Après une édition 2 où j'avais dû courir en sous régime pour ne pas risquer de ne pas voir la mer, j'avais fait de cette édition 3 mon gros objectif de l'année.
Moins fatigué, un peu mieux entrainé, je voulais pouvoir rejouer et tenter de retrouver le top 5 sur une course à étapes. Il faudra pour cela prendre quelques risques et se faire un peu violence certains jours, mais l'essentiel est de ne pas avoir de regrets au final. Parmi les inscrits, il y a 2 intouchables et un petit paquet de 5-6 coureurs avec lesquels il faudra batailler pour les places de devant, sans faire injure au reste du peloton, je parle là des coureurs qui seront proches d'une moyenne horaire de 10 km/h ou plus, sur les étapes.
Etape 1: URDOS - JACA : 45.1 km en 4h21'54, 3ème.
Toujours une longue montée de 15 km avant de basculer en Espagne, le tracé 2019 est en tout point identique à 2018. 30 km en descente quasi ininterrompue, il faut faire attention à ménager les quadriceps sur cette courte étape. A ma grande surprise, je termine 3ème de l'étape en améliorant mon chrono 2017 de 7 minutes. Pas de sensation de fatigue particulière.
Etape 2: JACA - FISCAL: 45.6 km en 4h43'20, 4ème ex-aequo.
1ère erreur de la semaine, je suis reparti ce matin avec les mêmes chaussures qu'hier, un peu minimalistes, pour cette nouvelle courte étape. Chaussures typées marathon que je pensais laisser ensuite pour les 5 étapes longues. J'ai mal à la cheville et les symptômes d'une tendinite du releveur gauche font leur apparition, dessus du pied qui picote, sensation d'étau qui serre le bas de la jambe, douleur qui monte le long du tibia, c'est malin !
Heureusement, le camion des bagages n'est pas encore passé et au km14, je fait signe à notre bagagiste en chef, Stéphane, de s'arrêter pour que je puisse changer de pneus. Je dois maintenant faire attention pour faire basculer la blessure éventuelle du bon côté, c'est à dire celui où elle disparait. Je me suis fait dépasser pendant mon arrêt et je vais essayer de limiter la casse pour aujourd'hui.
J'avance cahin-caha et j'arrive à garder un oeil sur Carmen qui pointe à la 5ème place de l'étape. J'envisage d'éteindre mon gps pour me concentrer uniquement sur ma course et ma cheville en changeant de foulée, d'appuis et petit à petit, ça revient. Comme par hasard, mon gps se coupe tout seul, je vais donc naviguer l'esprit libéré des contraintes d'allure.
Finalement, après le dernier ravito et au pied de la dernière grosse difficulté avant de basculer vers Fiscal, j'ai 3 cibles en vue: Carmen, Fabrice et Markus ! J'étais moins décroché que je l'imaginais...
Je lance la poursuite et après avoir croqué Carmen, je reviens mètre après mètre sur Fabrice alors que nous avons déjà entamé le tunnel qui marque le début de la descente. La cheville s'est endormie et pour ne pas prendre de risque, je reste avec Fabrice, Markus ayant décidé de finir à fond. Nous terminons ensemble, 4ème ex-aequo. Je reste 3ème au général pour moins de 3 minutes...
Demain, on change de braquet.
Etape 3: FISCAL - ALQUEZAR: 76.5 km en 7h56'39, 3ème ex-aequo.
On commence la série des 5 grosses étapes par une des plus belles mais aussi des plus vallonnées. C'est aussi à partir d'aujourd'hui qu'il y aura 2 départs le matin. 6h pour les moins rapides, 7h pour le groupe des plus rapides au classement. Cela permet de réduire l'amplitude des ravitaillements pour les bénévoles et aussi permettre à tous les coureurs de se voir en course, puisque sauf cas exceptionnel, ceux qui sont partis à 7h finissent par rattraper les autres. On peut prendre des nouvelles des uns et des autres et s'encourager mutuellement, ce sont des moments appréciés de tous.
Le GPS est passé pour le reste de la course dans le fond du sac. Je me connais assez pour pouvoir faire sans, je trouve que c'est même confortable et je suis plus à l'écoute des signaux envoyés par le corps.
La journée pourrait se résumer ainsi: départ prudent, chasse à la Carmen, ensuite au Fabrice (pendant 58 km !) puis fin tranquille avec ce dernier, nous allons unir nos pas pour avaler la dernière grosse bosse de 4 km qui nous amène à Alquezar. Nous finissons 3ème ex-aequo en moins de 8h ! Good job !
Les 2 de devants s'amusent tout seuls, nous on essaie de se faire une place au soleil derrière eux et pour l'instant, la dernière place du podium me convient parfaitement.
