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Croissance démographique et développement en Afrique subsaharienne

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par Yannick ZAMBO ZAMBO
Université Paris Dauphine - Master2 Assurance 2012
  

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    MASTER 218 "ASSURANCE ET GESTION DU RISQUE"

    CROISSANCE DEMOGRAPHIQUE ET DEVELOPPEMENT EN AFRIQUE SUBSAHARIENNE

    Sous la supervision de M.Olivier de BODMAN.

    Mémoire soutenu publiquement le 11 Septembre 2012

    Par Francis Yannick ZAMBO

    en présence de

    Monsieur Olivier de Bodman et

    Monsieur Jean Paul Bourillon

    SOMMAIRE

    INTITULE

    PAGE

    SOMMAIRE

    i

    AVANT-PROPOS

    iv

    RESUME

    v

    INTRODUCTION GENERALE

    1

    CHAPITRE I : THEORIE SUR LES LIENS ENTRECROISSANCE DEMOGRAPHIQUEET DEVELOPPEMENT

    4

    I- Les approches théoriques d'analyse des relations entre croissance démographique et développement

    4

    I.1- Les Malthusiens et les néomalthusiens

    4

    I.1.1- La stagnation du niveau de vie

    5

    I.1.2- Risque de pénurie des ressources disponibles

    5

    I.1.3- Croissance démographique et dysfonctionnement économique

    6

    I.1.4- La théorie de la population optimale

    6

    I.2- Les anti malthusiens

    8

    I.2.1- La pression créatrice et le capital humain

    8

    I.2.2- La rareté relative

    8

    I.2.3- La crédibilité des tendances

    9

    I.3- Interventionnisme ou passivité

    9

    I.2.1- La théorie de la transition démographique

    10

    I.2.2- Critique de la théorie de la transition démographique et interventionnisme

    11

    I.2.2.1- Critique de la théorie de la transition démographique

    11

    a)

    11

    b)

    12

    c)

    12

    I.2.2.2- Interventionnisme et politiques de population

    13

    II- Croissance démographique et développement : analyse des interactions à travers le système caractéristique

    14

    II.1- Les éléments constitutifs du système « démographie vs développement »

    16

    II.1.1- Les éléments démographiques du système

    16

    II.1.2- Les éléments du système ayant trait au développement

    16

    II.2- Les interactions entre les éléments du système

    17

    II.2.1- Théories sur la fécondité

    17

    II.2.1.1- La théorie de l'offre et de la demande dans l'économie domestique

    17

    II.2.1.2- La théorie culturaliste

    17

    II.2.1.2- La théorie culturaliste

    17

    II.2.1.3- La thèse institutionnelle

    18

    II.2.1.4- L'approche des contextualistes

    18

    I.2.2- Les effets du développement sur la croissance démographique

    18

    II.2.2.1- Incidence de l'éducation sur la fécondité

    18

    II.2.2.2 -Effets de la santé sur la croissance démographique

    19

    II.2.2.3- Les effets de l'environnement économique sur la croissance démographique

    19

    II.2.3- Les effets de la croissance démographique sur le développement

    21

    II.2.3.1- Les effets de la croissance démographique sur l'éducation

    21

    II.2.3.2- Les effets de la croissance démographique sur la santé

    21

    II.2.3.3- Les impacts de la croissance démographique sur l'environnement économique

    21

    CHAPITRE II : LES INTERACTIONS ENTRE LA CROISSANCE DEMOGRAPHIQUE ET LE DEVELOPPEMENT EN AFRIQUE AU SUD DU SAHARA

    23

    A- ETUDE DESCRIPTIVE ET EXPLICATIVE DE LA SITUATION DE DEVELOPPEMENT ET DE LA CROISSANCE DEMOGRAPHIQUE EN AFRIQUE AU SUD DU SAHARA

    23

    I- La croissance démographique en Afrique subsaharienne

    23

    I.1- Etude descriptive

    23

    I.2- Les facteurs explicatifs de la croissance démographique de l'Afrique subsaharienne

    25

    I.2.1- La fécondité

    25

    I.2.1.1- La demande d'enfants

    27

    a) Les causes historiques d'une demande d'enfants forte : la traite négrière

    27

    b) Les causes culturelles

    28

    c) Les causes socio-économiques

    28

    I.2.1.2- La contraception

    29

    I.2.1.3- L'âge de mariage et la santé de la reproduction

    30

    I.2.2- La mortalité en Afrique subsaharienne

    31

    I.2.2.1- Les conflits armés

    31

    I.2.2.2- La morbidité

    32

    a) Le paludisme

    32

    b) Le VIH SIDA

    32

    I.2.3- Niveau de transition démographique

    33

    II- Le développement en Afrique au sud du Sahara

    34

    II.1- Analyse descriptive de l'évolution du développement en Afrique subsaharienne

    34

    II.2- Analyse explicative

    35

    II.2.1-La faiblesse des revenus

    35

    II.2.2- Un système de santé non optimal

    37

    II.2.3- La scolarisation

    38

    B- INTERACTIONS ENTRE LA CROISSANCE DEMOGRAPHIQUE ET LE DEVELOPPEMENT AU COURS DES DENIERES DECENNIES

    38

    I- Détermination des matrices de corrélation du système « croissance démographique vs développement » en Afrique subsaharienne : degrés de liaison des variables du système et analyse des causalités

    39

    I.1- Etude de la corrélationentre le taux de croissance de la population et l'IDH

    39

    I.1.1- Calcul et interprétation du coefficient de corrélation

    39

    I.1.2- Test de significativité

    40

    I.2- Interprétation des résultats de la matrice de corrélation des facteurs intermédiaires

    41

    II. Interactions entre la croissance démographique et le développement : les résultats empiriques

    42

    II.1- Module «  fécondité vs niveau de vie économique » et perspectives pour l'atteinte de l'OMD 1

    42

    II.1.1- Incidence de la fécondité sur le niveau de vie des ménages

    42

    II.1.1.1- Conséquences macroéconomiques de la fécondité en Afrique subsaharienne et sur l'OMD 1

    42

    II.1.1.2- Incidence microéconomique : effets de la fécondité sur le niveau de vie des ménages

    44

    II.1.2- L'impact du niveau de vie économique sur la fécondité

    45

    II.2-Module «  Croissance démographique vs éducation » et perspectives pour l'atteinte de l'OMD2

    46

    II.2.1- Effets de la pression démographique sur l'éducation

    47

    II.2.1.1- Conséquence dans l'objectif « Ecole Primaire pour tous »

    47

    a) Analyse des données empiriques

    47

    b) Les perspectives pour l'atteinte de l'OMD2

    48

    II.2.1.2- Effets de la croissance démographique sur la qualité des enseignements

    48

    II.3.1.3- Effet de la croissance démographique sur le taux de survie jusqu'à la dernière année du primaire

    49

    II.3.2- Incidences de l'éducation sur la démographie

    49

    II.3.2.1- Effets de l'éducation sur la fécondité

    49

    II.3- Module « croissance démographique vs santé » et perspectives pour l'atteinte des OMD 4 et 5

    52

    II.3.2- Impact de la croissance démographique sur la santé

    53

    a) Analyse de la situation par les données empiriques

    53

    b) Les perspectives pour l'atteinte des OMD 4 et 5

    54

    III- Nécessité d'une analyse ciblée de quelques pays

    55

    CHAPITRE III- CAS PRATIQUE DE TROIS PAYS :

    LE KENYA, LE CAMEROUN ET L'AFRIQUE DU SUD

    56

    A- LE CAS DU KENYA

    56

    I- Etat des lieux de la démographie et du Développement

    56

    I.1- La démographie

    56

    I.1.1- La fécondité

    57

    I.1.2- La mortalité

    59

    I.1.3- Evolution comparée de la natalité et de la mortalité : niveau de la transition démographique

    60

    I.2.- Le développement

    61

    I.2.1- L'indice de développement humain (IDH)

    61

    I.2.2- L'index de santé

    61

    I.2.3- L'index d'éducation

    62

    I.2.4- Le bien-être économique

    62

    II- Interaction entre croissance démographique et développement

    63

    II.1- Module« Fécondité vs éducation, santé et niveau de vie »

    63

    II.2- Module « croissance démographique vs urbanisation »

    65

    II.3- Module «Pression démographique vs environnement »

    66

    B- LE CAS DU CAMEROUN

    66

    I- Etat des lieux de la démographie et du Développement

    66

    I.1- La démographie

    66

    I.1.1- La fécondité

    67

    I.1.2- La mortalité

    68

    I.2.- Le développement 

    68

    I.2.1- L'indice de développement humain (IDH)

    68

    I.2.2- La santé

    69

    II-Interaction entre croissance démographique et développement

    70

    II.1- Module« Fécondité vs éducation, santé et niveau de vie »

    70

    II.2- Module «  croissance démographique vs urbanisation »

    70

    CONCLUSION GENERALE

    72

    ANNEXES

    75

    TABLEAUX, GRAPHIQUES ET CARTES

    77

    BIBLIOGRAPHIE ET SITES WEB

    80

    AVANT-PROPOS

    Le cursus de formation du Master 218 « Assurance et Gestion du Risque » prévoit préalablement à l'obtention du diplôme y afférent, la présentation sous forme de mémoire écrit, de travaux effectués dans le cadre d'un thème de recherche. Les thèmes proposés regroupent un éventail de domaines allant des problèmes assurantiels ou de management des risques à des thématiques beaucoup plus globales mais dont l'intérêt est d'une pertinence avérée.

    C'est dans cette optique que nous avons choisi d'orienter nos réflexions vers la problématique des effets probablement plurivoques entre la croissance démographique que connait soutenue que connait l'Afrique subsaharienne, et le développement de cette région connu pour son retard en la matière. Pour être plus explicite, le sujet sur lequel nous allons nous appesantir dans le cadre de ce travail est : « Croissance démographique et développement en Afrique subsaharienne ».

    L'un des intérêts de ce thème est que son actualité, commencée il y a plus de trente ans, demeure encore actuelle. Cela se reflète à travers la mobilisation qu'il suscite envers les agences de développement internationales, les bailleurs de fonds et autres partenaires, ainsi qu'envers les gouvernements des pays concernés. Le bien-être des populations étant la finalité recherchée, l'objectif des réflexions des uns et des autres est de savoir quelles sont les mesures à prendre quantitativement et qualitativement pour faire de la population un catalyseur du développement ou tout ou moins neutraliser les effets d'une poussée démographique s'il s'avère que ces derniers freinent la marche vers le bien-être commun.

    Bien évidemment, cela place au centre des enjeux le débat autre fois entretenu par les malthusiens et les anti malthusiens sur la nécessité ou non de freiner une expansion démographique forte pour promouvoir le développement.

    D'un autre côté, le développement a,de par ses composantes, une incidence sur les convictions et les habitudes des individus. A ce sujet, une autre interrogation est de savoir si en Afrique subsaharienne, région longtemps dominée par des croyances souvent incompatibles avec divers systèmes de pensée étrangers, le développement influence la croissance démographique de manière à l'ajuster aux ressources disponibles pour une meilleure qualité de vie.

    Notre espoir est que vous puissiez trouver dans notre travail des réponses à ces interrogations. Pour ce faire, nous proposons d'analyser dans les faits, les interactions qu'il y aurait eues entre la croissance démographique et le développement depuis plus de trente ans. Pour cela, nous allons autant que faire se peut, nous baser sur les données parmi les plus actualisées. Aussi cette question ayant déjà fait l'objet d'une abondante littérature, nous ferons souvent référence à des théoriciens et praticiens dont les avis et études en la matière sont faits échos dans la première partie de ce document.

    RESUME

    L'Afrique subsaharienne est depuis belle lurette, la région du monde qui détient bien des records en matière de développement et de démographie. Cela a été mis en évidence dans notre travail par l'état des lieux fait sur la situation du bien-être des subsahariens ainsi que sur les avancées du sous-continent en matière de transition démographique. Il en est ressorti qu'en ce qui concerne le développement, les records sus-évoqués ne constituent indiscutablement pas un motif de satisfaction : l'IDH du sous-continent quoiqu'en perpétuelle amélioration est le plus faible du monde, et le fait classer comme région en voie de développement. Dans les faits, les déterminants de l'IDH sont le reflet de cette situation : les index de santé et de bien-être économique, à savoir l'espérance de vie (54 ans) et le revenu par tête (1265$ qui est catégorisé comme niveau moyen inférieur), sont les plus bas parmi ceux de toutes les autres régions. Dans le domaine de la démographie, le record concerne le caractère élevé de la croissance de la population du sous-continent. La fécondité y reste la plus élevée (4,9 enfants par femme) en dépit d'une baisse régulière qui prouve tout de même que l'Afrique subsaharienne a bel et bien entamé la deuxième phase de sa transition démographique.

    Cependant, contrairement au jugement tranché que nous avons eu ci-dessus sur l'évolution de la situation du développement, il est difficile de se prononcer sur le caractère vertueux ou non d'une forte poussée démographique comme celle qui caractérise encore l'Afrique subsaharienne. La prudence à avoir face à ce sujet s'impose ne serait-ce-que au vu des vives controverses qu'a longtemps suscité le rôle supposé d'une croissance démographique soutenue sur les conditions de vie des populations. Malthusiens et anti malthusiens ont longtemps porté ce débat. Tandis que les premiers étaient assez alarmistes sur les risques de pénurie et de conflit que représente  la population qui s'accroit à un rythme « géométrique » face à des ressources qui évoluent selon une progression « arithmétique », les seconds appelaient à relativiser eu égard au concept de la « pression créatrice » qui amène l'Homme à s'adapter, à être inventif particulièrement pendant les moments de difficultés.Ainsi, Le premier chapitre de ce travail, consacré à la présentation des théories de population et de développement, en fait largement échos dans un premier temps.Ensuite, il montre comment au fil du temps et sur la base d'observations empiriques, les positions quelque peu manichéennes de ces deux écoles de pensées ont été appelées à être nuancées, pour privilégier une approche d'interdépendance entre les sous-systèmes « démographie » et « développement ». Cette approche qui s'est imposé face aux réalités qui prévalaient sur le terrain, a rallié des figures parmi les plus convaincues du débat entre malthusiens et anti malthusiens. Le constat fait est que les déterminants et indicateurs de la croissance démographique et du développement interagissent entre eux selon des règles « causes à effets » complexes, non figées mais dynamiques dans le temps et dans l'espace. C'est sur cette base qui semble faire l'unanimité de nos jours, que nous nous sommes résolus à étudier les relations entre la croissance démographique et le développement en Afrique subsaharienne.

