Cet article vous est offert
Pour lire gratuitement cet article réservé aux abonnés, connectez-vous
Vous n'êtes pas inscrit sur Le Monde ?

Marion Maréchal, à la droite des Le Pen

La députée du Vaucluse devrait monter dans la hiérarchie du Front national après le congrès du parti, samedi et dimanche.

Par  (Le Pontet (Vaucluse) Envoyé spécial)

Publié le 13 novembre 2014 à 15h19, modifié le 19 août 2019 à 14h19

Temps de Lecture 5 min.

C’est une journée chaude d’automne au Pontet (Vaucluse). Le soleil frappe les stands où l’on vend des bouteilles de vin « cuvée Marine Le Pen » et des gadgets estampillés FN. Les gens se rafraîchissent à la buvette, en commandant un demi de bière « Jeanne d’Arc » ou un punch.

En ce jour d’octobre où l’été s’attarde, plus de trois cents militants du Front national attendent Marion Maréchal-Le Pen qui fait une rentrée politique tardive. Elle explique la raison : « J’ai accompli un autre de mes devoirs de patriote, qui est de faire des enfants pour payer nos retraites. » Cette sortie résume, au fond, assez bien Marion Maréchal-Le Pen : pour elle, tout est politique.

A 24 ans, elle est devenue la coqueluche de son parti. Jeune, jolie, elle porte surtout le nom qu’il faut dans ce qui reste une entreprise familiale. Marion Maréchal-Le Pen a donc toutes les chances de finir première à l’élection au Comité central, le parlement du parti, organisé dans le cadre du congrès du parti, fin novembre à Lyon. Et de prendre du galon à la direction.

« Je n’ai pas apprécié l’exercice médiatique »

Personne, ou presque, ne prédisait une trajectoire aussi rapide quand la jeune fille est devenue à 20 ans, candidate sur la liste FN en Ile-de-France pour les régionales de 2010. C’est Marie-Christine Arnautu, une amie de la famille Le Pen – tête de liste – qui a voulu recruter la petite-fille du « président ». « Dès qu’elle a su qu’elle allait être candidate, elle a pris tous les textes du conseil régional, et a fait des fiches, des résumés. Alors qu’elle n’était pas éligible », se souvient Mme Arnautu.

France, Le Pontet, le 18 octobre 2014. Conférence de presse de Marion Maréchal Le Pen, avec David Rachline (sénateur FN et Maire de Fréjus) et Joris Hébrard (Maire du pontet) suivi d'un

Mme Maréchal-Le Pen, elle, en garde un souvenir beaucoup plus mitigé. « J’ai été propulsée sur le devant de la scène. Je ne m’attendais pas à ça. Je n’ai pas apprécié l’exercice médiatique. » Les médias ? Une épreuve pour une jeune femme qui est en permanence dans le contrôle. « Je suis angoissée et je stresse », dit-elle. Ce manque d’appétence est très rare au FN, où beaucoup estiment que le poids politique se mesure au nombre d’apparitions télévisées. Fille de Yann Le Pen et de Samuel Maréchal – qui dirigea le FNJ dans les années 1990 –, la jeune élue a été échaudée par les révélations il y a un an sur l’identité de son père biologique, le journaliste Roger Auque, mort en septembre.

Après sa première incursion en politique, Marion Maréchal se mettra en retrait. Elle continue ses études de droit à l’université Paris-II Assas, jusqu’à la campagne législative de 2012. L’histoire est connue : c’est son grand-père, Jean-Marie Le Pen, qui la convainc de se présenter dans le Vaucluse, à Carpentras. Une circonscription très favorable que, du haut de ses 22 ans, Mme Maréchal-Le Pen a arrachée à Jean-Michel Ferrand (UMP). La voilà plus jeune député de l’histoire, seule élue FN, avec Gilbert Collard qui, lui, émarge au Rassemblement bleu Marine.

Un seul rival

L’élue a une équipe de collaborateurs mais celui qui tient un rôle à part est son « assistant parlementaire spécialisé dans les médias et la communication ». Il se présente sous le nom d’Arnaud Stéphan – il ne veut pas dévoiler son vrai patronyme pour des raisons familiales. Ce quadra a un long parcours à l’extrême droite. Il fut notamment membre au début des années 1990 du « directoire » du Groupement de recherche et d’études pour la civilisation européenne (Grece) qui fut le cœur de ce que l’on appelait la Nouvelle droite (Le Monde du 29 avril 2013). Très structuré politiquement, M. Stéphan est un rouage essentiel. Plus qu’un conseiller, il est son bras droit. A son contact, elle a énormément progressé. Ami de sa mère, c’est lui qui a présenté à Mme Maréchal-Le Pen un spécialiste de l’événementiel qui allait devenir son époux.