Etape 4: ALQUEZAR - SARINENA: 68,8 km en 6h45'35, 3ème.
Alors celle-là, c'est une des étapes qui m'a toujours fait le plus mal au démarrage. On descend sèchement au départ et les quadriceps mis à rude épreuve font souffrir à froid. Mais j'ai décidé de ne pas me faire décrocher comme à chaque fois et je suis dès le départ au contact de Carmen qui part souvent vite. Fabrice et Markus sont un peu en retrait.
Finalement, j'ai bien fait, j'ai des bonnes jambes aujourd'hui et je vais réussir à garder Carmen derrière moi après le R2 (km30) et ce, jusqu'à l'arrivée où je termine à plus de 10km/h malgré un temps de gueux sur les 20 derniers kilomètres. Pluie et rafales de vent finirons par tremper le peloton jusqu'aux os.
4 DNF aujourd'hui ! Michel, Christian, Melany et Vincent....
Rafales de vent et pluie vont continuer toute la nuit, faisant craindre une étape difficile demain, surtout que ce sera la plus longue... je ne parle même pas du linge trempé qu'il faudra enfiler demain matin !
Etape 5: SARINENA - CASPE: 77.8 km en 8h24'53, 3ème.
Cette fois, c'est normalement une étape qui passe bien et comme hier, c'est l'inverse qui se produit. Je n'ai pas de jambes et je peine à garder Carmen dans le viseur. J'abandonne finalement l'idée de rester accroché à son short, je sens que je m'use à petit feu. Au km42, je décide de lâcher la poursuite et de finir comme je peux en limitant l'écart. Je prends néanmoins 20 minutes dans la vue et Carmen revient à 14 minutes au général, une broutille. On rigole d'ailleurs bien à l'arrivée du tour qu'elle vient de me jouer. Au delà du match que l'on joue sur la route, il y a beaucoup de respect entre les coureurs, c'est un des charmes indéniables des courses à étapes.
Le fait du jour, c'est l'abandon de Rémi Duboq, le leader et double vainqueur de la Via Iberica. Il ne s'alimentait quasiment plus depuis 2 jours, peinant ainsi à garder quelques forces indispensables pour ces longues journées sur la route. Il a jeté l'éponge après seulement 5 kilomètres, sans jambes, complètement vidé. C'est toujours désagréable d'apprendre un abandon, même si le malheur des uns.... Je me retrouve donc 2ème du général et un peu plus candidat au podium final, Carmen montant elle aussi sur la boite, Fabrice en embuscade juste derrière avec Markus aux trousses. Le match continue...
Etape 6: CASPE - PINELL DE BRAÏ: 68.5 km en 6h47'37, 1er ex-aequo.
Objectif du jour: contenir la tornade Carmen ! Il faut savoir que Carmen a gagné à peu près toutes les courses à étapes auxquelles elle a participé, tout simplement ! Je n'avais jamais imaginé avant cette Via Iberica être en mesure de faire jeu égal avec elle, même si elle revient de loin depuis 2 ans et une grave blessure à un genou, elle est toujours aussi redoutable. Alors cette étape que j'ai toujours du mal a démarrer avant le 1er ravito, il va falloir que je la prenne par le bon bout et tout de suite !
Je prends les devants finalement plus vite que prévu et à part Maurice qui s'est déjà envolé, je reste calé devant le reste du groupe de 5 parti à 7h. Pour ne rien gâcher, je sens que j'ai les jambes qui tournent bien, comme lors de l'étape 4, ce qui va me permettre de mettre du rythme jusqu'au ravito 3. Ensuite, je vais un peu m'endormir, l'écart semblant creusé, je ne perds donc pas de temps sur mes poursuivants au général. L'étape est une succession de montagnes russes et je la trouve plus agréable que les années précédentes.
Le final est constitué d'une voie verte, ancienne voie ferrée jalonnée de tunnels, puis une longue remontée de 4 km, avant de plonger vers l'arrivée.
Sur la voie verte, donc, j'arrive au dernier ravito (km56-57) où Jean-Louis me demande ce que je fais là. Habitués à nous chambrer, je crois qu'il plaisante et lui réponds que je fais un petit footing sur la voie verte, que l'endroit est sympa. Il est en fait sérieux, il me dit que Maurice n'est pas passé ! Oups, on a perdu le leader !
Je me ravitaille pendant que Jean-Louis prévient la direction de course: il faut retrouver le soldat Maurice !