    Mais avant de nous appesantir à proprement dit sur ce thème, une meilleure maîtrise de ses contours s'est avérée indispensable notamment en ce qui concerne les déterminants des résultats actuels sur le développement et la croissance démographique du sous-continent. Ainsi, pour le sous-système démographie, les facteurs explicatifs de la forte fécondité de l'Afrique subsaharienne ont été identifiés via une demande d'enfants qui demeure élevée. Les raisons sont historiques (traite négrière), culturelles (lignage, famille élargie) et socioéconomiques (enfants sources de soutiens financiers, matériels et affectifs). En ce qui concerne l'état de développement, la principale raison source des autres (pauvreté culturelle et monétaire ainsi que précarité des conditions de santé), est sans aucun doute la faiblesse des niveaux de production de ces pays. Il a été identifié que l'une des causes majeures de cette faiblesse de production est la structure rentière qui a longtemps caractérisé les économies de ce sous-continent

    La présentation de ces éléments fondamentaux étant faites, nous avons donc pu aborder l'analyse des interrelations objets de notre travail.

    A cet effet, nous avons commencé par l'étude statistique des corrélations entre les deux sous-systèmes. Celle-ci s'est faite à deux niveaux. Le premier est un niveau globalisant puisqu'étudiant la corrélation directe entre l'IDH et le taux de croissance démographique et le second est plus détaillé étant entendu qu'il analyse les corrélations entre les facteurs directs et intermédiaires des deux grandeurs d'études. Dans tous les deux cas la démarche a consisté à introduire les séries chronologiques des variables concernées dans le logiciel E-views pour obtenir les matrices de corrélation et d'effectuer un test de causalité pour les couples de variables dont les coefficients de corrélation tendaient à traduire l'existence d'une liaison moyenne ou forte. Le test statistique de Granger qui a été utilisé a aussi l'avantage de d'indiquer non seulement si la dépendance dans un couple de variables est univoque ou plurivoque, mais aussi laquelle des grandeurs a une influence sur l'autre. Dans le cas de l'Afrique subsaharienne, les conclusions pour le premier niveau sus-évoqué sont les suivantes: corrélation assez forte entre l'IDH et la croissance démographique, avec une influence univoque et négative de cette croissance sur l'évolution du développement. Pour le second niveau, une constante se dégage : la croissance de la population, dont le reflet dans ces calculs est le niveau de la fécondité, est corrélée négativement à l'index de santé et au revenu par tête. Cette croissance influence donc négativement ces variables surtout dans le cas des conditions de santé des populations pour lequel le coefficient de corrélation est très élevé et les sens de causalité plurivoques.

    Après ces analyses des variables statistiques de liaison qui établissent in fine l'existence d'actions réciproques entre les deux concepts d'étude dans le cas de l'Afrique subsaharienne, nous avons enfin fait un examen plus empirique des causalités et effets induits.

    Il est globalement apparu une confirmation des résultats de l'étude des corrélations ci-dessous, à savoir que la poussée démographique du sous-continent n'a pas jusqu'ici rendu facile la marche vers un mieux-être des populations. L'expansion de la population est même sur la base des résultats de notre étude, l'un des facteurs qui empêcheraient l'Afrique subsaharienne d'atteindre à l'horizon 2015, les Objectifs du Millénaire pour le développement. En effet, en ce qui concerne l'index revenu, la croissance démographique est l'un des éléments qui ont causé la stagnation du revenu par tête réel de la région. Dans le même ordre d'idées, elle constitue un facteur aggravant de pauvreté selon des études réalisées auprès des ménages de certains pays. Dans les domaines sociaux, elle ne permet pas aux pays dont la plupart ont des ressources limités de répondre à l'accroissement continu et soutenu des demandes de prestations sociales liées à l'éducation et à la santé. Cela est d'autant plus vrai que la pyramide des âges de la région, montre que ses pays comptent un nombre important de personnes qui, en plus d'être en âge de bénéficier d'une scolarisation (6-12 ans), ont également une forte propension à la demande des soins de santé (les enfants notamment).Par conséquent, les taux d'encadrement des populations vis-à-vis de ces secteurs demeurent bas, ce qui ralentit la progression de la scolarisation et maintient la mortalité infantile et maternelle à des niveaux qui restent élevés.

    Un autre pan de notre étude a consisté à passer au crible de nos analyses les probables effets du développement sur la population. L'étude sur les corrélations n'a pas véritablement permis de déceler des résultats concluants à ce sujet, certainement parce qu'il aurait fallu des séries chronologiques plus longues étant entendu que le pas de temps des changements de comportements que peut induire le développement est généralement élevé. Mais, l'analyse des données empiriques amène à conclure que le développement accélère le processus de transition démographique. En effet, nos recherches et analyses ont monté que l'éducation des jeunes filles, parce que favorisant une meilleure santé reproductive et repoussant l'âge de mariage, est un facteur de diminution de la fécondité et de la mortalité. En outre, les niveaux de revenu et de développement du lieu de résidence sont apparus comme corrélés négativement à la fécondité. Le développement, en cette qualité de catalyseur de la transition démographique, peut donc créer un cercle vertueux autoentretenu par lui-même.

    Cependant, nos études ayant mis en exergue des disparités profondes entre les pays du sous-continent qui a cessé d'être rigoureusement homogène en matière de transition démographique ou de niveau de développement, il est apparu dans l'analyse de la situation spécifique de deux pays que le développement peut se combiner à l'expansion démographique pour créer des effets pervers. C'est le cas au Kenya ou encore au Cameroun où la quête des acquis de développement a provoqué l'accélération d'une urbanisation difficilement contrôlable. L'exemple du Kenya a également mis en évidence l'opposition entre la recherche d'un bien-être satisfaisant des besoins ponctuels et le développement durable.

    Mais, l'espoir demeure pour l'Afrique subsaharienne. En effet, outre la transition démographique qui se trouve déjà à une phase relativement avancée, les bilans d'étape des Objectifs du Millénaire pour le Développement, effectués dans le cadre de notre travail ont permis de constater que même s'il est difficile pour le sous-continent d'atteindre ces objectifs à l'horizon fixé, des avancées remarquables y ont été faites en une décennie en matière d'éducation, de santé et dans une certaine mesure, de revenu.

    INTRODUCTION GENERALE

    Défini comme une évolution d'ordre qualitatif et une restructuration de l'économie d'un pays en rapport avec le progrès technologique et social1(*), le développement constitue de nos jours l'une des principales quêtes des peuples, le baromètre des avancées relatives au bien-être des populations vivant dans un espace géographique déterminé. Depuis 1990, l'indicateur de développement le plus utilisé est l'indice de développement humain (IDH) calculé par le PNUD. Celui-ci remplaçait ainsi le Produit National Brut (PNB) par habitant utilisé jusqu'alors, et dont la principale limite était de ne prendre en compte que le volet quantitatif des mutations éventuelles. L'IDH est quant à lui un indice synthétique qui prend en compte l'espérance de vie, le niveau d'éducation, et le niveau de vie mesuré globalement par le PNB par habitant. En effet, les variations du PNB par habitant traduisent les évolutions relatives à la productivité économique et à l'amélioration en moyenne, du bien-être matériel des populations.

    Toutes ces variables qui permettent de jauger le niveau de développement, intègrent dans leur détermination les données statistiques de population. L'une des plus observées à cet effet est la croissance démographique définie comme l'augmentation au cours d'une période de temps, du nombre d'individus vivant dans un pays ou une région.

    Depuis belle lurette, la juxtaposition de ces deux concepts que sont le développement et la croissance démographique, dans les analyses ayant trait au bien-être des populations a toujours soulevé de vifs débats controversés. Ces débats portent sur le sens de dépendance entre la croissance démographique et le développement d'une part, et sur les effets que l'un entrainerait sur l'autre d'autre part.

    Ainsi pour l'économiste suédois Goran OHLIN (1926 - 1996):« L'argument simple et irréfutable qui condamne l'expansion démographique des pays défavorisés est qu'elle absorbe une quantité très importante de ressources qui pourraient être employés à faire progresser la consommation et, surtout, le développement »2(*)

    A contrario, l'économiste Esther Boserup (1910-1999)affirmait quant à elle : « la population plus précisément la densité de population, est un facteur de progrès économique ; la population n'est pas déterminée par la richesse mais elle la détermine grâce à la pression créatrice qu'elle génère ».(Esther Boserup citée dans le livre3(*).

    Ces deux positions diamétralement opposées de deux économistes ayant tous deux travaillé pour l'ONU, sont un héritage de deux courants de pensées dont les oppositions se sont cristallisées à la fin du 18e siècle, notamment lors des débats que suscitait la transition démographique en Europe. Pour les décideurs de ce continent, face à la croissance démographique soutenue, il s'agissait de répertorier les leviers d'actions dont l'arbitrage relèverait le niveau de vie de la population. Actuellement, l'Europe estpassée à une phase moderne de son régime démographique. Les problèmes de population et de développement se sont déportés sur d'autres terrains propres à cette autre phase: vieillissement de la population, accroissement naturel stagnant et parfois négatif comme cela a été observé en Russie et dans d'autres pays de l'ancien bloc de l'Est4(*) etc.

    En revanche, la question des politiques à adopter continue de se poser avec acuité dans les pays ou plus largement les régions du monden'ayant pas encore atteint un niveau de développement optimal alors que la population connait une croissance soutenue.

    Le regain d'intérêt s'observe pendant les années 80 (les premières enquêtes de démographie et de santé sont organisées dans 23 pays dont 10 pays africains en 1984) avec une accélération au cours de la décennie 90 (EDS, conférence internationale sur la population et la démographie du Caire en 1994, définition des objectifs du millénaire pour le développement). En effet, les organismes de développement ont recommencé à investir dans la lutte contre la pauvreté. L'enjeu est de permettre à tout Homme de pouvoir satisfaire « les besoins humains fondamentaux » (alimentation, logement, santé, éducation) pour infléchir la tendance à la paupérisation qui menaçait. Celle-ci maintenait et enrôlait de plus en plus de massesde populations dans une trappe à pauvreté qui se caractérise par des conditions de vie d'une extrême précarité.

    L'exemple le plus probant est la situation qui prévaut en Afrique subsaharienne, région du monde sur laquelle va porter notre travail. En effet, cette partie de l'Afrique est celle qui connait les indicateurs de développement les plus en berne tandis que sa fécondité qui reste la plus élevée au monde, en fait la zone où l'on observe la plus forte poussée démographique. Cela a alors contribué à alimenter une nouvelle fois les échanges entre les deux courants de pensée sus-évoquées, chacun faisant feu de tout bois pour démontrer la pertinence de ses positions.

    Entre temps (depuis les années 80 jusqu'à nos jours), la pression démographique obligeant, les gouvernements ont adopté diverses stratégies sous l'impulsion des organismes de développement, des bailleurs de fonds et autres partenaires, ou en fonction de leurs situations internes respectives.Cela s'est fait dans le sillage des théories sur les liens entre les facteurs démo économiques, ou en prenant des mesures que le pragmatisme sociopolitiqueimposait.

    Alorsconformément au contexte de l'Afrique subsaharienne mais sans toutefois avoir la prétention de trancher le débat entre les pro et les anti malthusiens, notre travail se propose de répondre aux questions suivantes : tout au long des vingt-cinq (25) dernières années, si la démographie a eu des effets sur le niveau de développement actuel de cette région du monde, quels sont-ils ? D'autre part, s'il est vrai que le sens des relations entre ces deux concepts est plutôt inversé, le niveau de développement de l'Afrique subsaharienne a-t-il eu des conséquences sur son système démographique ? Enfin et compte tenu des réponses que l'on aura suite aux analyses y afférentes et au regard des politiques actuelles, à quoi pourrait-on s'attendre dans un futur plus ou moins proche d'autant plus que des objectifs de développement ont été fixés ? La réponse à cette dernière question sera également l'occasion d'esquisser quelques recommandations.

    Mais avant de répondre tour à tour à ces questions, la présentation du cadre théorique de notre thématique sera faite au préalable, étant entendu que les analyses relatives à notre sujet ne seront pas faites ex nihilo. Elles auront comme cadre de référence diverses théories développées sur les interactions supposées entre la démographie et le développement. Par ailleurs, les variables d'observation utilisées dans le cadre de notre travail en découleront.

    CHAPITRE I : THEORIE SUR LES LIENS ENTRE

    CROISSANCE DEMOGRAPHIQUE

    ET DEVELOPPEMENT

    Depuis Thomas Malthus notamment la première édition, en 1798, de son livre intitulé « Essai sur le principe de population », un clivage net s'est opéré entre les tenants d'une thèse qui voit en l'accroissement de la population une source de développement et ceux qui pensent que les conditions nécessaires au développement ne peuvent être créées sans une régulation démographique. Les premiers sont communément appelés les antimalthusiens tandis que les autres sont connus sous les appellations de malthusiens et néomalthusiens.

    Cependant, au cours desdernières décennies et sur la base d'études et d'observations empiriques, nombrede spécialistes et chercheurs ont adopté une approche plus nuancée pour analyser les relations entre croissance démographique et développement. Il s'agit de l'approche dite des systèmes qui concilient les deux premières en faisant étatd'un ensemble d'interdépendances dynamiques entre les déterminants de ces deux concepts.