Marion Marechal-Le Pen le 24 octobre à l'Assemblée nationale.

Au sein du Front national, difficile de trouver des détracteurs. Certains la trouvent un peu « sèche », « cassante ». « C’est l’atavisme familial des Le Pen ! », rigole un historique. « Elle dit ce qu’elle pense, mais c’est toujours mesuré, sans agressivité », nuance un cadre dirigeant du FN qui ne compte pas parmi ses amis. « J’ai une liberté particulière, peut-être que d’autres personnes osent moins le faire », dit-elle, reconnaissant que son patronyme la protège.

Mme Maréchal-Le Pen a un rival : Florian Philippot, le numéro deux du parti. Incarnant deux lignes différentes, les tensions existent entre eux. Comme l’a raconté Le Canard enchaîné, Marion Maréchal-Le Pen n’a pas obtenu de temps de parole pour le congrès. Lorsqu’on l’interroge sur les raisons, elle répond : « Demandez à la vice-présidence. » Comprendre : à Florian Philippot. Lequel nie toute responsabilité dans ce choix.

Complémentaires

Quant à Marine Le Pen, elle ne considère pas aujourd’hui sa nièce comme une rivale. Les deux femmes, que l’on présente volontiers comme opposées, sont, en fait complémentaires. Marine Le Pen a besoin de Marion Maréchal, beaucoup plus droitière, pour s’adresser à son électorat du Sud-Est plus conservateur. Pendant ce temps, Marine Le Pen peut avancer ses pions sur un discours plus « social » défendant un état interventionniste. Ainsi, le FN – mais surtout la famille Le Pen – parle à tout le monde, mais avec des voix différentes. « Il y a une complémentarité, c’est clair. Mais elle se fait naturellement, sans plan préétabli », explique Marion Maréchal. « C’est une surdouée de la politique qui ne se repose pas sur ses lauriers, estime Marine Le Pen. Elle est courageuse, honnête et franche. »

Pour autant, Marion Maréchal-Le Pen s’est donné les moyens d’une certaine indépendance. Elle ne travaille pas avec les prestataires de service du FN, amis de Marine Le Pen. Elle a préféré confier sa communication à une entreprise lyonnaise, Janus international, dirigée par des anciens de l’Action française. Une école de pensée que l’on retrouve souvent lorsque l’on discute avec la députée du Vaucluse, catholique conservatrice. Ainsi, cette admiratrice de Napoléon Bonaparte, peut citer de mémoire les premières lignes du livre que lui a consacré l’historien Jacques Bainville, figure du mouvement maurrassien. « Je ne suis pas monarchiste ! », précise Mme Maréchal-Le Pen.

Newsletter
« Politique »
Chaque semaine, « Le Monde » analyse pour vous les enjeux de l’actualité politique
S’inscrire

A l’occasion du congrès, Marion Maréchal-Le Pen pourrait bien prendre du galon au Front national. « Si Marine Le Pen me le demande », ajoute-t-elle, prudemment. Elle se verrait bien vice-présidente chargée des relations internationales ou de la justice. Dans le premier cas, son père, installé en Côte d’Ivoire, « pourrait avoir un rôle à jouer ». Le FN reste décidément, une affaire de famille.

L’espace des contributions est réservé aux abonnés.
Abonnez-vous pour accéder à cet espace d’échange et contribuer à la discussion.
S’abonner

Voir les contributions

Réutiliser ce contenu

Lecture du Monde en cours sur un autre appareil.

Vous pouvez lire Le Monde sur un seul appareil à la fois

Ce message s’affichera sur l’autre appareil.

  • Parce qu’une autre personne (ou vous) est en train de lire Le Monde avec ce compte sur un autre appareil.

    Vous ne pouvez lire Le Monde que sur un seul appareil à la fois (ordinateur, téléphone ou tablette).

  • Comment ne plus voir ce message ?

    En cliquant sur «  » et en vous assurant que vous êtes la seule personne à consulter Le Monde avec ce compte.

  • Que se passera-t-il si vous continuez à lire ici ?

    Ce message s’affichera sur l’autre appareil. Ce dernier restera connecté avec ce compte.

  • Y a-t-il d’autres limites ?

    Non. Vous pouvez vous connecter avec votre compte sur autant d’appareils que vous le souhaitez, mais en les utilisant à des moments différents.

  • Vous ignorez qui est l’autre personne ?

    Nous vous conseillons de modifier votre mot de passe.

Lecture restreinte

Votre abonnement n’autorise pas la lecture de cet article

Pour plus d’informations, merci de contacter notre service commercial.