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17 janvier 2024 3 17 /01 /janvier /2024 11:54

Les peintures murales  (1540) de l'église Saint-Martin de Sillegny (Moselle). III. L'Arbe de Jessé.

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Sur ces peintures, voir : 

 

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PRÉSENTATION.

Présentation des peintures : voir article I.  Toute l'église est décorée de peintures à la détrempe du milieu du XVIe siècle (le Jugement dernier est daté de 1540), qui furent recouverte sous un badigeon en 1845, restaurées par Malardot, classées en 1881,  puis nettoyées entre 2002 et 2004.  Grâce à Jean Marie Pirus curé de la paroisse, une association la Sixtine de la Seille a vu le jour le 9 décembre 1987 et est très active pour rendre accessible et faire découvrir ces peintures.

Dans le choeur, sous la voûte nervurée gothique, le pan gauche est occupé par un Arbre de Jessé d'une hauteur de 7 mètres sur 3,6 mètres.

Rappel : on nomme sous le terme d'Arbre de Jessé , la représentation étagée de l'arbre généalogique de Jésus de Nazareth à partir de Jessé, père du roi David, généalogie détaillée par les évangiles de Matthieu 1:1-17 et Luc 3:23-38. Ce thème —dont la première représentation en France est le vitrail de la basilique Saint-Denis en 1144 —se fonde sur le verset d'Isaïe Is 11:1-3 : Egredietur virga de radice Jesse, et flos de radice eius ascendet. Et requiescet super eum Spiritus Domini. “Une tige sortira de la racine de Jessé, une fleur s’élèvera de ses racines. Et sur elle reposera l’Esprit du Seigneur” (Is 11, 1-3)

 Ces versets engendrent des réflexions théologiques et herméneutiques issues de Tertullien au IIIe siècle, puis de saint Jérôme et des Pères de l'Église et qui, à travers le jeu de mots virga [tige]/virgo [vierge] basé sur l'utilisation de citations d'Isaïe, permettent d'étayer un culte marial affirmant la conception virginale du Christ par Marie.

Dès le Xe siècle, Fulbert, évêque de Chartres a formulé cette interprétation Virga = Virgo dans un poème pour la Nativité, qui fut repris en répons des liturgies des offices célébrant Marie : le Stirps Jesse ("Souche de Jessé")

Stirps Jesse virgam prodúxit, vírgaque florem : Et super hunc florem requiéscit Spíritus almus.℣. Virgo Dei Génitrix virga est, flos Fílius ejus. Et super hunc florem requiéscit Spíritus almus. Glória Patri, & Fílio, & Spirítui Sancto.

"La souche de Jessé a produit un rameau, et le rameau une fleur : et sur cette fleur s’est reposé l’Esprit Saint. ℣. La Vierge Mère de Dieu est le rameau, et la fleur est son Fils. (Texte de saint Fulbert de Chartres)  Et sur cette fleur s’est reposé l’Esprit Saint.Gloire au Père, & au Fils, & au Saint-Esprit."

L'autre thème, aussi ardu sur le plan théologique, et associé au précédent, est celui de l'Incarnation, et de la double nature du Christ. Ce n'est pas la filiation généalogique, fût-elle royale, qui est représentée par ces Arbres, mais le passage d'une transmission généalogique à une conception d'origine divine. Le thème n'établit pas que le Christ soit "de la race de David" car tout serait alors faux puisque c'est, selon la généalogie présentée par Matthieu, Joseph qui est le descendant des rois de Juda* ; et Joseph n'est pas le géniteur biologique de Jésus, bien qu'il soit son père selon la loi hébraïque puisqu'il l'a reconnu.

* Marie descend de David, comme l'indique l'évangile de Luc, mais non pas par son fils Salomon, mais par son autre fils Nathan ; sa lignée généalogique ne passe pas par les Rois de Juda.

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 Voir dans ce blog :

A. ARBRES DE JESSÉ SCULPTÉS.

 

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B. VITRAUX DE L'ARBRE DE JESSÉ 

 

 En Bretagne, par ordre chronologique :



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DESCRIPTION.

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Jessé, père du roi David, est allongé sur le sol, appuyé sur son coude droit dans l'attitude traditionnel du songeur. Son rêve donne forme au verset d'Isaïe "Une tige sortira de la racine de Jessé, une fleur s’élèvera de ses racines. Et sur elle reposera l’Esprit du Seigneur”. Il rêve donc qu'un arbre s'élève de sa poitrine et que chacun de ses rejetons deviennent des rois, les rois du royaume de Juda. Et c'est justement ce qui s'est passé selon le texte biblique, puisqu'à partir de David,  les 12 rois de Juda appartiendront à la "Maison de David". 

Bien-sûr, ce nombre de rois est symbolique, la généalogie donnée par Matthieu 1:1  cite quatorze rois de Juda jusqu'à la déportation à Babylone (et encore quatorze générations depuis l’exil à Babylone jusqu’au Christ). 

Chaque roi est soit assis sur une fleur lui servant de coussin, soit à califourchon sur une branche, soit déambulant, mais portant tous leur couronne, leur sceptre, une tunique courte et une cape. Tous sont accompagnés d'une banderole blanche portant leur nom : LE ROY ---.

Les noms sont ceux cités par l'évangile  de Matthieu :

 

  • David,
  • Salomon,
  • Roboam,
  • Abia,
  • Asa,
  • Josaphat,
  • Joram,
  • Ozias,
  • Joatham,
  • Ézéchias,
  • Manassé,
  • Josias.

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L'Arbre de Jessé (peinture murale, vers 1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

L'Arbre de Jessé (peinture murale, vers 1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

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L'Arbre de Jessé (peinture murale, vers 1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

L'Arbre de Jessé (peinture murale, vers 1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

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L'Arbre de Jessé (peinture murale, vers 1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

L'Arbre de Jessé (peinture murale, vers 1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

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L'Arbre de Jessé (peinture murale, vers 1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

L'Arbre de Jessé (peinture murale, vers 1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

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L'Arbre de Jessé (peinture murale, vers 1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

L'Arbre de Jessé (peinture murale, vers 1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

L'Arbre de Jessé (peinture murale, vers 1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

L'Arbre de Jessé (peinture murale, vers 1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

L'Arbre de Jessé (peinture murale, vers 1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

L'Arbre de Jessé (peinture murale, vers 1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

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La Vierge, couronnée, portant l'Enfant, dans une gloire de rayons d'or, posée sur un bourgeon floral.

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L'Arbre de Jessé (peinture murale, vers 1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

L'Arbre de Jessé (peinture murale, vers 1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

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SOURCES ET LIENS.

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— BASE PALISSY

https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/memoire/APMH00260785

— DIVERS

https://histoiresduniversites.wordpress.com/2017/06/12/fresques-de-la-sixtine-de-la-seille/
 

—  DOBBY (Margaret), Le motet et l'Arbre de Jessé, Une métaphore qui met en lumière la complexité des relations entre profane et sacré au Moyen Age. 

http://pdf.actualite-poitou-charentes.info/086/Actu086oct2009_37-39..pdf

— FOURNIÉ (Eléonore), LEPAPE (Séverine), 2012,« Dévotions et représentations de l’Immaculée Conception dans les cours royales et princières du Nord de l’Europe (1380-1420) », L’Atelier du Centre de recherches historiques [En ligne], 10 | 2012, mis en ligne le 11 mai 2012, consulté le 24 septembre 2015. URL : http://acrh.revues.org/4259 ; DOI : 10.4000/acrh.4259 

—  LEPAPE (Séverine), 2009,  « L’Arbre de Jessé: une image de l’Immaculée Conception ? »,Médiévales [En ligne], 57 | automne 2009, mis en ligne le 18 janvier 2012, consulté le 22 septembre 2015. URL : http://medievales.revues.org/5833 

 — LEPAPE (Séverine) 2004 Étude iconographique de l’Arbre de Jessé en France du Nord du xive siècle au xviie siècle, Thèse Ecole des Chartes

http://theses.enc.sorbonne.fr/2004/lepape

—SCHNABEL (Abbé), 1858, « Rapport sur les peintures murales de Sillegny », Bulletin de la Société d'archéologie et d'histoire de la Moselle,‎ 1858.

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k33403f/f38.item

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Published by jean-yves cordier - dans Peintures murales. Arbre de Jessé XVIe siècle.
13 janvier 2024 6 13 /01 /janvier /2024 17:55

Les peintures murales  (1540) de l'église Saint-Martin de Sillegny (Moselle). II. Saint Christophe.

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Sur ces peintures, voir : 

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— Sur l'iconographie de saint Christophe : Voir (classement plus ou moins chronologique) :

 

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PRÉSENTATION.

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Présentation générale : voir l'article I.

Parmi le riche corpus des peintures murales de l'église de Sillegny, datées de 1540, un gigantesque saint Christophe traversant le gué, l'Enfant-Jésus sur ses épaules, accueille sur cinq mètres de haut le fidèle, dès l'entrée à gauche de la nef, sur la tour ronde de l'escalier et sur le mur adjacent à l'est. 

Cette peinture est donc en partie  courbe, et d'autre part répartie sur deux volumes, ce qui rend difficile son analyse en un seul cliché photographique.

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Le saint, conformémént à la tradition, franchit le gué en portant l'Enfant figuré en Sauveur du Monde, bénissant et tenant le globe terrestre, et il est peint au moment où, se sentant menacé par le poids considérable qui pèse sur ses épaules, il se retourne vers l'Enfant qui révèle son identité : il fonde sa confiance en lui (Christophe est qualifié de "Champion de la Foi), le poids s'allège, et il parvient à reprendre sa progression, d'autant qu'il est alors guidé par un ermite qui, sur la rive, 

Saint Christophe est représenté comme un géant, selon une tradition très attestée en Espagne, mais plus rare en France, à l'exception de la peinture murale de Louviers  et de celle de Wissembourg (et d'autres exemples possibles que je n'ai pu documenter). A l'église Saint-Jean de Malines, en Belgique, sur des peintures évaluées vers 1400, il mesure aussi plus de 4 mètres de haut.

Dans la même tradition, rare en France hormis sans doute à Louviers, il porte dans la besace de sa ceinture des "pèlerins", soit captifs de cet ogre, soit transportés gracieusement. Ce détail iconographique sera étudié.

Bien d'autres détails sont à examiner : les poissons (dont l'un est couronné), la sirène, l'ermite et sa lanterne, et un nid de quatre cigognes.

Par contre, le bâton n'est pas feuillu, en signe de reverdie. Et on ne voit pas la pierre de meule q'il porte ailleurs en Espagne.

Sur cette iconographie, lire, outre les liens cités supra, Dominique Rigaux 1996.

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Vue générale vers l'ouest, peintures murales (1540) de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Vue générale vers l'ouest, peintures murales (1540) de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

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La taille gigantesque.

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La taille gigantesque de saint Christophe est attestée dès les premières versions de la légende, tant orientales qu'occidentales, et, selon Jacques de Voragine qui en écrit l'histoire dans sa Légende dorée du XIIIe siècle, c'était "un Cananéen d’énorme stature, qui avait douze coudées de hauteur et un visage effrayant." Soit près de 6 mètres de haut. 

Ce géant au visage repoussant témoigne de "l'imprégnation de certains éléments mythologiques païens dans la tradition chrétienne" : on le relie, entre autre, à Anubis, divinité égyptienne  psychopompe, à Enée portant son père Anchise, à Hercule, à Charon passeur du Styx, etc. Ce gigantisme est bien attesté dans l'iconographie avant le Concile de Trente, puis s'atténue dans les représentations plus tardives.

Il confère au saint une vertu apotropaïque, conjurant le mauvais sort, et protectrice de la mort subite lors des traversées : passages de seuils (portes) et voyages. Au Moyen Âge, on croyait que -par le contact visuel d'une image de Saint Christophe, éventuellement associé à la récitation d'une formulette - le danger de mort subite sans sacrement  serait évité ce jour-là  : Christophorum videas postea tutus eas : "Vois Christophe et puis va en sûreté". (inscription du début XIIIe siècle) . La mort subite était particulièrement redoutée, car on croyait que de mourir  sans pouvoir se confesser, ou bénéficier de l'assistance d'un prêtre allongerait le séjour au Purgatoire, voire conduirait à l'Enfer en cas de péché capital non expié.

Saint Christophe était également l'un des quatorze saints auxiliaires invoqués pour se protéger des malheurs : il était chargé de  protéger de la peste , véritable terreur pour les hommes médiévaux.
Il était également le protecteur des voyageurs, des pèlerins et des professions nécessitant des déplacements fréquents , comme celui de charretier ou de vendeur ambulant.

Ainsi, d'immenses peintures de saint Christophe étaient placées soit à l'extérieur près de la porte des églises (35 exemples en Italie dans le Trentin et le Frioul-Vénétie (*)), soit à l'intérieur juste après l'entrée (en Espagne dans les cathédrales de Séville, Tolède, Burgos, Leõn). En France, la plus grande fresque du saint atteint 11,50 m, sur le transept de l'abbaye de Wissembourg, dans le Bas-Rhin : elle date du XIVe siècle. Celle de Louviers est placée à droite de l'entrée. En Allemagne, dans la cathédrale de Cologne la statue du saint, datant de 1470, mesure 3,73 m.

 

(*) Voir site Il capochiave avec nombreuses illustrations : Cathédrale de Trente : fin du XIIIe , Église de San Vigilio à Molveno, Église de Sant'Alessandro à Sanzeno, seconde moitié XIIIe ;  Église de San Tommaso in Cavedago, XVIe ; Église des Saints Pietro et Biagio de Cividale del Friuli (Udine), début du XVIe siècle ; Église de San Vigilio à Pinzolo, Cathédrale de Spilimbergo (Pordenone) : probablement du XVe siècle. Baptistère de Parme, etc.

En Espagne, pour montrer sa force herculéenne, saint Christophe est représenté portant en guise de bracelet une lourde pierre de meule.

Mais à Sillegny, Christophe n'est pas représenté frontalement et fixant le fidèle "droit dans les yeux" dans un regard hypnotique avec des yeux aggrandis, comme dans les figures géantes de la région de Trente et en Espagne au XIIIe-XVe siècle.

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Saint Christophe, peintures murales (1540) de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Saint Christophe, peintures murales (1540) de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

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Le passage du gué.

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Saint Christophe est représenté les jambes de profil, s'appuyant sur son bâton, dans la posture de celui qui franchit un gué, dans sa fonction de passeur. Mais par une rotation du tronc et de la tête, il se tourne vers le Christ, au moment où il se sent fléchir, ou plus exactement au moment où il reconnaît la puissance de l'Enfant et trouve la Foi.

Les deux rives très escarpées, le sol caillouteux, et les poissons abondants soulignent le danger du passage.

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Saint Christophe, peintures murales (1540) de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Saint Christophe, peintures murales (1540) de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

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L'ermite le guidant de sa lanterne.

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Le bon ermite symbolise la fonction clericale guidant le peuple. C'est lui qui a incité Christophe à devenir passeur afin de mettre sa force au service du Christ : 

"Enfin il rencontra un ermite qui lui dit : « Le maître que tu désires servir exige d’abord de toi que tu jeûnes souvent. » Et Christophe : « Qu’il exige de moi autre chose, car cette chose-là est au-dessus de mes forces ! » Et l’ermite : « Il exige que tu fasses de nombreuses prières. » Et Christophe : « Voilà encore une chose que je ne peux pas faire, car je ne sais pas même ce que c’est que prier ! » Alors l’ermite : « Connais-tu un fleuve qu’il y a dans ce pays, et qu’on ne peut traverser sans péril de mort ? » Et Christophe : « Je le connais. » Et l’ermite : « Grand et fort comme tu es, si tu demeurais près de ce fleuve, et si tu aidais les voyageurs à le traverser, cela serait très agréable au Christ que tu veux servir ; et peut-être consentirait-il à se montrer à toi. » Et Christophe : « Voilà enfin une chose que je puis faire ; et je te promets de la faire pour servir le Christ ! » Puis il se rendit sur la rive du fleuve, s’y construisit une cabane, et, se servant d’un tronc d’arbre en guise de bâton pour mieux marcher dans l’eau, il transportait d’une rive à l’autre tous ceux qui avaient à traverser le fleuve." (Légende dorée)

 

Saint Christophe, peintures murales (1540) de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Saint Christophe, peintures murales (1540) de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Saint Christophe, peintures murales (1540) de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Saint Christophe, peintures murales (1540) de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

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Les pèlerins transportés dans une besace ou aumônière suspendue à la ceinture.

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Parmi les 32 œuvres de la liste Wikipedia des peintures de saint Christophe aux XVe-XVIIIe siècle, seul une montre ce détail (qui n'appartient pas à la Légende dorée) : le retable (v.1480) de Juan Sanchez de Castro pour le couvent San Benito de Calatrava, exposé au Musée des beaux-arts de Séville, et que j'ai décrit en 2015.

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Juan Sánchez de Castro 1480-1502, Saint Antoine avec saint Christophe, Musée des Beaux-Arts de Séville.

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J'avais écrit dans ma description de ce retable : 

"La ceinture du saint attire aussi l'attention : en cuir noir, elle est régulièrement cloutée de pièces métalliques en forme de demi-sphères et se termine par un passant doré ; mais, bien-sûr, ce sont  les deux personnages qu'elles retient fermement qui nous intéressent. Ils semblent bien vivants, et, comme la pierre meulière, ils soulignent la taille gigantesque du saint, qui atteint douze coudées dans une légende carolingienne, soit plus de cinq mètres (une coudée = 45 cm). Les commentateurs les désignent habituellement sous le nom de "pèlerins", et je reprends volontiers ce qualificatif, qui supposerait que Christophe les a passés ainsi à sa ceinture pour les protéger ou leur faire profiter de sa foulée digne des bottes de sept lieues des contes de Perrault. Pourtant, ils gesticulent avec impatience : l'un (qui porte le même bandeau que le saint) se penche comme s'il appelait à l'aide, et l'autre, qui repousse la meule d'un bras, tient un récipient de fer blanc ou d'étain qu'il semble agiter. tandis qu'il maintient son chapeau sous le coude. Quel est le sens de cette mascarade de marionnettes ? Il me semble probable que ce détail cocasse n'est pas seulement destiné à souligner le gigantisme de Christophe, où à illustrer combien ce saint protège les pèlerins et autres voyageurs, mais qu'il est relié aux anecdotes d'une légende populaire ; néanmoins, je n'ai pas retrouvé d'éléments en faveur de cette notion."

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Or, c'est en Espagne que ce détail se retrouve fréquemment, associé à la grande taille des peintures, et à leur situation au seuil des églises. Il est souvent associé à une pierre de meule, portée par le saint, pierre qui est absente à Sillegny.

Au total, sur 23 peintures et 2 statues  de Saint Christophe en Espagne du XIV-XVIIe siècle, 12  présentent des "pèlerins" à la ceinture..

 

 Burgos (Castille-et-Léon)- Cathédrale: peinture murale du XIVe siècle : Regard frontal, meule au bras gauche, 3 pèlerins à la ceinture.

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photo lavieb-aile 2015

 

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Photo lavieb-aile 2015

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— Salamanque (Castille-et-Léon), Cathédrale ancienne, sacristie. Peinture murale. Meule au bras gauche, 4 ou 5 pèlerins à la ceinture.

Salamanque, église Saint-Marc. V. XIVe, 3 pèlerins à la ceinture, pierre de meule.

— León (Castille-et-Léon), cathédrale, haut relief, roue de moulin et trois pèlerins à la ceinture.

—León (Castille-et-Léon), Musée d'Art Sacré de la cathédrale et du diocèse de León, Retable de saint Christophe venant de Nuestra-Señora del Mercado  ancienne paroisse de Santa-Maria del Camino (cité par L. Grau-Lobo) "Tabla protogótica de san Cristóbal, pintada al temple, recientemente descubierta en la Iglesia del Mercado,oculta debajo de un Ecce Horno del siglo XVI.". Roue de moulin, trois pèlerins à la ceinture et deux dans une poche.

— Barcelone, Musée Mares,  statue de saint Christophe venant de San Cristóbal de Entreviñas (province de Zamora, Castille-et-Léon), cité par Grau-Lobo.Meule, trois pèlerins.

— Ségovie (Castille-et-Léon), église San Millán, peinture murale de saint Christophe à tête cinocéphale, quatre pèlerins à la ceinture.

—  Cotillo-Anievas (Cantabrie), Eglise de Saint-André , statue en pierre du  XIVe siècle. Position frontale ; meule de moulin ; quatre pèlerins à la ceinture. 

 —Huelva, Aroche, ermitage Saint -Mamés. Cinq pèlerins accrochés à la ceinture.

— Huelva, Moguer, couvent de Santa Clar.

—Au Musée du Prado de Madrid, un retable anonyme du XIVe siècle, 2,66 x 1,84 m.

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Saint Christophe, peintures murales (1540) de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Saint Christophe, peintures murales (1540) de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Saint Christophe, peintures murales (1540) de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Saint Christophe, peintures murales (1540) de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

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L'Enfant en Christ Sauveur du monde.

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Saint Christophe, peintures murales (1540) de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Saint Christophe, peintures murales (1540) de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

 

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Le nid de cigognes.

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Saint Christophe, peintures murales (1540) de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Saint Christophe, peintures murales (1540) de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

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Le fleuve, ses poissons, ses barques et sa sirène.

Ce fleuve est dangereux, et, comme l'a affirmé l'ermite, "on ne peut le franchit sans danger mortel". Symboliquement, l'élément aquatique est relié aux forces profondes et incontrolables. C'est le sens qu'il faut donner à ces poissons qui s'entre-dévorent, à cette anguille proche du serpent, et, sans doute, à ce poisson couronné, maître du royaume aquatique.

Ces poissons sont néanmoins en partie dominés par les hommes, qui les pêchent dans leur barques.

À partir du début du XVIe siècle, peut-être sous l'influence de Jérôme Bosch, on observe que les eaux prennent une connotation de plus en plus inquiétante. Habitée par des monstres marins et des sirènes, l'eau, désormais placée sous le signe de la tentation sous toutes ses formes, devient le lieu de l'épreuve et de la souffrance. Chez Alaert du Hamel, par exemple, la traversée du fleuve, décrit comme un espace de confusion et de vice, correspond très clairement à cette confrontation à la tentation, qui est aussi propre à l'iconographie de saint Antoine. Voir : Alaert du Hamel, vers 1500, Saint Christophe portant l'Enfant, estampe, Londres, British Museum.

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Saint Christophe, peintures murales (1540) de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Saint Christophe, peintures murales (1540) de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Saint Christophe, peintures murales (1540) de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Saint Christophe, peintures murales (1540) de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

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La sirène se peignant devant son miroir.

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Cette sirène ou femme-poisson souligne le lien classiquement établi entre la féminité et le monde aquatique. Elle personnifie la beauté, et c'est aussi une figure associée à la luxure, ou, du moins, à la frivolité et à la coquetterie, surtout lorsque, comme ici, elle se coiffe devant un miroir grâce à son peigne. 

La présence d'une sirène dans l'iconographie de saint Christophe, pour animer le fleuve traversé et en souligner les dangers (moraux...) est rare mais néanmoins attestée.

-Le premier exemple que j'en donnerai est le volet d'un retable daté de 1516, provenant de la chapelle de l'Ossuaire à Baden (Suisse) et conservé au Musée des beaux-arts de Dijon. Ce volet montre Saint Christophe et un donateur, Niklaus Eberler figurant avec ses armoiries, tandis qu'un autre volet montre  Saint Jérôme et une donatrice, sa femme , née Engelhardt , de Zurich.  Niklaus Eberler , dit Gruenenzweig , qui vécut de 1460 à 1520 environ , appartenait à une famille riche et puissante de Bâle , mais dans sa jeunesse ( 1476 ) il avait émigré avec son père à Baden , en Argovie , où il possédait le domaine le plus important de la contrée , et il devint maire de la ville . Les panneaux internes de ce retable, des reliefs de tilleul sculptés, sont conservés à Düsseldorf, ainsi que le revers peint et daté 1516.

 

 

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Musée des Beaux-arts de Dijon. Photo lavieb-aile.

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Musée des Beaux-arts de Dijon. Photo lavieb-aile.

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Musée des Beaux-arts de Dijon. Photo lavieb-aile.

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-Le deuxième exemple est celui du San Cristóbal du transept sud de l'église Santa María del Azogue de Benavente (Zamora), datant de la première moitié du XVIe siècle. J.L. Hernando Garrigo a consacré un bel article  à la sirène qui, comme à Sillegny, se peigne tout en se contemplant dans un miroir.

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Santa María del Azogue en Benavente (Zamora), photo Hernando Garrigo

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c. Gerson Alex

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- Au pied d'un haut-relief de Saint-Christophe (ca. 1331-32), à l'entrée de  la cathédrale de Gémona del Friouli,  une sirène est sculpté près du pied gauche. Elle tient les deux parties de sa queue bifide.

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- Sur une gravure du Maître E.S. réalisée vers 1450-1467 le  Maître E.S., et conservée au Louvre, une sirène se baigne dans les eaux traversées par saint Christophe.

 

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-On la retrouve au cloitre du dôme de Bressanone, entre les pieds du saint. Ou, dans la même situation, sur la peinture extérieure de la chapelle de Sainte-Lucie de Puy-Chalvin (Puy-Saint-André, Hautes-Alpes), tenant son miroir.

- cet inventaire n'est que partiel.

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Saint Christophe, peintures murales (1540) de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Saint Christophe, peintures murales (1540) de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Saint Christophe, peintures murales (1540) de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Saint Christophe, peintures murales (1540) de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Saint Christophe, peintures murales (1540) de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Saint Christophe, peintures murales (1540) de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

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SOURCES ET LIENS.

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En gras, les références importantes.

— BASE PALISSY

https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/memoire/AP16R001983?mainSearch=%22sillegny%22&last_view=%22list%22&idQuery=%22fe50e1-d57c-b4ec-f32b-363c45884df%22

—BASTIEN (René), PIRUS (Jean-Marie), 2019, "Les peintures de Sillegny", Paraige Patrimoine, 40 pages.

 

— GRAU LOBO, Luis (1994-1995): “San Cristóbal, Homo Viator en los caminos bajomedievales: avance hacia el catálogo de una iconografía particular”, a Brigecio, 4-5, p. 167-184. 

http://dialnet.unirioja.es/servlet/articulo?codigo=1402347

— GRUMEL (V.) 1938, "Rosenfeld (Hans-Friedrich). Der hl. Christophorus, Seine Verehrung uns seine Legende. Eine Untersuchung zur Kultgeographie und Legendenbildung des Mittelalters"  Échos d'Orient Volume 37 Numéro   191-192pp. 464-470

  http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rebyz_1146-9447_1938_num_37_191_3006_t1_0464_0000_2#

— GUENEBAULT Louis Jean 1850,  Dictionnaire iconographique des figures, légendes et actes des saints ... 

https://books.google.fr/books?id=tRAGAAAAQAAJ&pg=RA2-PT42&dq=%22saint+christophe%22+meule&hl=fr&sa=X&ei=EAh2VdPfC8yvU_2RgqgK&ved=0CCgQ6AEwAg#v=onepage&q=%22saint%20christophe%22%20meule&f=false

 

— HERNANDO GARRIDO (José Luis), 2013,  "San Cristóbal y la sirenita: aviso para peregrinos y navegantes", Fundación Santa María la Real-TEMPLA,  Codex Aquilarensis 29/2013.

https://www.romanicodigital.com/sites/default/files/2019-09/C29-14_Jos%C3%A9%20Luis%20Hernando%20Garrido.pdf

— MANZARBEITIA VALLE (Santiago), Universidad Complutense de Madrid, 2010,  "El mural de San Cristobalón en la iglesia de San Cebrián de Muda. Pintura medieval y devoción popular: del mítico Cinocéfalo al Polifemo cristiano"  Anales de Historia del Arte 293 2010, Volumen Extraordinario 293-309.   

http://revistas.ucm.es/index.php/ANHA/article/viewFile/ANHA1010010293A/30823

—RIGAUX (Dominique), 1996, "Une image pour la route. L'iconographie de saint Christophe dans les régions alpines (XIIe-XVe siècle)", Actes des congrès de la Société des historiens médiévistes de l'enseignement supérieur public  Année 1996  26  pp. 235-266

https://www.persee.fr/doc/shmes_1261-9078_1996_act_26_1_1681

—Site CONSULTADO

https://www.consultatodo.com/sanCristobal/sanCristobal2.htm

—SCHNABEL (Abbé), 1858, « Rapport sur les peintures murales de Sillegny », Bulletin de la Société d'archéologie et d'histoire de la Moselle,‎ 1858.

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k33403f/f38.item

 

— VORAGINE (Jacques de) 1261, ou IACOPO DA VARAZZE, Legenda aurea, traduite en français par JEAN DE VIGNAY sous le titre de Légende des Sains au plus tard en 1348.

Bnf Fr. 242 folio 149r Gallica http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b8426005j/f313.image

Bnf fr. 244-245 http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b8442920n/f1.image

 

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Published by jean-yves cordier - dans Peintures murales. Saint Christophe.
10 janvier 2024 3 10 /01 /janvier /2024 14:02

Les peintures murales ( 1540) de Sillegny (Moselle). I. Le Jugement dernier.

Voir aussi :

 

PRÉSENTATION.

Ces peintures murales exécutées à la détrempe en  1540  furent à une époque inconnue recouvertes d’un badigeon, les protégeant ainsi des effets du temps. Ce n’est qu’en 1845 lors d’un grattage de l’abside, qu'elles furent découvertes et remises à jour par l’Abbé Schnabel, curé de la paroisse de 1840 à 1891, et restaurées par le peintre Malardot, de Metz. Elles furent classées en 1881. De janvier 2002 à décembre 2004 les peintures furent restaurées par simple nettoyage par  la société ARCAMS d' Autun dirigée par  Joël Oliveres. Grâce à Jean Marie Pirus curé de la paroisse, une association la Sixtine de la Seille a vu le jour le 9 décembre 1987 et est très active pour rendre accessible et faire découvrir ces peintures.