    L'on peut dire que l'approche des systèmes, qui se fonde sur les relations plurivoques entre croissance économique et développement, permet aussi d'avoir une analyse des rapports dans le sens inverse : les effets du développement sur la croissance démographique. Il arrive souvent que les analyses à ce sujet soientéclipsées par les débats sus-évoqués.

    Au-delà de ces discussions idéologiques, les théoriciens se sont également penchés sur une autre question : faut-il intervenir ou non en cas de corrélation négative entre la croissance démographique et le développement ? La réponse à cette interrogation a elle aussi fait apparaitre une controverse entre deux groupes: l'un qui prône l'interventionnisme et l'autre qui croit à un mécanisme d'autorégulation démographique dans le temps, sur la base de la théorie de la transition démographique.

    Dans ce chapitre, la première partie sera consacrée à la présentation des arguments qui fondent les débats entre malthusiens et anti malthusiens d'une part, et l'analyse par systèmes d'autre part. Dans la deuxième partie, la problématique sur l'interventionnisme ou la passivité face à l'accroissement de la population sera abordée.

    I- Les approches théoriques d'analyse des relations entre croissance démographique et développement

    L'on distingue généralement trois approches : celles des malthusiens, des antimalthusiens et l'analyse par système.

    I.1- Les Malthusiens et les néomalthusiens

    Pour les malthusiens et les néomalthusiens,une population qui s'accroit à volonté, sans aucune contrainte, expose l'humanité à des crises majeures dans le futur : stagnation du niveau de vie, pénurie des ressourceset dysfonctionnements économiques. Cela a amené à mettre sur pied la théorie de la population optimale qui définit un seuil au-delà duquel le nombre d'habitants cesse d'être favorable à l'essor socio-économique.

    Mais avant de détailler cette théorie, intéressons-nous d'abord aux menaces que fait planer une expansion démographique non contrôlée sur l'humanité d'après ce courant de pensée.

    I.1.1- La stagnation du niveau de vie

    Elle est évoquée par Thomas Malthus pour qui la population a une faculté d'accroissement extrêmement plus élevéeque celle des ressources devant servir aux besoins humains. Pour lui, « si une population n'est pas freinée, elle s'accroit selon une progression géométrique, alors que les subsistances augmentent selon une progression arithmétique »5(*). Cela condamnerait donc les Hommes à vivre en permanence du minimum, à ne jamais dépasser durablement « le seuil des subsistances ». En effet, pour cette théorie, même s'il y a une découverte importante de gisements des ressources ou un progrès dans un domaine, la hausse potentielle du bien-être qui pourrait en résulter est absorbée dans le temps par le « pouvoir multiplicateur de la population ».

    Les relations entre ressources et populations, vues sous cet angle, font que l'humanité ne peut durablement améliorer son sort, la conséquence étant la stagnation du niveau de vie. D'où la nécessité selon Malthus de freiner la croissance démographique en utilisant soit des moyens de prévention comme le recul de l'âge de départ en mariage, soit alors des politiques de limitation des naissances dans les familles surtout au sein des plus défavorisées.

    Poursuivant sur cette lancée, les néomalthusiens ont alerté l'humanité sur le risque d'une pénurie des ressources disponibles.

    I.1.2- Risque de pénurie des ressources disponibles

    Ce risque est mis en exergue par les néomalthusiens qui font leur apparition à la fin du XIXe siècle, prenant ainsi le contre-pied les thèses natalistes érigées en modèles à l'époque dans plusieurs pays comme la France, suite à des pertes en vies humaines lors des guerres antérieures (guerre franco -prussienne de 1870 par exemple). Des théoriciens anarchistes y voient alors un moyen pour les bourgeois industriels de se doter en capital humain pour prendre des revanches guerrières futures, et avoir de la main d'oeuvre pour différentes tâches. Ces théoriciens suggèrent comme solutions l'utilisation des moyens de contraception, le recours à l'avortement si nécessaire et, plus tard, la sensibilisation des femmes pour que celles-ci soient impliquées dans la prise de décisions sur le nombre d'enfants du couple.

    Ce courant de pensée est relancé au cours de la deuxième moitié du XXe siècle mais avec d'autres motivations : le risque d'insuffisance des ressources indispensables à la vie qui pourrait se réaliser à terme si rien est fait.

    Le « danger » est pris au sérieux par des écologistes tels Paul R. Ehrlich, qui appellent à un ajustement impératif entre les ressources et le niveau numérique de la population si on veut éviter des famines dans un avenir proche et aussi des catastrophes écologiques. Pour eux au vu de la tendance, l'on s'achemine vers une surpopulation par rapport aux disponibilités nutritionnelles existantes. Aussi, la terre ne pourra pas continuer à résister à la surexploitation d'éléments indispensables au maintien de l'équilibre de l'écosystème.

    Pour mieux étayer leurs argumentaires à ce sujet, une étude chiffrée est réalisée, plus connue sous le nom de rapports Meadows, du nom de deux de ses coauteurs. Elle se veut résolument rigoureuse, scientifique et se fonde sur l'interprétation des modèles de consommation, de production et surtout l'évaluation des réserves mondiales de ressources non renouvelables. La conclusion est sans appel : l'on s'achemine vers une pénurie des ressources indispensables.

    Les néomalthusiens se voient ainsi conforter dans leurs recommandations qui préconisent un ralentissement de l'accroissement de la population car il ne peut avoir « une croissance indéfinie dans un monde fini »6(*). Pour y arriver, ce courant propose de mettre sur pied des politiques de régulation démographique dont le respect des règles peut être volontaire ou forcé afin d'éviter des situations de famine, de tension entre les peuples et de dégradation écologique.

    La question des dysfonctionnements économiques que l'expansion démographique peut causer, a également été soulevée.

    I.1.3- Croissance démographique et dysfonctionnement économique

    Pour les néomalthusiens, les dysfonctionnements qu'une croissance élevée de la population peut causer sur l'économie ont pour source la structure par âge.

    En effet, une population qui croit rapidement est généralement jeune, ce qui peut favoriser les dépenses de consommation au détriment de l'épargne. Ainsi, les investissements dans le secteur productif, souvent tributaires de l'épargne, se trouveraient donc globalement ralentis. Un cercle vicieux est ainsi autoentretenu car la raréfaction de l'épargne peut aboutir, ceterisparibus, à une sous-capitalisation conséquente du fait que les entreprises sont obligées d'utiliser le matelas de sécurité que représentent les capitaux propres pour financer leurs investissements.

    Au demeurant, dans un tel contexte, les Etats pour remplir leurs obligations régaliennes consacrent une part importante de leur budget aux investissements sociaux (construction d'école, d'hôpitaux, etc.). Cela est de nature à renvoyer au second plan les mesures incitatives qui peuvent être prises à l'avantage du secteur productif. En effet, lesdites mesures ont souvent des coûts immédiats pour des retombées escomptées à terme. Ce qui n'est pas toujours en adéquation avec les objectifs des gouvernants qui font souvent face à une pression démographique qui requiert des solutions d'urgence.

    I.1.4- La théorie de la population optimale

    Une analyse minutieuse de la position des anti malthusiens permet constater que ceux-ci ne sont pas opposés à l'augmentation de la population de manière absolue, mais d'une manière relative. En effet, il est question d'encadrer l'accroissement de la population de manière à ce que celle-ci ne crée pas d'effet pervers.

    La théorie de la population optimalestipuleà ce sujet qu'il existe un seuil numérique qui devrait être l'objectif en matière de nombre d'habitants pour une zone géographique déterminée.

    En effet, ce seuil est tel que si le nombre d'habitants ne l'a pas encore atteint, la population est alors clairsemée. Elle peine à tirer tous les bénéfices lui permettant d'atteindre le niveau de vie optimal que lui offre potentiellement ses différents environnements. Il s'agit par exemple de l'environnement économique (la taille du marché peut entrainer des économies d'échelle, la division du travail, etc.) et naturelle (exploitation optimale des ressources naturelles).

    Si par contre ce seuil est dépassé, le surplus de population fait perdre les différents avantages sus-évoqués et les environnements sont menacés. Dans l'environnement naturel, les ressources sont surexploitées provoquantdes phénomènes tels que la déforestation, l'érosion des sols, etc. Quant au secteur économique, le phénomène des rendements d'échelle décroissant peut alors entrer en jeu comme dans le secteur agricole où la surexploitation provoquée par la pression démographique a pour conséquence la baisse des rendements des surfaces cultivables. Cela fera que les coûts de production augmentent si l'on veut avoir le même niveau des récoltes.

    Cependant, pour certains économistes comme Goran OHLIN, ce n'est pas le dépassement d'un seuil critique de la population qui ferait problème, mais plutôt les variations brusques des taux de croissance démographique7(*). En effet, le fait qu'il faille mettre les secteurs économique et social en adéquation avec ces variations dans des délais courts, peut être extrêmement couteux : mesures d'incitation à l'embauche, construction des écoles et des hôpitaux, etc.

    I.2- Les anti malthusiens

    Pour aller à l'encontre des thèses malthusiennes, les anti malthusiens fondent, quant à eux, leurs argumentaires sur trois aspects : la pression créatrice, la rareté relative et la crédibilité des tendances.

    I.2.1- La pression créatrice et le capital humain

    Les anti malthusiens, à l'instar de l'économiste et historienne Esther Boserup, ont pris le contre-pied des thèses malthusiennes8(*). Leur principal argument était que la pression démographique, notamment une densité de population élevée, met les Hommes dans des conditions où il est nécessaire de faire preuve d'innovation pour s'adapter. En d'autres termes, « Un besoin ou un problème incite des idées créatives à s'activer pour résoudre ce besoin ou problème, ce qui donne naissance à des inventions ! ».

    Pour les anti malthusiens donc, la population est plutôt un facteur de progrès technique et parler d'une perpétuelle « stagnation du niveau de vie » due à une population qui s'accroit, c'est ne pas tenir compte des facultés d'adaptation de l'Homme. C'est pourquoi certains adeptes de cette thèse vont recommander plus tard de renforcer le capital humain pour avoir une population de « qualité ». Ainsi en allant dans le même sens et pour répondre aux thèses malthusiennes pour lesquelles une forte poussée démographique entraine l'augmentation des

    investissements sociaux « au détriment » des investissements dans le secteur productif, les anti malthusiens estiment que l'éducation et la santé développent la capacité des hommes à innover, et les rend plus ingénieux. Ils recommandent le renforcement du capital humain, pour faire accroître la productivité du travail. L'exemple de certains pays asiatiques (Japon, Taiwan, Singapour) qui n'ont pas considéré les dépenses sociales comme des gouffres financiers mais comme des investissements économiques, a permis d'étayer cette thèse.9(*)

    Par ricochet, la conception des anti malthusiensdes relations entre croissance démographique et développement est que de par la pression créatrice qu'il génère, c'est plutôt le niveau de la population en « qualité »  et en « quantité » qui détermine la richesse et pas l'inverse.

    I.2.2- La rareté relative

    En réponse au rapport Meadows qui parlait d' « une croissance infinie » de la population dans «  un monde fini » de ressources, les anti malthusiens opposent l'argument de rareté relative. En effet, ils estiment qu'il faut analyser le problème de la disponibilité future des ressources sous l'angle de « service rendu » et non de « stock disponible ». Ils font ainsi référence à la possibilité de substitution d'un bien par un autre. Cette possibilité fait que l'utilité que l'on tire d'un bien est pérennisée même si les réserves de celui-ci sont en épuisement. En même temps, les différentes tensions (sociales, inflationnistes) qui peuvent découler de la rareté d'un bien se trouvent ainsi minimisées dans la communauté dès lors qu'on lui trouve un substitut.

    Jacques Veron cite l'exemple du cuivre pour lequel à une certaine époque, malgré des réserves qui ne cessaient de diminuer depuis le XIXe siècle, l'indicateur de rareté qu'est le prix ne suivait pas la tendance haussière attendue10(*). D'une part, cela peut s'expliquer par le fait qu'il n'y avait pas encore « urgence », les réserves bien qu'en s'amenuisant demeuraientsuffisantes pour satisfaire la demande globale. D'autre part, la substitution faisait son effet car suite à une montée des cours du cuivre au début des années 60,la substitution de ce métal par l'aluminium s'était effectuée au cours de l'intervalle de temps 1965-1973approximativement, notamment dans le domaine de l'électricité (fabrication des câbles et fils électriques)11(*). En plus de la substitution, une pénurie d'un bien essentiel peut contribuer à intensifier sa recherche avec des moyens plus sophistiqués. En application de la phrase du chimiste Lavoisier qui disait : « Rien ne se crée, rien ne se perd tout se transforme ! »,  des Solutions comme le recyclage sont également utilisées. En Europe par exemple, autour de 40% des besoins du cuivre proviennent du recyclage de ce métal.

    En d'autres termes: « Parier sur la disparition ou sur la hausse continue des cours des matières premières, c'est parier contre l'ingéniosité humaine ».12(*)

    I.2.3- La crédibilité des tendances

    Les néomalthusiens, notamment dans le rapport Meadows, ont tiré des conclusions sur les stocks disponibles comparativement à la demande future. Les estimations de cette demande future ont été faites par prolongement du « trend » obtenu à partir des données d'observation du passé et/ou d'autres facteurs pouvant influencer la demande.

    Cependant, en tenant compte des paramètres tels que la possibilité de substitution d'un bien avec un autre, les changements qui peuvent subvenir dans les habitudes de consommationdes individus, le discours pessimiste tenu sur la base dudit rapport devrait être nuancé.

    Jacques Veron (1991) estimait à ce sujet : « Des perspectives à long terme de consommation de matières premières ou d'énergie sont inutiles dès lors que se produisent des substitutions »13(*).

