Un léger sourire aux lèvres, comme si de rien n’était, Omar Al-Bachir a été placé au premier rang pour la photo de groupe réunissant une cinquantaine de dirigeants africains. Alors que s’ouvrait, dimanche 14 juin, à Johannesburg, le vingt-cinquième sommet de l’Union africaine (UA), une scène inédite se déroulait pourtant dans un tribunal de la capitale sud-africaine, à Pretoria.
Le tribunal, saisi par une organisation des droits de l’homme sud-africaine (Southern Africa Litigation Centre ; SALC), venait d’ordonner aux autorités du pays de « prendre toutes les mesures nécessaires » pour empêcher le président soudanais de quitter le territoire. La mesure est en place jusqu’à ce que le juge puisse rendre sa décision sur le fond. Une nouvelle audience était prévue lundi matin. Cette démarche sans précédent n’inquiétait cependant pas le chef de la diplomatie soudanaise, Ibrahim Ghandour, qui soulignait avoir « reçu des assurances au plus haut niveau » pour que sa délégation puisse repartir au complet vers Khartoum à la fin du sommet, prévue lundi.
Omar Al-Bachir fait l’objet de deux mandats d’arrêt émis par la Cour pénale internationale (CPI) en 2009 et 2010, pour génocide, crimes contre l’humanité et crimes de guerre commis au Darfour. Depuis le début du conflit dans l’ouest du Soudan, les Nations unies ont recensé 300 000 morts et 2,5 millions de déplacés.
La CPI n’ayant pas de force de police, elle doit compter sur ses 123 pays membres pour arrêter les suspects. Depuis l’émission des mandats d’arrêt, le chef d’Etat soudanais s’est ainsi rendu sans être inquiété dans six pays – tous africains – parties au statut de Rome, fondateur de la CPI. Egalement membre, l’Afrique du Sud est désormais le septième sur la liste.
Immunité
Jusqu’ici, Pretoria comptait parmi les plus importants soutiens à la CPI sur le continent. A deux reprises, en 2009, lors de l’intronisation du président Jacob Zuma, et en 2010 pour le Mondial de football, il avait fait comprendre à son homologue soudanais qu’il serait arrêté s’il foulait le sol sud-africain.
Dès l’arrivée de ce dernier à Johannesburg samedi 13 juin après-midi, Sidiki Kaba, le président de l’Assemblée des Etats parties, l’organe législatif de la CPI, a rappelé à l’Afrique du Sud son obligation de coopérer avec la Cour. Plus tôt dans la journée, un juge à La Haye affirmait : « Il n’existe pas d’ambiguïté ou d’incertitude à l’égard de l’obligation de la république d’Afrique du Sud d’arrêter et de remettre Omar Al-Bachir à la Cour immédiatement. »
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