Le corpus est très riche, associant dans la nef et le transept des scènes religieuses (une Chasse de saint Hubert notamment), des figures de saints, un Credo des apôtres, à un Jugement dernier sur le mur de l'ouest, un saint Christophe de cinq mètres de haut à l'entrée, et, dans le chœur, un arbre de Jessé, tandis que les quatre évangélistes occupent la voûte de la croisée du transept.

 

La plus grande fresque est ce Jugement dernier d’une superficie de 42 mètres carrés, peinte sur le mur ouest au-dessus de l’entrée.

 

Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

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Le Christ de la Parousie.

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Le registre supérieur illsutre le passage de l'évangile de Matthieu 24:29-31

"Aussitôt après ces jours de détresse, le soleil s'obscurcira, la lune ne donnera plus sa lumière, les étoiles tomberont du ciel, et les puissances des cieux seront ébranlées.  Alors le signe du Fils de l'homme paraîtra dans le ciel, toutes les tribus de la terre se lamenteront, et elles verront le Fils de l'homme venant sur les nuées du ciel avec puissance et une grande gloire.  Il enverra ses anges avec la trompette retentissante, et ils rassembleront ses élus des quatre vents, depuis une extrémité des cieux jusqu'à l'autre."

 

Le Christ est assis sur l'arc en ciel rappelant l'Alliance et ses pieds sont posés sur le globe terrestre. Il apparaît dans la gloire de sa résurrection, nu sous le manteau de pourpre, et montrant ses cinq plaies preuves de sa crucifixion.

Il est entouré des phylactères portant les inscriptions :

-à sa droite (vers le Paradis)  :  Venite benedicti Patris mei, "Venez les bénis de mon Père", citation de l'évangile de Matthieu 25:34

-à sa gauche (vers l'Enfer) : Ite  Maledicti  in Ignem Aeternum  , "Allez, vous les maudits, dans le feu éternel", citation de l'évangile de Matthieu 25:41, 

 

Au dessus de lui sont les anges du Jugement, soufflant dans leurs trompettes au dessus des astres du Jour et de la Nuit.

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Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

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Le Christ est entouré de la Vierge et de Jean-Baptiste en prière.

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Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

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Le Christ Sauveur de la Porte du Salut.

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Le Christ Sauveur bénit le monde dont il tient le globe dans la main gauche. Sa représentation est très souvent sculpté au dessus des portes des porches.  Il est placé ici devant un drap d'honneur sous le tympan, orné d'un ange, d'une porte. On lit derrière sa tête la date de la fresque, MIL Vc XL, 1540, tandis que l'inscription en latin ERGO SUM VIA VERITAS VITA, signifie "Je suis la voie, la vérité et la vie". 

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Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

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Le Paradis ou Royaume des Cieux, sous forme d'un château auquel mène un escalier. Les élus y sont guidés par des anges et accueillis par saint Pierre tenant la clef.

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Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

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L'Enfer, à gauche du Christ.

L'enfer occupe toute la partie gauche, mais le diable qui fait le pendant avec le Royaume est figuré avec une tête de taureau et des pattes fourchues. Il est enchaîné à une colonne et il tient un arbre noir, parmi des langues de feu. Il correspond à Satan, Nelsébuth ou Mammon. Autour de lui, des diables supplicient les damnés.

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Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

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Registre inférieur, à gauche : le Jugement des humains ressuscités par saint Michel Archange muni de sa balance. Les anges annoncent le jugement dernier par leurs trompes.

Les pieds de l'archange sont posés sur les ailes d'un autre ange.

Le phylactère indique Venite ad judicium, "Venez devant la justice divine". Le début de la citation, Surgite mortui "Debout les morts", est du côté gauche.

Sous cette injonction, les morts sortent de leur tombeau, aidés par les anges qui les emportent ensuite vers la balance de la pesée de leur âme.

 

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Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

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Registre inférieur, à l'extrême gauche : le purgatoire.

À l'extrême gauche, d'autres hommes et femmes semblent vouloir échapper à des flammes, mains jointes ou bras tendus  vers les anges qui, effectivement, viennent les sauver.

Depuis le Moyen-Âge en effet, l'iconographie chrétienne représente le purgatoire, lieu de purification et d'expiation avant le pardon et l'accès aux Cieux, comme un feu, lieu de souffrance mais qui n'expose pas, comme celui de l'Enfer, au desespoir. Ainsi, dans les Très Riches heures du Duc de Berry  vers 1416 :

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Très Riches heures du Duc de Berry Chantilly f. 113

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Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

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Registre inférieur, à droite : les supplices des damnés.

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En haut, un diable porte une femme sur ses épaules, et enfonce son bâton dans la bouche d'un.e damné.e qui est étendu.e au sol.

Trois damnés, dont une femme, sont transpercés au niveau du bas-ventre par une perche portée par un diable.

Un couple est traîné au sol, ligoté, par un autre diable. Un autre en porte deux dans un tonneau sur son dos et  en pousse deux autres dans une brouette.

Un damné vêtu d'une tunique (Judas ??) est pendu à la branche d'un arbre.

Un homme est ligoté à une perche et tourné par un diable en rotissoire sur un feu, tandis qu'un diable assistant attise ls flammes de son soufflet.

Enfin, seize visages émergent des flammes  et de la gueule d'un Léviathan.

Certains de ces supplices (pendaison, brouette, hotte) se retrouvent sur les peintures murales des Jugements de la Cathédrale d'Albi,  du Mont-Dol ou de Kernascleden (tous de la fin XVe), mais avec moins de liens avec les éditions du Calendrier des biergers publiés par Guiot Marchant à Paris, ou Nicolas Le Rouge à Troyes en 1529 (BnF RES-V 274). Dans ces ouvrages, chaque type de supplice correspond à l'un des péchés capitaux.

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Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

Le Jugement dernier, peinture murale (1540) de l'église de Sillegny. Photographie lavieb-aile 2024.

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SOURCES ET LIENS.

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—BASTIEN (René), PIRUS (Jean-Marie), 2019, "Les peintures de Sillegny, Paraige Patrimoine, 40 pages.

—SCHNABEL (Abbé), 1858, « Rapport sur les peintures murales de Sillegny », Bulletin de la Société d'archéologie et d'histoire de la Moselle,‎ 1858.

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k33403f/f38.item

— BASE PALISSY

https://www.pop.culture.gouv.fr/search/list?mainSearch=%22sillegny%22

https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/merimee/PA00107006

https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/memoire/AP57W01423

— DIVERS

https://www.blelorraine.fr/2022/09/de-la-chapelle-sixtine-lorraine-a-sillegny/

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Published by jean-yves cordier - dans Peintures murales. Jugement dernier
9 janvier 2024 2 09 /01 /janvier /2024 11:18

Les 14 jeunes musiciens des stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival, dont un joueur de serpent. Remonté dans la chapelle des Cordeliers de Nancy.

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Cet article appartient à trois catégories :

1. Celle  sur les Termes gainés, cariatides et atlantes (ou "supports anthropomorphes") :

-Sculpture en pierre :

-Sculpture en bois :

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2. Celle sur l'étude des instruments sur les sculptures et vitraux ("anges musiciens") et particulièrement sur l'iconographie du serpent :
 

3. Celle sur l'étude des stalles : quoique celles de Salival n'offre pas un grand intérêt dans le décor des miséricordes et appuie-bras, elles peuvent renseigner par ses statues de la musique de la fin du XVIIe siècle :

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 En Bretagne par ordre chronologique :

 

Hors Bretagne :

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PRÉSENTATION.

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Je renvoie à la notice de Pierre-Hyppolite Pénet pour le Musée Lorrain:

https://musee-lorrain.nancy.fr/les-collections/catalogues-numeriques/nancy-capitale-des-ducs-de-lorraine/xviie-siecle/lambris-et-stalles-de-lavant-choeur-des-chanoines-de-labbaye-des-premontres-de-salival

Je me contente d'en citer cette introduction :

"Fondée par la comtesse Mathilde de Salm-Hombourg, entre 1140 et 1157, l’abbaye des Prémontrés de Salival (Moselle) dut son nom (en latin Salina vallis) à la présence des nombreuses sources salées de la Seille qui contribuèrent à sa grande richesse. Après avoir été dévastée en 1590 lors des guerres de Religion, l’abbaye fut principalement reconstruite à partir de 1670. Les travaux furent commencés par l’abbé Antoine Collart et poursuivis par Rémi Josnet qui orna somptueusement l’intérieur de l’église. C’est sous son abbatiat (1681-1720) que furent mises en place les stalles de l’avant-chœur des chanoines, datées de 1695, complétées en 1776 par les boiseries du sanctuaire exécutées par Joseph François Brêche dit la Bonté (v.1717-1784) également chargé du buffet d’orgue. Après la nationalisation des biens du clergé en 1789, les bâtiments de l’abbaye furent mis en vente en 1796. Jugée dangereuse, l’église fut finalement démolie en 1823."

 

Les stalles de l'abbaye de Salival ont donc  été démontées, dispersées, et une partie de celles-ci et de leurs lambris ont été recomposées pour s'adapter à la chapelle des Cordeliers de Nancy. 

 Vingt-cinq travées de lambris en chêne sont aujourd’hui séparées alternativement par douze pilastres cannelés corinthiens et par quatorze "putti", dont dix sont des termes. On désigne sous ce nom, ou plutôt sous celui de supports anthropomorphes, des statues de forme humaine (atlantes, termes, télamons cariatides), servant de support vertical soutenant un entablement, et dont la partie inférieure n'est pas humaine, mais architecturale, proche des bornes , et souvent fusiforme vers le bas. Même pour la partie supérieure, le respect de l'anatomie humaine n'est que partielle, et notamment les bras sont parfois réduits à des moignons en spirale.

Ces dix termes et les quatre personnages intègres ont pourtant un point commun, celui de représenter des garçons (j'évite le terme de "putti" qui désigne des petits enfants souvents nus) ou adolescents, dont dix jouent des instruments de  musique et quatre, au centre, pourraient être des chanteurs. Au total, ils composent donc un ensemble musical, ce qui est cohérent avec la fonction des stalles abbatiales, où les moines se réunissaient pour chanter les offices, parfois accompagnés à l'orgue ou au serpent.

On pourrait, si les vêtements de ces garçons n'évoquaient pas plutôt des pâtres, y voir des membres d'une psallette, ou école de musique attachée à une église, autrement dit, des enfants de chœur au sens littéral. Mais les instruments représentés sont inhabituels dans ce cadre : ainsi, à la cathédrale de Metz en 1790, on ne signale que des organistes, des joueurs de serpent, de basse continue et violoncelles, et de bassons, ainsi que 14 chantres et sous-chantres (adultes) et 8 enfants de chœur. Enfin ces psallettes n'existaient pas dans les abbayes. 

Le cartel de la chapelle des Cordeliers donne pour ces stalles la date de 1691 ; la notice du musée lorrain celle de 1695.

Le premier rang de stalles aurait été rajouté vers 1980. 


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Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

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Au centre, le lutrin en fer forgé, qui servait à accueillir les livres de plain-chant, provient de la basilique Saint-Epvre de Nancy. Il se compose "d’un double pupitre mobile orné, sur une face, d’un médaillon portant l’inscription : « 1752 / AMETZ » et, sur l’autre, d’un second médaillon portant le chiffre « JC ». Le pupitre est surmonté de quatre aigles dorés aux ailes déployées et d’une croix à double traverse. Selon le Père Eugène, celle-ci aurait remplacé un petit globe primitif ce qui nous semble peu probable. Le lutrin repose sur un imposant pied tripode, orné sur chaque face d’un nouveau cartouche portant les chiffres : « GD », « LL » et « ES »." (P.-H.Pénet)

Lutrin de 1752. Photographie lavieb-aile 2024.

Lutrin de 1752. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

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Liste des musiciens et chanteurs.

N.B la détermination des instruements est de moi, elle est sujette à caution.

1. Le jeune joueur de flûte traversière piccolo, en support anthropomorphe.

2. Le jeune joueur de chalemie (rauschpfeife, cornet, hautbois..), en support anthropomorphe.

3. Le jeune joueur de cymbales.

4. Le jeune joueur de tambourin ou "bedon", en support anthropomorphe.

5. Le jeune joueur de douçaine (basson baroque?).

6. Un jeune homme en support anthropomorphe.

7. Un jeune homme bras croisé en support anthropomorphe.

8. Un jeune homme main gauche levée,  en support anthropomorphe.

9. Un jeune homme sans bras, en support anthropomorphe.

10. Un joueur de serpent.

11. Un joueur de violon en support anthropomorphe.

12. Un jeune joueur de triangle.

13. Un jeune joueur de trompette en support anthropomorphe.

14. Un jeune joueur de trompe de chasse en support anthropomorphe.

 

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1. Le jeune joueur de flûte traversière piccolo, en support anthropomorphe.

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Il porte, comme un jeune berger, une tunique dénudant l'épaule droite et ses cheveux bouclés sont noués par un ruban au dessus du front.

C'est un terme, dont la tête soutient l'entablement, et son support qui se termine paer une volute est feuillagé.

La flûte, courte, dont mon point de vue ne permet pas de voir les trous, se termine par une virole plus large.

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Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

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2. Le jeune joueur de chalemie (chalumeau, rauschpfeife, cornet, hautbois..), en support anthropomorphe.

Sa tête joufflue est couronné de laurier, sa tunique courte s'envole; le support est feuillagé.

J'ai des hésitations pour désigner l'instrument (doté d'une anche), toute aide sera la bienvenue.

 

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Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

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3. Le jeune joueur de cymbales.

Il porte sur sa tunique une sur-tunique aux lambrequins à glands, ornée de rinceaux. Une écharpe est nouée sur son côté.

Ce n'est pas un terme, puisque ses deux jambes et ses pieds nus sont bien visibles, mais il prend appui sur un petit support anthropomorphe dont le tronc aux moignons d'épaules adopte la forme d'une feuille libérant des rameaux.

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Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Les 14 putti musiciens des stalles de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival.
Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

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4. Le jeune joueur de tambourin ou "bedon", en support anthropomorphe.

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 Albert Jacquot définit le bedon comme "un long et gros tambourin du moyen âge, qui se frappait comme la grosse-caisse, à l’aide d’un ou de deux bâtons courts, munis d’un tampon", et en donne en illustration ce joueur de Salival.

Le bâton tenu par la main gauche est brisé.

Il porte une tunique aux manches courtes ; le support est feuillagé.

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Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

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5. Le jeune joueur de douçaine (basson baroque?).

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La tunique, plus longue que les précédentes, et fendue, s'orne d'une petite rose. Le genou droit fléchi et le pied soulevé donne un bel élan à ce personnage.

Nouvelle hésitation pour désigner l'instrument. Le "bocal" est brisé, mais l'anche est bien visible dans la bouche du garçon. Le tuyau de perce n'est pas conique, mais cylindrique, à peine éffilé vers les extrémités.

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Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

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Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

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Exemple des chutes de fruits et fleurs placés sous chaque personnage. On reconnait ici des pommes et des poires, une grenade, des raisins, et des petits fruits (cerises ?).

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Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

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6. Un jeune homme en support anthropomorphe.

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Ce terme est privé de bras, il est vêtu d'une tunique nouée sur l'épaule droite, une guirlande de fruit forme un baudrier. Il a la tête tournée vers sa gauche, et donc vers le centre des stalles. Sa bouche est entrouverte, laissant penser qu'il s'agit d'un chanteur.

Le support est une feuille lancéolée.

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Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

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Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

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7. Un jeune homme bras croisé en support anthropomorphe.

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Il peut s'agir d'un chanteur, les bras expressivement croisés sur la poitrine. La tunique dégage l'épaule droite.

 

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Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

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Le blason au dessus de la cathèdre.

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Ce sont les armes du duché de Lorraine à partir d'Antoine Le Bon. Le blason aurait été ajouté en 1962 et proviendrait de la devanture de la fameuse librairie du collectionneur René Wiener (1855-1939) à Nancy.

https://en.m.wikipedia.org/wiki/File:Armoiries_Lorraine-Vaud%C3%A9mont.png

Voir aussi la planche gravée  de La musique en Lorraine d'Albert Jacquot p. 29.

On les comparera à celles de son père René II de Lorraine, où manquent les deux lions affrontés sur le Bréviaire de René II, BnF arsenal MS-601-res f.44r, datant du XVe siècle. Les enluminures de ce bréviaire montrent de nombreux instruments en usage sous René II.

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Bréviaire de René II, BnF, f. 44r, Gallica.

 

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Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

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8. Un jeune homme main gauche levée,  en support anthropomorphe.

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Sa tunique frangée  est ceinturée d'une guirlande. On peut supposer qu'il est en train de chanter, avec cette gestuelle propre à la rhétorique baroque.

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Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

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Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

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Nouvel exemple des chutes de fruits et fleurs assemblées autour d'un linge noué.

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Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

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9. Un jeune homme sans bras, en support anthropomorphe.

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La tunique serrée par une ceinture et une sangle  laisse l'épaule droite dénudée. Le jeune homme a le visage tourné vers le centre des stalles. 

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Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

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10. Un joueur de serpent.

 

 

 

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Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

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C'est l'instrument le plus attesté en accompagnement du chant liturgique et du chœur dont il renforçait la partie grave lors des offices religieux et  il fut donc, pendant plus de deux siècles, essentiellement voué au soutien des formations vocales religieuses. En témoignent les inscriptions gravées sur le dossier des stalles bretonnes.

Albert Jacquot présente cet instrument ainsi :

"SERPENT. Instrument à vent, en bois recouvert de cuir ou en cuir bouilli, inventé, au XVIe siècle, par Edme Guillaume, chanoine d’Auxerre. Il servait de basse aux cors ; il est à l’unisson des hautbois, il a six trous et quelquefois plusieurs clefs. On s’en servait encore, il y a quarante ans, dans les musiques militaires et dans les églises. Il y en a une grande variété : le serpent militaire, celui de cavalerie, qui permettait de passer le bras et de le maintenir facilement. Il y en eut aussi en fer. Parmi les sculptures du portail de la cathédrale de Strasbourg, on remarque, du côté droit, un joueur de serpent, qu’un sculpteur du XVIIe siècle y sculpta, pour remplacer une statue détruite, qui représentait, sans doute, un autre musicien. Cet artiste ne vit aucun inconvénient d’y mettre un type d’instrument si fort en vogue dans les églises, au XVIIe siècle. La figure ci-contre représente cette intéressante sculpture. Un. autre personnage, jouant aussi du basson, se voit aux boiseries du chœur de l’église de Salival, transférées à l’église des Cordeliers de Nancy. C’est aussi du XVIIe siècle. L’Ophicléide, aujourd’hui abandonné, remplaça le serpent. Une embouchure d’ivoire terminait le tube d’insufflation. Le nom de l’ophicléide vient du grec ophis, serpent, et cléïdes, clefs."

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L'instrument représenté à Salival montre au moins dix trous, dont certains occultés par les doigts du serpent (nom du joueur). Il est suspendu par une sangle noué autour de l'instrument.

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Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

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Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

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11. Un joueur de violon en support anthropomorphe.

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Le joueur porte une tunique courte dont on admirera la ceinture dont la boucle est joliement détaillée.

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Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

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12. Un jeune joueur de triangle.

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Sa sur-tunique serrée par un cordon à glands de passementerie est frappée de lys. La tunique elle-même est un surplis garni de broderies ou de dentelle en partie inférieure.

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Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

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Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

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13. Un jeune joueur de trompette en support anthropomorphe.

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Il est coiffé d'une sorte de casque et ses épaules sont couvertes d'une pièce d'armure, sur son torse nu. Main gauche sur la taille dans une posture martiale, il sonne de la trompette, dont seule l'embouchure est conservée. Il porte sur les reins une jupe à lanières. Le support est  sculpté d'une chute de fruits et fleurs.

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Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

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Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

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14. Un jeune joueur de trompe de chasse en support anthropomorphe.

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Il est tourné, comme son homologue de l'extrémité droite des stalles, vers la nef. Et, comme lui également, ses cheveux bouclés sont noués d'une rosette frontale. Sa tunique se rassemble en un gros nœud à l'arrière.

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Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

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Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

Stalles (1691) de l’avant-chœur des chanoines de l’abbaye des Prémontrés de Salival. Photographie lavieb-aile 2024.

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SOURCES ET LIENS.

— DECOMPS (Claire)

https://core.ac.uk/download/pdf/19545758.pdf

—JACQUOT (Albert), 1886, Dictionnaire pratique et raisonné des instruments de musique anciens et modernes

https://www.luthiers-mirecourt.com/jacquot1.htm

—JACQUOT (Albert), 1882, La Musique en Lorraine, étude rétrospective d'après les archives locales. Paris : Quantin et Fischbacher, 1882.

https://archive.org/details/lamusiqueenlorra00jacq/page/84/mode/2up

—MUSEE LORRAIN

https://musee-lorrain.nancy.fr/les-collections/catalogues-numeriques/nancy-capitale-des-ducs-de-lorraine/xviie-siecle/lambris-et-stalles-de-lavant-choeur-des-chanoines-de-labbaye-des-premontres-de-salival

—SITE PHILIDOR

https://philidor.cmbv.fr/Publications/Bases-prosopographiques/MUSEFREM-Base-de-donnees-prosopographique-des-musiciens-d-Eglise-en-1790/Moselle

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8 janvier 2024 1 08 /01 /janvier /2024 11:52

Le piédestal de la croix cénotaphe (calcaire, milieu XVIe siècle chapelle des Cordeliers de Nancy, coll. Musée lorrain) de la duchesse de Lorraine Philippe de Gueldre (1464-1547).

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PRÉSENTATION.

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Mon but initial était de partager ma découverte, en la chapelle des Cordeliers de Nancy,  de ce piédestal aux figures et aux inscriptions macabres. Mais ma consultation de la notice du musée lorrain dédiée à ce monument m'a vite convaincu de l'inutilité de cette démarche, tant cette notice était complète et accompagnée d'un riche dossier photographique. 

Ayant saboté par cette introduction mon article, mais sans renoncer à le rédiger, il me reste à tâcher d'aller un peu au delà de cette notice de Pierre-Hippolyte Pénet. Ce que je ferais en deuxième partie dans une réflexion sur les liens entre Philippe de Gueldre l'art macabre .

J'ai d'abord naïvement cru que Philippe (ou Phelippe) de Gueldre était un personnage masculin, avant de découvrir qu'il s'agissait de l'épouse du duc René II de Lorraine, dont le monumental et luxueux monument funéraire occupe, sur 7 mètres de haut, le centre du côté sud de la chapelle des Cordeliers. René II est le vainqueur en 1477 de la Bataille de Nancy , dans laquelle Charles le Téméraire trouva une  mort sordide (on retrouva son corps nu dans un étang gelé).

Dame Philippe épousa René II le 1er septembre 1485 à Orléans. Née en 1464, elle était la fille d'Adolphe, duc de Gueldre, et de Catherine de Bourbon, elle-même fille de Charles Ier duc de Bourbon, et sœur de Jean II duc de Bourbon jusqu'en 1488, du cardinal Charles II duc de Bourbon en 1488, d'Isabelle, épouse de Charles le Téméraire et grand-mère de Charles Quint et de Pierre II qui épousa Anne de Beaujeu régente de France. J'ai présenté la nécropole des Bourbon ici :

L'emblématique et l'héraldique monumentales de la Sainte-Chapelle de Champigny-sur-Veude.

 Orpheline dès 1469, elle fut éduquée à la cour du duc de Bourgogne, sous l’autorité de Marguerite d’York jusqu’en 1483, puis à la cour du roi de France, sous celle d’Anne de France, dame de Beaujeu, jusqu’en 1485. Cette dernière la donne alors en mariage au duc de Lorraine, René II. Douze enfants naîtront de cette union, dont cinq fils survivront.

 

Devenue veuve en 1508, Philippe de Gueldre refusa la régence instituée en sa faveur par le testament de son mari, laissant le pouvoir aux mains du prince Antoine, l'aîné de ses fils. Retirée durant quelques années au château de Bar, qui lui avait été assigné en douaire, elle entra, vers la fin de 1519, au monastère des Clarisses de la ville de Pont-à-Mousson (*). Sa prise d'habit eut lieu le jeudi 8 décembre de la même année et sa profession solennelle l'année suivante, le jour de la fête de la Conception, 8 décembre 1520. Elle mourut vingt-sept années plus tard, le 26 février 1547, à l'âge de quatre-vingt-sept ans.

(*) Ce monastère fut fondé par sainte Colette, cédant aux sollicitations du duc Charles II de Lorraine et de sa femme Marguerite de Bavière. Les travaux, commencés en 1431, furent terminés en 1447, sous le règne du duc René Ier. Les religieuses, au nombre de treize, prirent possession des bâtiments le 21 septembre de cette même année.

 

"Cependant, Philippe dispose d’un statut particulier au sein de la communauté. Elle possède une pièce à part et ne dort pas dans le dortoir commun. Elle est rapidement dispensée des rigueurs de la règle, en raison de son état de santé. Lorsqu’elle est malade elle bénéficie d’un traitement particulier, recommandé par ses médecins. Philippe peut donc s’affranchir des normes de vie du cloître. Elle n’oublie d’ailleurs pas la politique terrestre.

Aidée d’une sœur secrétaire, elle maintient une active correspondance avec les princes et l’aristocratie. À Pont-à-Mousson elle demeure une princesse. Le receveur de la ville a ordre de subvenir à ses demandes. Elle interpelle également les autorités locales, comme en 1529, où elle ordonne au maître-échevin de distribuer des aumônes aux pestiférés, jetés hors de la ville.

Philippe dote son couvent de multiples œuvres, dont un magnifique retable (*) encore visible à l’église Saint-Laurent de Pont-à-Mousson." (Est-Républicain)

(*)Retable d'Anvers à six compartiments sculptés et dorés et quatre volets peints.

Elle décède le 26 février 1547 d'une péritonite par perforation vésiculaire. Dans son testament rédigés dès le 23 octobre 1520, elle avait déjà spécifié : "& voulons notre corps viande aux vers soit enterré au cimetière dudict couvent ". Elle aurait obtenu, de son vivant, de faire élever au milieu du cimetière des religieuses, situé dans le cloître, un grand crucifix taillé en pierre afin d’indiquer l’emplacement de sa sépulture. Le crucifix a disparu, et le piédestal fut retrouvé en 1890 au cimetière de Vilcey-sur-Trey. 

Piédestal de la croix cénotaphe de Philippe de Gueldre, 1ère moitié du XVIe siècle, Calcaire, H. 116 ; L. 60 ; Pr. 57 cm, Musée lorrain de Nancy Inv. 2121.1 Achat auprès de la commune de Vilcey-sur-Trey, 1895

 


 

 

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DESCRIPTION.

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Photo Musée lorrain de Nancy

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Le piédestal débute par un soubassement carré sans sculpture, auquel succéde un étage à deux inscriptions de cinq lignes en ecriture gothique, puis un étage plus étroit dont deux faces opposées montrent un cadavre ou un crâne, et les deux autres une invocation pieuse. Au sommet, la base du crucifix détruit.

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La face qui attire immédiatement le regard est ornée d’un petit squelette assis sur un rocher, dans la figure du penseur mélancolique, vu de trois-quart, la tête posée sur la main en signe de douleur et d’abattement. Mais en contraste avec le squelette décharné, les intestins sont représentés par des boyaux en spirale.

Ainsi la duchesse décédée, jadis enterrée en pleine terre du cloitre sous le monument,  invitait-elle ses sœurs clarisses à une méditation sur la mort.

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Cénotaphe de Philippe de Gueldre, v.1547, calcaire, Chapelle des Cordeliers de Nancy. Photo lavieb-aile 2024.

Cénotaphe de Philippe de Gueldre, v.1547, calcaire, Chapelle des Cordeliers de Nancy. Photo lavieb-aile 2024.

Cénotaphe de Philippe de Gueldre, v.1547, calcaire, Chapelle des Cordeliers de Nancy. Photo lavieb-aile 2024.

Cénotaphe de Philippe de Gueldre, v.1547, calcaire, Chapelle des Cordeliers de Nancy. Photo lavieb-aile 2024.

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Sur la face opposée, un crâne  est sculpté en moyen-relief dans un médaillon suspendu par un ruban. Le sculpteur compose ainsi un "miroir de la Mort". C'est, en littérature macabre, le titre de l'ouvrage Le miroir de mort , "ung excellent et tres prouffitable livre pour toute creature humaine" publié dès 1470 puis en 1481-1482 par George Chastelain historiographe des ducs de Bourgogne. L'inplicit et l'explicit du manuscrit Carpentras BM 0410 reprennent les mêmes vers :

...le miroir de la mort

a glace obscure et tenebreuse

la ou on voit chose doubteuse

et matiere de desconfort.

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Le texte reprend vite la métaphore :

 

Pour au miroer de mort mirer

Penser y fault en remirant

Et sy nous fault tous amirer

De ceulx que nous voyons mirer

Pour la mort qui nous va minant

Rien n'y vault don non mie nant

...

 

Comme ou mirouer si est la glace

La ou on voit sa remembrance

On y choisist et corps et face

Mais de legier elle s'efface

Car elle n'a point de souffrance

Elle ne peut avoir grevance

Que de legier ne soit cassee

Nostre vie est plus toust passee

Mirons nous dont et remirons

Et il se conclut par une série d'anaphores dont la dernière est :

 

Mirons nous au grand jugement

Mirons nous en la passion

Mirons enfer en dampnement

Mirons la mort et son tourment

Mirons nostre inclinacion

Mirons le monde et sa façon

Mirons nostre fragilité

Mirons nous pour estre saulvés

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En Bretagne, Jehan An Archer Coz compose en 1519 le Mirouer de la mort, en breton, imprimé à Morlaix en 1575. Sa couverture est illustrée d'un miroir de la mort avec cette injonction : MIRE TOY LA.