    I.3- Interventionnisme ou passivité

    Un autre débat à mi-chemin entre le pragmatisme et la théorie, a concerné l'attitude à adopter face à une pression démographique à laquelle il est difficile de faire face dans un contexte où les structures économiques et sociales n'ont pas la capacité de réaction nécessaire. D'aucuns pensent qu'il n'est pas nécessaire d'intervenir car il existe un mécanisme d'autorégulation de la population qui équilibre inéluctablement dans le temps le nombre d'habitants aux ressources disponibles : c'est la transition démographique. Cette théorie a suscité des réactions de la part de ceux qui pensent qu'elle est difficilement applicable pour répondre aux problèmes de déséquilibre entre les capacités d'absorption des structures socio-économiques des Etats et le boom démographique.

    I.2.1- La théorie de la transition démographique

    Cette théorie, évoquée pour la première fois par le démographe français Adolphe Landry en 1934, a été précisée après la guerre notamment en 1945 par le démographe britannique Franck Notestein. Les auteurs se sont appuyés sur les observations faites dans le cas des pays développés au cours du processus de passage de leurs populations d'un régime démographique traditionnelà un régime moderne. Ces deux régimes sont rigoureusement opposés, le premier désignant une situation où la natalité et la mortalité sont élevées, tandis que le second est caractérisé par la situation exactement inverse.

    L'idée principale est que toutes les populations se caractérisent par un mécanisme automatique de rééquilibrage entre les naissances et les décès. Une croissance démographique élevée apparait ainsi comme la phase transitoire du régime traditionnel sus-évoqué vers le régime moderne, tel que décrit dans le graphique ci-dessous.

    Graphique 1 : schéma général de la transition démographique

    Source : http://fr.wikipedia.org/wiki/Transition_d%C3%A9mographique

    - La pré-transition désigne la phase traditionnelle, caractérisée par une forte mortalité compensée par des taux de natalité élevés. En effet, l'inexistence ou les difficultés d'accès aux soins de santé combinés à la méconnaissance des règles d'hygiène, maintiennent la mortalité infantile à des niveaux élevés. Dans un tel contexte et par souci de remplacement des enfants qui vont probablement décéder à l'avenir, les ménages anticipent en ayant une progéniture nombreuse. La phase traditionnelle se caractérise ainsi par un accroissement naturel très bas, qui peut devenir négatif lors des pics de mortalité atteints pendant les épidémies ou les famines.

    - La phase 1 est l'entame de la transition démographique proprement dite. Avec le développement progressif du pays et l'amélioration des conditions de santé et d'hygiène,l'on assiste à un recul de la mortalité dans son ensemble. Mais du fait que la politique natalisteest solidement ancrée dans les comportements, la natalité ne baisse pas mécaniquement et demeure forte. Il s'ensuit donc une hausse de l'accroissement naturel qui induit des taux de croissance de la population assez élevés de l'ordre de 2 à 3%.

    - La phase 2 est la dernière étape de la transition. Les ménages comprennent qu'ils n'ont plus besoin de faire un nombre élevé d'enfants en prévision à d'éventuels décès futurs, la mortalité ayant chuté. C'est le début de l'utilisation des moyens contraceptifs. L'on observe une baisse plus accélérée de la natalité qui induit une chute de l'accroissement naturel.

    - La post-transition est la période du régime moderne. La natalité chute est quasiment au même niveau que la mortalité. Le taux de croissance de la population est très faible. Le nombre d'habitants stagne. Il peut arriver que ce schéma soit prolongé et qu'on arrive à une situation dans laquelle l'accroissement naturel est négatif, les décès étant plus élevés que les naissances.

    Cette théorie, qui inciterait à ne rien faire face à une poussée démographique dans l'attente que le déséquilibre transitoire soit résorbé dans le temps, a fait l'objet de controverses. Ses limites ont été soulignées.

    I.2.2- Critique de la théorie de la transition démographique et interventionnisme

    I.2.2.1- Critique de la théorie de la transition démographique

    Les limites relatives à cette théorie concernent entre autres, des doutes quant à l'universalité schématique du processus, l'omission de l'impact des phénomènes migratoires sur la démographie et la durée de la transition.

    a) L'universalité schématique du processus : elle a été mise en doute lorsqu'on a observé que dans certains cas, la natalité et la mortalité n'ont pas évolué conformément au modèle de transition qu'on tendait à universaliser. Si l'évolution des pays comme l'Angleterre a été conforme à la théorie, le cas patent de la France constitue l'une des exceptions. En effet, au cours de la période considérée comme transitoire, mortalité et natalité ont simultanément évolué d'une manière quasi identique. Cela a empêché ce pays de connaitre un fort accroissement naturel, le taux de croissance de la population n'ayant pas dépassé 1%14(*). Ce tauxest très en deçà de ce qu'on observe généralement en période de transition, les amplitudes étant souvent de l'ordre de 2 à 3%.

    Graphique 2 : controverse sur l'universalité du processus de transition: cas de la France

    Source : Cours « Histoire de la population mondiale et transition démographique », Professeur Alexandre Avdeev (Institut de démographie de l'Université de Paris 1, Centre PMF), 2010.

    b) Omission de l'impact des phénomènes migratoires

    L'une des limites de la théorie de la transition démographique est qu'elle est basée sur l'hypothèse d'une « démographie fermée », sans échange migratoire avec le reste du monde. Or, les données démographiques sont aussi impactées directement ou indirectement par les migrations. En effet, les données telles que le nombre d'immigrés et d'émigrés affectent directement les variables démographiques numériques, tandis que les pays de provenance des migrants ont une influence sur la fécondité de ces derniers et indirectement sur le volume de population du pays d'accueil.

    Les données de population sont donc la résultante conjointe des variables démographiques naturelles et des variables de migrations, surtout dans les pays où les échanges migratoires sont non négligeables.

    c) La durée de la transition démographique

    Elle est variable en fonction des pays. Il existe ainsi des transitions rapides et des transitions lentes, même sans éléments perturbateurs tels que les guerres, les épidémies, les catastrophes naturelles, etc. Parmi les transitions lentes, il y a celles qui ont caractérisé les pays européens avec une durée allant de un (1) à un siècle et démi (1,5). Les transitions accélérées se sont quant à elles produites dans des zones insulaires telles que Maurice, les îles pacifiques, les Antilles avec une durée allant de 30 à 40 ans seulement ! Il est vrai que les pays en développement devraient en théorie connaitre des transitions plus rapides que celle qu'a connue l'Europe, car ces pays utilisent des techniques médicales déjà existantes alors que l'Europe les découvrait progressivement dans le temps. Mais si l'on fait la comparaison entre les pays en développement, les différences de rythme subsistent.

    Graphique 3 : différences de rythmes de transitions démographiques entre pays endéveloppement

    Transitions Lentes Transitions rapides

    Source : Isabelle Attané et Magali Barbieri « La démographie de l'Asie de l'Est et du Sud-Est des années 1950 aux années 2000 », Population 1/2009 (Vol. 64), p. 7-154. 
    URL :  www.cairn.info/revue-population-2009-1-page-7.htm.

    Cette variabilité à forte amplitude de la durée des transitions démographiques fait qu'il existe une grande incertitude sur la période de temps au cours de laquelle l'équilibre va se restaurer. La possibilité que cette période soit naturellement longue ou alors allongée par des interférences externes (guerres ou épidémies dans les pays en développement), a renforcé l'argumentaire du courant des interventionnistes. Ceux-ci prônent l'action face à une expansion démographique forte dans des pays menacés par le piège de la pauvreté, et ne disposant pas de structures socio-économiques conséquentes.

    I.2.2.2- Interventionnisme et politiques de population

    Les néomalthusiens recommandent l'interventionnisme pour freiner la croissance de la population, de manière à avoir un ajustement entre le nombre de personnes et les ressources disponibles. Les mesures doivent être prises à toutes les échelles, depuis l'unité familiale pour s'étendre à tout le pays. Pour y arriver, les néomalthusiens pensent qu'une adhésion volontaire des ménages à cette action est souhaitable, mais n'excluent pas l'utilisation des moyens coercitifs en cas de refus de se conformer à cette régulation démographique. Pour Paul Ehrlich: « Nous ne pouvons pas seulement traiter les symptômes du cancer de la croissance de la population, le cancer lui-même doit être extrait »15(*)

    C'est à cet effet que les politiques de population antinatalistes ont été élaborées. Celles-ci sont un ensemble de mesures qui incitent une population à faire moins d'enfants. Les moyens utilisés sont la contraception, les interruptions volontaires de grossesses dans les pays où cette pratique est autorisée,la stérilisation et divers avantages aux familles peu nombreuses tels que le versement d'allocations ou des avantages fiscaux. La planification familiale joue un rôle majeur car c'est dans les bureaux de son réseau que la promotion de ces moyens antinatalistes est effectuée. Les politiques coercitives ont également été expérimentées, notamment en Chine avec la politique de l'enfant unique. Mais l'efficacité de ces politiques ne fait pas l'unanimité. Il est reproché à leur promoteur de circonscrire le problème du nombre élevé d'enfant à l'offre des méthodes contraceptives exclusivement, sans s'attarder sur la demande de celles-ci. L'offre étant ici l'accès aux moyens de contraception tandis que la demande concerne la volonté des populations cibles à avoir un nombre limité d'enfants. En effet, même si les moyens contraceptifs sont disponibles, l'objectif peut ne pas être atteint si les ménages n'ont aucune motivation à limiter numériquement leur progéniture.

    Cela pose implicitement la question des déterminants de la demande d'enfants dans un pays, dont certains théoriciens et praticiens ont affirmé que le niveau de développement est l'un des facteurs les plus importants à prendre en compte. Dans cet ordre d'idée, lors de la Conférence mondiale sur la population de Bucarest en 1974, le slogan suivant lancé lors des débats, devint célèbre : « Le développement est le meilleur moyen contraceptif ».

    Le corollaire est que la relation entre le développement et la croissance démographique serait plurivoque. Il existerait donc une interdépendance entre les deux concepts. C'est ce sur quoi repose le consensus beaucoup plus contemporain sur les relations entre le développement et la croissance démographique. Cette approche fait état d'un enchevêtrement d'interdépendances que l'on ne peut analyser que dans le cadre de deux systèmes dont les indicateurs interagissent entre eux : le système démographique et le système de développement.

    II- Croissance démographique et développement : analyse des interactions à travers le système caractéristique

    Sur la base d'observations empiriques des variables démo-économiques et indépendamment des facteurs spatial et temporel, l'on s'est aperçu que les indicateurs de développement avaient une influence sur les variables démographiques. C'est le cas patent du niveau d'instruction de la mère qui a une incidence sur la mortalité infanto-juvénile, ou encore sur l'indice synthétique de fécondité (ISF).

    Tableau : mise en évidence de l'effet du développement sur la démographie

    Source : Philippe Hugon « Variables démographiques et éducation en Afrique ou le mirage des Objectifs du millénaire pour le développement », Mondes en développement 2/2008 (n° 142), p. 83-96.

    Ce type de constat a été fait sur les relations cause à effet d'autres indicateurs de développement sur des variables conditionnant l'expansion démographique (santé et baisse de la mortalité, etc.). D'où la conclusion suivante de Jacques Véron, démographe et spécialiste des interactions entre population et développement : « L'histoire démo-économique montre que l'opposition radicale entre malthusiens et anti-malthusiens doit être dépassée. Une approche moins idéologique conduit à privilégier l'analyse des interactions entre toutes les formes de changements qui affectent une société. On sort alors du cadre des déterminations simples et de la linéarité ».16(*)

    Il s'impose alors une autre approche d'étude qui est celle des systèmes. En effet, un système étant un  ensemble d'éléments interagissant entre eux selon certains principes ou règles17(*), il apparait que cette approche est un cadre de référence permettant de mieux optimiser les analyses sur les relations « développement vs croissance démographique ». Il s'agit de systèmes dont les principes ou règles ne sont pas figés mais évoluent en fonction du temps, de l'espace, du contexte. Ainsi des évènements spécifiques peuvent améliorer une situation dans un lieu à un moment donné et dans un contexte bien précis, et la dégrader sous des cieux différents ou identiques en d'autres circonstances. Goran Ohlin fait d'ailleurs savoir à ce sujet : « La longue série d'évènements qui ont marqué l'expansion démographique au cours de l'histoire indique avant tout qu'il est impossible d'assigner à la population un rôle unique. A certaines époques son évolution a été liée à la mise en valeur de nouveaux territoires .... En d'autres temps, l'accroissement inexorable d'une population a engendré la misère et les troubles... »18(*).

    Un système se caractérisant par ses éléments constitutifs et les interactions entre ces derniers, il serait donc intéressant de présenter les enchainements théoriques qui régissent le système « démographie vs développement ». Tout l'intérêt de cette présentation découle du fait que les analyses subséquentes concerneront les relations entre la croissance démographique et le développement dans le contexte de l'Afrique subsaharienne.

    II.1- Les éléments constitutifs du système « démographie vs développement »

    Il s'agit d'identifier les éléments démographiques et de développement dont la variabilité influe sur les indicateurs de population et de développement. Pour faire des analyses des plus exhaustives, les facteurs proches de ces éléments seront présentés et si nécessaire, leurs facteurs intermédiaires.

    II.1.1- Les éléments démographiques du système

    Il s'agit notamment de :

    - La fécondité a pour unité de mesure « enfants par femme ». L'indicateur que nous retiendrons dans les analyses est l'indice synthétique de fécondité (ISF) qui est le nombre moyen d'enfants qu'aurait mis au monde une femme durant sa vie si, au cours de sa période de reproduction, elle avait eu un taux de fécondité conforme aux taux de fécondité par âge pour cette période (population et société)19(*).