Au moment où je m'apprête à repartir, Markus surgit du tunnel, ce qui a le don de me sortir de ma léthargie qui dure depuis une vingtaine de kilomètres. Je repars de plus belle, surtout qu'il y a peut-être une victoire d'étape à la clé ! Markus ne va pas lâcher le morceau et nous allons finir quasiment au sprint, pour franchir la ligne d'arrivée ensemble et partager cette victoire d'étape improbable. Je remets par la même occasion Carmen à bonne distance (+27' soit 41' au général) et ça devrait être suffisant pour demain
Après une bonne panique, Maurice sera finalement retrouvé, il avait pris la voie verte dans le mauvais sens, rallongeant l'étape de 25 km, soit 93 km au total ! Il termine 8ème de l'étape 3h05 après Markus et moi. Ce matin, il avait 3h12 d'avance sur moi... Demain, il repartira avec seulement 7 minutes de marge au général.
Je suis mal à l'aise, j'attaque toujours le dernier jour et là ça ne serait pas super correct, mais je le préviens au cas où, tout en espérant qu'il aura bien digéré cette "aventure". J'ai une seconde place à défendre et je ne pourrai pas l'attendre au risque de la perdre si Carmen sort le grand jeu.
Etape 7: PINELL DE BRAÏ - RIUMAR: 69.7 km en 7h10'37, 2ème.
Top départ, "BANZAÏ", je pars donc comme prévu, à fond ! Maurice me dépasse au bout de 50 mètres comme sorti d'une catapulte ! Voilà un problème réglé, il a des jambes et ne va pas me laisser le soin de mettre en péril sa victoire finale. Tant mieux finalement, gagner la Via Iberica m'aurait déplu dans ces conditions. Le meilleur va gagner, c'est parfait. En attendant, j'aimerais bien être quand même le 2ème !
J'ai donc 3 objectifs pour bien finir:
1- Faire second de l'étape donc 2- terminer devant Carmen et 3- si possible en moins de 7h01 pour passer sous les 46h pour les 450 km de la Via Iberica.
Bon, j'en ai raté un, le dernier, pour 9 petites minutes. Aucun regret, j'étais "sec" au sommet du second col et j'ai fini les 30 derniers kilomètres avec les forces qui me restaient. Pas grave, l'arrivée sur la plage de Riumar, pour une fois sous le soleil, sans vent et sans moustiques restera un beau souvenir.
Place aux bières, aux récompenses et au dernier repas entre gens de bonne compagnie.
BILAN 2019:
J'améliore ma moyenne horaire record de 2017 (9.75 km/h) de 0.03 km/h, encore un peu loin des 10 que je rêve de réaliser un jour, mais je me rends compte que sur un parcours aussi exigeant, c'est peut-être utopique. Je termine en 46h10'35 les 450 km, à 9.78 km/h de moyenne.
Je ne ferai jamais mieux que 2ème, c'est déjà incroyable, car ceux qui gagnent sont vraiment toujours beaucoup plus fort que moi, il n'y a même pas le début de commencement du moindre doute là-dessus. Même si j'avais réussi à tenir Rémi en respect sur la dernière étape en 2017, sur une épreuve entière, je n'ai pas le niveau pour rivaliser.
6 podiums en 7 jours dont une victoire d'étape, millésime quasi parfait. Faire mieux est probablement la seule chose qui est désormais impossible, même si sur un malentendu tout peut arriver, on l'a bien vu le 6ème jour.
Un grand coup de chapeau à tous ceux qui ont bouclé cette VI et notamment à Marie-Jeanne, qui demeure avec moi, l'unique rescapée des pionniers de l'édition 0 à avoir bouclé les 1800 km de Via Iberica courus à ce jour ! Pour les autres, rendez-vous en 2021 pour prendre votre revanche !
Un merci particulier à Carmen, Fabrice et Markus pour le match qu'on s'est joué à 4 pour les 2 places restantes sur le podium, c'était sympa de se tirer la bourre tous les jours, en se rendant coup pour coup, toujours dans le respect et la bonne humeur. Hâte de vous retrouver pour de nouvelles aventures.
Bravo à Maurice qui était, et de loin, le meilleur d'entre nous, même si j'aurai aimé que Rémi puisse continuer le duel magnifique que vous vous êtes livré ! J'aurai fini 3ème et aurai été tout aussi heureux.
Bravo aussi à notre général Gérard "Gégé" Denis avec sa trottinette, un vrai gamin de 75 ans !
Un immense et chaleureux merci à toute l'équipe qui nous a dorloté toute la semaine. J'ai trop peur d'en oublier un, alors sachez que vous avez été tous parfaits dans le rôle qui vous a été attribué, un casting de rêve. 450 fois Merci !
On en chie sur la route, mais à chaque ligne d'arrivée franchie, on oublie et on en redemande.
Hasta luego amigos !
Les pointages sont là: https://via-iberica.jimdo.com/l-%C3%A9preuve/pointages/
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Les portraits des participants et bénévoles sont là: https://via-iberica.jimdo.com/galeries-photos/2019/
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