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Couverture du Mirouer de la mort BnF RES P-YN-1.

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Cénotaphe de Philippe de Gueldre, v.1547, calcaire, Chapelle des Cordeliers de Nancy. Photo lavieb-aile 2024.

Cénotaphe de Philippe de Gueldre, v.1547, calcaire, Chapelle des Cordeliers de Nancy. Photo lavieb-aile 2024.

Cénotaphe de Philippe de Gueldre, v.1547, calcaire, Chapelle des Cordeliers de Nancy. Photo lavieb-aile 2024.

Cénotaphe de Philippe de Gueldre, v.1547, calcaire, Chapelle des Cordeliers de Nancy. Photo lavieb-aile 2024.

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Sur la paroi latérale, on peut lire dans un petit cartouche suspendu à un anneau par des rubans l'inscription en lettres romaines « JESU.MA/IOSEPH » (Jésus, Marie, Joseph).

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Cénotaphe de Philippe de Gueldre, v.1547, calcaire, Chapelle des Cordeliers de Nancy. Photo lavieb-aile 2024.

Cénotaphe de Philippe de Gueldre, v.1547, calcaire, Chapelle des Cordeliers de Nancy. Photo lavieb-aile 2024.

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Sur la paroi latérale opposée, on peut  lire dans un  cartouche identique l'invocation « AVE.MAA/MERE.D. » (Ave Maria, Mère de Dieu).

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Cénotaphe de Philippe de Gueldre, v.1547, calcaire, Chapelle des Cordeliers de Nancy. Photo lavieb-aile 2024.

Cénotaphe de Philippe de Gueldre, v.1547, calcaire, Chapelle des Cordeliers de Nancy. Photo lavieb-aile 2024.

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Sous les deux motifs à squelette, deux inscriptions sculptées en lettres gothiques auraient été rédigées par la duchesse elle-même. Le coin droit de chaque inscription est abimée,  d'où des lettres et mots absents:

Sous le squelette méditatif :

 

« Cy gist . Ung . Ver . Tourn . en .porriture . re[n]dant . Amort . le tribut . De . nature. Seur. phelip de. Gueldres .fust .roine du passe. terre . lost pour toute. conieture. Cest . La . Mal. De . to[u]te. creature. Seurs. Dictes. lui Req. Pa »

Cy gist ung ver tourn en porriture

rendant à mort le tribut de nature

seur phelip de gueldres fust roine du passé

terre lost soulat pour toute couverture

cest la ma[…] de toute creature

Seurs dites lui  requiecat in pace

 

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L'insistance sur les vers qui décomposent le cadavre et le transforme en pourriture et en poussière est caractéristique de l'art macabre. On trouve souvent au XVIe siècle en sculpture des "têtes de mort" où des vers sortent par les orbites.

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Cénotaphe de Philippe de Gueldre, v.1547, calcaire, Chapelle des Cordeliers de Nancy. Photo lavieb-aile 2024.

Cénotaphe de Philippe de Gueldre, v.1547, calcaire, Chapelle des Cordeliers de Nancy. Photo lavieb-aile 2024.

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Sous la face sculptée d'un crâne

 on lit la supplique suivante, dont la dernière ligne est presque détruite:

 

« O REDEMPTUR.BEOIST.CRUFIE.E.Q.MO
CUEUR.IAMAIS.NADEFFIE.MAIS.ESPER
A.TA.CROIS.JE.MACORDE.COME.A.CELLE.Q
A.VIVIFIE.LE.GENRE.HUMAIN.DU.JOUR »

 

O redempteur benoiste crucifie

que mon cueur jamais na deffie

mais espere à la croix je maccorde

comme a celle qui a vivifie

le genre humain du jour [moult rude

mon ame priant à ta misericorde]

soit
« Ô Rédempteur benoît crucifié à qui mon cœur jamais n’a défié mais espéré, à ta croix je m’accorde comme à celle qui a vivifié le genre humain du jour horrifié. Mon âme prie en ta miséricorde ».

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Cénotaphe de Philippe de Gueldre, v.1547, calcaire, Chapelle des Cordeliers de Nancy. Photo lavieb-aile 2024.

Cénotaphe de Philippe de Gueldre, v.1547, calcaire, Chapelle des Cordeliers de Nancy. Photo lavieb-aile 2024.

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Pierre-Hippolyte Pénet conclue sa notice ainsi :

"Cette iconographie et ces inscriptions sont une transcription du motif du transi funéraire, apparu au XIVe siècle, qui décrit le défunt en état de décomposition. Elles ne sont pas sans évoquer les reliefs très proches appelés « miroirs de la mort » de l’église Notre-Dame de Bar-le-Duc ou du monument funéraire de Claude de la Vallée à l’église Saint-Didier de Clermont-en-Argonne qui sont tous deux accompagnés de l’inscription : « Mirez-vous et considérez comme je suis telz vous serez ». Le monument de Clermont-en-Argonne, représentant le squelette du défunt allongé, complète par une inscription proche de celle de Philippe de Gueldre : « Considérez ma hideuse figure / Quelque belle que vous ayez la face / Sy fauldra-t-il que telle la vous face / Quant consumez servez en pourriture ».

Loin du faste inhérent à son statut princier, le monument de la duchesse témoigne ainsi de son mépris du corps et de sa foi dans le Christ souffrant pour lequel elle avait développé une dévotion particulière."

a) La pierre de l'église Notre-Dame de Bar-le-Duc

Dans un médaillon bordé d’une inscription un crâne tenant un tibia entre les dents est représenté de trois-quarts ; les angles de la pierre sont ornés de crânes et la partie inférieure est gravée d’une citation. Le cadre circulaire comporte cette phrase : « Mirez-vous et considérez, comme je suis tels vous serez » ; l’ordre indique clairement aux vivants de se regarder comme dans un miroir pour connaître leur devenir. Le bandeau inférieur indique : « Naistre, labourer et mourir, L’on ne fait qu’à la mort [courrir] ».

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Bas-relief, XVIe siècle, bas-côté nord, chapelle Saint-Louis de Gonzague de l'église de Bar-le-Duc

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b) Le monument funéraire de Claude de la Vallée, dans l'église Saint-Didier de Clermont-en-Argonne, est daté de 1548. Le squelette gisant est surmonté des 3 trois allégories: la justice divine, le miroir de la mort, très semblable au précédent avec les mêmes inscriptions.

Le miroir porte les sentences :

Miroir ou l'homme au naturel,

Se doit recongnoistre mortel.

 

Mirez vous et considerez

comme je suis tels vous serez.

 

Naistre labourer et mourir,

Lon ne fait qua la mort courrir

Au-dessous de ces trois premiers bas-reliefs, une niche rectangulaire présente un transi presque à l’état de squelette ; en haut un cartouche explique : « Tu feras ce que vouldras avoir fait au jour que moras » ; près de la tête « Memento mori » et près des pieds « Memento finis ».

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Monument funéraire de Claude de La Vallée, photo François Janvier © Ministère de la Culture (France), Conservation des antiquités et des objets d’art de la Meuse, tous droits réservés

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Monument funéraire de Claude de La Vallée, photo François Janvier © Ministère de la Culture (France), Conservation des antiquités et des objets d’art de la Meuse, tous droits réservés

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COMPLÉMENTS.

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Le caractère macabre des termes du testament de Philippe de Gueldre, et de l'inscription qui figure sur ce pièdestal, amène plusieurs réflexions complémentaires :

1. Philippe de Gueldre a fait rédiger en 1506 par Guillaume le Ménant une traduction de la Grande Vie de Jésus-Christ de Ludolphe le Chartreux, qui a été illustrée de 111 enluminures par un artiste nommé par convention, et pour cet ouvrage (Lyon B.M 5125), le Maître de Philippe de Guelde, actif à Paris et peut-être à Rouen entre 1495 et 1510.

René de Lorraine et Philippe de Gueldre devant leurs enfants, Vie de Jésus Christ enluminé par le Maître de Philippe de Gueldre.

 

Le Maître de Philippe de Gueldre fournit des illustrations pour les imprimés de luxe d'Antoine Vérard, et, outre la famille de Lorraine, il travailla pour Louise de Savoie et Georges d'Amboise (le cardinal d'Amboise). Or, cet artiste est selon F. Avril, dans un style inspiré de Bourdichon,  l'enlumineur du manuscrit BnF français 995 (vers 1500-1510 ?) associant la Danse macabre (dérivant de la D.M de Guyot Marchant 1486), le Dit des trois vifs et des trois morts et la Danse macabre des femmes

Or, cette dernière Danse débute par la déclaration de l'acteur :  "Mirez vous icy mirez femmes Et mettes vostre affection A penser a voz poures ames Qui desirent saluacion ...."

Puis, parmi les femmes entrainées par les morts, viennent en premier la reine (Phelippe de Gueldre est reine de Jérusalem et de Sicile), et la duchesse, mais ensuite la veuve dont voici le dialogue avec la morte (notez les cheveux de son cadavre).

La morte : "Femme vefue venez auant Et vous auancez de venir. Vous voyez les autres dauant Il conuient vne foys finir Cest belle chose de tenir lestat ou on est appellee Et soy tousiours bien maintenir Vertus est tout par tout louee."

La veuve : "Depuis que mon mary mourut  Jay eu affaire grandement Sans ce que aucun me secourut Si non de dieu gard seulement Jay des enfans bien largement Qui sont ieunes et non pourueux Dont iay pitie: mais nullement Dieu ne lesse aucuns despourueux."

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Danse macabre des femmes, La veuve, BnF fr 995 f 29v enluminure Maître de Philippe de Gielde.

 

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Mais la réponse de la damoiselle est plus en rapport avec l'épitaphe de Philippe de Gueldre :

"Que me vallent mes grans atours Mes habitz. ieunesse. beautequant tout me fault lesser en plours Oultre mon gre et voulente Mon corps sera tantost porte Aux vers et a la pourriture: Plus nen sera bale: ne chanteIoye mondaine bien peu dure "

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2. Le Maître de Philippe de Gueldre a enluminé également le mirouer des pécheurs et des pécheresses de Jean Castel édité par Antoine Vérard en 1505-1507. On y trouve les  enluminures suivantes, suffisament éloquentes :

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Le mirouer des pécheurs et pécherresses , par Jean de Castel BnF RES livres rares Velins-2229 vue 14. Source Gallica.bnf.fr/BnF

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BnF, RES livres rares Velins-2229 vue 73. Source Gallica.bnf.fr/BnF

 

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3. Malgré un monument funéraire de plus grande envergure fut édifié après sa mort, vers 1547-1548, au sein de la chapelle de la Conception qu’elle avait fait construire dans l’église conventuelle. Commandé par les descendants de Philippe de Gueldre (dont le duc Antoine le Bon) ou par les clarisses, ce monument, installé dans un enfeu orné de motifs sculptés polychromes, était constitué d’un sarcophage de marbre gris foncé sur lequel était placé le gisant de la duchesse, exposé aujourd'hui en la chapelle des Cordeliers tout près du cénotaphe. Il est attribué au sculpteur lorrain Ligier Richier, dont le duc Antoine s'était attaché les talents dès 1530. La duchesse n'est pas idéalisée au summum de sa jeunesse et dans ses plus beaux atours (comme dans la plupart des gisants) mais est représentée en habit de clarisse, et son visage est bien celui d'une femme âgée que Delacroix décrivit  comme "une vieille de quatre-vingts ans dont la tête est encapuchonnée, maigre à faire peur et tout cela représenté de manière à ce qu’on ne l’oublie jamais et qu’on n’en puisse détacher les regards". Ce type de gisant est proche du "transi", défini comme  "représentant le défunt de façon réaliste, nu, voire en putréfaction, contrairement au gisant représentant un personnage couché et endormi, dans une attitude béate ou souriante. C'est un genre qui se développe au XVIe siècle en France et en Europe, où on compte 155 tranis, contre 75 au XVe siècle et 29 au XVIIe siècle.

 

Or, la réalisation la plus connue de Ligier Richier est le Transi de René de Chalon dans l'église Saint-Étienne de Bar-le-Duc, un chef-d'œuvre de l'art macabre qui surmonte le tombeau du cœur et des entrailles de ce dernier, prince d’Orange et ... gendre d'Antoine Le Bon : le traitement en écorché du transi suggère des connaissances étendues en anatomie et une volonté d'émouvoir le spectateur par son réalisme. Ce transi est daté de 1545-1547, il précède de très peu le gisant de Philippe de Gueldre .

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Gisant de Philippe de Gueldre, Ligier Richier, v.1548, calcaires polychrome, Chapelle des Cordeliers de Nancy. Photo lavieb-aile 2024.

Gisant de Philippe de Gueldre, Ligier Richier, v.1548, calcaires polychrome, Chapelle des Cordeliers de Nancy. Photo lavieb-aile 2024.

Gisant de Philippe de Gueldre, Ligier Richier, v.1548, calcaires polychrome, Chapelle des Cordeliers de Nancy. Photo lavieb-aile 2024.

Gisant de Philippe de Gueldre, Ligier Richier, v.1548, calcaires polychrome, Chapelle des Cordeliers de Nancy. Photo lavieb-aile 2024.

Gisant de Philippe de Gueldre, Ligier Richier, v.1548, calcaires polychrome, Chapelle des Cordeliers de Nancy. Photo lavieb-aile 2024.

Gisant de Philippe de Gueldre, Ligier Richier, v.1548, calcaires polychrome, Chapelle des Cordeliers de Nancy. Photo lavieb-aile 2024.

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SOURCES ET LIENS.

— BOURDIEU-WEISS (Catherine), 2005, « Réflexions sur les Vanités lorraines au XVIIe siècle : diverses formes artistiques »,  Littératures classiques 2005/1 (N° 56), pages 169 à 175

https://www.cairn.info/revue-litteratures-classiques1-2005-1-page-169.htm

—DENIS (Paul), 1911, Ligier Richier, l'artiste et son œuvre; avec 51 planches hors texte et 44 illustrations dans le texte par Denis, Paul, 1911

https://archive.org/details/ligierrichierlar00deniuoft/page/n5/mode/2up

— DIVERS

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b100212581

https://fr.wikipedia.org/wiki/Philippe_de_Gueldre

https://fr.wikipedia.org/wiki/Ligier_Richier

https://fr.wikipedia.org/wiki/Transi_de_Ren%C3%A9_de_Chalon

https://fr.wikipedia.org/wiki/Transi

https://musees-meuse.fr/wp-content/uploads/2016/10/Plaquette-LR-pour-impression-BD.pdf

— L'EST REPUBLICAIN

https://www.lorrainemag.com/sorties/deux-monuments-du-patrimoine-lorrain/

—FAVREAU, épigraphie...

https://shs.hal.science/halshs-03322724/document

— MUSEE LORRAIN DE NANCY

https://musee-lorrain.nancy.fr/les-collections/catalogues-numeriques/nancy-capitale-des-ducs-de-lorraine/xvie-siecle/piedestal-de-la-croix-cenotaphe-de-philippe-de-gueldre

https://musee-lorrain.nancy.fr/les-collections/catalogues-numeriques/nancy-capitale-des-ducs-de-lorraine/xvie-siecle/gisant-de-philippe-de-gueldre

— TRANIÉ (Ghislain) 2011, Un exemple d'articulation du féminin et du masculin à travers le mécénat. Les pratiques de Philippe de Gueldre (1467–1547) et d'Antoine de Lorraine (1489–1544) , dans Le Moyen Age 2011/3-4 (Tome CXVII), pages 531 à 544

https://www.cairn.info/revue-le-moyen-age-2011-3-page-531.htm

"Lors de son entrée au couvent, Philippe de Gueldre emporte avec elle de nombreux ouvrages de liturgie et de dévotion, acquis de son propre fait ou retirés de la bibliothèque ducale. Quelques-uns de ces ouvrages ont pu être identifiés par les bibliophiles du XIXe siècle : des heures, un temporal, un bréviaire et un passionnaire illustrent le mécénat ducal pour les manuscrits à peinture mais on rencontre également des livres imprimés, tels que La discipline de l’amour divin, un Dialogue de consolation entre l’âme et la raison, les Dialogues de saint Grégoire le Grand, la Vita Christi de Ludolphe le Chartreux/ de Saxe, une Horloge de la Passion de Jésus Christ et, plus étonnant, Le livre de vraie et parfaite oraison de Luther."

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Published by jean-yves cordier - dans Macabre Sculptures XVe siècle
30 décembre 2023 6 30 /12 /décembre /2023 10:54

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny.II . le registre supérieur, une chapelle fictive ou un précieux document ? 

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Voir :

Le tableau (vers 1445-1446) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny, provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. I. Les personnages : Jean Jouvenel (1360-1431), sa femme Michelle de Vitry et leurs onze enfants.

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Ce second article étudie le registre supérieur du célèbre tableau représentant la famille Jouvenel des Ursins en donateurs, tableau réalisé vers 1445-1456 et qui ornait un mur de leur chapelle de fondation Saint-Rémi au sud du chœur de la cathédrale Notre-Dame de Paris, lieu de sépulture du couple fondateur Jean Jouvenel des Ursins et Michelle de Vitry, du chancelier Guillaume des Ursins puis d'autres membres de cette famille.

"En mars 1415, le sire de Bourbon propose au chapitre de fonder une messe basse quotidienne, avec messe haute le dimanche, et de redécorer la chapelle Saint-Rémi, en laquelle seraient célébrés les offices. La proposition est apparemment sans suite. Vingt-six ans plus tard, les héritiers de Jean Jouvenel proposeront à leur tour au chapitre de leur concéder cette chapelle, dont ils renouvelleront le décor." (G. Eldin)

En effet, ce registre dépeint avec une grande précision un décor architectural en trompe-l'œil, comme ci les treize personnages étaient agenouillés, tournés vers l'est, devant une tenture damassée tendue entre les colonnes devant les niches à personnage et les vitraux de leur chapelle aux voûtes gothiques.

Il n'en est rien, car nous avons ici une absidiole centrale à sept baies encadrées par deux chapelles, ce qui ne correspond pas à la situation de la chapelle Saint-Rémi (aujourd'hui Saint-Guillaume). Néanmoins, comme l'avait suggéré Henry Kraus, ces statues ou ces vitraux peuvent-ils témoigner de l'aménagement de Notre-Dame de Paris au XVe siècle? La suggestion n'a pas été adoptée par les auteurs qui ont suivi, mais je souhaite présenter ici les détails de ce décor à la précision bluffante. Il semble bien témoigner, notamment par sa succession de vitraux armoriés, d'une réalité.

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L'architecture.

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Les personnages sont agenouillés devant le drap d'honneur, tendue entre deux colonnes à chapiteaux ornés de feuilles naissantes recourbées en crochets. Ces colonnes servent d'appui à trois arcades retombant sur des clefs tombantes 

 

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Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny.II . le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny.II . le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

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I. LES QUATRE BLASONS.

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Je passerai rapidement, le sujet ayant été traité de façon chevronnée et exhaustive par Matteo Ferrari pour l'ARMMA.

À la retombée des arcades, au dessus des colonnes ou sur les clefs pendantes quatre anges aux ailes déployées présentent les armoiries familiales, alternativement  pleines , ou mi-parti de  Jean Jouvenel des Ursins et Michelle de Vitry.

On se souvient que les armes des Jouvenel étaient également figurées, sur la peinture, sur le tabard de Jean I et de cinq de ses fils, et que les armes des époux étaient également figurées sur le soubassement de leur tombeau, au centre de la chapelle Saint-Rémi .
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Au total, ces quatre blasons montrent que le peintre représente  une chapelle décorée par la famille qui y a acquis des droits, de fondation, de sépulture et d'ornementation.

Dans la chapelle Saint-Rémi, il est évident que des blasons, dans cette disposition ou dans une autre, affichaient l'identité des propriétaires sur les murs. On les retrouvait sur le soubassement du tombeau, et, probablement sur les tentures, la ou les tapisseries, et sans doute encore sur les livres liturgiques.

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1. Armoiries de la famille Jouvenel des Ursins, bandé d'argent et de gueules de six pièces, au chef d'argent soutenu d'or,  chargé d’une rose de gueules, boutonnée d’or.

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Colonne de gauche, la plus proche de Jean Jouvenel des Ursins, au dessus d'un chapiteau. Le blason est incliné. L'ange aux ailes dorées est agenouillé en chevalier servant, vêtu d'une tunique longue à amict  ; sa courte chevelure est celle des fils de Jean.

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Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

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2. Armoiries du couple fondateur Jouvenel/Vitry.

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Première clef pendante. L'ange est identique au premier. Le blason est incliné, c'est une targe soutenue par une sangle. Le parti Jouvenel est plus contourné, le parti Vitry (d’azur, à la fasce losangée de trois pièces d’or, accompagnée de trois merlettes du même) est à bord plus droit. L'azur s'est assombri et se rapproche du noir.

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Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

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2. Armoiries de la famille Jouvenel des Ursins.

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Deuxième clef pendante. La targe est soutenue par une sangle bien détaillée.

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Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

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4. Armoiries du couple fondateur Jouvenel/Vitry.

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Au dessus de la colonne de droite. Le blason est coupé par le bord du tableau, mais on peut affirmer qu'il est mi-parti.

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Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

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II. LES SIX NICHES À STATUES D'APÔTRES.

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De gauche à droite, nous trouvons les apôtres Jacques le Majeur,  Jean, Barthélémy, Jacques le Mineur, Philippe et Simon. L'ordre n'est pas aléatoire, mais il suit globalement la séquence du Credo des apôtres (qui débute par Pierre et André), tel qu'il apparaît, notamment, en marge du calendrier des Petites Heures de Jean de Berry, BnF latin 18014 enluminé par Jean Le Noir élève de Jean de Pucelle. Dans ce calendrier, la séquence est Pierre, André, Jacques le majeur, Jean, Thomas, Jacques le Mineur, Philippe, Barthélémy, Matthieu, Simon et Thaddée. On retrouve, du même atelier, le même calendrier dans les Heures de Jeanne de Navarre BnF latin 3145 (1330-1340). De même, on retrouve ce Credo à la marge du calendrier des Grandes Heures de Jean de Berry, BnF Latin 919 illustré par Jean de Pucelle. Le même Jean Pucelle a enluminé le Bréviaire de Belleville BnF 10483 que Marie Jouvenel des Ursins eut en sa possession : son calendrier ne conserve aujourd'hui que la page où figure saint André. Dans tous ces cas, l'ordre des apôtres est le même. Mais aucun d'entre eux ne tient un attribut (il est désigné par une inscription).

Deuxième remarque, ils sont peints en grisaille. C'est précisément Jean Pucelle qui introduisit en France cette technique dans les enluminures vers 1325. Dans le Psautier de Jean de Berry BnF français 13091, les apôtres sont représentés par André Beauneveu en pleine page, assis, alternant avec des prophètes, tenant un attribut, et en grisaille.

Bien entendu, les apôtres peints ici sont bien différents de ceux dont je viens de citer les références. Ils sont très expressifs, leurs visages sont fortement caractérisés, leurs barbes sont longues et en bataille, comme leurs cheveux (sauf Simon).

En tout cas, l'ordre presque canonique  adopté dispense de rechercher ici un rapport avec les prénoms de Jean Jouvenel et de ses fils Jean II, Louis, Denis, Guillaume, Pierre, Michel  et Jacques.

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1. Saint Jacques le Majeur tenant le bourdon et la besace frappé de la coquille et coiffé du chapeau de pèlerin.

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Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

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2. Saint Barthélémy tenant le couteau de dépeçage (ou saint Thomas ?).

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Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

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3. Saint Jean l'évangéliste, imberbe,  tenant la coupe de poison.

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Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

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4. Saint Jacques le Mineur tenant le bâton de foulon.

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Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

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5. Saint Philippe et sa croix à longue hampe.

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Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

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6. Saint Simon et sa scie.

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Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

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III. LES TREIZE BAIES ET LEURS VERRIÈRES.

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Treize baies sont visibles sur cette peinture, dont onze clairement. Deux sous la première arcade de gauche, puis neuf sous la deuxième arcade  (dont sept, à une seule lancette ogivale, pour la chapelle d'axe), et à nouveau deux sous la dernière arcade, à droite. Les baies les plus latérales étant vues en enfilade, elles ne peuvent être décrites. Il en reste onze.

—1. Dans la première chapelle latérale, entre les statues de Jacques et de Barthélémy, une baie à remplage gothique à deux lancettes et un tympan à oculus en trèfle, armoriée , et écoinçons.

—2. Dans la même chapelle, à côté de la niche de Jean l'évangéliste, une baie a priori semblable, mais masquée par la clef pendante.

—3 à 9. Sept baies lancéolées à une seule lancette.

—10. Dans la  chapelle latérale à notre droite, à côté de la niche de Jacques l'évangéliste, une baie a priori semblable aux baies 1 à 3, mais masquée par la clef pendante.

—11. Dans la même chapelle latérale, entre les statues de Philippe et de Simon, une baie à remplage gothique à deux lancettes et un tympan à oculus en trèfle, armorié , et écoinçons.

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Remarques :

Les armoiries des tympans des baies 1 et 11 sont celles de la famille Jouvenel des Ursins.

Chaque lancette abrite un personnage en pied, soit (1 et 11) dans une niche gothique, soit dans les baies 3 à 9, sur un soubassement hexagonal. Toutes se détachent sur un fond vitré à losanges et bordures.

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Liste des personnages identifiables.

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1a : un saint diacre ou moine, tenant un livre, et à gauche un objet non identifié. Saint Éienne tenant la pierre de son martyre, et la palme du martyre.

1b : un saint religieux ; saint Antoine???

3 : un saint évêque.

4 : saint Louis tenant la couronne d'épines ? 

5 : saint tenant une palme de martyre sur l'épaule gauche. Laurent tenant son grill ?

6 (au centre de la baie axiale) : la Vierge à l'Enfant.

7 : Marie-Madeleine.

8 : saint Pierre.

9 : une sainte tenant une croix sur l'épaule droite, et un livre (Hélène?).

11a : saint Michel terrassant le dragon.

11b : saint Christophe traversant le gué et portant l'Enfant.

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Baie n°1.

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Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

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Baie n°1a. Saint Étienne tenant en main droite la pierre de sa lapidation, et en main gauche la palme du martyre.

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Comparer à l'enluminure (peut-être du Maître de Jouvenel) du folio 313 des heures de Jeanne de France BnF NAL 3244.

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Saint Étienne, Heures de Jeanne de France, 1440-1460, BnF NAL 3244 f.313v.

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Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

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Baie n°1b. Un saint moine, barbu, tenant un livre.

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Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

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Baies n° 3 à 9.

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Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

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Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

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Baies n°3 et n°4 . Un saint évêque (saint Rémi évêque de Reims ?). Saint Louis tenant la couronne d'épines. 

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Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

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Baies n°4 et n° 5. Saint Louis tenant la couronne d'épines. Saint Laurent tenant son grill et la palme du martyre.

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Comparer à saint Laurent des heures de Jeanne de France.

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Saint Laurent, Heures de Jeanne de France, 1440-1460, BnF NAL 3244 f.315v.

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Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

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Baie n°6 : la Vierge à l'Enfant.

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L'Enfant est tenu sur le côté droit.

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La Vierge, Heures de Jeanne de France, 1440-1460, BnF NAL 3244 f.299v.

 

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Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

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Baie n°7 : Marie-Madeleine tenant le flacon d'onguent.

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Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

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Baie n°8 : saint Pierre tenant sa clef et un livre.

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Saint Pierre, Heures de Jeanne de France, 1440-1460, BnF NAL 3244 f.312v.

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Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

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Baie n°9.

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Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

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Baie n° 10.

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Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

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Baie n° 11. Saint Michel et saint Christophe.

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Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

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Saint Michel , un saint psychopompe, et saint Christophe, saint apotropaïque (donc tous les deux invoqués pour la Bonne Mort)  sont réunis aussi (avec saint Jacques) sur la baie 34 de l'abbaye de la Trinité à Vendôme datant du XVe siècle , avec des points communs frappants avec cette peinture, notamment la symétrie des postures avec le bâton/lance en diagonale:

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Baie 34 de l'abbaye de la Trinité à Vendôme. Photo lavieb-aile.

Voir aussi pour voir le soubassement ndoduc.com

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Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

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Baie n° 11a : saint Michel terrassant le dragon.

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Note : on ne peut écarter l'hypothèse qu'il s'agisse de saint Georges terrassant le dragon, si c'est bien ce dernier qui, ailé, est représenté sur un livre d'heures à l'usage de Nantes enluminé par le Maître de Jouvenel (et le Maître de Boccace) au folio 166 du B.L Add.28785, accompagné d'une prière à ce saint.

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Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

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Baie n° 11b. Saint Christophe traversant le gué en s'aidant de sa perche, l'Enfant-Jésus sur l'épaule gauche.

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Comparer avec l'enluminure par le Maître du Smith-Lesouef dans un ouvrage principalement enluminé par le maître de Jouvenel des Ursins, les Heures à l'usage d'Angers BnF 3211 p.224  datées entre 1450 et 1455:

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 Horae ad usum Andegavensem BnF NAL 3211 page 224,  O beneuré amy de Dieu saint Christofle vrai champion de la foy , enlumineur Maître du Smith-Lesouëf

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L'intention de cette série de mon blog est de replacer chaque œuvre dans un ensemble iconographique étudiant les variations et les reprises du thème de saint Christophe traversant le gué en portant le Christ enfant sur ses épaules. Et de faire apparaître l'importance de ce culte au XVe et XVIe siècle.

A Quimper, ce culte tenait une place prépondérante

Saint Christophe sur les vitraux de la cathédrale de Quimper :

Autres exemples iconographiques :

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Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau (v. 1445) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny : le registre supérieur. Photographie lavieb-aile 2023.

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DISCUSSION.

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Je ne suis pas qualifié pour tenter d'identifier l'éventuel sanctuaire représenté ici (seule l'analyse par moteur de recherche d'une large base de données des sites candidats actuels ou détruits mais documentés pourrait y prétendre; ou un heureux hasard) et je préfère me débarrasser de cette contrainte et admettre qu'il s'agit d'un décor fictif, afin de faire remarquer plusieurs points qui soulignent l'intérêt de ce décor.