    - La mortalité dont l'indicateur sera le taux de mortalité défini comme le rapport dunombre de décès de l'année à la population totale moyenne de l'année.20(*)

    - La mobilité spatiale qui est le changement du lieu de résidence. Elle résulte des facteurs migratoires.

    II.1.2- Les éléments du système ayant trait au développement

    Ce sont des éléments dont l'association prend en compte les aspects qualitatif et quantitatif du développement. Il s'agit notamment :

    - Du bien-être économique dont l'indicateur sera le revenu par habitant mesuré à travers le PNB par habitant. Ce dernier est le revenu annuel dont disposerait chaque personne d'un pays si les richesses produites par les résidents et les non-résidents étaient réparties équitablement. On utilise souvent le PIB par habitant qui ne prend en compte que les richesses produites à l'intérieur d'un pays quelle que soit la nationalité du producteur.

    - De la santé dont les indicateurs renseignent sur l'état de santé de la population. Les indicateurs qui seront utilisés sont l'espérance de vie à la naissance, la morbidité notamment la prévalence à certaines maladies.

    - De l'éducation avec deux principaux indicateurs : le taux d'alphabétisme et le taux de scolarisation. Le taux d'alphabétisme représente le pourcentage des membres de la population âgée de 15 ans et plus qui savent à la fois lire et écrire et comprendre un texte simple. L'alphabétisme constitue un potentiel pour le développement intellectuel ultérieur de l'individu et une contribution accrue au développement socio-économique et culturel de la société (INDICATEURS DE L'ÉDUCATION, Institut de statistique de l'UNESCO, page 5, Novembre 2009). Quant au taux de scolarisation, il est la  proportion de jeunes d'un âge donné  scolarisés par rapport à la population totale du même âge (Wikipédia, http://fr.wikipedia.org/wiki/Taux_de_scolarisation).

    II.2- Les interactions entre les éléments du système

    Nous allons nous atteler à présenter comment les éléments du système peuvent théoriquement interagirent entre eux. Il s'agira des interactions entre les éléments des deux sous-systèmes « démographie » et  « développement » pris deux à deux d'une part, et s'il y a lieu de possibles interactions entre deux éléments d'un même sous-système.

    D'une manière globale, nous aborderons les probables incidences du développement sur la croissance démographique. Ensuite, nous traiterons de celles de la croissance démographique sur le développement dans le cadre de système qui tranche avec l'approche manichéenne des pro et anti malthusiens.

    Mais, le thème de notre travail portant sur la croissance démographique, nous ferons d'abord une analyse des plus approfondies sur la variable qui est généralement reconnue comme conditionnant le plus l'évolution numérique de la population : la fécondité.

    II.2.1- Théories sur la fécondité

    Ces théories portent essentiellement sur la demande d'enfants des ménages c'est-à-dire les facteurs qui fondent le choix du nombre d'enfants des couples. Quatre sont généralement évoquées :

    II.2.1.1- La théorie de l'offre et de la demande dans l'économie domestique

    L'un des pionniers de cette théorie est l'économiste américain Becker en 1976. Cette théorie stipule que le choix du nombre d'enfant est le résultat de la rationalité économique des ménages. En effet, ce choix est la résultante d'un arbitrage que chaque ménage fait entre les coûts (éducation, santé, temps dépensé avec eux, etc.) induit par la naissance des enfants et les bénéfices escomptés (aide aux travaux domestiques, soutiens financiers et matériel notamment lors de la retraite, affection réciproque, avantages accordés dans certains pays proportionnellement au nombre d'enfants à charge, etc.).

    II.2.1.2- La théorie culturaliste

    Cette approche conteste la précédente car pour ses tenants (Bernard Berelson 1966, John Cleland 1987), il y a eu par le passé un mouvement général de baisses de fécondité dans des régions du monde (Europe entre 1880 et 1930) dont les statuts économiques étaient différents. Pour eux, l'évolution de la fécondité à travers la demande d'enfants est surtout due à « la transformation du contexte culturel et normatif des choix reproductifs avec la production de nouveaux idéaux et de nouvelles perceptions, aspirations et connaissances »21(*). Cette thèse souligne implicitement le rôle de la modernisation des pensées dans le choix du nombre d'enfants et par extension celui de l'universalisation progressive des facteurs de choix y afférents.

    II.2.1.3- La thèse institutionnelle

    Pour cette thèse, l'organisation institutionnelle influence le nombre d'enfants désirés. En effet, les politiques publiques peuvent affecter la demande d'enfants de manière directe ou indirecte. Il s'agit entre autres des mesures publiques incitatives ou coercitives, prises selon qu'on est dans un pays nataliste ou non. On peut également citer le régime foncier et les garanties offertes par l'Etat pour absorber les jeunes dans le marché du travail.

    II.2.1.4- L'approche des contextualistes

    Les contextualistes, dont l'historien anglais Simon Szeter est l'un des pionniers, émettent des réserves sur la capacité des analyses globalisantes à donner des explications fiables sur les changements relatifs à la fécondité. Ils demandent de privilégier les approches micro car pour eux, le nombre d'enfantsd'un ménage est fonction de la situation propre de celui-ci. Dans cet ordre d'idées, ils estiment qu'expliquer les mutations de la demande d'enfants par le mouvement synchrone de la transition démographiqueest limité. La raison principale est que ladite « transition étant « une description métaphorique et résumée du changement, elle ne peut nécessairement apporter une aide dans l'explication causale d'un changement donné dans un cas particulier »22(*).

    Il reste que la demande d'enfants ne peut expliquer à elle seule la fécondité car il est courant que le nombre d'enfants désirés soit inférieur à la progéniture finale. Cela pose le problème de l'accès au moyen de contraception moderne, pour le contrôle du nombre de naissances. Cet accès peut être freiné par la pauvreté culturelle qui traduit le manque d'informations sur la contraception ou par des contraintes religieuses et traditionnelles. L'autre frein est la pauvreté économique qui ne permet pas aux ménages de financer permanemment les dépenses liées à la contraception.

    I.2.2- Les effets du développement sur la croissance démographique

    Il s'agit des effets que l'éducation, la santé et le bien-être économique peuvent avoir sur la croissance démographique.

    II.2.2.1- Incidence de l'éducation sur la fécondité

    L'éducation, à travers les valeurs qu'elle transmet progressivement, développe à terme des convictions et des comportements chez les individus. Ceux-ci sont souvent en rupture avec les valeurs sociales ancestrales inculquées jusqu'alors.

    Ainsi, s'agissant de l'âge de mariage, celui-ci est souvent précoce dans certaines régions du fait que pour la tradition le statut marital confère à l'homme une certaine considération sociale de même que la paternité. En outre, le mariage entre individus peut avoir des motivations ponctuelles, ou étrangères aux concernés comme par exemple sceller l'union de deux familles en guise de remerciement d'un service rendu ou pour des raisons qui relèvent des relations politiques entre deux villages, des clans, etc. Dans ces schémas, d'autres raisons ne tenant pas compte de l'âge des conjoints surtout des filles sont la source des mariages. Or les mariages précoces qui impliquent des grossessesprécoces ont des conséquences néfastes sur la santé physique (accouchements douloureux, mortalité maternelle due à l'immaturité physique des filles, etc.) et psychologiques de ces dernières.

    Comparativement, les connaissances acquises à l'école vont plutôt mettre l'accent sur l'exigence de santé de la mère et de l'enfant. Outre le fait que l'école occupe déjà en elle-même les filles, elle va donc en outre prôner un âge de mariage plus tardif et un espacement des grossesses afin de préserver la santé des mères et des enfants. Toutes choses qui auront pour conséquence de faire baisser la fécondité étant entendu que la période de reproduction chez les femmes est biologiquement limitée (15-49 ans environ).

    Un autre aspect de l'éducation susceptible de faire chuter la fécondité concerne les informations sur les moyens contraceptifs qu'elle donne ainsi que les capacités à les utiliser de la manière la plus optimale.

    Enfin l'éducation des filles leur donne plus tard les aptitudes à appliquer certaines règles d'hygiène et sanitaires (vaccination, suivi des grossesses et des nouveaux nés, etc.) qui font baisser le taux de mortalité infantile et maternelle. Cela peut faire augmenter dans l'immédiat l'accroissement naturel de la population puis le réduire à terme, la propension des familles à avoir une progéniture nombreusen'étant plus motivée par des besoins de remplacement des enfants qui pourraient décéder dans le futur.

    Cependant, pour que l'éducation puisse jouer ce triple rôle qui concourt somme toute à baisser la fécondité et par ricochet à ralentir la croissance démographique, il faudrait un certains nombres de préalables. En effet, le corps enseignant doit faire preuve de pédagogie et l'environnement dans lequel les connaissances sont transmises doit offrir les conditions propices à la concentration et à l'assimilation des connaissances.

    II.2.2.2 -Effets de la santé sur la croissance démographique

    L'état de santé de la population est l'un des principaux déterminants de la mortalité et de l'espérance de vie. La quantité et la qualité des structures de santé, du personnel soignant et l'imprégnation des populations en matière de prévention et de premiers soins, réduit la morbidité et la mortalité. La mortalité étant avec l'émigration le principal facteur direct de décélération de la croissance démographique, il s'en suit que l'environnement sanitaire d'une population joue un rôle de premier plan dans son accroissement. A titre d'exemple, en période d'épidémies, on a pu enregistrer des baissesspectaculaires de la croissance naturelle dues à la surmortalité (la peste noire en Europe au milieu du XIVe siècle a fait baisser la population européenne de 30 à 40%).

    II.2.2.3- Les effets de l'environnement économique sur la croissance démographique

    Bien que son incidence soit indirecte, l'environnement économique est au coeur des problèmes de population et influe sur les individus micro économiquement et macro économiquement.

    Sur le plan microéconomique, le niveau de vie d'un ménage est un indicateur de sa capacité à se procurer les moyens de contraception nécessaires pour équilibrer l'offre (nombre d'enfants qu'un couple peut faire sans aucune volonté d'en limiter le nombre) et la demande d'enfants. Aussi, à travers la capacité des ménages à se procurer certains outils de média massivement utilisés dans beaucoup de pays comme supports d'informations, le niveau de vie est déterminant pour la sensibilisation aux moyens contraceptifs, aux règles relatives à la santé reproductive (intervalle d'espacements des naissances, recul de l'âge de procréation), etc.

    Sur le plan macroéconomique, le contexte économique se trouve en amont et en aval de l'encadrement des populations.

    En amont : les disponibilités financières des Etats conditionnent le volume et la qualité des investissements sociaux devant servir à l'épanouissement des populations. Ces investissements ont à leur tour une incidence certaine sur la fécondité. Si cela a déjà été abordé dans les domaines de l'éducation et des infrastructures de santé (cf. II.2.2.1 et II.2.2.2), il y a aussi le domaine très important de la sécurité sociale universelle. Ladite sécuritédevrait garantir à tous un accès aux soins de santé et une protection contre la perte totale ou partielle du pouvoir d'achat tout au long de la période de retraite. Il est évident que l'inexistence de sécurité sociale universelle est de nature à accroitre ou tout au moins à entretenir un climat d'incertitude et d'insécurité face à de nombreux risques sociétaux. Le corollaire peut être un repli sur les communautés dont la famille est souvent la composante de base, ce qui peut encourager les comportements natalistes de masse qui sont l'un des moteurs des croissances démographiques élevées.

    En aval : c'est le secteur économique qui est chargé d'absorber l'offre de travail après « production » du capital humain par les systèmes éducatif et de santé. Maisce secteur joue ce rôle avec plus ou moins d'efficacité en fonction du régime économique qui prévaut dans un pays. Il peut s'agir d'une économie d'accumulation ou de rente.

    Dans le premier cas, les entreprises cherchent à augmenter leurs stocks d'actifs, ce qui accroit directement ou indirectement les investissements, et donne plus de capacité à ce type d'économie de lutter contre le chômage et le sous-emploi.

    Dans une économie de rente, la priorité est surtout de tirer avantage des ressources naturelles dont on peut bénéficier de par sa position géographique. Les équipements de transformation des matières premières ne constituent pas la priorité, ce qui en plus de limiter la création de valeur, a une incidence négative sur l'investissement. Il s'en suit donc une faible capacité d'absorption des demandeurs d'emploi par le secteur productif auquel l'Etat ne peut se substituer à cause de ses contraintes budgétaires et de son potentiel d'offre d'emploi limité. Pour les diplômés sans-emplois etpour les personnes ayant migré en ville pour valoriser l'instruction reçue ou pour améliorer leurs conditions de vie, la solution est souvent le secteur informel. Celui-ci qui est composé d'un ensemble de micro activités génératrices de faibles revenus, contribue aussi à considérer les épouses et les enfants comme une main d'oeuvre gratuite dont l'accroissement est donc bénéfique. L'informalisation de l'économie peut ainsi encourager à maintenir la fécondité à des niveaux relativement élevés.

    Mais, il conviendrait de souligner que l'on ne peut pas attribuer à la faiblesse des revenus un rôle unique sur la démographie. En effet, dans les villes, les coûts que représentent l'éducation des enfants, leur nutrition, leurs soins de santé, etc., peut a contrario inciter les parents à en limiter le nombre. Cette incidence de la faiblesse du revenu sur la fécondité est connue sous le nom de malthusianisme de pauvreté qui a été observé en Amérique latine. Aussi, les villes sont par excellence les lieux de la modernisation des comportements. Par média, systèmes scolaires et voisinages interposés, on y est le plus en contact des modèles antinatalistes qui semblent s'ériger en règle par nécessité ou pareffet de mode.

    II.2.3- Les effets de la croissance démographique sur le développement

    Inversement, nous allons passer en examen les effets que la croissance démographique peut avoir sur chacun des éléments sus-indiqués comme faisant partie du module« développement ». Ce sujet ayant déjà été abondamment commenté lors de la présentation des débats entre pro et anti malthusiens, l'accent sera surtout mis sur les effets que l'on peut observer selon que la croissance démographique maintien ou fait évoluer le nombre d'habitants en deçà ou au-dessus de certains seuils.

