Canal+ : Maxime Saada, tout sauf un guignol
En onze ans de maison, le nouveau directeur général de Canal+, qui remplace Rodolphe Belmer, est passé par quasiment tous les métiers.
Par Fabienne Schmitt
On lui donnerait le bon Dieu sans confession, mais c’est un ambitieux. Maxime Saada, le nouveau «DG» de Canal+, officie sur la chaîne cryptée depuis onze ans. Ironie du sort, c’est grâce à Rodolphe Belmer, à qui il succède aujourd’hui, qu’il y est entré pour y piloter la stratégie. Tous deux ont partagé un bureau, autrefois, chez McKinsey. Cet homme discret de 45 ans a connu son heure de gloire en 2013 quand Bertrand Meheut, le président de Canal+, le nomme à la direction des chaînes payantes du groupe (Canal+, Canal+ Cinéma, Canal+ Sport...). Il connaît peu les programmes. Le foot, c’est pas trop son truc, il préfère le cinéma. Mais « il apprend très vite », observe un professionnel de l’audiovisuel.
Stratégie, direction marketing, direction commerciale... A « Canal », Maxime Saada est passé par tous les métiers, ou presque. Surtout, il a dirigé les deux piliers du groupe: les chaînes payantes, donc, depuis deux ans, mais aussi la distribution de chaînes de télévision. A l’heure où l’actionnaire Vivendi pousse à redresser les comptes de Canal+, son profil a séduit.
Le Cube, le nouveau décodeur numérique de Canal+, c’est lui. A la tête de CanalSat, il s’est efforcé de résister à la concurrence qui a fait perdre beaucoup d’abonnés au bouquet ces dernières années. Il a aussi pris des coups, quand la fusion de CanalSat avec TPS, dont Maxime Saada a été l’architecte, a été retoquée par l’Autorité de la concurrence en 2011, pour non respect de certains engagements pris auprès de cette dernière. Du jamais vu ! L’esprit des dirigeants de « Canal », c’est un mélange d’excellence et une bonne dose de roublardise...
L’oeil rieur
Mais la difficulté n’effraie pas ce père de trois enfants, qui derrière son air réservé et poli, cache un tempérament de feu. L’élève plutôt timide de Science Po, aussi titulaire d’un MBA de HEC, s’est forgé le caractère, à ses débuts, à la Datar (Délégation à l’aménagement du territoire et à l’action régionale), à New York, où il a eu l’âpre tâche de convaincre les Américains d’investir en France. Cependant, ce n’est pas parce qu’il a l’oeil rieur qu’il faut le prendre pour un guignol. S’il a claqué la porte du conseil de direction de Science Po, en 2013, c’est parce qu’il n’y avait « pas suffisamment d’impact ». « J’y passais 3 à 4 heures par mois avec une impression de faire-valoir », déclarait-il aux «Echos» en avril 2013.
Une lourde tâche l’attend à la tête de Canal+, bousculé par la double concurrence de BeIn Sports et du service américain de vidéo à la demande par abonnement Netflix. A lui de composer avec Vincent Bolloré, réputé pour son interventionnisme à tous les étages dans les groupes qu’il dirige. Cela lui sera probablement plus facile que pour Rodolphe Belmer, trop habitué à vivre en autarcie depuis des années.