1. Bien que les statues d'apôtres soient attestées dès les premières cathédrales, le thème des Credo apostoliques, ordonnant ces statues dans un ordre fixé (quoique sujet à variation) se diffuse en iconographie dans les livres enluminés par Jean Pucelle et son élève Jean Le Noir au XIVe siècle, pour le compte du duc de Berry, se retrouve dans les vitraux sur des sites aussi prestigieux que la Sainte-Chapelle de Bourges, toujours pour le duc de Berry (en grisaille, cartons d'André Beauneveu, v.1395) et la cathédrale du Mans (rose nord, vers 1430-1435)  et en sculpture, par exemple, en la chapelle de Jean de Bourbon à Cluny vers 1460. La famille Jouvenel adopte donc pour sa chapelle fictive un thème très à la mode dans l'entourage du roi.

2. La précision avec laquelle le peintre représente ici ses vitraux, et leur mise en plomb, laisse supposer qu'il connait bien le sujet. Selon Philippe Lorentz, "durant tout le XVe siècle, la quasi totalité de ceux à qui on commande des vitraux sont des peintres de chevalet" et des peintres de retables, en Bourgogne, en Provence ou ailleurs. Mes connaissances sont minimes, mais je ne connais pas d'exemple de représentation aussi réaliste des vitraux en peinture à cette époque. Soit l'artiste anonyme est parti d'un espace vitré réel, soit il est un de ces peintres-verriers créateur des cartons de vitraux.

3. C'est bien à la fin du XIVe et au XVe siècle que les peintres-verriers se mettent à placer dans leurs lancettes un seul personnage, de plein pied, dans une niche architecturale, alors que dans les siècles antérieurs, les lancettes historiées faisaient se succéder de bas en haut des scènes dans des cadres de formes géométriques savantes et variées. Ces lancettes à un seul personnage se voient, par exemple, en Normandie (Rouen Saint-Maclou, cathédrale d'Evreux (baie 17 v.1370), Saint-Lô, Carentan, Pont-Audemer 1475 (baie 17), Verneuil sur-Avre 1470, Caudebec-en-Caux, Bourg-Achard ( baie 3 vers 1430) et en Bretagne en la cathédrale de Quimper à la fin du XVe siècle (baies 105, 109, 113 par exemple). Conclusion : la chapelle représentée sur la peinture est bien contemporaine de la famille Jouvenel qui y est représentée. Et ces niches architecturées intégrent le vitrail dans l'architecture fictive du monument.

4. Le choix des onze personnages identifiés sur les vitraux est parfaitement cohérent avec le programme iconographique des grands sanctuaires mariaux du XVe siècle, notamment dans la chapelle d'axe où la Vierge occupe la place centrale. Il manque sainte Catherine à côté de Marie-Madeleine. La présence de saint Louis est conforme à nos attentes.

5. Bien que les représentations d'intérieur de chapelles, avec leurs vitraux, sont nombreuses en peinture (d'enluminures notamment) comme en témoigne l'inventaire Biblissima, cette représentation ne devient réaliste voire "illusioniste" qu'au XVe siècle. C'est alors qu'on trouve ces décors d'absides ou chapelles rayonnantes vues en perspective (ou en trompe-l'œil) derrière des accolades à clefs pendantes. En voici quelques exemples :

) Messe de l'Avent,  missel de Louis de Guyenne, Bibliothèque Mazarine folio 7, par le Maître de Bedford, 1415. Célébration d'une messe en la Sainte-Chapelle de Paris. Mais le décor des vitraux est remplacé par des losanges. N.B : Denis Juvenel des Ursins fut écuyer et échanson de Louis de Guyenne. Ce dernier avait une dévotion toute particulière pour la Sainte-Chapelle. Le manuscrit est resté inachevé au décès du Dauphin le 18 décembre 1415.

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Paris. Bibliothèque Mazarine, Ms 406 folio 7, Missale Parisiense [latin]. Enlumineur Maître de Bedford

 

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2°) L'Annonciation, Heures d'Etienne Chevalier, Jean Fouquet 1452-1460. Intérieur de la Sainte-Chapelle de Bourges. On reconnait dans les verrières les apôtres dessinés par André Beauneveu vers 1395.

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3°)Les Heures de l'année liturgique, la Messe de Noël,  Très Riches Heures du duc de Berry, Musée Condé, Chantilly, MS65 f°158v par Jean Colombes, 1485 (sur un dessin antérieur, peut-être des Limbourg, ou du Maître de Bedford).

On y a reconnu l'intérieur de la Sainte-Chapelle de Paris. Mais l’architecture de celle-ci est plus fidèlement rendue au frontispice du Missel de Louis de Guyenne (supra), enluminé par le Maître de Bedford (Inès Villela-Petit, Bibliothèque nationale de France, 2008).

Notez l'ange scutifère sur la clef tombante, comme sur la peinture des Jouvenel, et le réseau de nervures en arrière des arcades.

 

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4°)Les Obsèques de Raymond Diocrès,  Très Riches Heures du duc de Berry, Musée Condé, Chantilly, MS65 f°86v par Jean Colombes, 1485 (sur un dessin antérieur, peut-être des Limbourg, ou du Maître de Bedford).

 

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5. Dans un processus inverse, ou de mise en abyme, certains vitraux des chapelles du XVe siècle représentent, comme sur ces enluminures, l'intérieur de chapelles avec leurs vitraux..

 L'Annonciation de la baie Jacques Cœur, ou baie 25 de la cathédrale de Bourges, datant de 1451 peut-être par Jacob de Littemont.

Les quatre personnages ont été placés dans une architecture complexe, voutée d'ogives ornées de fleurs de lys sur fond bleu. A la différence de la peinture des Jouvenel (réalisée 5 ans auparavant), mais selon le même procédé, c'est la scène liturgique qui figure au premier plan, devant une tenture rouge damassée tendue entre les colonnes. Au premier plan de la partie supérieure, les clefs pendantes s'avancent dans l'espace fictif, devant la voûte nervurée. 

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Photo lavieb-aile

 

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L'Annonciation baie n°25, cathédrale de Bourges. Photo lavieb-aile.

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Les vitraux de la peinture peuvent-ils représenter  ceux de Notre-Dame, soit ceux de la chapelle axiale, soit ceux de la chapelle Saint-Rémi au XVe siècle ?

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Réponse : on ne sait pas.

"Il ne reste plus rien de la vitrerie médiévale, à l'exception de deux médaillons médiévaux aujourd'hui replacés dans la chapelle Saint-Guillaume, ... ancienne chapelle Saint-Rémi, mais provenant d'un autre emplacement.
Les historiens ne possèdent aucune information sur la nature des vitraux du XIIe siècle et sur l'iconographie retenue pour les trois niveaux d'élévation. L'historienne du vitrail Françoise Gatouillat rappelle que la vitrerie de cette époque a dû se constituer grâce à des donations, mais sans doute aussi avec des remplois des verrières de l'église que la nouvelle cathédrale remplaçait. Ainsi, un triomphe de la Vierge, offert par l'abbé Suger, a été réutilisé dans les tribunes.
Au XIVe siècle, le problème de la cathédrale restait sa pénombre extrême. Et la vitrerie en place allait en faire les frais : quelques verres blancs joignirent les étages supérieurs ; parfois des scènes diverses en camaïeu ou en grisaille et jaune d'argent. Néanmoins des chapelles reçurent des vitraux historiés avec commanditaires à leur partie inférieure, mais on les compte sur les doigts d'une main. Rappelons que les confréries, pourvoyeuses habituelles de vitraux, étaient interdites de séjour dans la cathédrale de Paris (voir le financement de la construction plus haut). Pis encore au XVIIIe siècle : les vitraux des grandes fenêtres seront détruits pour gagner de la lumière.
Les seuls vitraux médiévaux importants qu'il nous reste sont les trois grandes roses du XIIIe siècle"

https://www.patrimoine-histoire.fr/Patrimoine/Paris/Paris-Notre-Dame.htm

Source : La cathédrale Notre-Dame de Paris, La Nuée Bleue, collection La grâce d'une cathédrale, 2012, article de Françoise Gatouillat.

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L'architecture représentée sur la peinture peut-elle correspondre à elle de Notre-Dame, soit ceux de la chapelle axiale, soit ceux de la chapelle Saint-Rémi au XVe siècle ?

Réponse : non, ce qui est représenté ici est une absidiole axiale et deux chapelle latérales, or le chevet de Notre-Dame ne possède pas de chapelles rayonnantes (comme en la cathédrale de Bourges) et de chapelle absidiale  axiale plus importante, (comme en la cathédrale du Mans ou en celle de Rouen, par exemple.

Plan de Notre-Dame : https://passerelles.essentiels.bnf.fr/fr/image/926747b1-1473-4117-8441-ef7668e80a69-plan-notre-dame-paris.

Il faudrait encore comparer ce chevet avec celui des cathédrales de Troyes (origine de la famille Jouvenel), de Laon, dont Jean II Jouvenel était évêque ou de Reims, dont Jacques Jouvenel était archevêque , ou de Poitiers.

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Quels sont les éléments descriptifs dont nous disposons sur la chapelle Saint-Rémi ?

La chapelle Saint-Rémi, actuelle chapelle Saint-Guillaume, est conjointe (non séparée par un mur) de la chapelle Saint-Pierre-et-Saint-Etienne, actuelle chapelle d'Harcourt, plus à l'est. Elle est éclairée aujourd'hui par une large baie à 2x2 lancettes à vitrerie et un tympan à trois roses, devant lequel le mausolée de Jean Jouvenel et Michelle de Vitry est disposé (alors que le dessin de Guilhermy le montre devant un mur). En effet, C.P. Gueffier signale en 1753 que la peinture étudiée ici était placée contre le mur devant lequel était le tombeau, de marbre noir. 

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Quels sont les éléments descriptifs dont nous disposons sur les chapelles du chœur de Notre-Dame ?

Document décrivant le déambulatoire et le chevet de Notre-Dame :

"Un double collatéral environne tout le chevet. Quatre piliers et dix-sept colonnes le partagent en deux galeries. Le nombre de ses travées est donc de vingt, c’est-à-dire qu’il en a cinq de plus que le chœur et l’abside ensemble. La différence du rayon de la courbe à décrire explique naturellement cet accroissement dans le nombre des arcs et dans celui des points d’appui nécessaires pour les soutenir. C’est d’ailleurs toujours le même système dans la structure des voûtes. Seulement, au rond-point, comme la disposition des travées à couvrir ne se prêtait plus au croisement régulier des nervures, on s’est contenté de réunir entre eux les points d’appui par des arcs en ogive, dont les intervalles ont été remplis au moyen de portions de voûtes de formes diverses. Les colonnes libres et les groupes engagés dans les murs de refend des chapelles appartiennent à la première construction, comme le prouvent suffisamment le style de leurs chapiteaux et les feuilles en relief sur les angles de leurs socles. Deux harpies, l’une mâle, l’autre femelle, à corps d’oiseau et tête humaine, sculptées dans un feuillage, sur un chapiteau, entre les septième et huitième chapelles au sud, marquent la transition du style qui se plaisait à l’emploi des personnages et des animaux, à celui qui leur a substitué presque exclusivement le règne végétal.

Si de la colonnade intermédiaire nous passons aux chapelles, nous voyons qu’elles présentent un total de vingt-trois travées. À mesure qu’on s’éloigne du centre, le nombre des subdivisions devient forcément plus considérable.  Les cinq premières, de chaque côté, n’ont pas plus d’une travée d’étendue. La première surtout est plus restreinte encore, envahie par le massif qui renferme l’escalier de la tribune.

Vers le rond-point, l’architecte du xive siècle a voulu que ses chapelles fussent plus dégagées et plus élégantes. Il a donc pris le parti de supprimer huit murs de refend pour avoir deux chapelles doubles et trois triples. Le collatéral y a gagné plus de légèreté et plus de lumière. Dans les chapelles simples, les nervures croisées reposent sur des colonnettes engagées dans les angles. Les chapelles doubles et triples ont des faisceaux de colonnes pour soutenir leurs voûtes et leurs arcs doubleaux. Les nervures sont rondes, quelques-unes même avec ce filet en saillie sur le tore qui devint ordinaire dans la seconde moitié du xiiie siècle. Le feuillage des clefs et des chapiteaux, chêne, lierre, trèfle, vigne, etc., a été traité avec une délicatesse et une vérité charmantes. Les arcs doubleaux et les arcs d’ouverture sont fortifiés de nombreuses moulures toriques. Il est intéressant de comparer sur place, et souvent dans l’espace d’une même travée, la manière du xiie siècle et celle du xive. Il est resté dans plusieurs de ces chapelles, comme dans quelques-unes de celles de la nef, des piscines creusées dans les murs et surmontées de petits pignons. Tout était prévu. Ainsi, ces piscines présentent un double bassin, l’un communiquant avec l’extérieur par un déversoir pour rejeter l’eau qui a servi à purifier les mains du prêtre avant le canon de la messe ; l’autre, percé d’un conduit qui va se perdre dans le sol même de l’église, afin de ne pas laisser tomber sur une terre profane l’eau dont le prêtre se lave les doigts après avoir touché aux saintes espèces.

Quelques vagues indices de peinture murale s’aperçoivent çà et là sur les murs des chapelles absidales. Les traces d’une décoration polychrome plus complète se sont trouvées sous le badigeon dans les trois chapelles du fond. On a découvert il y a quelques mois sur le mur de refend de droite de la chapelle du fond, une belle peinture du xive siècle représentant la Vierge assise sur un trône avec l’enfant Jésus ; à gauche est saint Denis à genoux tenant sa tête entre ses bras ; à droite un évêque également agenouillé ; au-dessus de la Vierge on voit deux anges enlevant une âme sous forme d’un jeune homme nu. Une arcature en pierre entourait cette peinture, qui se trouvait probablement placée au-dessus du tombeau de Matiffas de Bucy, le fondateur de ces chapelles. L’évêque placé à la droite de la sainte Vierge serait alors le pieux prélat. Dans la crainte de voir disparaître ces restes qui dénotent un art fort avancé, les architectes les ont fait copier en fac simile de grandeur naturelle par M. Steinheil. " (M. De Guilhermy et Viollet-le-Duc 1856)

 

Dans ces chapelles latérales du choeur de Notre-Dame, les statues que signalent Gueffier au XVIIIe siècle sont rares : ce sont, sur des colonnes,  celles de Simon de Batifas évêque de Paris, fondateur des chapelles saint Nicaise, saint Rigobert et saint Louis (*), d'une part, et, dans la chapelle Saint-Denis et Saint-Georges, celle de Denis Dumoulin, évêque de Paris patriarche d'Antioche et conseiller de Charles VII, décédé en 1441 Cette statue fut brisée à la Révolution.

(*)En 1602 les chapelles Saint-Louis et Saint-Rigobert sont rassemblées pour accueillir les tombeaux du cardinal et du maréchal de Retz. La chapelle est aujourd’hui connue sous le vocable de Notre-Dame-des-Sept-Douleurs.

 

Remarque : Sur le mur méridional de la chapelle d'axe de Notre-Dame de Paris, dédiée à saint Nicaise, subsiste aujourd'hui une importante peinture murale du XIVe siècle parisien. Vestige du tombeau à enfeu de Simon Matifas de Bucy, évêque de Paris de 1290 à 1304, l'œuvre, lourdement restaurée par Viollet-le-Duc au XIXe siècle, constitue pourtant possiblement l'unique témoignage de l'activité de Jean Pucelle, connu pour ses enluminures, dans le domaine de la peinture monumentale. En effet, Jean-Marie Guillouet est parvenu à cette attribution, en 2008, en la rapprochant de  la Crucifixion et l’Adoration des Mages des folios 68v. et 69 des Heures de Jeanne d’Evreux (entre 1325 et 1328), conservées au Metropolitan Museum de New York. Cela confirme que les artistes enlumineurs pouvaient réaliser, non seulement des cartons de vitraux, mais aussi des peintures monumentales, et cela démontre l'intérêt de recherches de cet ordre.

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Peinture murale, chapelle axiale Saint-Nicaise, Notre-Dame de Paris

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Jean Pucelle, Heures de Jeanne d'Evreux folio 69, Adoration des Mages.

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On remarque l'absence sur la peinture de statues dressées sur des colonnes, soit des donateurs, soit des patrons des chapelles :

"Nous avons connaissance, de manière plus ou moins fragmentaire, de treize supports établis ainsi au devant ou à l'intérieur des chapelles pour recevoir une statue. Ces statues représentaient des donateurs, tels que Simon Matiffas de Bucy, à l'entrée de la chapelle Saint-Nicaise, au devant de son tombeau, Michel du Bec, devant l'entrée de la chapelle Saint-Michel, Etienne de Suizy, "contre un pilier de sa chapelle", Thomas de Courcelles, Jean de Courcelles, encadrant l'autel de la chapelle Saint-Martin-Sainte-Anne, l'évêque Denis du Moulin devant la chapelle Saint-Denis-Saint-Georges, ainsi qu'un chanoine non identifié dans la chapelle de la Décollation.  Des statues à l'effigie de leurs saints patrons ou d'autres personnages étaient placées soit isolément soit vis-à-vis de ces donateurs : saint Michel face à Michel du Bec, l'Enfant Jésus et saint Joseph dans la chapelle de la Décollation, saint Denis face à Denis du Moulin. Dans certains cas, des saints intercesseurs pouvaient même être placés sur le même support que les donateurs. [...] La décoration projetée par Etienne Yver dans la chapelle Saint-Nicolas comportait apparemment un ensemble de statues reposant sur deux colonnes, sur le thème de l’Annonciation. Dès le XIVe siècle, on trouvait en la chapelle Saint-Crépin-Saint-Crépinien une représentation de ces saints, qui pourrait bien avoir été exposée de la même façon que les saints que nous avons mentionnés." (G. Eldrin)

Un exemple : la statue de Beatrix de Bourbon, morte en 1383, en sa chapelle funéraire  des Jacobins de Paris (aujourd'hui conservée à la basilique de Saint-Denis) :

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Un témoignage important est la façon dont Philippe de Mortvilliers aménagea sa chapelle funéraire, dans le chœur de Saint-Martin-des-Champs, et, notamment, de l'existence de statues sur colonnes ou culots.

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Cet avocat d'Amiens, conseiller de Jean Sans Peur puis du duc de Bedford, fut nommé premier président du Parlement de Paris pour le parti "bourguignon" en 1418 et accompagna, pendant l'occupation anglaise, l'évêque de Beauvais Pierre Cauchon auprès de Jean de Lancastre. Dans le même temps, du côté "armagnac", Jean Jouvenel des Ursins était premier président du Parlement à Poitiers, et le rival direct de Philippe de Mortvilliers. En 1436, Charles VII réunit les deux parlements.

Philippe de Mortvilliers mourut en 1436 (cinq ans après Jean Jouvenel). Il s'était soucié dès 1426 de fonder sa chapelle funéraire au prieuré clunisien de Saint-Martin-des-Champs en la chapelle Saint-Nicolas, la deuxième chapelle rayonnante nord du chevet, et d'y élever un tombeau pour lui et son épouse Jeanne de Drac . Mais, à la différence des Jouvenel, l'ensemble des textes très détaillés concernant les diverses tractations avec les religieux de Saint-Martin-des-Champs, le financement de la chapelle, les cérémonies liturgiques, l'aménagement et l'ameublement de celle-ci, les calices, vêtements liturgiques et parements d'autels (le poste le plus coûteux), missels et livres (à ses armes et d'emblèmes), etc. ont été conservés et Philippe Plagnieux en a rendu compte. Du monument funéraire lui-même, seule le gisant de Philippe de Mortvilliers, en pierre et marbre blanc, est conservé au Louvre.

"On a montré comment les démarches entreprises par la famille Jouvenel pour inhumer à Notre-Dame, plus de dix ans après sa mort, l'ancien président du parlement de Poitiers, constituaient une réplique aux fondations effectuées en l'église de Saint-Martin-des-Champs par Philippe de Morvilliers. Ce dernier avait présidé le parlement de Paris durant l'occupation anglaise tandis que Jean Jouvenel présidait celui de Poitiers et les occasions de rivalité n'avaient pas manqué entre les deux familles. [...]. Rien d'étonnant par conséquent à ce que la famille Jouvenel ait repris à son compte les principes appliqués par son rival dans l'une des chapelles du chevet de Saint-Martin-des-Champs : droit d'inhumation étendu aux descendants par filiation directe issue de mariage, célébration d'une messe quotidienne dans la chapelle, représentation physique, sur un tombeau élévé de terre, des chefs de la lignée sous la forme de sculptures dont la peinture devait accroître le réalisme. L'instauration de la procession le jour de l'obit des différents membres de la famille peut elle-même apparaître comme une copie de la procession qui le jour de l'obit du président de Morvilliers devait après la célébration se rendre du choeur au tombeau du fondateur, y chanter plusieurs oraisons avant de s'en retourner en entonnant une antienne à saint Martin." (G. Eldin)

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Les fondateurs déjà figurés en gisants se firent  représenter sous forme de statues, également de pierre, mais cette fois debout. Adossées aux deux piliers d'entrée de la chapelle, sous un dais ouvragé, elles se dressent sur des consoles en forme d'anges présentant leurs armoiries. A l'instar des gisants, mais de façon nettement plus ostentatoire, ces statues représentent les deux personnages au sommet de leur gloire, vêtus de costumes de cérémonie . Philippe de Morvilliers est vêtu de sa longue robe rouge de premier président du Parlement, et tient un curieux édicule ( une maquette symbolisant la chapelle Saint-Nicolas?). Quant à son épouse, mains jointes, mondaine et élégante, elle porte un riche habit doré,. Sur les deux piles composées de la chapelle, dessinées par Gaignières, grimpent deux tiges de rinceaux à feuilles de chêne.Elles s'entrecroisent et déterminent des médaillons, séparés par la devise hac virtutis iter, puis enchâssent alternativement les armes des deux époux et la herse liée à F Y.

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Roger de Gaignières, BnF, Est. RESERVE Pe-11-Fol.

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Philippe de Morvilliers et Jeanne du Drac dans le choeur de l'église de st-Martin des Champs Gaignières, BnF, Est. RESERVE Pe-11-Fol.

 

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SOURCES ET LIENS.

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BATTIFOL (Louis), 1894, Jean Jouvenel, prêvôt des marchands de la ville de Paris (1360-1431), thèse, Honoré Champion

https://ia600201.us.archive.org/17/items/jeanjouvenelpr00batiuoft/jeanjouvenelpr00batiuoft.pdf

https://www.mediterranee-antique.fr/Auteurs/Fichiers/ABC/Batiffol_L/Jouvenel_Jean/Jouve_10.htm

BATTIFOL (Louis), 1893, L'origine italienne des Juvenel des Ursins, Bibliothèque de l'école des Chartes

https://www.persee.fr/doc/bec_0373-6237_1893_num_54_1_447749

 

BOUCHOT, Henri, Inventaire des dessins exécutés pour Roger de Gaignières et conservés aux départements des estampes et des manuscrits, Paris 1891.

DEMURGER ( Alain), « La famille Jouvenel. Quelques questions sur un tableau », Annuaire-Bulletin de la Société de l’Histoire de France, 1997 (1999), p. 31-56.

https://books.google.fr/books?id=wEwo4Lx75-8C&pg=PA55&lpg=PA55&dq=%22ce+sont+les+representations+de+nobles+personnes+messire%22&source=bl&ots=AoJTrBx6NL&sig=ACfU3U3jgikE9L_rPNh2Z0OLR3S8tB6khw&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwjc4qbU66KDAxWtcKQEHfo8Ay8Q6AF6BAgKEAM#v=onepage&q=%22ce%20sont%20les%20representations%20de%20nobles%20personnes%20messire%22&f=false

ELDIN (Grégoire), 1994, Les chapellenies à Notre-Dame de Paris (XIIe au XVIe siècles) ,thèse de l' Ecole nationale des Chartes, 3 volumes, vol.I

https://bibnum.explore.psl.eu/s/psl/ark:/18469/465kd

"La relation étroite entre décor et sépulture, que l'on ressent particulièrement à la fin du Moyen Âge, nous a conduit plusieurs fois déjà, dans notre étude des tombeaux, à évoquer la décoration des chapelles. Notre propos n'est pas ici de présenter l'aspect de chacune d'elles ; ces éléments ont été réunis dans la description topographique que l'on trouvera en fin d'étude. Il est plutôt de nous interroger sur les règles qui ont présidé à l'aménagement des chapelles, tout en sachant que l'information réunie, qui restera toujours fragmentaire, ne permet pas d'analyse de type statistique.

L'un des écueils auxquels nous nous heurtons est notamment le fait qu'une bonne part de notre documentation se compose de descriptions portant non sur des oeuvres, mais sur des projets, dont rien ne confirme qu'ils furent suivis d'exécution.

L'information dont nous disposons témoigne d'un nombre respectable d'entreprises de décoration des chapelles du tour du choeur. Pour les chapelles de la nef, les données sont beaucoup plus rares. Il est probable qu'elles aient été beaucoup plus négligées. Comme on l'a vu, elles n'avaient attiré que très peu de sépultures.

Comme pour les inhumations, les fondateurs de chapellenies ou de cycles de messes peuvent être tenus pour responsables d'une bonne part des réalisations. L'étroitesse des chapelles, dont on a dit qu'elle expliquait en partie que l'on n'eût élevé que très peu de tombeaux au-dessus du sol, peut aussi justifier l'usage consistant à dresser sur des colonnettes les représentations des donateurs. A plusieurs reprises, les délibérations du chapitre attestent du souci de ne pas endommager les maçonneries de l'édifice en y insérant des pièces rapportées.

Nous avons connaissance, de manière plus ou moins fragmentaire, de treize supports établis ainsi au devant ou à l'intérieur des chapelles pour recevoir une statue. Ces statues représentaient des donateurs, tels que Simon Matiffas de Bucy, à l'entrée de la chapelle Saint-Nicaise, au devant de son tombeau, Michel du Bec, devant l'entrée de la chapelle Saint-Michel, Etienne de Suizy, "contre un pilier de sachapelle", Thomas de Courcelles, Jean de Courcelles, encadrant l'autel de la chapelle Saint-Martin-Sainte-Anne, l'évêque Denis du Moulin devant la chapelle Saint-Denis-Saint-Georges, ainsi qu'un chanoine non identifié dans la chapelle de la Décollation.  Des statues à l'effigie de leurs saints patrons ou d'autres personnages étaient placées soit isolément soit vis-à-vis de ces donateurs : saint Michel face à Michel du Bec, l'Enfant Jésus et saint Joseph dans la chapelle de la Décollation, saint Denis face à Denis du Moulin. Dans certains cas, des saints intercesseurs pouvaient même être placés sur le même support que les donateurs. [...] La décoration projetée par Etienne Yver dans la chapelle Saint-Nicolas comportait apparemment un ensemble de statues reposant sur deux colonnes, sur le thème de l’Annonciation. Dès le XIVe siècle, on trouvait en la chapelle Saint-Crépin-Saint-Crépinien une représentation de ces saints, qui pourrait bien avoir été exposée de la même façon que les saints que nous avons mentionnés.

Qui sont les commanditaires de ces sculptures ? On les connaît dans le cas des frères de Courcelles et d'Etienne Yver. Faut-il en déduire que tous les personnages représentés en aient eux-mêmes fait la demande ? Marcel Aubert propose la date de 1330 pour la figuration du plus ancien de ces personnages, Simon Matiffas de Bucy. Il n'est pas impossible en effet qu'après l’achèvement des chapelles du choeur on ait souhaité commémorer par une série de statues à leur effigie certains personnages ayant contribué à la construction. Ainsi auraient été élevées les statues de Michel du Bec et d'Etienne de Suizy. Il est fort possible également que cet ensemble de sculptures — pour peu qu'il s'agisse effectivement d'une commande d'ensemble, or rien n'est moins sûr — ait été financé par un ou des personnages lui-même ou eux-mêmes désireux d'être représenté. Mais n'espérons pas connaître le poids exact de la modestie ou de la vanité de chacun de ces personnages

Nous n'irons pas jusqu'à assimiler ces statues, comme l'a proposé H. Kraus, à celles figurées sur le tableau représentant la famille Jouvenel des Ursins, que l'on entrevoit dans des niches placées entre les fenêtres d'un déambulatoire. La comparaison s'impose, mais point l'identification. (H. Kraus, Notre-Dame's vanished médiéval glass, dans la Gazette des Beaux-arts, t. LXVIII, n° 1172 (septembre 1966), p. 140 et suiv.).

Les craintes du chapitre quant à la maçonnerie de l'édifice ne laissèrent point de choix à ceux qui souhaitèrent orner les murs des chapelles à leurs frais : la peinture était la seule façon de les décorer de façon permanente, l'utilisation de tentures constituant le moyen de les revêtir de façon provisoire. Les Jouvenel des Ursins envisagent également de faire peindre le mur séparant la chapelle Saint-Rémi de la chapelle Saint-Géraud. Avant eux, le sire de Bourbon et ses gens avaient envisagé de réaménager la même chapelle en y faisant notamment peindre la Vierge, entourée de leurs armoiries. (27 mars 1415, LL 112, p. 43).

Moins accessibles au badigeonnage, les voûtes des chapelles ont plus longtemps que les murs conservé la trace de peintures. Plusieurs donateurs y firent peindre leurs armoiries. La date de ces travaux n'est pas connue, mais les observateurs de l'époque moderne ont pu reconnaître ainsi les armes des Jouvenel des Ursins à la voûte de la chapelle Saint-Rémi et celles de Denis Dumoulin à celle de la chapelle Saint-Denis-Saint-Georges.

Mais la famille Jouvenel des Ursins offrit le premier cas de fidélité durable à une fondation. Cette fidélité pluriséculaire fut cependant axée sur le droit de sépulture concédé à la descendance du président du parlement de Poitiers.