    II.2.3.1- Les effets de la croissance démographique sur l'éducation

    Une population dont le nombre de personnes scolarisables est en dessous de la capacité numérique d'accueil et d'encadrement par les professionnels de l'enseignement, ne permet pas à un pays de réaliser des économies d'échelles. En effet, l'institution éducative est un dispositif comprenant un certain nombre d'équipements dont des salles de classes, des moyens de locomotion, des infirmeries, etc. La sous-utilisation de ce matériel constitue une perte pour l'Etat, chacune des places non occupées étant un «manque à gagner ». La conséquence est que pour les pays disposant des moyens limités, lescentres scolaires et académiques sont prioritairement construits dans des lieux à densité de peuplement « raisonnable ». Cela peut influer négativement les résultats scolaires de ceux dont les contrées sont éloignées, et qui viennent parfois à l'école à piedspour atteindre le centre scolaire le plus proche.

    Cependant, une population qui croit rapidement peut ne pas permettre à l'Etat de s'ajuster à temps en augmentant ses capacités d'accueil. Dans un tel contexte, les effectifs pléthoriques retrouvés dans des salles de classes ont une incidence négative sur la qualité de l'enseignement dispensé. Au demeurant, l'offre insuffisante de formation peut compromettre la généralisation de l'instruction.

    II.2.3.2- Les effets de la croissance démographique sur la santé

    Une forte poussée démographique peut déséquilibrer le nombre de personnels soignants par rapport à la population totale. Pour les médecins par exemple, la densité médicale doit être au moins d'unmédecin pour 3000 habitants. En dessous de ce seuil fixé par l'OMS, la qualité des soinsne répond plus aux normes et peut se dégrader en termes d'accueil des patients, de leur suivi et de la célérité dans les prestations. A cela, il faut ajouter les difficultés que peuvent avoir certains pays à répondre à la tendance haussière de la demande de soins, celle-ci exigeant que de nouveaux investissements soient réalisés.

    II.2.3.3- Les impacts de la croissance démographique sur l'environnement économique

    L'histoire plus ou moins récente de l'humanité amène à conclure que la croissance démographique n'a pas un rôle unique, universel ou mécanique sur la croissance économique.

    En effet, on a vu se réaliser des situations boseruptiennes avec la révolution industrielle pour laquelle l'économiste britannique John Hicks a affirmé que «Dans son ensemble la révolution industrielle qui a marqué les deux cents dernières années n'est peut-être jamais qu'une grande vague séculaire de prospérité provoquée en grande partie par un accroissement sans précédent de la population »23(*). Plus récemment, les exemples du peuple bamiléké du Cameroun et des habitants des hauts plateaux du Kenya sont souvent évoqués, ces peuples ayant fait preuve de beaucoup de capacité d'adaptation et d'ingéniosité économique face à la pression démographique combinée au rationnement des terres qui s'imposaient à eux.

    D'un autre côté, la même histoire enseigne que des situations malthusiennes se sont également produites. A titre d'illustration, l'on pourrait citer la situation vécue actuellement sur le long du lac Tchad24(*)ou encore les conflits fonciers au Rwanda et au Burundi qui ont parmi les plus fortes densités de population en Afrique (250 et 300 hab/km2 respectivement).

    Il s'ensuit donc que face à la croissance démographique, un avantage peut se transformer en handicap et induire un cercle vicieux duquel il est plus ou moins difficile de ressortir, et vice-versa. Force est de constater que tout dépend des aléas et surtout de la capacité des acteurs à s'adapter, à faire jouer les atouts qu'ils ont face à des situations données, et de leurs capacités réactivesafin de préserver leur niveau de vie en situations défavorables.

    Tous ces débats théoriques et la recherche des effets de seuil se poursuivent dans plusieurs régions du monde, mais avec une acuité différente selon les niveaux de développement atteints par les différents pays. Dans les nations dites en voie de développement plus qu'ailleurs dans le monde, cette problématique reste entière. L'Afrique subsaharienne, région du monde la plus à la traine d'un point de vue du développement (cf. tableau II ci-dessous), mérite toute notre attention.

    Tableau II: Classement des régions par niveau de développement : place de l'Afrique subsaharienne

    Régions du monde

    Indice de Développement Humain 2011

    Afrique subsaharienne

    0.463

    Asie du Sud

    0,548

    Asie de l'Est et Pacifique

    0.671

    Etats arabes

    0.681

    Amérique latine et Caraïbes

    0.731

    Europe et Asie centrale

    0.75

    Source : tableau constitué partir des donnéescollectées dans le site http://www.populationdata.net/index2.php?option=palmares&rid=1&nom=idh

    La suite de notre travail aura pour objectif d'analyser le cas pratique de l'Afrique subsaharienne, sur les probables interactions entre la croissance démographique et le développement de cette région du monde. Un examen des perspectives en la matière sera également fait suivi d'un certain nombre de recommandations.

    CHAPITRE II : LES INTERACTIONS ENTRE LA

    CROISSANCE DEMOGRAPHIQUE ET LE DEVELOPPEMENT

    EN AFRIQUE AU SUD DU SAHARA

    Dans ce chapitre, il est question de faire une analyse pratique des interactions entre la croissance démographique et le développement dans le cas de l'Afrique subsaharienne. Ces analyses seront faites dans le cadre de système. Les modules dudit système25(*)seront choisis en fonction de leur capacité à mettre en évidence comment les éléments des deux sous-systèmes (démographique et de développement) interagissent entre eux. Afin de mieux rendre compte des différentes situations y relatives, les analyses seront transversales et longitudinales. Elles seront complétées par l'état d'avancement des pays de la région quant à l'atteinte des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) à quelques années de l'échéance.

    Cependant, passer ces interactions au crible d'une étude minutieuse requiert certains préalables. Il s'agit de l'évaluation de la situation de développement et de la croissance de la population en Afrique subsaharienne.

    A-ETUDE DESCRIPTIVE ET EXPLICATIVE DE LA SITUATION DE DEVELOPPEMENT ET DE LA CROISSANCE DEMOGRAPHIQUE EN AFRIQUE AU SUD DU SAHARA

    L'objectif poursuivi dans cette partie de notre travail est de donner une idée sur le niveau de développement de l'Afrique subsaharienne et sur l'amplitude de sa croissance démographique. En plus des données qui seront présentées, des comparaisons seront faites avec les autres régions du monde pour mieux apprécier la situation. Aussi, un point sera fait sur les facteurs explicatifs des résultats obtenus spécifiquement à cette région du monde.

    III- La croissance démographique en Afrique subsaharienne

    I.1- Etude descriptive

    L'Afrique subsaharienne est une région du continent africain composé de 50 Etats réparties entre 4 sous-régions dont le découpage est politique ou géographique. Sa superficie d'environ 22 millions de Km2abritait en 2011, une population de 853 231 271 d'habitants soit 13% de la population mondiale.

    Carte N°1 : L'Afrique subsaharienne et ses pays

    Source : Démographie et région du monde : Etat et tendance, La démographie de l'Afrique au sud du Sahara des années 1950 aux années 2000, D.TABUTIN, B. SCHOUMAKER

    La population de l'Afrique subsaharienne croit à un rythme soutenu et régulier depuis plus de 50 ans. En effet, son taux de croissance démographique qui est actuellement le plus élevé de toutes les régions du monde (2,5% en 2011), n'est plus passé sous la barre des 2,4% depuis au moins 1960. Cependant, il est en baisse progressive depuis le pic observé au cours des années 80 où il était de 2,9% pendant 8 années consécutives.

    Graphique 4: Evolution du taux de croissance démographique de l'Afrique subsaharienne (1960-2010)

    Ces taux qui sont globalement élevés cachent quelques inégalités entre les quatre principales sous-régions. En effet, c'est l'Afrique de l'Est suivi par l'Afrique Centrale qui sont en tête des taux de croissance démographique élevés, l'Afrique centrale ayant globalement supplanté en moyenne quinquennale l'Afrique orientale depuis 1985-1990. Il faudrait également souligner la baisse continue de l'accroissement de la population en Afrique Australe depuis 1990-1995. Cette sous-région est celle dont l'accroissement de la population est la plus faible avec un taux de croissance démographique de 1% seulement en 2005-2010. Comparativement, ceux des Afrique du Centre, de l'Est et de l'Ouest étaient respectivement de 2,7 ; 2,6 ; 2,5 au cours de la même période.

    Graphique 5 : Taux de croissance démographique par sous-région en Afrique subsaharienne

    Source: United Nations, Department of Economy and social affairs, Population Division.

    I.2- Les facteurs explicatifs de la croissance démographique de l'Afrique subsaharienne

    La croissance démographique s'explique généralement par deux facteurs principaux : les migrations et l'accroissement naturel ;

    Dans le cas de l'Afrique subsaharienne prise comme entité unique, le solde migratoire est négatif depuis au moins 1960 d'après des statistiques de la Division de la population des nations Unis dont les détails sont donnés ci-après.

    Tableau 3 : évolution du solde migratoire de l'Afrique subsaharienne de 1960 à 2010 (en millier)

    Périodes

    1960-1965

    1965-1970

    1970-1975

    1975-1980

    1980-1985

    1985-1990

    1990-1995

    1995-2000

    2000-2005

    2005-2010

    Migrations nettes

    - 184

    - 276

    - 642

    - 587

    - 821

    -1 176

    398

    -1 197

    -1 976

    -1 987

    Source: United Nations, Department of Economy and Social Affairs, Population Division.

    Par ricochet, les taux de croissance démographique élevés que connait cette région sont essentiellement dus à l'accroissement naturel qui a deux facteurs clés : la natalité qui peut être cerné à partir de la fécondité, et la mortalité. Expliquer le niveau élevé du taux de croissance démographique revient à expliquer les niveaux de ces deux phénomènes.

    I.2.1- La fécondité

    Corrélativement à la croissance démographique, l'Afrique subsaharienne est la région du monde ayant le plus fort indice synthétique de fécondité depuis plus de trente ans. Le nombre moyen d'enfant par femme y est encore supérieur à 3 (4,9 en 2010).

    Graphique 6 : Evolution comparative des taux de fécondité de l'Afrique subsaharienne et des autres régions du monde (N.B : ANMO = Afrique du Nord et Moyen Orient)

    Source : généré avec les statistiques de population de la Banque mondiale

    Cependant, l'indice général ne reflète pas la réalité de tous les pays, une grande disparité des indices de fécondité existant. En 2006, on comptait par exemple 09 pays avec un ISF supérieur ou égale à 6 et un seul pays, l'Afrique du Sud, avec un ISF inférieur à trois.

    Carte N°2 : L'indice synthétique de fécondité dans le monde

    Source: «2006 World Population Data Sheet», Population Reference Bureau.

    En 2011, l'ISF de toute la région était estimé à 4,9 enfants par femme.

    Beaucoup d'études de populations africaines se sont consacrées à l'explication du niveau de fécondité de l'Afrique subsaharienne qui reste élevé relativement à celui des autres régions. Dans la plupart de ces travaux, les facteurs explicatifs du sous-système démographie qui reviennent le plus souvent sont : la demande d'enfants, l'accès aux moyens contraceptifs, l'âge de mariage et la santé de reproduction.

    I.2.1.1- La demande d'enfants

    Le nombre moyen d'enfants désirés par les ménages dépasse généralement 4 enfants par femme, bien qu'il existe aussi d'importantes disparités entre les pays de ce sous-continent ou même de la même sous-région. Pour l'Afrique Centrale par exemple, la demande d'enfants au Tchad était estimée à plus de six enfants en 2004 alors que celle du Gabon était déjà d'environ 3,5 en 2000.

    Les déterminants de cette demande dans le cas de l'Afrique subsaharienne sont historiques, culturelles et socio-économiques.

    Graphique7 : nombre d'enfants désiré en Afrique au sud du Sahara (en millier)

    Source : L'Afrique face à ses défis démographiques, sous la direction de Benoit Ferry, éd. AFD, CEPED, Karthala, 2007

    a) Les causes historiques d'une demande d'enfants forte : la traite négrière

    Il s'agit principalement des conséquences entrainées par la traite négrière sur la population subsaharienne. Les personnes ciblées étaient parmi les hommes et femmes les plus vigoureux, capables de travailler durement dans les champs ou de faire des travaux domestiques. Il demeure que ce phénomène qui a commencé au 16e siècle pour finir trois siècles plus tard, a ponctionné l'Afrique d'environ 11 millions de personnes stricto sensu, d'après une étude récente de l'historien  françaisOlivier Pétré-Grenouilleau26(*). Largo sensu, d'autres sources (le théoricien panafricaniste W.E.B Dubois) indiquent que si l'on compte les victimes collatérales (personnes tuées pour refus de devenir esclave, enfants ou autre personnes mortes car un parent a été vendu, etc), les pertes humaines pour l'Afrique seraient le quadruple de toute estimation stricte soit environ 44 millions de personnes. Ce chiffre est très élevé pour la population africaine à l'époque, sachant que ce n'est qu'au début des années 1900 que l'Afrique franchit le cap des 100 millions d'habitants. La traite négrière explique donc en grande partie le dépeuplement qu'a connu l'Afrique pendant longtemps, continent dont la population est passée de 17% à 7% de la population mondiale entre les années 1500 et 1900.

    Arguant de cette situation, certains discours estiment que l'Afrique a un retard démographique qu'il faut combler. De tels arguments sont propices à l'encouragement de comportements natalistes auprès des populations pour des besoins de compensation.

    b) Les causes culturelles

    Elles concernent l'organisation familiale en Afrique subsaharienne. Celle-ci a longtemps été dominée par le concept de la famille élargie et le statut réservé à ceux ayant déjà procréé.