 

 

 

FERRARI (Matteo),  , Paris, Notre-Dame (chapelle Jouvenel des Ursins), base ARMMA/SAPRAT

https://armma.saprat.fr/monument/paris-notre-dame-chapelle-jouvenel-des-ursins/ 

FERRARI (Matteo),  Paris, Hôtel Jouvenel des Ursins, base ARMMA/SAPRAT

https://armma.saprat.fr/monument/paris-hotel-des-ursins/

FERRARI (Matteo),  Troyes, Hôtel Jouvenel des Ursins, base ARMMA/SAPRAT

https://armma.saprat.fr/monument/troyes-hotel-juvenal-des-ursins/

 

 

—  GUILHERMY (Ferdinand de), 1873, Inscription de la France du Ve au XVIIIe, t. 1. Ancien diocèse de Paris, Paris, Imprimerie nationale, 1873.

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6377940n/f94.item.r=

https://gallica.bnf.fr/view3if/ga/ark:/12148/btv1b69074450/f2

PATTOU (Etienne)

http://racineshistoire.free.fr/LGN/PDF/Jouvenel-des-Ursins.pdf

REYNAUD, (Nicole), 1999 « Les Heures du chancelier Guillaume Jouvenel des Ursins et la peinture parisienne autour de 1440 », Revue de l’Art, 126, 1999, p. 23-35.

Photo RMN

https://www.photo.rmn.fr/archive/87-005856-2C6NU0HGUCXF.html

https://www.fontaine-fourches.com/625.Histoire.annexe.1.famille.Juvenal.des.Ursins.html

 

Source du deuxième article

AUBERT (Marcel) , 1950, La cathédrale Notre-Dame de Paris. Notice historique et archéologique, page 86

https://archive.org/details/lacathdraleno00aube/page/86/mode/2up

DAVIS (Michael T.), 1998, "Splendor and Péril: the Cathedral of Paris. 1290-1350" . Art Bulletin, LXX X (1998), p. 34-66.

https://www.jstor.org/stable/3051253

—  FREIGANG (Christian), 2002,  "Chapelles latérales privées. Origines, fonctions, financement: le cas de Notre-Dame de Paris", in  Art, cérémonial et liturgie au Moyen Age, actes du colloque de 3e cycle Romand de Lettres, Lausanne-Fribourg, 24-25 mars, 14-15 avril, 12-13 mai 2000 (sous la dir. de Nicolas Bock, Peter Kurmann, Serena Romano et Jean-Michel Spieser), Paris, 2002.

https://d-nb.info/1212516060/34

Les nouvelles chapelles commencent à être bâties comme annexes de la nef. Le chevet, en revanche, ne se verra enrichi de ces espaces supplémentaires que pendant la deuxième moitié du XIIIe et au début du XIVe siècle . Les chapelles latérales de Notre-Dame ne sont donc évidemment pas à confondre avec les absidioles entourant souvent les déambulatoires des grandes églises romanes et gothiques.

...chapellenie. dont les fondations ont été des fois interprétées comme témoignage de la construction matérielle d'une de ces édicules annexes. Cependant, fundare, construere ou edificare unam capellaniam veut, dans notre contexte, surtout dire la dotation d'un bénéfice avec la charge du prêtre de célébrer régulièrement une ou plusieurs messes dans une église, et souvent à un autel précis. Généralement, il s'agit de messes commémoratives pour le fondateur et ses proches, après la mort de celui-ci. la dotation d'un tel bénéfice. S'y ajoute, dès le début du XIIIe siècle, que le fondateur désigne un autel particulier qu'il dote aussi des instruments liturgiques nécessaires, des habits, de la vaisselle et/ou de la lumière.

[...]Ctte constatation peut être confirmée pour le clerc et professeur Eudes de Sens qui, en 1315, fait dotation d'une chapellenie dans la chapelle St-Pierre et St-Etienne (la cinquième, côté sud, du déambulatoire), où il sera également enseveli. Les anciennes représentations dans les vitraux nous renseignent davantage sur le contexte de cette fondation: on y voyait le frère et les parents d'Eudes, dont le père avait déjà fondé une messe annuelle pour son fils, en 1303. La figure d'Eudes, en habit de diacre, portait une chapelle dans sa main. C'est ici presque une véritable chapelle privée, où plusieurs chapellenies sont consacrées à une même famille et où figure un donateur, Eudes lui-même, en tant que fondateur de la chapelle elle-même. [...]

La chapelle latérale a, dans ce contexte, tendance à devenir un point de repère très important. Cette tendance à la concentration familiale et à l'isolation est confirmée par l'organisation de l'entretien des chapelles.... Apparemment, les chapelles avaient des clôtures en forme de treillage, ce qui interdisait l'accès à toute personne non autorisée.

Conformément aux prescriptions ecclésiastiques, au XIIe siècle, ne se trouvent à l'intérieur, dans le chœur, que des tombeaux de la famille royale et des évêques. Cependant, l'abbaye de St-Victor étant plus prestigieuse comme lieu de sépulture pour les évêques parisiens durant tout le XIIe siècle, ceux-ci ne deviennent plus nombreux qu'ave c Eudes de Sully, en 1208. Suivent les chanoines qui, dès le milieu du XIIIe siècle, ne sont plus enterrés principalement dans le cloître, mais aussi dans la nef et ses chapelles, ainsi que dans les chapelles du chevet. Il convient cependant de souligner que les laïcs n'étaient nullement privés de tels privilèges, comme le montre l'exemple du chevalier Robert de Millet, qui aura en 1329 son tombeau figuré dans la quatrième chapelle côté nord des parties droites du chevet.

Les chapelles individuelles ne deviennent plus intéressantes qu'au moment où elles peuvent également servir de lieu de sépulture du fondateur et de cadre de représentation familiale par les médias de l'image et de l'épigraphie, vers la fin du XIIIe siècle. Mais il est important de constater que l'architecture reste, jusqu'au XIVe siècle, un cadre neutre et non soumis à une quelconque intervention du donateur. En fait, l'étonnante homogénéité des chapelles latérales de Notre-Dame peut être comprise à la lumière de cet aspect. Même si l'on peut observer quelques modifications dans les détails durant l'étape de construction des chapelles de la nef, avant le milieu du XIIIe siècle, l'espace mis à disposition des fondateurs, comme la largeur des fenêtres et la richesse du remplage, ne changent pratiquement pas. En ce qui concerne les chapelles du chevet, leur ressemblance à l'identique résulte d'un esprit de standardisation qui ne connaît presque pas de modifications. Les chapelles suivent un plan préétabli, et cela n'est pas seulement l'application d'un procédé développé par l'architecture gothique du XIIIe siècle, procédé qui consiste en la conception théorique préalable d'une partie architecturale. L'unité du langage architectural des chapelles, qui forment, par leurs gables ajourés, un ensemble indissociable avec les nouveaux bras des transepts ainsi qu'ave c la Porte Rouge, démontre clairement que les chapelles latérales ne sont nullement des espaces individuels, indépendants du reste de la cathédrale. Ceci est confirmé par leur disposition à l'intérieur, où il ne faut pas surestimer l'aspect d'isolement des espaces annexes. Certes, en ce qui concerne les parties droites, les contreforts s'imposent naturellement en tant que clôtures entre les chapelles. Quant aux chapelles rayonnantes cependant, il y a des groupements de chapelles à deux et à trois unités. Ces chapelles ont donc un caractère ambigu, puisqu'elles peuvent également être interprétées comme un agrandissement de l'intérieur de la cathédrale par un troisième déambulatoire . Le fait que les chapelles étaient, de toute évidence, séparées du déambulatoire par des clôtures à serrures ne contredit pas cette observation. Ces clôtures étaient des treillages translucides qui laissaient pénétrer le jour des fenêtres et permettaient d'entendre publiquement le service divin. Les chapelles font donc visiblement partie de l'ensemble architectural de l'église principale.

 

 

 GUEFFIER, (Claude-Pierre ), 1753, Curiosités de l'église Notre-Dame de Paris, avec l'explication des tableaux qui ont été donnés par le corps des orfèvres, BnF Arsenal 8-H-13286

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1518656k/f65.item

GUILLOUET (Jean-Marie ), Guillaume Kazerouni. 2008, Une nouvelle peinture médiévale à Notre-Dame de Paris : le tombeau de Simon Matifas de Bucy. Revue de l'Art, 2008, I (158), pp.35-44. 

Sur le mur méridional de la chapelle d'axe de Notre-Dame de Paris, dédiée à saint Nicaise, subsiste aujourd'hui une importante peinture murale du XIVe siècle parisien. Vestige du tombeau à enfeu de Simon Matifas de Bucy, évêque de Paris de 1290 à 1304, l'œuvre, lourdement restaurée par Viollet-le-Duc au XIXe siècle, constitue pourtant possiblement l'unique témoignage de l'activité de Jean Pucelle dans le domaine de la peinture monumentale. Des relevés et documents indirects permettent de reconstituer en partie l'histoire matérielle de ce monument et d'en évaluer la place dans l'histoire de l'art du premier tiers du XIVe siècle.

https://shs.hal.science/halshs-00560732

 

 

KRAUS (Henry ), 1966, Notre-Dame's vanished medieval glass I : the iconography II : the donors ,la Gazette des beaux-arts,

KRAUS (Henry ), 1993, A prix d'or, L'argent des cathédrales / L'argent des cathédrales de Henry Kraus, les Éditions du Cerf, CNRS Éditions, 2012

https://www.persee.fr/doc/bulmo_0007-473x_1993_num_151_3_3398_t1_0532_0000_4

KRAUS (Henry ), 1967, Notre-Dame's vanished medieval glass ,la Gazette des beaux-arts, 1967 - 32 pages

KRAUS (Henry ), 1969 "New Documents for Notre-Dame's Early Chapels", Gazette des Beaux-Arts, CXI (1969). p. 121-134. k

KRAUS (Henry ), 1970. "Plan of the early Chapels of Notre-Dame de Paris", Gazette des Beaux-Arts, CXII (1970). p. 271.

Les premières chapelles latérales de la cathédrale Notre-Dame n'ont assurément pas eu la même fonction. Toutefois, une documentation abondante et quelques vestiges de l'ancien mobilier des chapelles nous permettent de redessiner les conditions de leur fondation et de leur édification, ainsi que d'expliquer leur forme architecturale et leur place dans la genèse des oratoires privés latéraux des XIVe et XVe siècles. L

Chapelle Saint-Guillaume

https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/palissy/PM75000728

PLAGNIEUX Philippe 1993 La fondation funéraire de Philippe de Morvilliers, premier président du Parlement. Art, politique et société à Paris sous la régence du duc de Bedford

Bulletin Monumental  Année 1993  151-2  pp. 357-381

 

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27 décembre 2023 3 27 /12 /décembre /2023 11:15

Le tableau (vers 1445-1446) de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny, provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. I. Les personnages : Jean Jouvenel (1360-1431), sa femme Michelle de Vitry et leurs onze enfants

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PRÉSENTATION.

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"Sur ce long tableau peint, s’alignent les membres de l’opulente famille Jouvenel des Ursins affichant leurs tabards armoriés. Celle-ci  comprend en effet un prévôt des marchands de Paris, un président du Parlement de Poitiers, deux évêques et archevêques, un chancelier royal. Parmi les dames, se trouvent une veuve, deux religieuses, et deux femmes mariées reconnaissables à leur coiffure à cornes. Sur fond de brocarts d’or en relief, ce portrait collectif figurait dans la chapelle familiale fondée dans le chœur de la cathédrale de Paris. Il représente l’un des rares témoignages de la peinture parisienne au milieu du 15e siècle, en un temps encore trouble de la Guerre de Cent ans. Daté entre 1445 et 1449. Versé au Musée des monuments français en 1795 ; entré au Louvre en 1829 ; déposé par le Louvre en 1985. 1,65 m de haut 3,50 m de large N° Inventaire : RF 9618" (Notice du musée)

Il s'agirait (A. Demurger) d'une commande collective des membres de la famille Jouvenel encore vivants en 1445-1449, incluant les vivants et les défunts dans l'ordre de leur chronologie de naissance, et ne représentant, hors le couple fondateur, que les enfants et non leurs conjoints.

"Le contrat de fondation de la chapelle a été passé sous le scel de la prévôté de Paris, le 14 juin 1443, fondation effectuée plus de dix ans après la mort de Jean Jouvenel, et dont l'objet principal de ia fondation est d'obtenir le droit de sépulture pour feu Jean Jouvenel, son épouse et ceux de leurs héritiers qui voudront y élire sépulture. Il débute par « Premièrement requièrent avoir la chapelle de Saint Remy."Les fondateurs cèdent au chapitre moitié du moulin des Chambres Hugues, à Paris sur la Seine, ainsi que 4 1. 14 s.p. d'autres revenus ; le tout est estimé 60 l.p. de rente, mais qui doit aussi financer la célébration d'un obit solennel. Chaque messe est payée 16 d.p. à celui qui la célèbre. La seule rétribution des messes s'élève donc à 26 I. 6 s. 8 d.p. Service : Une messe basse chaque jour à huit heures : le lundi du Saint-Esprit, mardi de Requiem, mercredi de Notre Dame, jeudi du Saint -Esprit, vendredi de Requiem, samedi de Notre Dame et le dimanche du jour ; les jours de fête solennelle, on célébrera du jour, en faisant commémoration des défunts ; après chaque messe, le célébrant dira un De profundis et une collecte en aspergeant le tombeau d'eau bénite. Intention : "Pro defuncto domino Jacobo (sic) Juvenel et suis parentibus et amicis. Règles de collation : Le 30 décembre 1443, l'un des fondateurs, Jean Jouvenel, évêque de Beauvais, désigne cinq prêtres, auxquels le chapitre ajoute deux autres célébrants ; chacun célèbre un jour de la semaine."

"On a montré il y a peu que les démarches entreprises par la famille Jouvenel pour inhumer à Notre-Dame, plus de dix ans après sa mort, l'ancien président du parlement de Poitiers, constituaient une réplique aux fondations effectuées en l'église de Saint-Martin-des-Champs par Philippe de Morvilliers. Ce dernier avait présidé le parlement de Paris durant l'occupation anglaise tandis que Jean Jouvenel présidait celui de Poitiers et les occasions de rivalité n'avaient pas manqué entre les deux familles. [...]. Rien d'étonnant par conséquent à ce que la famille Jouvenel ait repris à son compte les principes appliqués par son rival dans l'une des chapelles du chevet de Saint-Martin-des-Champs : droit d'inhumation étendu aux descendants par filiation directe issue de mariage, célébration d'une messe quotidienne dans la chapelle, représentation physique, sur un tombeau élévé de terre, des chefs de la lignée sous la forme de sculptures dont la peinture devait accroître le réalisme. L'instauration de la procession le jour de l'obit des différents membres de la famille peut elle-même apparaître comme une copie de la procession qui le jour de l'obit du président de Morvilliers devait après la célébration se rendre du choeur au tombeau du fondateur, y chanter plusieurs oraisons avant de s'en retourner en entonnant une antienne à saint Martin." (G. Eldin)

Cette commande participe d'une stratégie commémorative de cette famille de marchands de draps de Troyes venant d'accéder à la noblesse, associant l'acquisition d'une chapelle privative au chœur même de Notre-Dame en 1443-1444 (par Jean II, archevêque de Reims, Guillaume, chancelier de France, Jacques patriarche et évêque d'Antioche, et Louis bailli de Troyes), la commande d'un mausolée de Jean I et son épouse en cette chapelle vers 1449, diverses donations, comme le don le 12 juin 1456, à la date de la mort de Michelle de Vitry, de 200 écus d'or pour fonder un anniversaire à Notre-Dame.

C'est là un privilège insigne :

"Lorsque les chanoines de Paris furent de plus en plus nombreux à se faire enterrer dans la cathédrale, l'inhumation des laïques y demeura exceptionnelle. Les deux cas que nous avons cités pour le XIVe siècle sont uniques. Unique aussi celui de la famille Jouvenel des Ursins au XVe siècle. A notre connaissance, Elizabeth de Hainaut, Pemelle épouse de Galeran le Breton, Pemelle épouse de Pierre Mulet et Michelle de Vitry furent ainsi les quatre seules femmes inhumées à Notre-Dame du XIIe au XVe siècle. Toutes ne le furent que dans la tombe de leur époux."

"Les autres fondateurs laïques de chapellenies ne semblent pas avoir prétendu se faire inhumer dans la cathédrale, soit qu'ils disposassent déjà d'un sépulcre familial dans une autre église ou un cimetière parisien, soit qu'il leur apparût que l'inhumation sous les voûtes de la cathédrale n'était pas ouverte à des gens de leur qualité. Observons que l'iconographie des trois tombeaux connus de laïques inhumés alors à Notre-Dame, ceux de Pierre Mulet [  ou Millet, en 1329,dans la chapelle Saint-Jean-Baptiste-Sainte-Marie-Madeleine. cf.Bibl. Nat Est., Pe 11 a rés. ], de Jean Jouvenel et de Guillaume Jouvenel, veut marquer leur appartenance à la catégorie sociale des chevaliers. Ils ne sauraient être confondus avec de simples bourgeois de Paris." (G. Eldin)

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Les chapelles du choeur de la cathédrale Notre-Dame avec leurs sépultures, selon G. Eldin.

 

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Détail : la chapelle Saint-Rémi dans le déambulatoire du chœur, et ses sépultures du XIV et XVe siècles (G. Eldin)

 

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Pour citer encore Grégoire Eldin,

"Ce grand tableau mesurant 3,50 x 1,65 m porte le numéro 15 dans le catalogue des peintures françaises des XIVe au XVIe siècles dû à Charles Sterling et Hélène Adhémar, Musée national du Louvre. Peintures ; école française, XIVe et XVIe siècles, Paris, éd. des Musées nationaux, 1965. Il ne fait pas de doute que ce tableau a bien orné la "chapelle des Ursins". Sa présence y est du moins attestée durant le XVIIIe siècle ; vers 1722, le manuscrit du Musée Notre-Dame note en effet que trois prédécesseurs de l'actuel marquis de Trainel sont enterrés dans la chapelle, "ce que les curieux peuvent voir et examiner facilement parce qu'on a nettoyé et donné une nouvelle couleur à un tombeau élevé de trois pieds de terre avec les statues et un tableau où les plus considérables de la famille sont peints. Il y a aussi quelques tombes de cuivre sur le pavé de la chapelle". Au milieu du siècle, Charpentier signale lui aussi cette peinture, dont il indique les mensurations, onze pieds de long sur cinq pieds de haut, qui correspondent bien à celles du tableau conservé. Plusieurs questions demeurent : on ne sait encore qui en fit la commande, ou quand il fut accroché pour la première fois en la chapelle et à quel emplacement. Le plan de la cathédrale publié par Charpentier place l'autel de cette chapelle au pied de la fenêtre et rien ne porte à penser que cet emplacement ne soit pas celui d'origine.

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La position du tombeau et des priants de Jean Jouvenel et Michelle de Vitry, le long du mur occidental, tournés vers l'autel, tels que les représente le dessin exécuté pour Gaignières, semble logique. Il serait tout aussi naturel que le tableau ait regardé l'autel, en étant placé en arrière ou à côté du tombeau. Le dessin du tombeau de la collection Gaignières ne l'y montre pas, bien qu'une autre pièce de ladite collection représente ce tableau et le signale conservé en la chapelle Saint-Rémi (Bibl.nat., Est., Oa 15 rés., fol. 30). Le tableau pourrait encore, comme l'a proposé Maurice Vloberg (cité par H. Kraus, Notre-Dame's vanished médiéval glass, dans Gazette des Beaux-arts, t. LXVIII, n°1172 (septembre 1966), p. 140 et suiv.), avoir été offert pour orner une autre partie de la cathédrale,en particulier le sanctuaire. Il pourrait avoir été replacé dans la chapelle lors de la réalisation du vœu de Louis XIII. H. Kraus indique que le dessinateur de Gaignières a noté que ce tableau était même la copie d'une tapisserie exécutée pour décorer le sanctuaire, ce que suggère le tableau lui-même. On observera que le chancelier Guillaume Juvénal des Ursins (dixième personnage en partant de la gauche) est représenté en avant de ses frères et soeurs et muni comme ses parents d'un prie-dieu." 

D'après l'une de leurs requêtes, le mur en avant duquel serait placé le tombeau devait également faire l'objet d'une peinture ("Et dessus y faire une representacion sur une tumbe eslevee ou seront mises et apposées les representacions en ymages du feu seigneur et de ladite dame. Et de consentir que ledit costé de mur de ladite chappelle ilz peussent et puissent faire peindre a leur plaisir et faire changer les voirrieres d'icelle chappelle se bon leur sembloit". Les témoignages transmis notamment par la collection Gaignières ne sont peut-être qu'une vision partielle de la réalité médiévale.

Dans la supplique lue en chapitre le 3 mars 1442, les Jouvenel demandent avant tout de pouvoir disposer de la chapelle comme d'une sépulture :

" C'est ce que les heritiers de feu Jehan Jouvenel a son vivant seigneur de Treynel requièrent pour le fait de sa sépulture. Premièrement requièrent qu'il plaise a messeigneurs de l'eglise de leur bailler la chapelle d'emprés celle de Saint Crespin du costé de ladite chapelle de Saint Crespin pour faire une representacion dudit feu de Treynel et de madame sa femme et puissent ensepulturer oudit lieu le corps dudit feu seigneur et cellui de ladite dame après son trespas et aussi desdits heritiers et des leurs qui vouldront la eslire leur sépulture et que chacun jour soyt chantee en ladite chapelle une messe basse cestassavoir le lundi du Saint Esperit, le mardi de Requiem et le mercredi de Notre Dame, le jeudi du Saint Esperit, le vendredi de Requiem, le samedi de Notre Dame et le dimenche du jour. Et que le corps de l'eglise soy chargé de faire dire et continuer ladite messe et lesdits heritiers feront reparer et habiller ladite chapelle et la garniront de oumemens et vestemens. "

Acte en date du 14 juin 1443 : "Premièrement requièrent avoir la chapelle de Saint Remy et le costé dextre joignant du pillier pour la faire une volte en façon de sépulcre et dessus faire une representacion sur une tombe ou seront les ymages ou representacions desd. seigneur et dame" ; "et de consentir que led. costé de mur de lad. chappelle ilz peussent et puissent faire peindre a leur plaisir et faire changer les voirrieres d'icelle chappelle se bon leur sembloit".

"A la messe quotidienne instituée par le contrat du 14 juin 1443, l'un des fils de Jean Jouvenel, Guillaume, chancelier, ajoute en 1469 la célébration par les enfants de choeur et leur maître, le 14 de chaque mois, dans la chapelle Saint-Rémi, où il demande à être inhumé, des vigiles, des vêpres des défunts et le lendemain, c'est-à-dire le 15, de la messe des apôtres, célébrée en l'honneur de saint Guillaume des Déserts. Après la mort du chancelier, cette messe mensuelle sera transformée en obit célébré le quantième correspondant à la date du décès (Guillaume Jouvenel avait fondé en 1460 une messe solennelle de saint Guillaume célébrée chaque année le 15 mars dans le choeur et devant être transformée à sa mort en obit (Bibl. nat., ms lat. 5185 c.c., éd. Guérard, t. IV, p. 40-42). La deuxième fondation, célébrée en la chapelle, s'ajouta à la première (acte passé le 30 janvier 1369 (n. st.), ibid., p. 42-43).. Guillaume mourut en juin 1472 et fut effectivement inhumé dans la chapelle familiale. En 1481, une procession fut en outre instituée à l'issue des obits de Jean Jouvenel, de Michelle de Vitry et de leur fils Jean. Ces jours là, les clercs assemblés dans le choeur devaient, après la célébration de l’obit et la procession de l'Ave Regina qui se faisait chaque jour avant la grand’messe, se rendre en chantant devant la chapelle Saint-Rémi pour y accomplir une station. Plusieurs oraisons et psaumes étaient alors récités sous la conduite du prêtre devant célébrer la grand'messe du jour. La procession faisait ensuite le tour du choeur en chantant le répons « Sancte Remigi» . Bien avant l'arrivée des Jouvenel à Paris, saint Rémi avait été le patron de cette chapelle. Nous ne croyons pas que ce fut pour cette raison que les héritiers de Jean Jouvenel demandèrent au chapitre de pouvoir y faire leur sépulture. Les termes de leurs diverses suppliques ne montrent pas qu'il connaissent forcément le nom de cette chapelle, qu'ils désignent à plusieurs reprises par le nom de chapelles voisines. Mais les superbes carrières qui menèrent deux de ces Champenois à la tête de la province ecclésiastique de Reims et le sens aigu du culte des saints qui caractérise la deuxième moitié du XVe siècle ont ainsi contribué à restituer au saint patron de cette chapelle une réalité liturgique. " (G. Eldin)

La chapelle était un lieu de sépulture pour le couple fondateur, pour leur fils Guillaume, puis  pour François Jouvenel des Ursins, baron de Trainel, seigneur de Doue et de La Chapelle-en-Brie, mort le 20 avril 1547, et de sa femme Anne, dame d’Armenonville, morte en 1561 (tombe de cuivre à leur effigie au milieu de la chapelle Bibl. nat., Est., Pe 9 rés) ; de  Jean des Ursins, évêque de Tréguier, mort le 4 novembre 1566  ; de Christophe des Ursins, marquis de Trainel, gouverneur de Paris et d'Ile-de-France, seigneur de La Chapelle, de Doue et d'Armenonville, chevalier des ordres du roi, pour lequel un obit solennel suivi d'une station en la chapelle des Ursins fut fondé en 1588, et devant la chapelle, tombe de pierre à l'effigie de Louis Jouvenel des Ursins, conseiller en Parlement, chanoine de Paris, archidiacre de Champagne en l'église de Reims, mort le 23 novembre 1520. (encore G. Eldin)

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Je m'interrogerai  dans un deuxième article, à la suite de H. Kraus, sur la participation (avérée) des Jouvenel au décor de la chapelle. J'étudierai  ce décor, partiellement mais précisément visible sur la peinture qui nous intéresse, avec notamment la série de vitraux qu'ils pourraient avoir commandés.

 

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Représentation des donateurs au XVe et XVe siècle.

a) sur les vitrauxSur les vitraux anciens, les donateurs se font représenter en couple, madame derrière monsieur, ou monsieur à gauche et madame à droite ... Les nobles ou les marchands  font figurer leurs armoiries, ou leurs emblèmes.

https://www.lavieb-aile.com/2016/04/les-vitraux-anciens-de-l-eglise-saint-etienne-de-beauvais-iii.html

https://www.lavieb-aile.com/2015/06/le-vitrail-d-engrand-leprince-de-la-cathedrale-de-beauvais-vitrail-dit-de-roncherolles-i-generalites.html

https://www.lavieb-aile.com/2018/11/la-verriere-de-l-apparition-du-christ-a-madeleine-de-l-eglise-notre-dame-de-louviers.html

https://www.lavieb-aile.com/article-les-vitraux-de-plogonnec-i-saint-sebastien-95903456.html

https://www.lavieb-aile.com/2017/11/les-verres-roses-des-vitraux-datant-vers-1500-de-l-eglise-saint-fiacre-de-guengat-la-baie-4.html

https://www.lavieb-aile.com/article-les-vitraux-anciens-de-l-eglise-d-ergue-gaberic-123229458.html

...ou en famille, et alors, souvent, le père de famille se met à gauche devant ses nombreux fils et la mère de famille de l'autre côté, devant ses filles.

 

https://www.lavieb-aile.com/2016/04/les-vitraux-anciens-de-l-eglise-saint-etienne-de-beauvais-baie-n-18-vie-de-saint-eustache.html

https://www.lavieb-aile.com/2018/10/le-vitrail-de-romain-buron-baie-21-de-la-collegiale-de-gisors.html

https://www.lavieb-aile.com/2018/11/la-verriere-de-saint-claude-de-l-eglise-de-louviers-1.html

Parfois, un noble, un chanoine ou évêque sont  représentés seuls.

https://www.lavieb-aile.com/2018/11/la-verriere-de-saint-claude-de-l-eglise-de-louviers.html

https://www.lavieb-aile.com/2018/10/la-baie-1-de-1460-1480-et-de-1500-1510-marie-madeleine-de-l-eglise-saint-lo-de-bourg-achard.html

https://www.lavieb-aile.com/2019/11/les-vitraux-du-xive-siecle-de-la-cathedrale-d-evreux.vii.la-baie-207-1325-1329-offerte-par-le-chanoine-raoul-de-ferriere.html

https://www.lavieb-aile.com/2019/11/les-vitraux-du-xive-siecle-du-choeur-de-la-cathedrale-d-evreux.x.la-baie-202-vers-1335-un-couronnement-de-la-vierge-offert-par-l-eve

b) Parmi les peintures murales du XVe siècle, celles de Merléac, ou de Kermaria an Iskuit, en Côtes d'Armor, montre une famille entière, un lignage où le couple premier est suivi des descendants, par couple. Voir aussi Mesnard-la-Barotière.

https://www.lavieb-aile.com/2017/09/la-chapelle-saint-jacques-a-merleac-22-les-peintures-murales.html

https://www.lavieb-aile.com/2023/10/la-peinture-murale-de-la-chapelle-seigneuriale-de-kermaria-an-iskuit.html

https://armma.saprat.fr/monument/mesnard-la-barotiere-eglise-saint-christophe/

c) En peinture sur bois, le meilleur exemple est le tryptique de l'église Saint-Jacques de Bruges par Hans Memling en 1484 :

https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/7/7a/Hans_Memling_-_Triptiek_van_Willem_Moreel_%281484%29.jpg/2560px-Hans_Memling_-_Triptiek_van_Willem_Moreel_%281484%29.jpg

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Bref (si je puis dire), on a compris que mon but ne sera pas d'être succinct...

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La famille Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

La famille Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

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1 et 2. Jehan Juvenal des Ursins chevalier seigneur et baron de Trainel conseiller du roi et damme Michie de Vitry.

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La famille Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

La famille Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Le tableau de la famille Jouvenel des Ursins au musée de Cluny.

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"La famille Jouvenel des Ursins, qui avait son hôtel particulier sur l’Île de la Cité, avait élu sa sépulture dans la cathédrale Notre-Dame et plus précisément dans la chapelle Saint-Rémi (actuelle chapelle Saint-Guillaume), située à la sixième travée du déambulatoire du chœur, sur le côté sud."  (M. Ferrari)

"En 1443 Michelle de Vitry avait obtenu le droit de sépulture dans la chapelle par le chapitre pour elle et pour sa postérité : une concession plus qu’extraordinaire, à cette époque, pour des laïcs. Elle avait ainsi obtenu l’autorisation à faire « au joignant dudit mur une voute en façon de sepulture (un enfeu, donc), et dessus une représentation sur une tombe eslevée, où seroient mises et apposees les representation en images dudit feu seigneur et de la dite dame, et de faire peindre a leur plaisir le dist costè du mur, et faire changer les verrieres d’iceluy, se bon leur sembloit » (doc. cit. par Demurger 1997, p. 41). Michèle put alors faire rapatrier le corps de son mari, qui était mort à Tours, et réaliser le tombeau que devait accueillir sa dépouille et celle de son conjoint."  (M. Ferrari)

 

"A la fin du XIXe siècle, la chapelle abritaient encore la tombe de Guillaume des Ursins († 1472) et celle de François des Ursins († 1547) et de sa femme, Anne l’Orfèvre (voir ci-dessous). Le mausolée de Jean Jouvenal des Ursins († 1431), prévôt des marchands de Paris, et de sa femme, Michelle de Vitry († 1456), avait été en revanche déjà démantelé. Seulement les statues des deux défunts, représentés en prière, avaient été sauvegardées : initialement déposées à Versailles, elles ont pu regagner leur emplacement d’origine dans l’église Notre-Dame en 1955, installées sur un socle qui suggère leur emplacement surélevé originaire (les têtes des deux priants ont été refaites aux XIXe siècle)." (M. Ferrari)

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En effet, le tableau formait l'exacte correspondance du mausolée où Jean de Jouvenel et Michelle de Vitry figuraient en donateurs, sculptés dans la pierre, dans la même posture et la même tenue que sur le tableau.

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L'aspect actuel du mausolée (et de la chapelle saint Guillaume de la cathédrale Notre-Dame) est celui-ci :

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cliché Wikipedia Denys Jarvis

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La famille Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

La famille Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

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1. Jean Jouvenel des Ursins, prêvôt des marchands de Paris (1388), président à mortier au parlement de Paris, décédé le 1er avril 1431 à Tours.

 

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"La généalogie de cette famille commence avec Pierre Jouvenel des Ursins (attesté comme marchand drapier à Troyes en 1360) et dame d'Assenay, parents de Jean Jouvenel des Ursins. 

 

"Né entre 1350 et 1360, après avoir achevé les études en droit à Orléans et à Paris, Jean Jouvenel fut avocat à Troyes, conseiller au Châtelet (1381) et avocat au Parlement de Paris (1384).  L’année 1388 représente un tournant décisif dans la carrière de Jean Jouvenel : Charles VI établit la charge de garde de la prévôté des marchands de la ville de Paris, qui avait été supprimée après la révolte des Maillotins en 1383, et Jean fut nommé garde prévôt des marchands. Il occupa brillamment cette fonction, parvenant à rétablir une partie des privilèges parisiens révoqués en 1383. En 1400 il laissa cette charge et fut nommé avocat du roi au Parlement. Anobli en 1407, il fut chancelier du dauphin Louis (1413) et président de la Cour des aides (1417). Proscrit par les Bourguignons qui prirent le pouvoir à Paris (1418), Jean Jouvenel s’enfuit à Poitiers avec le nouveau dauphin Charles (le futur Charles VII). Là, il devint en 1419 président au Parlement de Paris (établi à Poitiers) et ensuite de celui de Languedoc à Toulouse (1420), jusqu'à sa mort en 1431.

En 1436, Michelle de Vitry et leurs onze fils revinrent à Paris, qui était de nouveau sous le contrôle royal. " (Wikipedia)

 Le couple a eu seize enfants entre 1387 et 1410. Deux garçons sont morts au bout de quelques jours et trois filles ont sans doute aussi disparu avant 1445 (à 9, 11 et 21 ans). 

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Jean de Jouvenel est agenouillé, sur un coussin de velours noir à glands dorés, devant un prie-dieu recouvert de la même étoffe d'or damassée que la tenture, mais à rinceaux. Il est tourné vers notre gauche, donc vers l'est —là où devait se dresser l'autel de la chapelle. Ses mains sont jointes (comme tout donateur), il porte une bague en or à l'annulaire gauche. 

Son heaume, englobant le cou, à visière, est posé sur le prie-dieu. La cotte de maille est visible , couvrant le cou. L'armure est bien visible en partie basse, avec des solertets à la poulaine et des éperons à tige longue ( 20 ou 30 cm?), à molette à huit pointes. L'épée dans son fourreau est suspendue à la ceinture côté gauche.

La cuirasse est recouverte du tabard à ses armes (empruntées aux Orsini !), bandé d’argent et de gueules de six pièces, au chef d’argent soutenu d’or et chargé d’une rose de gueules.

Il est probable que le juriste Jean Jouvenel des Ursins n'ait jamais porté cette tenue de chevalerie, qui serait de pure convention.

Il porte un anneau d'or sur l'annulaire gauche (le seul visible).
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Le sol (qui pourrait témoigner du sol réel de la cathédrale) est bicolore noir et blanc, à petits carreaux formant des dessins géométriques.

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N.B Son signet de 1393 porte un chien accroupi, portant un manteau à ses armes. Celui de 1396, est très semblable, mais l'animal est interprété comme étant un ours assis. Son sceau utilisé en 1390-1394 porte un écu bandé  de six pièces, au chef chargé de trois roses, penché, timbré d'un heaume de profil cimé d'un chien accroupi, supporté par deux lévriers [colletés].

http://www.sigilla.org/sceau-type/jean-jouvenel-signet-3746

http://www.sigilla.org/sceau-type/jean-jouvenel-ursins-sceau-33684

http://www.sigilla.org/sceau-type/jean-jouvenel-sceau-armorial-3745

La famille Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

La famille Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

La famille Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

La famille Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

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Le livre de prière de Jean Jouvenel est minutieusement représenté, comme celui de son épouse et, plus loin, celui de son fils Guillaume, que j'étudierai plus longuement.

Il est ouvert sur le verset du psaume 69 :2 Deus in adiutorium intende  (Dieu venez à mon aide) et de son répons D[omi]ne ad adiuvandum [ me festina] (Seigneur, hâtez-vous de me secourir).  C'est la classique prière d'introduction des heures de Notre-Dame (ou des heures de la Croix) tirée du premier verset du psaume 69  et de son répons , qui est  suivi de la doxologie trinitaire mineure : Gloria Patri et Filio et Spiritui sancto. Sicut erat in principio, et nunc, et semper, in sæcula sæculorum. Amen.

https://gregorien.info/chant/id/1965/0/fr

Heures de Jeanne de France  : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b8571085n/f84.item

Heures de Guillaume de Jouvenel : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b10532604q/f13.item

On lit ensuite, sur la deuxième page l'initiale O rouge, suivi de tenpore, qui pourrait difficilement correspondre à "et in omni tempore corpus meum et animam meam". La forme orthographique tenpore est attesté dans l'épigraphie.

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La famille Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

La famille Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

La famille Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

La famille Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

La famille Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

La famille Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

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2. Michelle de Vitry, décédée le 12 juin 1456.

 Michelle de Vitry, membre d'une famille de fortune assez récente réalisée dans le commerce, et fille de Michel de Vitry, seigneur de Goupillières et de Jeanne Le Picard, épousa Jean Jouvenel le 20 juin 1386. Ils se feront réciproquement dons de leurs biens par présuccession le 15 novembre 1403: Michèlle hérita donc des biens de Jean.

Elle eut 16 enfants, dont 11 survécurent ; la plupart furent  baptisés à Saint-Landry à Paris. 

Elle fut, avec ses enfants, la commanditaire de la chapelle du chœur de Notre-Dame :

"C'est le vendredi 14 juin 1443 que Michelle de Vitry et ses enfants obtinrent du chapitre de Notre-Dame la chappelle Monsieur Sainct-Remy, fondée en ladite église, et le côté dextre joignant du mur en icelle chappelle pour sepulturer et enterrer les dits feu seigneur de Traynel, leur père, et la dite dame, leurs enfants et héritiers et ceux qui doresnavant descendroiont de coux d'entre eux qui estoient et seroient mariez et de leur posteritez et lignées qui toutesfois y voudroient estre sepulturez et enterrez : ensemble permission de faire au joignant dudit mur une voûte en façon de sépulture et dessus une représentation sur une tombe eslevée où seroient mises et apposées les représentations en images du dit feu seigneur et de la dite dame, et de faire peindre à leur plaisir le dit costé du mur et faire changer les voirrières d'iceluy, ai bon leur sembloit ». D. Godefroy, Hist, de Charles VI, annotations, p. 622. L'acte est passé devant Pierre Choart et Jean Franchois, clercs, notaires du roi au Chàtelet de Paris, sous le sceau du garde de la prévôté de Paris. Cette concession était faite moyennant l'abandon par indivis au chapitre de la moitié d'un moulin et de ses appartenances nommé « le moulin des chambres-maistre-Hugues » qui était situé sur la Seine, près de la rue de la Tannerie « à l'opposite du derrière de l'hostel dudit feu seigneur de Treynel » et en outre d'un certain nombre d'autres revenus s'élevant à la somme de 4 livres 14 sous parisis de rente. Le tout faisait partie de la censive de St-Magloire : le 3 août 1456, Jean, « humble abbé de l'église et monastère de Monseigneur Magloire à Paris, et tout le couvent de ce même lieu », donnaient acte aux doyen et chapitre de Notre-Dame de Paris, de l'amortissement de ces rentes. Arch. nat., L 607, n» 12, parch. Les revenus du moulin de chambre-maistre-Hugues appartenaient à Jouvenel depuis 1414, époque à laquelle (31 juillet), il les avait achetés à Pierre et Jean Jouans, ainsi qu'une propriété sise à Vanves, appelée les Treneaux et un certain nombre d'autres biens d'une valeur totale de cent livres tour- nois de rente. Ces cent livres avaient été données en dot par Jouvenel à sa fille Jeanne, lors de son mariage avec Nicolas l'Eschalat : les deux époux s'étaient fait don mutuel de leurs biens. Le 23 juin 1439, Michelle de Vitry et ses entants rachetèrent ces mêmes revenus pour les céder quatre ans après au chapitre de Notre-Dame de Paris. Arch. nat., Ibid.y fol. 1" (L. Battifol)

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Michelle de Vitry est représentée en veuve, la gorge couvert d'une guimpe blanche, portant une coiffe à long voile et un habit (robe et manteau) noir ourlé de blanc. La coiffe à plis cassés forme deux légères cornes.

Ses mains jointes portent deux anneaux, l'un, avec une pierre rouge, sur le majeur gauche, l'autre, avec une pierre indistincte ou claire, sur l'auriculaire droit.

Est-elle la commanditaire de la peinture ? Celle-ci a-t-elle été terminée de son vivant ?

Les armoiries de la famille de Vitry n'apparaissent pas, comme cela se fera sur ces scènes de donateurs, sur la robe de l'épouse, ce qui se conçoit bien ici. Mais l'écu mi-parti  se trouve présenté par un ange sur la retombée de voûte de la chapelle peinte, juste au dessus de la crosse de son fils Jehan II. Les armes de Vitry sont d'azur à la fasce de trois losanges d'or accompagnée de trois merlettes du même. On  voyait aussi l'écu mi-parti sur le soubassement du mausolée.

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Photo Lavieb-aile 2023

 

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L'oncle de Michelle de Vitry, Thibaud de VITRY (+ 23 mars 1464), chanoine de Paris, trésorier de l'église d'Angers, est mentionné comme conseiller en Parlement à partir de novembre 1412. Il fut commissaire du roi en Limousin pour faire payer l’aide. En 1448, il fait don à la cathédrale de Paris  d'une tapisserie de haute lice en cinq parties représentant quinze histoires de la Vierge devant servir à l’ornement des stalles du choeur. En 1453, il offre une cloche appelée Thibaud, devant sonner le samedi. Il fonde une messe de l'Annonciation. Il fut enterré dans la nef de la cathédrale. (G. Eldin)

 

 

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La famille Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

La famille Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

La famille Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

La famille Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

La famille Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

La famille Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

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Le livre est en tout point semblable au précédent, avec la même couverte d'étoffe noire  perlées aux coins, et les deux languettes du fermoir ; mais celle du haut est rabattue, et celle du bas sert de marque-page. La languette ou patte est sans doute en cuir, de couleur verte.  L'agrafe en  d'or est ouvragée autour d'une perle, et un anneau permet la fixation d'un cordon violet, qui devait être noué lors du rangement.

Sur le livre, les cinq lettrines enrichies de rinceaux sont celles du D  de Deus, d'un O (Ondo?) ou Q, d'un D (Deus?), et enfin d'un O, sous réserve.

Je reconnais les trois premiers mots de Deus in adiutorium intende , puis je perds le fil.

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La famille Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

La famille Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

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3. Révérend père en Dieu messire Jehan Juvénal des Ursins,   docteur en lois et décret en son temps évêque et comte de Beauvais et depuis évêque et duc de Laon, comte d'aussi, pair de France, Conseiller du roi.

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Fils de Jehan I et de Michelle de Vitry, Jehan II, né le 14 septembre 1438 à Reims, étudia le droit civil et canonique, et fit une carrière dans les ordres et dans la diplomatie.

Il étudie le droit civil et canonique et devient avocat à Paris. En 1416, il est nommé maître des requêtes de l’hôtel du Dauphin et conseiller du roi. Puis, Charles VII le nomme avocat général au parlement en 1425. En 1429, il est chapelain du roi, archiprêtre de Carmaing, doyen d'Avranches, il succédera en 1432 à Pierre Cauchon en tant qu'évêque de Beauvais. En 1444, il est nommé évêque de Laon. Après la réalisation de cette peinture exécutée vers 1445,  il remplacera, en 1449, son frère Jacques à la tête de l'archevêché de Reims. Il présidera en 1456 le procès chargé de la réhabilitation de Jeanne d'Arc. Le 15 août 1461, il sacrera le roi Louis XI de France en la cathédrale de Reims. Il fut aussi historien et auteur de la Chronique dite de Jouvenel des Ursins : Histoire de Charles VI. Roy de France, et des choses mémorables advenues durant quarante-deux années de son règne depuis 1380 jusqu’en 1422.

Jean Juvenal des Ursins fut aussi l’un des conseillers les plus écoutés de Charles VII qui lui confia plusieurs missions diplomatiques. Il joua un rôle important dans la capitulation de Rouen (reprise aux Anglais par Charles VII le 10 novembre 1449). Le 24 septembre 1461, il ne put contenir la mutinerie des rémois contre les receveurs des impôts, dite révolte de la Miquemaque. 

Tenu à l’écart par Louis XI, il meurt à Reims, dans son palais archiépiscopal, le 4 juillet 1473.

C'est Jean II Jouvenel des Ursins qui latinisa le nom de Jouvenel en Juvénal et ajouta le nom d'Ursins (Orsini). La famille soutenait qu'elle descendait de ces illustres italiens. L'ours devient ainsi un emblème qui se retrouve notamment sur le décor des livres.

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L'évêque porte, en tant qu'évêque de Laon, la crosse et la mitre, et  une chape pluviale, en étoffe d'or damassée, et  dont les parements sont brodés des figures des douze apôtres, comme ces chapes que j'avais étudié à Burgos ou sur un évêque breton d'un vitrail de Saint-Nic (Jean du Largez).

Ses mains jointes portent les chirothèques (gants épiscopaux) ornés sur le dos d'une broderie (ou plaque de métal) en losange, aux manches larges lestées de glands de passementerie, portant une bague émeraude.

On comparera cette tenue (les figures d'apôtres, la mitre précieuse, etc) avec celle de Saint Donatien premier évêque de Reims dans la Vierge au chanoine van der Paele de Van Eyck réalisé en 1436.

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La famille Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

La famille Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Jean II Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Jean II Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Jean II Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Jean II Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Jean II Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Jean II Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

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4 . Jehanne Juvenal des Ursins qui fut conjointe par mariage avecque noble maistre Nichole Consart [pour Eschallart], conseiller du roi.

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Jeanne I Jouvenel des Ursins épousa Nicolas Eschallart, conseiller en 1418 au Parlement de Poitiers (Jean Jouvenel étant doyen des conseillers) ; il décéda en mars 1422. À sa mort, ses parents héritèrent d'elle, ce qui situe cette mort avant 1431.

Elle figure ici à titre posthume, et en figure de veuve, comme sa mère, et les deux figures sont des copies conformes. Mais elle s'en distingue par sa bague portée à l'annulaire gauche, un anneau d'or portant une pierre (bleue?) sertie dans de l'or.

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Jeanne I Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Jeanne I Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Jeanne I Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Jeanne I Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Jeanne I Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Jeanne I Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

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La suite de la famille...

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La famille Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

La famille Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

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5.Messire Loys Juvenal des Ursins, chevalier conseiller et chambellan du Roy et bailli de Troyes.

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L'armure et le heaume de Louis Jouvenel des Ursins (1393- est semblable à celle de son père, mais est elle plus crédible chez ce soldat qui fut prisonnier  des Anglais en 1420 après le siège de Melun, fut libéré en 1423 grâce à une caution de 300 livres versées par le roi  puis combattit dans les troupes royales de Charles VII, comme son frère Denys (n°8). On ignore la date de son décès, et les renseignements sont assez pauvres sur sa biographie.

L'image elle-même, par la reprise de la figure paternelle, n'apporte rien à notre analyse. Il porte la même bague d'or à l'annulaire gauche.

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Louis Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Louis Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Louis Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Louis Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Louis Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Louis Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Louis Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Louis Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Louis Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Louis Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

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6. Dame Jehanne Juvenal des Ursins qui fut conjointe par mariage avec Pierre de Chailly escuier et depuis à messire Guichart, seigneur de Pelvoisin, chevalier.

7. Demoiselle Eude Juvenal des Ursins qui fu conjoincte par mariage à Denys Demares escuier seigneur de Doué.

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Rien ne distingue les deux sœurs : l'artiste reste fidèle à son principe, utiliser des "clones" sans caractères distinctifs, hormis le fait que ces deux femmes ne sont pas figurées en veuves ou en religieuses, mais dans la splendeur de leurs atours. Elles portent, sur un front et des tempes épilés à l'extrême une coiffe à hénnins  "papillon" (déjà démodés en 1455 selon Demurger) dont les cornes font presque deux fois la hauteur du visage, soit plus de trente centimètres. La coiffe est largement dotée de perles et de pierreries bleues noires et rouges sous un voile doré et transparent. Elles portent également le même collier ou s'enfilent des pièces d'or portant une pierre — rubis (la pierre de l'amour) ou saphir, "la perle du ciel"— entouré de quatre perles — la pierre de la rosée—. Les pierres sont rondes ou ovales ou lobées, et non taillées, la taille en diamant n'apparaissant qu'après 1475.

De même , les deux femmes portent les mêmes bagues,  sur le majeur, l'annulaire et l'auriculaire (des deux mains). Sur l'anneau en or, le majeur s'orne d'une grosse perle, l'annulaire et l'auriculaire de pierres plus petites, et, pour Eude, de couleur peut-être bleutée .

Valérie Gontero-Lauze (Belles Lettres, 2016)  nous incite à examiner l'anneau de l'annulaire : "En attendant d’être remplacée par l’alliance, la bague de fiançailles se porte à l’annulaire gauche, d’où partirait la vena amoris, veine de l’amour qui court jusqu’au cœur, siège des sentiments et de la passion amoureuse. Porter un anneau ou une bague à ce doigt signifie que son cœur est officiellement déjà pris, que l’on est marié ou sur le point de l’être. L’anneau et la pierre peuvent aussi servir à protéger cette précieuse veine – le diamant est en effet la pierre de l’invincibilité." Nous ne pouvons ni affirmer, ni infirmer que les deux femmes, mariées,  portent un diamant à l'annulaire.

N'oublions pas la ceinture, qui elle aussi alterne les rubis et les saphirs entourés de perles. 

Chacune porte un surcot ouvert, doublé d'hermines , quoique le motif damassé de l'étoffe (soie?) sombre de l'une se distingue très légèrement de celle de l'autre. La robe, à décolleté carré, est rouge, brodé d'or, et revenant par un très large pan sur les avant-bras.

 

https://www.persee.fr/doc/ahess_0395-2649_1968_num_23_5_421989

https://lesbelleslettresblog.com/2016/10/12/les-pierres-du-moyen-age-apercu/

6. Jeanne II Jouvenel des Ursins , née le 24 janvier 1395, épousa Pierre Chailly puis Guichard d'Appelvoisin (Saint-Paul en Gâtines, 79, ca 1345-1445), seigneur du Bois-Chapeleau (La-Chapelle-Thireuil, 79), sans postérité. Elle demeurait principalement dans le Poitou, où elle gérait les biens des Appelvoisins et les intérêts de la famille . En 1456, Jacques évêque de Poitiers la choisit  comme principale exécutrice de son testament. Elle  décéda en 1473, et, en 1475, toute la famille Jouvenel vint devant le sénéchal de Poitou vint pour régler sa succession. Tous ses frères sont alors décédés mais sont présents tous ses neveux et nièces : les trois enfants de Guillaume, les quatre enfants majeurs de Michel, ainsi que sa veuve Yolande de Montbéron au nom de ses cinq enfants mineurs. (A. Demurger)

7. Eude [ou Odette] Jouvenel des Ursins épouse de Denis des Marés, seigneur de Doué-en-Brie. Je trouve sa date de naissance le 12 juillet 1396.

Alors qu'elle est décédée veuve, elle est représentée ici en tenue mondaine. Sa famille a hérité des propriétés et titres de l'époux, et la terre de Soignolles-en-Brie, au nord de Melun, est revenue à Guillaume (A. Demurger) puis/ou à Michel et son fils  François, seigneur de Soignolles.

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Jeanne II Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Jeanne II Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Eude Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Eude Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Jeanne II et Eude Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Jeanne II et Eude Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Jeanne II et Eude Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Jeanne II et Eude Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Jeanne II et Eude Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Jeanne II et Eude Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Jeanne II et Eude Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Jeanne II et Eude Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

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8. Denys Juvenal des Ursins escuyer eschanson de monseigneur Loys dauphin de Vienne et duc de Guyenne.

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Denis est né en 1397 : il est donc contemporain de Louis de Guyenne (1397-1415), fils de Charles VI, qui fut le troisième dauphin , décédé à 18 ans. On peut penser que Denis Jouvenel des Ursins est mort assez jeune, puisque vers 1455 le commanditaire de la peinture ne fournisse aucun autre titre à son sujet.

D'ailleurs, il ne porte aucune bague.

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Denis  Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Denis Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Denis  Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Denis Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Denis  Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Denis Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

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9. Sœur Marie Juvenal des Ursins religieuse à Poinssy.

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Elle est née le 27 août 1399. Elle fut religieuse au Prieuré de dominicaines de Saint-Louis de Poissy (Yvelines). Rien ne la distingue de sa mère ou de sa sœur Jeanne I, si ce n'est la posture humble de la tête et l'absence de bague. Elle ne porte pas l'habit des dominicaines.

Elle est citée parmi les anciens possesseurs du très fameux Bréviaire de Belleville BnF latin 10483, (tome I, partie hiver)  tout comme Guyonne, Michèle, Claude, et Marie Jouvenel des Ursins, après  le duc Jean de Berry et le prieuré de Saint-Louis de Poissy.

 

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Marie   Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Marie Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Marie   Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Marie Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

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10. Messire Guillaume Juvenal des Ursins chevalier et baron de Trainel en son temps conseiller du Roy, bailli de Sens et depuis Chancelier de France.

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C'est le personnage laïc le plus considérable de cette famille, et le seul de la fratrie à se faire enterrer dans la chapelle.

"Guillaume Jouvenel des Ursins, né le 15 mars 1400 à Paris et mort le 23 juin 1472, est un chancelier de France. Baron de Traînel par acquisition de son père en sa faveur vers 1412, puis sire de Marigny acquis vers 1446/1447 (son frère cadet Michel, 1408-1471, étant, lui, seigneur de Marigny-le-Grand ?), Vicomte de Troyes et bailli de Sens, seigneur d'Autry et St-Brisson en 1471, et de Perroy et La Motte-Jo(u)sserand par acquisition en 1446 et 1466. Fils de Jean Jouvenel des Ursins et de Michelle de Vitry, il épousa Geneviève, la fille de Macé Héron, d'où postérité 

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Il fit une brillante carrière politique. Il fut conseiller au parlement de Poitiers. Il s'occupa des finances concernant les guerres menées par Charles VII de France. De 1435 à 1440, il remplit les fonctions de bailli à Sens. Charles VII le nomme lieutenant du gouverneur du Dauphiné, fonction qu'il remplira de 1435 à 1440. Charles VII le nomme chancelier de France en 1445. Il fut chargé de l'instruction lors du procès de Jean II d'Alençon (Valois) en 1458. Il fut de nouveau chancelier de France sous Louis XI de France (1466)." (Wikipedia)

 

 

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Le chancelier Guillaume   Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Le chancelier Guillaume Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Le chancelier Guillaume   Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Le chancelier Guillaume Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

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La tombe de cuivre de Guillaume Jouvenel des Ursins.

 La tombe de Guillaume Jouvenel des Ursins, chevalier et seigneur de Trainel, conseiller en Parlement, lieutenant du Dauphiné puis bailli de Sens, mort en 1472 est en  cuivre et placée sous le marchepied de l'autel à gauche La plaque relevé par Gaignières Bibl. nat., Est., Pe 9 rés le représente gisant en deux figures sous deux tenues différentes, soit comme membre du Parlement, soit comme  chevalier et chancelier . Selon la longue inscription placée  autour de la tombe , on lit  : « Cy gist noble homme messire Guillaume Juvénal des Ursins, chevalier et seigneur de Treignel, lequel en son temps fut conseiller en la court de Parlement du très-sage et victorieux le roy de France Charles VIIe de ce nom. Depuis chevalier en voyage de son sacre et capitaine des gens d’armes puis lieutenant du Dauphiné, et après bailly de Sens et finalement le chancelier de France de l'an mil CCCCLXXII. Dieu ait l'ame de lui. »" (M.C.P.G. (Gueffier), op. Cit., p. 167, cité par Eldin). Les deux personnages de la tombe correspondent à ces deux temps de sa vie et ces deux fonctions de juriste ou homme politique, puis comme homme d'armes.

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"Guillaume était représenté, sur la gauche, habillé de sa tenue de membre du Parlement. Au-dessus de sa tête sont gravés une boîte à sceaux et le bonnet à mortier de velours noir utilisé par le président du Parlement, à fin d’indiquer les plus hautes charges occupées par Guillaume durant sa vie. Ce tombeau présente toutefois un deuxième portrait, resté longtemps mystérieux. L’arcade de droite encadre en effet un chevalier en armure, revêtu d’un surcot aux armes de la famille des Ursins et portant un poignard et une épée à la ceinture. [...]  Il est donc plausible que le deuxième portrait ne représente autre que le même Guillaume, comme le confirme le double portrait figurant dans une enluminure d’un célèbre manuscrit (Giovanni Colonna, Mare historiarum) lui ayant appartenu (Paris, BnF, ms. Lat. 4915, f. 21r). Avec ce double portrait Guillaume voulait donc mettre en évidence sa double carrière, en tant qu’homme d’armes et politicien et, peut-être, humaniste . Concernant le dispositif héraldique et emblématique figurant sur la plate tombe, nous remarquerons que des oursons – emblème de la famille qui, avec muselière et chaîne, tapissent également les folios du livre d’Heures de Guillaume (Paris, BnF, NAL ms. 3226 ; Reynaud 1999) – figuraient aux pieds des portraits du défunts, tandis que les armes des Jouvenel des Ursins étaient gravées d’une part et d’autre de leurs visages, aux deux côtés des jambes de celui en armure  et, suivant le schéma traditionnel, à l’intérieur de la bordure portant l’épitaphe, insérés dans des encadrements polylobés ."

Matteo Ferrari : https://armma.saprat.fr/monument/paris-notre-dame-chapelle-jouvenel-des-ursins/ .

Tombe en cuivre de messire Guillaume Juvénal des Ursins, capitaine des gens d'armes du roy, mort en 1472, le 24 juin, sur le marchepied de l'autel à gauche dans la chapelle des Ursins à droite du chœur de l'église de Notre-Dame

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Giovanni Colonna, Mare historiarum, Paris, BnF, ms. Lat. 4915, f. 21r

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Le chancelier Guillaume   Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Le chancelier Guillaume Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

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Mais sur cette peinture, rien ne distingue Guillaume de son père ou de ses frères en armure, si ce n'est une taille très légèrement supérieure, un peu plus de prestance, un détail (les bagues du pouce et de l'annulaire gauche et de l'auriculaire droit), et surtout le prie-dieu sur lequel un livre est ouvert.

Le chancelier Guillaume   Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Le chancelier Guillaume Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

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Le livre de prière.

 

Le livre est parfaitement réaliste, le tranchefil est bien visible, les tranches sont dorées, et deux rubans verts servant d'agrafes disposent de boucles d'or, perlées et munies d'un cordon tressé à pomme terminale.

Surtout, la reliure semble un drap en sac de transport, muni aux quatre coins d'une boule à franges de passementerie dorées : l'un des coins me semble plus long , pouvant permettre le blocage dans la paume lors du transport. Nous retrouvons un drap semblable, avec les mêmes boules à pompon, sur le portrait de Guillaume Jouvenel par Jean Fouquet en 1460-1465 (Louvre).