    La famille élargie repose sur le fait que les enfants n'appartiennent pas seulement aux parents, mais à une lignée lointaine qu'il faut pérenniser. Cela fait que les enfants qui en sont issus appartiennent aussi à tous les multiples parents vivants, membres de la lignée. Or plus une lignée est lointaine, plus les potentiels tuteurs sont nombreux. En conséquence, les charges liées à l'éducation des enfants sont communes. En effet, la fierté ressentie par tous les membres de la lignée lors de la réussite d'un des leurs fait que le financement des besoins des enfants ait une tendance au communautarisme. Dans un contexte qui, au regard des chiffres présentés plus haut, a longtemps été pro nataliste, les influences des membres de la famille ne faisant pas partie du couple sont évidentes, avec une importance reconnue aux patriarches qui ne peuvent que voir d'un bon oeil l'élargissement du clan. Dans ce type d'organisation et contrairement à certaines théories présentées précédemment sur le sujet, le nombre d'enfants du couple n'obéit à des contraintes économiquesdudit couple que de manière presque marginale. Un exemple illustratif est la forte mobilité familiale qui a longtemps caractérisé le parcours des enfants d'Afrique, qui pouvaient être accueillis dans les villes ou les campagnes par un membre du clan pour les études ou pour toute autre activité.

    Un autre corollaire de cette vision de la famille est la place de choix que vont donc occuper ceux des membres qui pérennisent le clan. Ils jouissent d'un statut privilégié qui renforce ou crée le désir d'un nombre d'enfants élevé.

    Cette culture a longtemps été l'un des socles de comportements pro natalistes en Afrique subsaharienne. Mais la forte urbanisation que connait le sous-continent a eu pour conséquence la limitation des moyens pour les habitants des villes, « la modernisation des pensées » qui tend à être antinatalistes et l'éloignement des citadins par rapport aux campagnes où les gardiens des traditions vivent généralement. Les comportements changent donc progressivement. Ceci expliquerait en partie la chute progressive des taux de fécondité en Afrique subsaharienne qui même s'ils restent relativement élevés, sont passé de plus de 7 avant 1960 à 4,9 aujourd'hui avec des pays qui sont déjà passés sous la barre de 3 enfants par femme (cf. Carte N°2 ci-dessus).

    c) Les causes socio-économiques

    Elles concernent l'environnement socio-économique qui caractérise la plupart des pays de l'Afrique subsaharienne. Ces derniers sont marqués par un taux de chômageélevésurtout chez les jeunes et en milieu urbain. Parmi les causes, on peut citer la structure des économies qui sont pour la plupart rentières, et l'afflux massif des demandeurs d'emplois compte tenu de la structure par âge de la population qui est constituée en grande partie de potentiels demandeurs d'emplois (plus de 16 ans au sens du B.I.T).

    Graphique 8 : Structures par âge de l'Afrique subsaharienne et de l'Europe

    Afrique subsaharienne

    Europe

    Europe

    Source : United States Census Bureau

    Au demeurant, en Afrique subsaharienne, aucun pays ne dispose pour le moment d'une couverture sociale universelle. Dans la plupart des cas, seuls les fonctionnaires et les travailleurs de sociétés privées d'une certaine envergure disposent d'une couverture sociale avec quelque fois une extension aux membres de leurs familles.

    Le chômage combiné à l'absence de la couverture sociale universelle renforce un sentiment général de précarité, d'incertitude et d'insécurité sociale. Dans cet environnement, les concernés se replient vers des communautés affinitaires auprès desquels ils pourront trouver un réconfort affectif ou matériel en cas de sinistre. La famille étant le regroupement affinitaire de base et celui auquel l'on est naturellement plus proche, avoir un nombre d'enfants non négligeable est un gage de sécurité affective et plus tard de sécurité matérielle quand ceux-ci commencent à participer aux dépenses de la famille. Plus loin encore et par anticipation pour certains, les enfants représentent une certaine assurance vieillesse en l'absence de sécurité sociale universelle.

    En d'autres termes, la réduction du nombre d'enfants ne peut se faire si les couples n'y trouvent aucun intérêt, bien au contraire. J. Coale estimait à ce sujet que « Réduire sa fécondité doit être avantageux. Les circonstances sociales et économiques doivent conduire les couples à juger profitable la réduction de la fécondité »27(*).

    I.2.1.2- La contraception

    Malgré une amélioration sensible de la prévalence à la contraception (cf. tableau 4 ci-dessous), celle-ci dépasse difficilement le seuil de 40% des femmes mariées dans la plupart des pays à l'exception notabledu Zimbabwe, de l'Afrique du Sud, du Kenya, de la Namibie et de l'Ouganda (Source : L'Afrique face à ses défis démographiques, page 266) Les différentes Enquêtes de Démographie et de Santé citent comme causes majeures : en dehors de la proportion de femmes qui sont nées ou devenues stériles, des raisons religieuses, culturelles, sanitaires (cf. l' exemple du Kenya tiré de la dernière EDS en 2008-2009, au titre A-I.1.1 de ce document) et dans une moindre mesure de sensibilisation, sont évoquées comme freins à l'usage des méthodes contraceptives modernes.

    Tableau 4 : évolution de la prévalence contraceptive au Sénégal et au Kenya (1978 -2005)

    Source : L'Afrique face à ses défis démographiques,sous la direction de Benoit Ferry, éd. AFD, CEPED, Karthala, 2007, page 225

    L'utilisation encore limitée des méthodes de contraception modernes expliquent en partie l'écart notable qu'il y a entre le nombre d'enfants désirés et celui du nombre effectif d'enfants, généralement plus élevés dans le cas de l'Afrique subsaharienne. Le nombre de pays (8) où le différentiel (ISF - ISF désiré) est positif étant très inférieur à celui des pays où l'ISF effectif est supérieur à l'ISF souhaité (cf. annexe 1 de ce document).

    I.2.1.3- L'âge de mariage et la santé de la reproduction

    L'âge nuptial est un déterminant essentiel de la fécondité. En effet, la période de conception par excellence pour les femmes est de 15-49 ans. Le mariage impliquant généralement un besoin immédiat d'enfants, il s'ensuit que plus une femme se marie rapidement, plus elle a beaucoup plus de temps de faire un nombre élevé d'enfants avant ses 49 ans par rapport à celles qui se marient tardivement. Or en Afrique, la précocité du mariage a longtemps été une réalité et le demeure encore dans un nombre non négligeable de pays.Par exemple, jusqu'à une époque récente, la quasi-totalité des pays d'Afrique subsaharienne à l'exception des pays d'Afrique australe, avait un âge médian de mariage inférieur à 20 ans avec des pics en Afrique centrale au Tchad (16 ans en 2004), de l'ouest au Niger (15,1 ans en 1998) et au Burkina (17,7 ans en 2003) et en Afrique de l'Est avec l'Ethiopie (17,2 ans en 2000) ou encore le Mozambique (17,5 ans en 2003). L'âge de mariage ayant un pas de temps relativement élevé, il demeure certainement une préoccupation compte tenu des conséquences physiques et psychologiques qu'entrainent les accouchements précoces qu'il induit.

    La santé de la reproduction joue également un rôle sur la fécondité si elle est respectée car, afin de préserver la santé de la mère et de l'enfant, elle préconise l'espacement des naissances à au moins deux ans du dernier accouchement. Cela n'est toujours pas très respecté en Afrique subsaharienne par défaut de sensibilisation, de contraception ou encore de facteurs exogènes à la vie du couple dont la décision d'avoir un enfant peut être la résultante d'une multitude de facteurs dont certains ont déjà été évoqués.

    I.2.2- La mortalité en Afrique subsaharienne

    En bénéficiant des dividendes des progrès sanitaires à travers le monde, du respect progressif des règles d'hygiène et de multiples campagnes de lutte contre les épidémies initiées par les différents gouvernements, la mortalité a amorcé en Afrique subsaharienne une phase baissière depuis au moins les années 1960. En effet, le taux de mortalité a décru sans discontinuer au fil du temps, mais avec des amplitudes différentes. L'on note ainsi une décélération de cette tendance globale à partir de la décennie 1990, puis une évolution dont l'accélération est encore plus prononcée au début des années 2000.

    Graphique 9 : Evolution du taux brut de mortalité de l'Afrique subsaharienne (1960-2010)

    Hormis la morbidité qui est généralement la principale cause de mortalité dans le monde, la spécificité de l'Afrique subsaharienne en la matière, concerne les pertes en vies humaines dues aux conflits armés qui sont également un facteur important.

    I.2.2.1- Les conflits armés

    Cette région du monde est parmi celles qui auront connu le plus de guerres depuis 1960, avec des conséquences sur le niveau de mortalité (Près de dix millions de morts depuis 1960, sans compter les pertes humaines collatérales selon Statistiques mondiales).

    Tableau 5 : principaux conflits et pertes humaines

    Source : Statistiques mondiales,http://www.statistiques-mondiales.com/afrique_guerres.htm

    I.2.2.2- La morbidité

    La morbidité en Afrique subsaharienne reste marquée par deux épidémies, qui sont les premières causes de mortalité sur le continent : le paludisme et le VIH/SIDA.

    a) Le paludisme

    C'est l'une des premières causes de mortalité et de morbidité en Afrique subsaharienne. Le sous-continent, en étant une région tropicale, abrite les espèces de plasmodium les plus dangereuses. Il s'ensuit donc qu'à travers le monde, d'après les statistiques du programme de l'OMS dénommé « Roll Back Malaria », sur les 247 millions de prévalence annuelle de paludisme à travers le monde, l'Afrique subsaharienne en compte 212 millions de cas, soit 86% de la prévalence totale, devant l'Asie (8,5%), le Moyen Orient (3,3%) et l'Amérique.

    Concernant la mortalité, la même hiérarchie est respectée pour l'Afrique au sud du Sahara. Les statistiques du même programme indiquent que le paludisme fait en moyenne annuelle environ 881 000 décès par an, dont 801 000 pour la seule Afrique soit 91% de la mortalité mondiale due à la malaria.

    b) Le VIH SIDA

    En 2010, la prévalence mondiale du VIH/SIDA était estimée à 34 millions de personnes dont 68% en Afrique subsaharienne, soit 23 120 000 cas. Au demeurant, le sous-continent était à lui seul responsable de 70% de nouvelles infections enregistrées à travers le monde en 2010. Les femmes sont plus touchées que les hommes, avec un taux de prévalence qui est plus que le double du taux masculin.

    En ce qui concerne la mortalité, le SIDA a été la cause de la mortalité de 1.400 000 personnes en Afrique subsaharienne en 2010, soit la première cause de décès du sous-continent devant le paludisme (801 000 décès en 2010)

    Tableau 6 : Statistiques du SIDA en Afrique subsaharienne (2010-2011)

    Source : Infection par le VIH/Sida et tropiques Actualités 2012, Professeur Pierre Aubry

    Il y a une inégalité de répartition en Afrique subsaharienne dans la prévalence, l'incidence et le nombre de décès causés par cette pandémie. La situation la plus alarmante s'observe en Afrique Australe, avec le Swaziland qui a eu la plus haute prévalence du monde qui était de 29,9% en 2009. En Afrique du Sud, l'incidence reste élevée même s'il y a eu une amélioration car elle est passée de 2,4% à 1,5% entre 2004 et 2009. Mais ce pays compte le plus grand nombre de cas enregistrés dans le monde qui est de 5,6 millions de porteurs de virus en 2009, soit environ 18% de l'ensemble des cas enregistrés dans le monde. En Afrique orientale, l'amplitude du taux de prévalence est moins élevée avec comme maximum 7% en Ouganda et 3% de minimum au Rwanda. L'Afrique occidentale a une prévalence assez faible car dans la plupart des pays, le taux de prévalence est compris entre 1% et 4%, les pays les plus atteints étant la Côte d'Ivoire 3% et le Nigéria (4%).

    Le nombre cumulé des décès dus au VIH/SIDA en Afrique était de plus de 17 millions en 2005.28(*)

    I.2.3- Niveau de transition démographique

    Globalement, il ressort des analyses et descriptions ci-dessus que la natalité et la mortalité sont en net recul malgré les évènements perturbateurs que peuvent être les guerres et les épidémies. La natalité par l'intermédiaire de la baisse de la fécondité a par exemple chuté de en 1960 à en 2010. Il en de même de la mortalité qui a fait l'objet d'analyses dans le paragraphe I.2.2.2 de ce travail. L'on peut donc affirmer que dans son ensemble et malgré le retard pris par rapport à toutes les autres grandes régions du monde, l'Afrique subsaharienne a déjà entamé la deuxième phase de sa transition démographique marquée par une tendance baissière de sa fécondité.

    Carte N°3 : Transition démographique de l'Afrique subsaharienne par rapport à celle des autres régions du monde (2009)

    Source : http://www.blogg.org

    IV- Le développement en Afrique au sud du Sahara

    D'un point de vue du développement, l'Afrique subsaharienne est la région du monde la moins avancée. Le sous-continent enregistre depuis belle lurette les records de faiblesse de son indicateur de développement humain (IDH), qu'induit le niveau de ses principales variables intermédiaires que sont l'éducation, la santé et le niveau de vie de ses populations.

    II.1- Analyse descriptive de l'évolution du développement en Afrique subsaharienne

    Graphique 10 : évolution comparée IDH

    En s'en tenant à l'indice de développement humain qui est l'indicateur de bien-être le plus communément utilisé, il ressort que l'Afrique subsaharienne dans son ensemble a un niveau de développement faible. Malgré une amélioration ininterrompue depuis au moins le milieu des années 70, cet indice n'a pas encore franchi le seuil de 0,5 qui fait passer de région à indice faible et donc en voie de développement, à région en développement. Avec in IDH de 0,463 en 2011, l'Afrique subsaharienne est la région la moins avancée en la matière.