Les trois livres représentés sur cette peinture sont semblables et ouverts à la même page. Nous retrouvons les lettrines M, D, E, O et G, . On reconnait encore  le début de Deus in adiutorium intende , puis le in tenpore déjà présent sur le deuxième livre (in illo tempore est l'incipit de l'évangile de Luc), et enfin le mot final Gloriam ou plutôt Gloria in [secula seculorum]. Ainsi que  Et in avor tuum mei bonum res...

 

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Jean Fouquet - Portrait of Guillaume Jouvenel des Ursins vers 1460-1465. Remarquez les oursons tenant les blasons.

 

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Le chancelier Guillaume   Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Le chancelier Guillaume Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Le chancelier Guillaume   Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Le chancelier Guillaume Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Le chancelier Guillaume   Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Le chancelier Guillaume Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

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Guillaume Jouvenel des Ursins a commandé de nombreux manuscrits enluminés. Il est le commanditaire notamment, nous l'avons vu, d'un manuscrit du Mare historiarum de Giovanni Colonna (BNF, Lat. 4915), décoré de 730 miniatures par les artistes d'un atelier dirigé par un artiste qui tire son nom de son mécène : le Maître de Jouvenel.

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Guillaume de Jouvenel commanditaire vers 1446 de la "Mer des histoires" de Jean Colonna.

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https://fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_de_la_reliure_occidentale#/media/Fichier:Sachsenspiegel.jpg

https://mediaephile.fr/signets-marque-pages-pipes/

La BnF conserve un Livre d'Heures de Guillaume des Ursins , enluminé , le  BnF NAL 3226, avec onze miniatures en semi-grisaille par le Maître de Dunois dont 6 pour l'office de la Vierge,  des initiales ornées, et des bordures comportant systématiquement l'ours, souvent colleté de rouge, et doté d'une chaine, ou muselé, emblématique des Ursins, mais sans la reliure d'origine. On y lit dans un phylactère en marge une devise, Servite Domino in timore et exultate ei in tremore. Les initiales sont assez proches de celles des trois livres de cette peinture.

 

Ci dessous les initiales ornées des versets Deus in adiutorium meum intende Domine ad adiu...

 

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Livre d'Heures du chancelier Guillaume Jouvenel des Ursins BnF NAL 3226 folio 4v (Visitation)

 

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Livre d'Heures du chancelier Guillaume Jouvenel des Ursins BnF NAL 3226 folio 13v (Nativité)

 

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Il possédait aussi des tapisseries, dont celle, tissée en Flandres et conservée au Louvre, reprenant le motif des marges du livre d'Heures aux oursons affrontés au pied d'un arbre, reprenant son chiffre (un I et J gothique?) très présent sur la bordure du livre d'Heures et ses armes, associées à deux autres écus (Sydenhall ?). Voir aussi un fragment conservé au Louvre.

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© 1981 RMN-Grand Palais (musée du Louvre) Tapisserie : deux ours affrontés, chaînes au cou, se dressant chacun sur leurs pattes arrières, chacun reposant sur un tertre verte et fleuri. Au milieu de la composition, 3 écus armoriés dont un aux armes de Guillaume Jouvenel des Ursins

 

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La suite de la famille...

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La famille  Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

La famille Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

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11. Pierre Juvenal des Ursins escuier.

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Dans les documents concernant la famille Jouvenel; on n'entend plus jamais parler ni de Louis, ni de Denis ni de Pierre (A. Demurger). La mention "écuyer" laisse penser qu'il est mort avant d'occuper des charges plus honorables. Il ne porte pas de bague. Sa tête est fléchie, comme effacée.

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Pierre  Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Pierre Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Pierre  Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Pierre Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

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12. Mischiel Juvenal des Ursins escuier et seigneur de La Chapelle-Gaulthier en Bry.

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Michel Jouvenel des Ursins, seigneur de Doué (acheté en ruines en 1443 après la guerre de Cent ans), seigneur de la Chapelle-Gauthier, d'Armentière et de Soignolles, panetier du roi,  est bien connu. Il meurt en 1471, il est inhumé aux Cordelier de Troyes, ville dont il est le bailli de1455 jusqu'à 1461.

Il épousa le 25 novembre 1446 Yolande de Montberon. Son fils Jean , qui épousera Louise de Varie, reprendra le titre de seigneur de la Chapelle-Gauthier.

Il ne porte pas de bague : la peinture a-t-elle été réalisée avant son mariage ?

Il commanda avec son épouse un livre d'Heures en 1446, année de leur mariage [mais ce livre est daté de 1465-1470 par la notice]. Le BnF NAL 3113, réalisé à Troyes (les saints tourangeaux du calendrier sont particulièrement nombreux)   est enluminé par 9 grandes miniatures en grisaille par le Maître de Michel de Jouvenel, dont la carrière s'est effectuée entre Troyes et Langres . Les ours, colletés, des Ursins, associés à des lévriers colletés, sont présents dans les marges. On constate combien le verset Deus in adiutorum ... est associé à chaque épisode des Heures de la Vierge

Le blason mi-parti Jouvenel/de Montbaron est en folio 44v. Le blason plein des Montbaron est au folio 27v.

Le blason des époux Jouvenel/de Varie — de gueules à trois heaume d'argent est en  folio 141r.

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Visitation folio 27v

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Nativité folio 38v

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Apparition aux Bergers folio 44v
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folio 141v
Michel Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Michel Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Michel Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Michel Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

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13. Très révérend père en Dieu messire Jacques Juvenal des Ursins archevesque et duc de Reims, premier pair de France, conseiller du Roy et président en la chambre des Comptes.

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Né le 14 octobre 1410, Jacques Jouvenel des Ursins est décédé le 12 mars 1457 à Poitiers, à l'âge de 46 ans.

"Chanoine, puis président des comptes et trésorier de la Sainte-Chapelle. En 1441, Il est archidiacre de Paris. il devint en 1444 archevêque de Reims, dignité dont il se démit en 1449 en faveur de son frère aîné Jean II Jouvenel des Ursins après qu'il eut été institué patriarche d'Antioche par le pape Nicolas V. Le 5 novembre 1449, il se voit confier l'évêché de Poitiers, et le 30 du même mois, celui de Fréjus, dignité qu'il échangea contre celle de prieur de Saint-Martin-des-Champs à Paris.

Il fit une brillante carrière ecclésiastique mais fut tout aussi brillant dans la diplomatie. Premier pair de France, avocat du Roi au Parlement de Paris rétabli (1436), il remplira avec beaucoup de réussite les diverses missions à l'étranger qui lui furent confiées.

Il fut un négociateur non négligeable lors des États généraux de 1439 tenu à Orléans où, avec Louis Ier de Bourbon-Vendôme, le comte de Vendôme, il prôna la paix.

Il fut l'un des protagonistes qui permit la fin du Grand Schisme d'Occident en notifiant en avril 1449 sa déchéance à Amédée (VIII) de Savoie, le dernier antipape sous le nom de Félix V. En récompense de quoi, il se vit attribuer le patriarcat d'Antioche." (Wikipedia)

 

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La figure de Jacques Jouvenel des Ursins est la copie de celle de son frère Jean, sauf que l'artiste a changé la crosse pour la croix d'archevêque de Reims, qu'il a à peine modifié le damassé, ou la plaque des gants, et qu'il a modifié quelques apôtres qui sont mieux distincts.

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Michel Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Michel Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Michel Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Michel Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Michel Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Michel Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Michel Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Michel Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Michel Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Michel Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Michel Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Michel Jouvenel des Ursins, peinture vers 1445 provenant de la chapelle Saint-Rémy de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

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CONCLUSION.

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Cette peinture ne fournit aucun portrait physique exact des treize personnages, bien qu'on trouve souvent leurs dessins coloriés copiés de ce tableau comme illustrations de leurs biographies. Ce sont les représentations standardisées de leurs titres et de leurs charges, avec un portrait idéalisé, à un âge identique et idéal lui-aussi, et sans distinction des membres vivants de la famille en 1445 d'avec les membres décédés . La comparaison avec le portrait de Guillaume Jouvenel, le chancelier, par Jean Fouquet permet de voir la différence entre les deux procédés et les deux attentes. Cela correspond, dans cette chapelle destinée aux sépultures familiales, à des figures funéraires, comme on les observe sur les gisants et autres monuments.

Néanmoins, et même précisément, c'est un excellent témoignage des pratiques liées aux fondations de chapelles, et du souci de s'en approprier le décor en soulignant le faste familial, et, ici, l'accès à la noblesse de ces marchands de draps de Troyes, multipliant le rappel de leurs armoiries.

Mon second article étudiera le registre supérieur, avec le décor armorié, sculpté et vitré de la chapelle fictive peinte pour accueillir ces treize personnages.

 

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SOURCES ET LIENS.

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— BATTIFOL (Louis), 1894, Jean Jouvenel, prêvôt des marchands de la ville de Paris (1360-1431), thèse, Honoré Champion

https://ia600201.us.archive.org/17/items/jeanjouvenelpr00batiuoft/jeanjouvenelpr00batiuoft.pdf

https://www.mediterranee-antique.fr/Auteurs/Fichiers/ABC/Batiffol_L/Jouvenel_Jean/Jouve_10.htm

— BATTIFOL (Louis), 1893, L'origine italienne des Juvenel des Ursins, Bibliothèque de l'école des Chartes

https://www.persee.fr/doc/bec_0373-6237_1893_num_54_1_447749

 

—BOUCHOT, Henri, Inventaire des dessins exécutés pour Roger de Gaignières et conservés aux départements des estampes et des manuscrits, Paris 1891.

—DEMURGER ( Alain), « La famille Jouvenel. Quelques questions sur un tableau », Annuaire-Bulletin de la Société de l’Histoire de France, 1997 (1999), p. 31-56.

https://books.google.fr/books?id=wEwo4Lx75-8C&pg=PA55&lpg=PA55&dq=%22ce+sont+les+representations+de+nobles+personnes+messire%22&source=bl&ots=AoJTrBx6NL&sig=ACfU3U3jgikE9L_rPNh2Z0OLR3S8tB6khw&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwjc4qbU66KDAxWtcKQEHfo8Ay8Q6AF6BAgKEAM#v=onepage&q=%22ce%20sont%20les%20representations%20de%20nobles%20personnes%20messire%22&f=false

— ELDIN (Grégoire), 1994, Les chapellenies à Notre-Dame de Paris (XIIe au XVIe siècles) ,thèse de l' Ecole nationale des Chartes, 3 volumes, vol.I

https://bibnum.explore.psl.eu/s/psl/ark:/18469/465kd

En mars 1415, le sire de Bourbon propose au chapitre de fonder une messe basse quotidienne, avec messe haute le dimanche, et de redécorer la chapelle Saint-Rémi, en laquelle seraient célébrés les offices. La proposition est apparemment sans suite. Vingt-six ans plus tard, les héritiers de Jean Jouvenel proposeront à leur tour au chapitre de leur concéder cette chapelle, dont ils renouvelleront le décor.

 

—FERRARI (Matteo),  , Paris, Notre-Dame (chapelle Jouvenel des Ursins), base ARMMA/SAPRAT

https://armma.saprat.fr/monument/paris-notre-dame-chapelle-jouvenel-des-ursins/ 

—FERRARI (Matteo),  Paris, Hôtel Jouvenel des Ursins, base ARMMA/SAPRAT

https://armma.saprat.fr/monument/paris-hotel-des-ursins/

—FERRARI (Matteo),  Troyes, Hôtel Jouvenel des Ursins, base ARMMA/SAPRAT

https://armma.saprat.fr/monument/troyes-hotel-juvenal-des-ursins/

—  GUILHERMY (Ferdinand de), 1873, Inscription de la France du Ve au XVIIIe, t. 1. Ancien diocèse de Paris, Paris, Imprimerie nationale, 1873.

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6377940n/f94.item.r=

https://gallica.bnf.fr/view3if/ga/ark:/12148/btv1b69074450/f2

— PATTOU (Etienne)

http://racineshistoire.free.fr/LGN/PDF/Jouvenel-des-Ursins.pdf

—REYNAUD, (Nicole), 1999 « Les Heures du chancelier Guillaume Jouvenel des Ursins et la peinture parisienne autour de 1440 », Revue de l’Art, 126, 1999, p. 23-35.

—Photo RMN

https://www.photo.rmn.fr/archive/87-005856-2C6NU0HGUCXF.html

https://www.fontaine-fourches.com/625.Histoire.annexe.1.famille.Juvenal.des.Ursins.html

 

Source du deuxième article

—DAVIS (Michael T.), 1998, "Splendor and Péril: the Cathedral of Paris. 1290-1350" . Art Bulletin, LXX X (1998), p. 34-66.

https://www.jstor.org/stable/3051253

—KRAUS (Henry ), 1966, Notre-Dame's vanished medieval glass I : the iconography II : the donors ,la Gazette des beaux-arts,

—KRAUS (Henry ), 1993, A prix d'or, L'argent des cathédrales / L'argent des cathédrales de Henry Kraus, les Éditions du Cerf, CNRS Éditions, 2012

https://www.persee.fr/doc/bulmo_0007-473x_1993_num_151_3_3398_t1_0532_0000_4

—KRAUS (Henry ), 1967, Notre-Dame's vanished medieval glass ,la Gazette des beaux-arts, 1967 - 32 pages

—KRAUS (Henry ), 1969 "New Documents for Notre-Dame's Early Chapels", Gazette des Beaux-Arts, CXI (1969). p. 121-134. k

—KRAUS (Henry ), 1970. "Plan of the early Chapels of Notre-Dame de Paris", Gazette des Beaux-Arts, CXII (1970). p. 271.

Les premières chapelles latérales de la cathédrale Notre-Dame n'ont assurément pas eu la même fonction. Toutefois, une documentation abondante et quelques vestiges de l'ancien mobilier des chapelles nous permettent de redessiner les conditions de leur fondation et de leur édification, ainsi que d'expliquer leur forme architecturale et leur place dans la genèse des oratoires privés latéraux des XIVe et XVe siècles. L

Chapelle Saint-Guillaume

https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/palissy/PM75000728

—PLAGNIEUX Philippe 1993 La fondation funéraire de Philippe de Morvilliers, premier président du Parlement. Art, politique et société à Paris sous la régence du duc de Bedford

Bulletin Monumental  Année 1993  151-2  pp. 357-381


 

 

 

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Published by jean-yves cordier - dans Peinture. XVe siècle Vitraux Apôtres Donateurs Cluny
21 décembre 2023 4 21 /12 /décembre /2023 18:42

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'eglise Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris et exposée au musée Carnavalet.

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PRÉSENTATION.
Mon article sur la Danse macabre de Kermaria an Iskuit m'a donné l'occasion de présenter l'un des personnages entrainés dans la danse par les morts, le Sergent, reconnaissable à sa masse d'armes (seizième personnage).

La Danse macabre (peinture murale, troisième quart du XVe siècle) de la chapelle de Kermaria an Iskuit de Plouha.

La peinture assez dégradée ne permet pas d'examiner la tenue de ce soldat, bien qu'on reconnaisse très bien son attribut. Celle de La Chaise-Dieu (1450) montre un personnage assez prestigieux, avec, outre sa masse d'armes, un large chapeau et une tenue noble.  Mais les gravures  des versions imprimées de la Danse macabre de Guy Marchant en fournissent une illustration, en 1485 ou en 1486. Notez le bonnet à plumet, les chausses à taillades, l'épée ou les chaussures à extrémités arrondies. La masse n'est dilatée (en quatre lames) qu'à une extrémité.

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Danse macabre 1485

 

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Miroir salutaire. La Danse macabre historiée. Guy Marchant (Paris) 1486; droits Gallica.

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Néanmoins, les dalles gravées provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Écoliers, déplacées ensuite en 1773 dans l'église des Jésuites, puis après la Révolution à Saint-Denis et enfin récemment au musée Carnavalet, fournissent des  données iconographiques plus précoces sur cette fonction militaire. Elles sont classées à titre d'objet depuis 1906.

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Rappel :

Le terme de sergent provient du latin latin serviens, signifiant « qui sert ».

Au Moyen Âge, les sergents d’armes sont des soldats permanents, au service de simples chevaliers, ou de villes, d'évêques, d'abbayes ou même de corporations.

Philippe Auguste, avant de partir en Croisade, crée deux fonctions portant ce nom :

  • les sergents royaux : chaque prévôt dispose de sergents pour exécuter ses décisions de justice ;
  • des sergents d’armes, ou Massiers du roi qui formaient sa garde de son corps. Philippe-Auguste les institua pour la garde de sa personne : ils étaient gentilshommes, et en 1214, ils combattirent vaillamment à la bataille de Bouvines. En 1342, Philippe VI en fixa le nombre à cent. Charles V, étant régent, les réduisit à six en 1359.

Ils étaient armés, pour cette protection rapprochée,  de la masse d'armes,  dont la massue permettait d'enfoncer et de déformer les armures, d'enfoncer les casques et de briser les os. À partir du XIVe siècle, ces masses perdent leur usage d'armes pour prendre une signification symbolique. Elles sont alors de plus en plus ouvragées, voire faites de métaux précieux.

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Lors de la bataille de Bouvines en 1214, les 150 sergents d’armes du roi   gardèrent efficacement le pont de Bouvines, unique moyen de retraite à travers les marécages, ce qui fut déterminant pour la victoire. Les sergents firent vœu, en cas de victoire, de faire bâtir une église en l'honneur de Sainte-Catherine. Louis XI  fonda à leur demande le couvent Sainte-Catherine-du-Val-des-Écoliers, qui sera  détruite à la fin du XVIIIe siècle. Deux plaques commémoratives y furent apposées au XVe siècle.

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Les deux plaques de pierre gravées, colorées et dorées : description.

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Selon Philippe Plagnieux, les dalles de pierre, de 78 cm sur 194 cm, montrent, sur la première, deux sergents d'armes, qui, en costume civil et portant leur masse baissée en signe de respect, demandent l'aide de saint Louis qui lève la main gauche en signe d'approbation. Sur la seconde plaque, les sergents en armures s'adressent au prieur des Ecoliers qui, de l'index, désigne l'église, accomplissement de leur voeu. Une inscription en lettres gothiques court sur le bord supérieure : 

A la priere des sergens d'armes mons. saint Loys fonda ceste eglise et y mist la premire pierre et fu pour la joie de la vittoire qui fu au pont de Bovines l'an mil CC et XIIII / Les sergens d'armes pour le temps gardoient ledit pont et vouerent que se Dieu leur donnoit vittoire ilz fonderoient une eglise en l'honneur de madame sainte Katherine et ainsy fu il.

"Si le type des armures évoque la fin du XIVe siècle, le fond de ces dalles, traité à la manière d'une tenture comme les riches vêtements de cour correspondent davantage aux premières années du XVe siècle : hauts cols, larges manches plongeantes, bordures de festons ou de franges sont fréquents dans les enluminures et les tapisseries vers 1400-1410. La réalisation de ces plaques peut donc être mise en relation avec la reconnaissance de privilèges aux sergents par Charles VI en septembre 1410 - acte qui mentionne d'ailleurs les deux épisodes illustrés par ces dalles (cf Ordonnances des rois de France, p. 541-543)." (Philippe Plagnieux, Paris 1400 : les arts sous Charles VI, Paris, RMN, 2004, p. 163)

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LA PREMIÈRE PLAQUE.

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Les trois personnages se détachent sur un drap d'honneur doré, damassé de grenades (centrées par deux esses affrontées) et d'e rinceaux croisés en étoiles,  tricolores (bleu, rouge et jaune). Ils sont debout sur un sol fleuri et herbu.

Devant le roi, les deux sergents portent leur masse, et l'épée à la ceinture, côté gauche comme il se doit. 

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Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'eglise Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'eglise Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

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1°) Le premier sergent.

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Il est coiffé d'un couvre-chef rouge rappelant le mortier de juges, et vêtu d'une houpelande aux bords déchiquetés dont lea manches touchent le sol, sur une tunique courte frangée et des chausses ajustées bleu-émeraude. Sa gorge est couverte d'un gorgerin de cuir, entourant tout son visage.

Ses chaussures à la poulaine sont boutonnées sur le côté et remontent, comme des bottines, à mi-mollet.

La masse semble fixée à un baudrier. L'une de ses extrémités est crenélée.

Roger de Gaignières en a donné un dessin :

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Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

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2°) Le deuxième sergent.

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Son costume est très différent, laissant penser qu'il n'y avait pas d'uniforme  propre à cette fonction. Il est plus élégant que l'autre  —qui semblait en tenue de combat — avec un costume de cour et d'apparat . 

L'extrémité plate et circulaire  de la masse à plateau porte un émail  aux armes de France (Laurent Hablot, com. pers.). On voit aussi les trois  lys sur la base du tulipage, et sur le manche. Gaignères a omis de les représenter sur le plateau:

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Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

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3°) Saint Louis.

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Les éléments remarquables sont la couronne, la robe et le manteau fleurdelysée, un sceptre à longue hampe, et des chaussures souples.

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Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

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LA DEUXIÈME PLAQUE.

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Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

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1°) Le prieur de l'église Sainte-Catherine des Ecoliers.

Le prieur porte un manteau noir sur une robe brune serrée par une ceinture à long bout. Il désigne de la main droite la direction de l'église dont la plaque commémore la fondation.

 

Rappel :

" En 1201, quatre professeurs de l'université de Paris, préférant la solitude au monde et la vie privée à la réputation que leurs lumières et leurs talents leur avaient acquise, se retirent dans une vallée déserte de la Champagne où ils bâtissent des cellules et un oratoire, fondations du premier prieuré du Val des Écoliers. Leurs écoliers les y suivent. Une congrégation se forme, dite l'ordre du Val-des-Écoliers. Les jeunes gens qui la composent font le vœu de chasteté sous le patronage d'une vierge, sainte Catherine. Moins de trente ans après, cet ordre compte vingt prieurés.

En 1228, l'un de ces prieurés est établi à Paris par Nicolas Giboin, bourgeois qui cède trois arpents de terre (environ un hectare) qu'il possède près de la porte Baudet à l'extérieur de l'enceinte de Philippe-Auguste (aux alentours de l'actuelle rue de Sévigné). L'église est alors fondée par les sergents d'armes de la garde du roi, en mémoire de la bataille de Bouvines. Le roi saint Louis pose la première pierre du couvent en 1229 et le dote de revenus.

L'établissement faisait partie de l'université de Paris. Les sergents d'armes font de cette église le siège de leur confrérie, et presque tous y ont leur sépulture. Ainsi, y sont enterrés les maréchaux de Champagne et de Normandie tués sur l'ordre d'Étienne Marcel .

 Louis XI octroie des dons à l'église le 22 octobre 1461 et le 3 juin 1477. Il confirme encore ses privilèges en juin 1480."

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Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

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2°) Un sergent d'armes en armure complète.

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Il est coiffé d'un bonnet ; les solerets sont à la poulaine. Il tient sa masse à extrémité dilatée frappée des lys royaux (qu'on retrouve comme précédemment sur la base et sur le manche) et à l'autre extrémité divisée en quatre ailettes.

Le relevé de Gaignères :

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Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

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3°) Le dernier des sergents d'armes, en armure complète.

Il ne diffère du précédent que par sa coiffure qui est un chaperon. Les lys de la masse d'arme sont fidélement sculptés.

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Le relevé de Gaignières :

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Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

Les deux  dalles (pierre, vers 1410) du vœu des sergents d'armes à Bouvines provenant de l'église Sainte-Catherine du Val des Ecoliers à Paris. Photographie lavieb-aile 2023.

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CONCLUSION.

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Sur ces dalles, les Sergents royaux sont richement vêtus et porte l'épée. Faut-il différencier par leur statut ceux de la première dalle, où ils sont en tenue civile, et ceux de la seconde dalle, qui sont en armure ?

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COMPLÉMENTS D'ICONOGRAPHIE
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Sur le site Mandragore, pour le XVe siècle à Paris, 68 résultas sont proposés. En voici quelques uns :

Grande Bible historiale BnF5 f3v, audience royale;

 

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Grande Bible historiale complétée de Guyart des Moulins , Grande Bible historiale complétée Auteur : Maître du couronnement de Charles VI, enlumineur actif à Paris fin XIVe siècle. Enlumineur: Maître de Colin Novel, enlumineur actif à Paris fin XIVe siècle. Enlumineur Maître du couronnement de Charles VI, enlumineur actif à Paris fin XIVe siècle, Maître de Colin Novel, enlumineur actif à Paris fin XIVe siècle.

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Sur cette enluminure du XVe siècle des Chroniques universelles, nous voyons deux sergents d'armes, en rouge et coiffés d'un chaperon, au second plan, et deux autres devant le pavillon.

Chroniques, BnF 64 f.347v

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BnF fr.131. Un sergent dans l'entourage immédiat du roi. La masse est tenue sur l'épaule gauche, le sergent est coiffé d'un chaperon.

BnF français 131, f.2v, XVe siècle. Boccace, Jean. Cas des nobles hommes et femmes. Laurent de Premierfait. Traductions, de Boccace. Vers à la louange de Boccace.

 

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Dans les Danses macabres.

 

 

Livre d'Heures de Charles Quint enluminé vers 1500–1510, Bibliothéque numérique de Madrid page 124.

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https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k503981r/f18.item#

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Dans les danses macabres imprimées du XVIe siècle, le Sergent laisse la place à l'Homme d'armes, armé d'une hallebarde ou d'une lance, à Genève ou à Lyon.

Genève, Jean Bellot 1500:

https://www.e-rara.ch/gep_g/content/zoom/12538015

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Lyon, Claude Nourry 1501:

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1510028q/f20.item

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SOURCES ET LIENS.

— HABLOT (Laurent), 2007, « Le bâton du pouvoir dans l'image médiévale », In: Des signes dans l'image. Actes du colloque de l'EPHE (Paris, INHA, 23 - 24 mars 2007), dir. M. Pastoureau et O. Vassilieva-Codognet, Turnhout : Brepols, p. 191-209, ill.

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Published by jean-yves cordier
13 décembre 2023 3 13 /12 /décembre /2023 14:56

La météorite d'Ensisheim (1492), le polyèdre de Dürer (1514), le crâne de cristal (XIXe siècle)  et la Tête crâne de Giacometti (1934) : un parcours macabre de l'exposition Voyage dans le cristal au musée de Cluny.

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Voir :

La Mort et le cristal : la Danse macabre (cristal de roche, 2023), et autres œuvres  de Patrick Neu . Exposition Voyage dans le cristal au Musée de Cluny, Paris septembre 2023/janvier 2024.

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PRÉSENTATION.

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Au gré des six salles de l'exposition, et des cartels des œuvres présentées, c'est un étrange  ou macabre voyage qui est proposé au visiteur. Le rapport avec le cristal n'est pas toujours évident, notamment à propos de Dürer et de Giacometti, et c'est bien ces petites énigmes que nous allons tenter de débrouiller. Quand au crâne, et son rapport avec le macabre, central dans mon premier article, nous verrons qu'il tient également une place majeure, mais cachée, pour ces deux artistes.

Je débuterai donc, pour être limpide, par le Crâne de cristal du Quai Branly, avant de partir, tel Indiana Jones, à sa recherche chez Dürer puis Giacometti.

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I. Le crâne de cristal.

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Cette alliance du cristal, pierre de lumière symbole de pureté et d'inaltérabilité, et du crâne, image du memento mori dans les mosaïques romaines ou les Vanités baroques, crée un oxymore troublant, que Patrick Neu a repris dans sa Danse macabre (article précédent).

Il en existe douze autre exemplaires, mais tous n'ont pas cette pureté lumineuse du crâne du Quai Branly. Ce fut la fierté du Musée, comme représentant de l'art des lapidaires atzèques, jusqu'à ce que les analyses  scientifiques du Louvre prouvent qu'il s'agissait d'un faux, provenant d'Allemagne entre 1867 et 1886 et commercialisé par Eugène Boban, comme celui du British Museum et de la Smithsonian Institution.

Cette duperie, qui a triomphé pendant un siècle, est elle-même troublante : elle nous révèle la faillibilté de la science et de l'esprit, leçon d'humilité qui s'ajoute à la certitude de notre destin mortel : vanitas vanitatis et omnia vanitum est précisément le message muet des crânes qui nous fixent de leurs orbites creuses.

La lumière se fait un plaisir de passer comme en se jouant à travers ce crâne jadis si savant et d'en révéler l'ombre, creusée d'un cœur éblouissant.

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https://fr.wikipedia.org/wiki/Cr%C3%A2ne_de_cristal

 

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Exposition Voyage dans le cristal, Musée de Cluny, Paris décembre 2023. Photographie lavieb-aile.

Exposition Voyage dans le cristal, Musée de Cluny, Paris décembre 2023. Photographie lavieb-aile.

Exposition Voyage dans le cristal, Musée de Cluny, Paris décembre 2023. Photographie lavieb-aile.

Exposition Voyage dans le cristal, Musée de Cluny, Paris décembre 2023. Photographie lavieb-aile.

Exposition Voyage dans le cristal, Musée de Cluny, Paris décembre 2023. Photographie lavieb-aile.

Exposition Voyage dans le cristal, Musée de Cluny, Paris décembre 2023. Photographie lavieb-aile.

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II. Le crâne de la Melencolia I (1514) d'Albrecht Dürer, et la météorite d'Ensisheim.

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La série macabre se poursuit par cette Mélancolie de Dürer, et si nous n'en étions pas convaincu, nous pourrions nous rappeler que cette gravure appartient à un cycle où figure le Chevalier, La Mort et le Diable (1513), qui est un Memento mori explicite, mais surtout Saint Jérôme pénitent (1496), puisque la retraite érémitique et pénitentielle est une préparation chrétienne à la mort ; et que saint Jérôme tient un caillou dans la main, pour se frapper la poitrine. Le sablier et le crâne sont présents dans les deux premières de ces œuvres, et s'ils sont absents de Jérôme pénitent, ils sont présents dans Saint Jérôme dans sa cellule.

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https://artifexinopere.com/blog/interpr/peintres/durer/saint-jerome/2-la-serie-des-saint-jerome/

https://fr.wikipedia.org/wiki/Melencolia_I

 

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Melencolia I, Albrecht Dürer 1514.

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Le crâne sur le polyèdre.

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Un crâne est discrètement représenté sur l'une des faces du polyèdre, déformé  comme par une anamorphose. On peut imaginer que la surface polie reflète en une image macabre le visage de  la femme ailée, possible allégorie de la Mélancolie. Ce reflet morbide du soi pourrait être donc ce que contemple d'un regard songeur la femme. Et ce que dessine l'enfant sur sa tablette.

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Le polyèdre et la météorite d'Ensisheim

https://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%BCrer_et_la_m%C3%A9t%C3%A9orite_d%27Ensisheim

 

 

Le matin du 7 novembre 1492, une météorite de pierre de 127 kg entre à grande vitesse dans l'atmosphère terrestre. La météorite laisse derrière elle une vive trainée lumineuse, avant de s'écraser dans un champ de blé, à proximité de la ville d'Ensisheim, à 22 km au nord de Mulhouse et à 44 km de Bâle. 

Son point de chute  est alors marqué par un cratère de deux mètres de diamètre. Les habitants prélèvent des fragments de cette météorite, en guise d'amulette porte-bonheur. Le bailli  fait suspendre la météorite, comme signe divin de bon augure, dans le chœur de l'église paroissiale. Elle y reste jusqu'en 1793, date à laquelle elle est exposée à la Bibliothèque nationale de Colmar. De nombreux prélèvements sont réalisés : cadeaux pour des visiteurs d'importance, spécimen à analyser pour Ernst Chladni. En 1803, la ville d'Ensisheim la récupère et la replace dans son église. Le 6 novembre 1854, l'église voit son clocher s'effondrer. La météorite fut alors remisée à l'école, puis à l'hôtel de la Régence devenu par la suite l'hôtel de ville. Elle a été divisée en plusieurs morceaux qui se trouvent aujourd'hui pour la plupart d'entre eux dans des musées, dont le Muséum d'Histoire naturelle de Paris, galerie de minéralogie : elle fait partie des chondrites à olivine et hypersthène, du groupe LL6 dans la classification des météorites.

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La chute de cette "pierre de tonnerre"  a été relaté par de nombreux auteurs notamment en 1492 par Sébastien Brant — De fulgerra anni xcii. Sebastianus Brant  — (dont Dürer illustrait alors la Nef des Fous) ou en 1493 dans la Chronique de Nuremberg de Hartmann Schedel : c'est la première chute observée d'une météorite depuis l'invention de l'imprimerie. Certains (W) pensent que Dürer a "assisté" à cette chute ; ou qu'il aurait pu entendre le son, perceptible jusqu'à Bâle, ou enquêter auprès de témoins indirects : son séjour chez des imprimeurs de Bâle est attesté, du moins à l'été 1492.

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Sebastien Brant

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Chroniques de Nuremberg

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Cet évènement a en tout cas frappé  Albrecht Dürer qui l'a représenté dans sa gravure Hexensabbat (date inconnue) et  qui l'a peinte en 1496  au au verso du tableau Saint Jérôme pénitent :  la météorite jaune citron est au centre d'un tourbillon de flammes rouges et grises. 

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Albrecht Dürer, au dos de Saint Jérôme pénitent.

 

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C'est sa traversée incandescente  de l'atmosphère qui est représentée dans le ciel de Melencolia I, au dessus de la chauve-souris portant sur ses ailes le titre.

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Le polyèdre contemplé par l'ange féminin est-il une "représentation idéalisée" de la météorite sosu la forme d'une  structure cristalline ? En tout cas, ce polyèdre est relié au cristal par la commissaire de l'exposition, puisque rien, sinon, ne justifie la présence de cette gravure (dans son exemplaire possédé par le Louvre) dans l'acte IV du parcours :

"À la Renaissance, la maîtrise de la glyptique et la passion de la taille du cristal atteignent une virtuosité jamais égalée. La redécouverte des codes antiques trouve une expression particulièrement perceptible au travers de rondes-bosses et de pièces d’apparat. [...]Parallèlement, les écrits scientifiques de Platon, Aristote et Euclide sont revisités. Luca Pacioli, avec son De Divina Proportione, est une figure centrale de ce mouvement. Dans la peinture et la gravure, les formes et facettes du polyèdre sont transcendées par Paolo Uccello et Albrecht Dürer qui cherchent à déployer les volumes en facettes."

Il a été prouvé que ce polyèdre est "un cube dressé selon sa diagonale, d’abord étiré selon son grand axe puis tronqué en haut et en bas". Le cube est une forme parfaite, comme la sphère posée juste en dessous. 

Jacques Bousquet y consacre un très grand nombre d'articles sur son site artifexinopere, car ce polyèdre est pour lui "avec le carré magique,  l’objet le plus intrigant de la gravure". Dürer n’aurait-il  pas  fait tourner le polyèdre autour de son axe vertical, de manière à ce que l’angelot regarde  dans la direction du rhomboèdre ?

Avec lui, et tous les auteurs dont il relate les calculs, les travaux et les hypothèses, ce polyèdre devient un abîme de réflexion, comme le crâne et son interrogation insondable.

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Exposition Voyage dans le cristal, Musée de Cluny, Paris décembre 2023. Photographie lavieb-aile.

Exposition Voyage dans le cristal, Musée de Cluny, Paris décembre 2023. Photographie lavieb-aile.

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III. GIACOMETTI ET LE POLYÈDRE : LE CUBE, LA CAGE, ET LE CRÂNE-CUBE

 

 

Les commissaires de l'exposition nous prennent par la main pour souligner comment Giacometti reprend le polyèdre de Dürer, et sa réflexion mélancolique sur le crâne.

" Quelques années avant Le Cube, Giacometti produit une mélancolie, La Cage, dans laquelle on peut voir un squelette enfermé dans un cristal, nous rappelant sa fascination pour la Melancolia de Dürer. Ce rapprochement formel se double d’un autre point commun, celui d’une expérience initiatique. Le polyèdre de Dürer est une référence à une expérience personnelle extraordinaire. En 1492, Dürer est témoin de la chute de la météorite appelée «Pierre du tonnerre d’Ensisheim».

De son côté, Giacometti évoque le caractère fondateur de la vision d’une pierre dans la montagne suisse de son enfance : Ce fut mon père qui, un jour, nous montra ce monolithe. Découverte énorme, tout de suite je considérai cette pierre comme une amie, un être animé des meilleures intentions à mon égard; nous appelant, nous souriant, comme quelqu’un qu’on aurait connu autrefois, aimé et qu’on retrouverait avec une surprise et une joie infinie ."

La figure de Dürer (découverte dans l'enfance sous l'influence de son père peintre), sa Melencolia, et en particulier son polyèdre renvoie donc à la figure paternelle, Giovanni Giacometti, qui lui appris à dessiner et à modeler.  Alberto découvrit directement Melencolia à l'exposition deu Petit Palais de 1933 sur les estampes de Rembrandt et de Dürer.

La figure maternelle, Anetta Giacometti, est néanmoins centrale,  et elle fut le modèle de nombreuses œuvres peintes ou sculptées.

Giacometti est fasciné par Dürer et son premier dessin exact fut, dès 1915 (à 14 ans) la copie de Le Chevalier, la Mort et le Diable.

 

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1.  "La Table" bronze, 1969, d'après l'original en plâtre, 1933. Centre Pompidou AM1705 S.

"Il appuie son coude sur la table, et reste absorbé dans ses pensées comme un somnambule" (Lautréamont, Les chants de Maldoror)

"Signé et daté par Giacometti, le plâtre fut probablement conçu pour l’« Exposition surréaliste. Sculptures, objets, peintures, dessins » (galerie Pierre Colle, 7-19 juin 1933). C’était, comme le rappelle Giacometti à Pierre Matisse en insistant sur sa fonction d’objet mobilier, « une table pour un couloir » : la conçut-il, déjà entraîné à d’autres commandes de pièces d’ameublement – chenets, vide-poche, cheminée – pour Charles et Marie-Laure de Noailles, qui de fait achètent l’œuvre, le 20 juin, et la placent dans un couloir de leur maison d’Hyères (où elle restera jusqu’en 1951)? Quoi qu’il en soit, en l’exposant galerie Pierre Colle, face à Femme qui marche (1932), il la présente aussi comme une sculpture à part entière. Instabilité ontologique de l’œuvre en effet : à la fois meuble, avec son dos plat s’ajustant au mur et ses objets déposés sur la table, comme l’étaient les bibelots dispersés au-dessus de la cheminée que le sculpteur dessine alors pour l’ensemblier Jean-Michel Franck, et sculpture figurative, offrant un dispositif plastique complexe, très scénographié. Quatre pieds disparates et trop grêles supportent le buste, en forme de pion d’un jeu d’échecs géant, d’une femme à la figure à moitié cachée par un voile, dont le lourd pan menace de déséquilibrer la table ; sur le plateau, devant cette sorte de voyante, sont posés un objet polyédrique (réduction du Cube), un mortier d’alchimiste et une main coupée, motifs récurrents de cette époque de grande angoisse.

Au-delà de la poétique de ce dispositif, qui n’est pas sans posséder la force d’inquiétante étrangeté du Cerveau de l’enfant de De Chirico et qui pourrait presque apparaître comme un « poncif » du surréalisme (la sculpture fut fameuse en son temps, photographiée par Man Ray, exposée à Londres en 1936, reproduite dans le Dictionnaire abrégé du surréalisme de Breton et Eluard en 1938, etc.), c’est, semble-t-il, un ouvrage de « mélancolie » que dresse encore ici Giacometti, dans l’incertitude du saisissement de la figure humaine, dans son aveuglement. Dans le dessin-poème « le Rideau brun », qu’il livre au Surréalisme au service de la révolution (n° 5, 15 mars 1933), il écrit en place des yeux, au centre d’une figure aveugle : « aucune figure ne m’est aussi étrangère même plus un visage de l’avoir tant regardée, elle s’est fermée sur des marches d’escaliers inconnus ». Le propos ésotérique qu’il expose dans Table s’éclairera dans un dessin, Figure (1935) : la table se déploie comme un cube ouvert, pour faire corps avec un buste féminin enfin dévoilé, tenant un cristal polyédrique. En 1935, Giacometti sera prêt à se dégager des énigmes fantasmatiques de la période surréaliste passée pour revenir à la vision directe de la figure humaine." (Agnès de la Beaumelle)

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De l'autre côté du plateau, Giacometti a posé la main coupée de la femme, un de ses "objets désagréables" qui revet une étrange morbidité, à l'instar des reliquaires parlants du Moyen-Âge. (Catalogue)

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Exposition Voyage dans le cristal, Musée de Cluny, Paris décembre 2023. Photographie lavieb-aile.

Exposition Voyage dans le cristal, Musée de Cluny, Paris décembre 2023. Photographie lavieb-aile.

Exposition Voyage dans le cristal, Musée de Cluny, Paris décembre 2023. Photographie lavieb-aile.

Exposition Voyage dans le cristal, Musée de Cluny, Paris décembre 2023. Photographie lavieb-aile.

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2. Le polyèdre : "Le Cube", plâtre [1934-1934 ] Centre Pompidou.

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"Le monolithe polyédrique aux douze faces irrégulières – objet de géométrie descriptive et de stéréométrie bien connu pour constituer notamment un des éléments de la Melencolia de Dürer – apparaît à maintes reprises dans l’œuvre de Giacometti des années 1932-1935, comme une citation de la fameuse allégorie gravée du maître allemand, qu’il revoit, en mai 1933, dans une exposition au Petit Palais. Avec ce Cube , qui radicalise la grande colonne polyédrique de Figure (1931-1932), conçue pour le jardin de la villa Noailles à Hyères, et qui annonce sa résolution figurative de Tête-Crâne (1934, AM 1986-58) – les deux œuvres se trouvent côte à côte sur une page de Minotaure , n° 5, mai 1934 –, se pose la question, pour le sculpteur, qui perd son père en juin 1933, de la possibilité ou non d’une apparition de la figure, du saisissement ou non du réel.

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Les pieds dans le plat 1933, 1935, Fondation Giacometti, copie d'écran.

 

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"Étroite association, pleinement mélancolique et récurrente chez Giacometti, du polyèdre et de la tête de mort : déjà un cristal irrégulier, enfermant un pantin-squelette, apparaît sur le dessin de L’Atelier (1932), un caillou de forme identique est posé sur la Table surréaliste (1933, AM 960 S), aux côtés d’une voyante à demi voilée, un autre, à moitié ouvert, apparaît dans la gravure Lunaire (1933), un crâne cristallin polyédrique constitue la Tête gravée (1933-1934, New York, MoMA), un polyèdre irrégulier encercle une figure féminine dans une gravure quasi inédite de la même date ( Giacometti, Le dessin à l’œuvre , cat. exp., Paris, Centre Pompidou / Gallimard, 2001, n° 56), tandis qu’un « objet invisible » polyédrique semble apparaître enfin entre les mains de la grande figure de 1934 : autant d’objets géométriques regardés comme des figures d’énigmes, entachés d’une blancheur lunaire, et associés toujours à des figures comme s’ils en incarnaient le cercueil ou la réduction.

La masse blanche, presque phosphorescente et aux arêtes vives de Cube , qui apparaît à première vue comme un météorite tombé au sol sous l’effet d’on ne sait quel désastre, semble se dématérialiser, s’ouvrir, engageant celui qui regarde à en franchir les parois pour saisir, dans son hallucination, le possible fantomal d’une présence.

Dans la méditation mélancolique du sculpteur, qui vient d’ériger une stèle « cubique » sur la tombe paternelle au cimetière de Borgonovo (*), le Cube , intitulé d’abord par lui Pavillon nocturne (ainsi à l’exposition « Abstrakte Malerei und Plastik, Arp, Ernst, Giacometti, González, Miró », Zurich, 11 octobre-4 novembre 1934), constituerait dès lors le lieu d’apparition / disparition, d’émergence / enfouissement de la figure paternelle : hypothèse étayée encore par la gravure d’un portrait d’homme sur une face d’un des deux exemplaires en bronze du Cube (Zurich, Kunsthaus, Alberto Giacometti Stiftung) (**). À cette méditation se noue étroitement le questionnement, à nouveau crucial pour Giacometti en 1934, sur les perspectives de son travail de sculpteur : l’affrontement devant le modèle avec la tête humaine, qui sera « de retour » définitivement en 1935 avec la Tête-Crâne qui en est la résolution explicite, est ici en gestation. La présentation du Cube à Lucerne (Kunstmuseum, 24 février-31 mars 1935), dans l’exposition « Thèse, antithèse, synthèse », sur un « socle » mobile à quatre pieds coniques (identique à celui qui soutenait en 1927 les Danseurs), socle dont on retrouve plusieurs exemplaires dans les photographies de l’atelier à cette époque, confirme la signification figurative de l’étrange objet géométrique. Ce Cube ainsi finalement nommé, un objet « abstrait » ? « Je le considérais en réalité, dira Giacometti à James Lord, comme une tête »." (Agnès de la Beaumelle)

 

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(*) La tombe de Giovanni et Anetta Giacometti à Borgonovo, Italie :

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(**) Bien sûr, on souhaite voir cette "gravure d'un portrait" grattées à la fin des années 1930 sur la face de la deuxième version du Cube (moulage de la version précédente) , du Kunsthaus de Munich. Elle a été effacée du modèle en plâtre inventaire GS 128 mais est conservé sur le moulage en bronze de 1959, GS 025. Les lignes gravées sont décrites comme "une représentation de l'atelier et à un autoportrait". Mais la photographie proposée ne permet pas de discerner le motif :

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Le Cube, moulage en bronze CS 025, 1959, Kunsthaus, Munich

 

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Le Cube, moulage en bronze, détail

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Inversement, le Cube en plâtre conservé au Centre Pompidou montre des lignes sur trois faces, dont un cercle et une croix.

Le Cube, Centre Pompidou.

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Y-a-t-il un lien entre ces lignes gravées, comparées (pour GS025) à un portrait d'homme, évoquant peut-être la figure paternelle décédée en juin 1933, et le crâne du polyèdre de Dürer ?

Les faces du Cube exposé à Cluny et visibles sans contorsion pour le visiteur ne permettent pas de voir ces gravures.

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Exposition Voyage dans le cristal, Musée de Cluny, Paris décembre 2023. Photographie lavieb-aile.

Exposition Voyage dans le cristal, Musée de Cluny, Paris décembre 2023. Photographie lavieb-aile.

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3.  "La Tête-crâne". Terre-cuite chamottée, 1934, Centre Pompidou AM1986-58

https://www.centrepompidou.fr/fr/ressources/oeuvre/cxxAeLz

Pour les auteurs de l'exposition, "Ainsi le Cube et la Tête-crâne sont-ils un seul et même geste, qui ancre l'artiste dans une métaphysique poètique du cristal".

"La Tête-crâne est inscrite dans la suite créative du Cube, y surlignant par le motif l'association mélancolique du polyèdre et de la mort (les deux œuvres apparaissent sur une même planche dans le Minotaure de 1934). De face et de profil droit, un crâne est reconnaissable, les orifices ronds des yeux suggérant le côté osseux et squelettique. Le profil gauche ne révèle plus que la fente rectangulaire de la bouche dans un volume facetté (elle n'est jamais autant une tête cubique que sous cet angle. Par l'arrière, il semble que le bloc soit une macle et alors, sans-doute, sommes-nous face à la « tête-pierre » de Giacometti : Si je vous regarde en face, j'oublie le profil, si je regarde le profil, j'oublie la face ». La correspondance formelle avec le crâne de cristal qu'il avait vu au musée d'ethnographie du Trocadéro est l'indice d'une probable inspiration directe, Tête cubiste (gravure, 1933, New-York, Moma inv.42.1968) constituant un jalon intermédiaire entre le crâne du Trocadéro et sa sculpture." (Catalogue)

 

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Exposition Voyage dans le cristal, Musée de Cluny, Paris décembre 2023. Photographie lavieb-aile.

Exposition Voyage dans le cristal, Musée de Cluny, Paris décembre 2023. Photographie lavieb-aile.

Exposition Voyage dans le cristal, Musée de Cluny, Paris décembre 2023. Photographie lavieb-aile.

Exposition Voyage dans le cristal, Musée de Cluny, Paris décembre 2023. Photographie lavieb-aile.

Exposition Voyage dans le cristal, Musée de Cluny, Paris décembre 2023. Photographie lavieb-aile.

Exposition Voyage dans le cristal, Musée de Cluny, Paris décembre 2023. Photographie lavieb-aile.

Exposition Voyage dans le cristal, Musée de Cluny, Paris décembre 2023. Photographie lavieb-aile.

Exposition Voyage dans le cristal, Musée de Cluny, Paris décembre 2023. Photographie lavieb-aile.

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CONCLUSION.

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L'exposition de Cluny nous révèle de façon argumentée les liens étroits qui existent entre le Crâne-cristal du Quai Branly, le Melencolia I de Dürer, et les trois œuvres d'Alberto Giacometti, la Cage, le Cube, et la Tête-Crâne.

Le crâne est l'élément central. Le cristal est présent sous la forme indirecte du polyèdre, d'une pierre de structuration géométrique. 

La mélancolie est celle qui naît de la méditation devant le crâne, figure de la mort (les Vanités) mais aussi de celle qui naît devant la pierre, le monolithe, la météorite, l'organisation géométrique de la Nature et ses échelles de temps confondante.

La pierre jette l'effroi et place l'artiste devant le défi de le résoudre  ; ce défi n'est relevé que partiellement, sous forme d'une création, et d'un échec imposant de poursuivre l'œuvre.

Pour Giacometti, la pierre est d'abord féminine, amicale, et nostalgique, un être animé des meilleures intentions à mon égard; nous appelant, nous souriant, comme quelqu’un qu’on aurait connu autrefois, aimé et qu’on retrouverait avec une surprise et une joie infinie. Mais c'est ensuite la pierre tombale de la mort du père.

Les deux  fils conducteurs les plus visibles, crâne et cristal, tissent donc les motifs en entrelacs de la Lumière, du Cosmos, de la Mort, du Temps, et de la création artistique. Le Macabre est là, mais se fait discret.

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Published by jean-yves cordier - dans Macabre Sculptures Exposition
12 décembre 2023 2 12 /12 /décembre /2023 14:30

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PRÉSENTATION.

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Après avoir dessiné la Danse macabre du XVe siècle de la Chaise-Dieu (Haute-Loire) en 2007 sur un napperon de papier carbonisé, l'artiste lorrain Patrick Neu, conseiller artistique de la cristallerie de Saint-Louis, s'en inspire à nouveau en créant pour l'exposition Voyage dans le cristal du Musée de Cluny une Danse macabre gravée sur un cristal de roche hexagonal  d'une dizaine de centimètres de haut.

On se perd dans les reflets des facettes et les squelettes dansent dès que notre œil se déplace légèrement, ils se dédoublent en grimaçant : la matérialité du trait contraste avec  la transparence du matériau tout comme la date précise et récente de la taille et sa propriété, exploitée par les horlogers,  de battre le temps s'opposent à l'origine immémoriale du quartz. Vanité de l'existence brève et vertige devant les échelles des temps géologiques.

"Né en Lorraine, pays du verre et du cristal de plomb, Patrick Neu (Bitche, 1963-) connaît de l’intérieur le monde du feu, du souffle et de la taille. Depuis ses premières œuvres, il utilise le cristal de plomb et puise souvent son inspiration chez les maîtres anciens, dont ceux de la fin du Moyen Âge et du début de la Renaissance. L’utilisation du cristal de plomb pour la Couronne d’épines confère à la sculpture une aura qui laisse tout commentaire vain, l’artiste invitant à la contemplation, tout comme avec son Baigneur démembré. Les verres noircis à la fumée constituent une pinacothèque onirique et le Crâne en cristal de plomb noir, un memento mori contemporain. Pour cette exposition, il s’est donné un nouveau défi en choisissant de graver sur un cristal de roche une Danse macabre. Il joue doublement avec le temps : la vanité qui rappelle la brièveté de la vie est sculptée sur une pierre dure dont l’âge, immémorial, est celui de la Terre." (Dossier de presse)

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Patrick Neu, cristal, exposition Voyage dans le cristal, musée de Cluny. photographie lavieb-aile 2023.

Patrick Neu, cristal, exposition Voyage dans le cristal, musée de Cluny. photographie lavieb-aile 2023.

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Patrick Neu  aurait repris ici, selon le catalogue de l'exposition, les  figures du Chevalier et du transi, ou plutôt à mon sens uniquement celle du mort entrainant le Chevalier, un peu courbé en avant, le bras droit fléchi à 90° et le bras gauche glissé sous le bras du Chevalier.

Danse macabre de La Chaise-Dieu (peinture murale, v.1545). Photo lavieb-aile 2014.

 

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Si nous retournons l'image de la peinture, nous retrouvons la silhouette gravée sur le cristal.

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Danse macabre de La Chaise-Dieu (peinture murale, v.1545). Photo lavieb-aile 2014.

 

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Patrick Neu, cristal, exposition Voyage dans le cristal, musée de Cluny. photographie lavieb-aile 2023.

Patrick Neu, cristal, exposition Voyage dans le cristal, musée de Cluny. photographie lavieb-aile 2023.

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Un deuxième mort est au contraire redressé, la tête en arrière, tandis que le bras droit est tendu vers son partenaire de danse et que le bras gauche est fléchi.

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Patrick Neu, cristal, exposition Voyage dans le cristal, musée de Cluny. photographie lavieb-aile 2023.

Patrick Neu, cristal, exposition Voyage dans le cristal, musée de Cluny. photographie lavieb-aile 2023.

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Je crois y reconnaitre le mort qui se saisit du Laboureur, sur la danse macabre de La Chaise-Dieu.

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Danse macabre de La Chaise-Dieu (peinture murale, v.1545). Photo lavieb-aile 2014.

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Après retournement du modèle :

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Danse macabre de La Chaise-Dieu (peinture murale, v.1545). Photo lavieb-aile 2014.

 

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Patrick Neu, cristal, exposition Voyage dans le cristal, musée de Cluny. photographie lavieb-aile 2023.

Patrick Neu, cristal, exposition Voyage dans le cristal, musée de Cluny. photographie lavieb-aile 2023.

Patrick Neu, cristal, exposition Voyage dans le cristal, musée de Cluny. photographie lavieb-aile 2023.

Patrick Neu, cristal, exposition Voyage dans le cristal, musée de Cluny. photographie lavieb-aile 2023.

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Cette œuvre incite les amateurs d'iconographie de la Danse macabre, ou plus généralement du macabre, à examiner les autres productions de Patrick Neu, exposées dans la même salle de l'exposition de Cluny.

 

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Le crâne en cristal de plomb, Patrick Neu, 1993-2004, Paris, Sarkis.

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Patrick Neu, cristal, exposition Voyage dans le cristal, musée de Cluny. photographie lavieb-aile 2023.

Patrick Neu, cristal, exposition Voyage dans le cristal, musée de Cluny. photographie lavieb-aile 2023.

Patrick Neu, cristal, exposition Voyage dans le cristal, musée de Cluny. photographie lavieb-aile 2023.

Patrick Neu, cristal, exposition Voyage dans le cristal, musée de Cluny. photographie lavieb-aile 2023.

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La poupée démembrée (cristal de plomb, 6cm x 30 x 25 cm 1993-2004).

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Dans les deux œuvres précédentes, — comme dans tout objet en cristal— un autre acteur s'invite immédiatement : la lumière.

La lumière est, foncièrement, un oxymore : elle est indissociable de l'ombre. Mais avec le cristal (comme avec le verre des vitraux), elle traverse l'objet, qu'elle révèle, et se poursuit par le reflet qui est l'ombre-reflet.

La chair nue et démembrée révèle sa vulnérabilité et sa souffrance, et la lumière la traverse comme un feu. 

Toute lumière  transforme, par son jeu, l'objet en sujet ; et ici, elle fait jouer nos notions de matérialité et de spiritualité. De corps, et, par le reflet, de trace.

La fragmentation du corps sexué est troublante, puisque l'objet  en cristal nous semble incassable, et qu'il est ici brisé.

Enfin, tout le corps est  solide, présent et lumineux, seuls les yeux sont noirs, et absents.

(Voir aussi, infra, les rapports possibles avec "Enfant mort avec quatre crânes" de Barthel Beham)

 

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Patrick Neu, cristal, exposition Voyage dans le cristal, musée de Cluny. photographie lavieb-aile 2023.

Patrick Neu, cristal, exposition Voyage dans le cristal, musée de Cluny. photographie lavieb-aile 2023.

Patrick Neu, cristal, exposition Voyage dans le cristal, musée de Cluny. photographie lavieb-aile 2023.

Patrick Neu, cristal, exposition Voyage dans le cristal, musée de Cluny. photographie lavieb-aile 2023.

Patrick Neu, cristal, exposition Voyage dans le cristal, musée de Cluny. photographie lavieb-aile 2023.

Patrick Neu, cristal, exposition Voyage dans le cristal, musée de Cluny. photographie lavieb-aile 2023.

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Sept verres fumés (cristal de plomb, noir de fumée, 10 cm, 2005, 2006, 2019 et 2020) de Patrick Neu.

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L'artiste a gravé sur le noir de fumé, à l'aide d'un stylet, les œuvres de Jérome Bosch (Le Jardin des délices, détail), ou de Paolo Ucello (La bataille de San Romano), Hans Sebald Beham (Trois crânes), Georges De La Tour (Madeleine pénitente à la veilleuse), Jacques-Louis David (l'Enlévement des Sabines), Gustave Courbet (Les demoiselles au bord de la Seine) et Edvard Munch (Le Cri). 

Je présenterai trois de ces verres, liés, pour les deux premiers, au thème de la Vanité, de la méditation sur la mort, devant des crânes..

 

1. D'après Hans Sebald (ou son frère Barthel)  Beham  Trois crânes. Verres et noir de fumée.

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Patrick Neu, cristal, exposition Voyage dans le cristal, musée de Cluny. photographie lavieb-aile 2023.

Patrick Neu, cristal, exposition Voyage dans le cristal, musée de Cluny. photographie lavieb-aile 2023.

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Enfant mort avec quatre crânes, milieu du 16e siècle. Barthel Beham.

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Barthel Beham, Enfant avec trois crânes, 1529.

 

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Patrick Neu, cristal, exposition Voyage dans le cristal, musée de Cluny. photographie lavieb-aile 2023.

Patrick Neu, cristal, exposition Voyage dans le cristal, musée de Cluny. photographie lavieb-aile 2023.

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2. D'après la Madeleine pénitente avec veilleuse de Goerges de la Tour.

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Patrick Neu, cristal, exposition Voyage dans le cristal, musée de Cluny. photographie lavieb-aile 2023.

Patrick Neu, cristal, exposition Voyage dans le cristal, musée de Cluny. photographie lavieb-aile 2023.

Patrick Neu, cristal, exposition Voyage dans le cristal, musée de Cluny. photographie lavieb-aile 2023.

Patrick Neu, cristal, exposition Voyage dans le cristal, musée de Cluny. photographie lavieb-aile 2023.

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3. D'après Le Cri, d'Edvard Munch.

Patrick Neu, cristal, exposition Voyage dans le cristal, musée de Cluny. photographie lavieb-aile 2023.

Patrick Neu, cristal, exposition Voyage dans le cristal, musée de Cluny. photographie lavieb-aile 2023.

Patrick Neu, cristal, exposition Voyage dans le cristal, musée de Cluny. photographie lavieb-aile 2023.

Patrick Neu, cristal, exposition Voyage dans le cristal, musée de Cluny. photographie lavieb-aile 2023.

Patrick Neu, cristal, exposition Voyage dans le cristal, musée de Cluny. photographie lavieb-aile 2023.

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  • : Le blog de jean-yves cordier
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