    Cependant, il est à souligner la différence des niveaux d'indice et donc de développement entre les pays faisant partie de cette aire géographique. A tire d'exemple en 2011, il existe aussi bien des pays à indices (36 pays au total) que des pays à indice moyen(13 pays au total). Les indices des Seychelles et de la République démocratique du Congo (resp. 0,773 et 0,286) constituent les deux extrema.

    Graphique 11 : Disparité entre les IDH des pays subsahariens (année 2011).

    Source : PNUD

    II.2- Analyse explicative

    Le faible niveau de développement de l'Afrique subsaharienne s'explique en grande partie par le retard accusé par le sous-continent en matières de revenu et donc du niveau de vie, de santé et dans une certaine mesure de l'éducation.

    II.2.1-La faiblesse des revenus

    En 2011, le revenu moyen par habitant de l'Afrique subsaharienne était de 1265 $ selon la méthode Atlas de la Banque mondiale qui permet la classification entre pays selon le niveau du RNB/hab. Ce revenu est moins élevéde plus de 30 points que celui de la région qui précède le sous-continent dans le classement. Il s'agit de l'Asie du Sud dont le RNB/habitant en 2011 était de 1299$. L'Afrique au sud du Sahara et l'Asie du Sud sont ainsi les seules régions classées dans la catégorie des régions à revenus moyens inférieurs (976=RNB = 3876). L'écart est considérable entre ces deux régions et le Moyen Orient qui les précède directement dans le classement avec un RNB/hab de 7097$, soit plus de 5800$ de différentiel !

    Malgré l'existence de gaps abyssaux entre les Etats subsahariens eux-mêmes, la faiblesse du revenu est quasi générale, seuls 8 pays sur 48 sont à des catégories plus élevés que celle des revenus moyens inférieurs(supérieurs à 3876 Euros).

    Graphique 12 : Disparité du RNB/hab. entre les pays subsahariens (année 2011, méthode Atlas)

    Source : généré à partir des données de la banque mondiale.

    Les raisons de ce niveau de revenu peu élevé sont entre autres :

    - La structure économique de ces pays dont la plupart ont longtemps été des économies de rente, sans réelle préoccupation de transformation locale des matières premières. Il s'en est suivi un retard dans le décollage de leurs secteurs industriels respectifs, censés créer la valeur et promouvoir les investissements productifs.

    - Les difficultés de mobiliser l'épargne pour le financement de l'économie, parmi lesquelles l'insuffisance des garanties sollicitées par les institutions financières.

    - La faiblesse des revenus qui s'auto entretient par le niveau peu élevé du pouvoir d'achat. Cela ne permet pas, pour les investisseurs nationaux et internationaux, d'augurer un niveau de consommation globale se situant au-delà d'un seuil devant déclencher les effets escomptés (économies d'échelle, création d'un volume de richesses capable de finance les investissements, etc.).

    - Les différents risques présentés par ces pays qui sont préjudiciables pour les investissements étrangers. Il s'agit des risques politiques (guerres, coups d'Etats récurrents, etc.), le manque d'indépendance de la justice, l'environnement réglementaire dont les textes ne garantissent pas souvent une célérité dans bon nombre de procédures administratives.

    - Etc.

    Le niveau de revenu de l'Afrique subsaharienne a pour corollaire un nombre élevé de personnes vivant dans la pauvreté. Ainsi, le pourcentage des personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté (monétaire) est supérieur ou égale à 41% dans dans la quasi-totalité des pays.

    Carte N°4 : pourcentage de la population vivant en dessous du seuil de pauvreté dans les pays de l'Afrique subsaharienne.


    Source : www.indexmundi.com

    II.2.2- Un système de santé non optimal

    Les indications données dans le titre I.2.2.2 du présent chapitre, sur la morbidité et la mortalité en Afrique subsaharienne, démontrent la vulnérabilité des populations en matière de santé. En effet, la plupart des systèmes de santé du sous-continent ne répondent pas aux besoins d'une grande partie de la population. Parmi les raisons de cette défaillance, on peut citer : le manque de moyens devant permettre l'extension du réseau de centres de soins pour une couverture optimale des différents territoires, le manque d'équipements performants dans les centres existants, et l'inexistence d'une assurance santé universelle.

    Alors que la Conférence d'Abuja sur la santé (2001) avait pris comme principale résolution de faire augmenter les dépenses y afférentes par pays à au moins 15% de leurs dépenses publiques totales, seuls 4 pays avaient déjà atteints cet objectif en 2010 (Burkina Faso, Rwanda, Libéria, Malawi). La moitié des pays affectent moins de 10% des ressources à ce secteur et 7 pays y allouentmoins de 5% de leurs recettes budgétaires29(*).

    Le corolaire de toutes ces difficultés est l'espérance de vie à la naissance qui est la plus basse du monde pour les subsahariens. En 2010, cet indicateur de santé était de 55ans pour le sous-continent alors que la moyenne mondiale était de 72 ans.

    Graphique13 : Espérance de vie des principales régions du monde

    Source : généré à partir des données de la Banque Mondiale

    II.2.3- La scolarisation

    Pendant longtemps, la croissance du taux de scolarisation a été plombée par l'inégalité des genres au détriment des femmes. L'instruction des filles était reléguée au second plan dans de nombreuses communautés africaines. L'école était alors perçue comme un moyen pour les femmes, dont la soumission face aux hommes était la règle, de s'émanciper et donc d'aspirer à une relative indépendance. Il faut également mentionner l'insuffisance des revenus familiaux qui faisaient que les garçons soient prioritaires pour l'instruction. En effet, les dividendes à tirer de l'investissement dans la scolarisation des filles étaient considérées comme nulles pour leurs familles d'origine, étant entendu que le capital humain formé allait d'abord bénéficier à la famille et plus largement au clan auquel elles allaient appartenir dès qu'elles allaient se marier.

    A la faveur de l'influence de la modernisation progressive des sociétés, de la sensibilisation continue des populations sur le bien-fondé de l'instruction et de la mise en place de la gratuité de l'école primaire et/ou maternelle dans certains pays (Cameroun, Benin, Kenya, etc.), d'énormes progrès ont été accomplis en Afrique subsaharienne à ces dernières années. A titre illustratif, l'écart du taux de scolarisation des garçons et des filles à l'école primaire était de 8 points en 1999, et se situe en 2010 à 4 points. Cela a également contribué à tirer vers le haut le taux de scolarisation global, celui des garçons ayant continué à croître.

    Graphique 14 : évolution du taux de scolarisation global et du genre en Afrique subsaharienne.

    Source : généré à partir des données de la Banque Mondiale

    Cette évolution d'ordre quantitative constitue un motif d'espoir pour un développement accru du sous-continent dans les années futures, le capital humain étantune composante essentielle du développement d'une région.

    C- INTERACTIONS ENTRE LA CROISSANCE DEMOGRAPHIQUE ET LE DEVELOPPEMENT AU COURS DES DENIERES DECENNIES

    Dans cette partie de notre travail, l'objectif est de mettre en exergue s'il y a lieu, les effets réciproques que les indicateurs ou les facteurs de la croissance démographique et ceux du développement ont entretenus entre eux au cours des dernières décennies en Afrique subsaharienne. Notre démarche sera une approche par les modules (sous-systèmes des éléments de la famille de chaque concept pris deux à deux). Ces derniers seront choisis en fonction de la disponibilité des données et autres observations permettant la mise en évidence des effets univoques ou plurivoques entreleurs éléments constitutifs.

    Mais avant d'aborder cette phase de l'analyse, il serait intéressant de faire une étude statistique sur l'amplitude des liaisons auxquelles on pourrait s'attendre entre les variables prises deux à deux ainsi que sur le sens des variations desdites variables.

    V- Détermination des matrices de corrélation du système « croissance démographique vs développement » en Afrique subsaharienne : degrés de liaison des variables du système et analyse des causalités

    Les coefficients de corrélation seront calculés puis analysés d'une manière générale puis détaillée. Le calcul général renvoie à l'interprétation du coefficient de corrélation entre l'indice de développement humain et le taux de croissance démographique en utilisant les valeurs prises par ces deux variables dans le passé. Le calcul détaillé de cette corrélation concernera quant à lui les corrélations croisées entre les variables intermédiaires de cesgrandeurs prises deux à deux.

    I.1- Etude de la corrélation entre le taux de croissance de la population et l'IDH

    Cette étude comporte deux phases à savoir le calcul du coefficient de corrélation et le test de significativité avec lequel on validera cette première phase en vérifiant que la relation n'est pas due au hasard au cas où elle est pressentie.

    I.1.1- Calcul et interprétation du coefficient de corrélation

    Le coefficient de corrélation est généré à travers le logiciel statistique E-views d'où provient le tableau ci-dessous :

    Interprétation et analyse des résultats

    Ce coefficient est de -0,66 et traduit deux réalités :

    - L'existence d'une corrélation assez élevée (amplitude de 0,66/1) entre la croissance démographique et le développement en Afrique au subsaharienne.

    - Les deux variables (IDH et le taux de croissance de la population) évoluent globalement en sens inverses.

    I.1.2- Test de significativité

    Ce test qui permet de vérifier l'existence d'un lien de causalité entre les deux variables, est également réalisé à l'aide du logiciel E-views. In fine, il consiste à interpréter la valeur prise par le coefficient de Fisher (F-Statistique) au seuil de 5%. L'hypothèse nulle H0du test est : « la corrélation n'est pas significative », en d'autres termes « il y a absence d'un lien de causalité de la variable de référence sur la variable explicative ». Si la valeur de F-statistique est élevée, alors la corrélation est significative. Cela revient également à dire que la probabilité de détermination du seuil de l'erreur associée au test est supérieure à 5% (selon le paramétrage de E-views).

    Les résultats du test se trouvent dans le tableau ci-dessous, généré via le logiciel

    E-iews:

     

    Pairwise Granger Causality Tests

    Sample: 1980 2011

     

    Lags: 2

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

     NullHypothesis:

    Obs

    F-Statistic

    Prob. 

     
     
     
     
     
     
     
     

     IDH does not Granger Cause CROISSANCE_POP

     16

     1.68016

    0.2349

     CROISSANCE_POP does not Granger Cause IDH

     4.88011

    0.0332

     
     
     
     
     
     
     
     

    Interprétation et analyse

    - Sur l'influence qu'exercerait l'IDH sur le taux de croissance de la population, la probabilité de se tromper en affirmant que cette influence joue un rôle majeur dans le sens et l'amplitude de variation de l'IDH est de 23%. Par rapport au paramétrage du logiciel statistique utilisé, cette probabilité est très élevée car elle est supérieure au seuil de 5% fixée comme seuil de tolérance de la possibilité de se tromper. On accepte donc l'hypothèse nulle H0. En d'autres termes, s'il y a une influence de l'IDH sur les amplitudes et le sens de variation du taux de croissance de la population, cette influence est très minime en Afrique subsaharienne.

    - Sur l'incidence qu'aurait le taux de croissance de la population sur l'évolution et le niveau de l'IDH, la probabilité de se tromper en affirmant que cette incidence existe est de 3%. Elle est inférieure au seuil de 5% fixée dans le logiciel. On rejette donc l'hypothèse nulle H0 et on conclut que le taux de croissance démographique exerce une influence certaine sur le niveau de développement dans le cas de l'Afrique au sud du Sahara.

    Il conviendrait, pour ne pas tirer une conclusion partielle, d'affiner l'analyse en étudiant les corrélations entre les facteurs intermédiaires de l'IDH et du taux de croissance démographique.

    I.2- Interprétation des résultats de la matrice de corrélation des facteurs intermédiaires

    Ci-dessous, les matrices des corrélations et des résultats des tests de causalité :

    Interprétation des résultats

    D'un point de vue pratique,nous allons interpréter les chiffres découlant des associations qui nous paraissent pertinentes. Il s'agit des couples « espérance de vie et indice synthétique de fécondité », « revenu par habitant et indice synthétique de fécondité », « espérance de vie et revenu par habitant ».

    - Espérance de vie et indice synthétique de fécondité : il s'agit de voir si la fécondité baisse avec l'allongement de la vie comme semble le postuler la théorie de la transition démographique. Le coefficient de corrélation est de -0,86, ce qui semble traduire une forte liaison entre les deux grandeurs et des sens de variations inverses comme le postule la théorie.De plus, la probabilité de l'incidence de l'espérance de vie sur la fécondité est inférieure à 5% (0,15%), ce qui traduit aussi causalité assez marquée.

    - Revenu par habitant et indice synthétique de fécondité : il s'agit de voir si les statistiques de liaison corroborent les observations selon lesquelles les régions les moins aisées sont les plus fécondes et si, comme on le verra dans le cadre de ce travail plus tard, la taille de la famille est un facteur aggravant de pauvreté. Le coefficient de corrélation est de -0,15 et parmi les probabilités du test de causalité, seule celle de l'incidence de l'ISF (0,42%) sur le revenu moyen est confirmée. On conclut donc à un impact relatif de la fécondité sur le niveau de revenu en Afrique subsaharienne.

    - Espérance de vie et revenu par habitant : il est question de savoir si d'après les données et les calculs effectués, le revenu par habitant conditionne de manière globale la durée de la vie humaine. Si le coefficient de corrélation (0,5) semble traduire une liaison assez forte entre les deux grandeurs, le test de causalité n'est pas concluant (probabilité = 6%).

    Les conclusions tirées des valeurs prises par les différents indicateurs statistiques calculés précédemment ne constituent pas une base de généralisation déterministe, contraire aux caractéristiques d'un système dynamique. Mais, ces valeurs rendent compte d'une tendance globale de long terme qu'il serait erroné de vouloir systématiquement appliquer à chaque cas de figure. Les conclusions qui ont été tirées ne peuvent servir que de cadre de référence auquel il faudrait adjoindre les spécificités de chaque situation prise dans son contexte spatio-temporel. D'où la nécessité de faire une analyse empirique des interactions qu'il y aurait eu au cours des dernières décennies entre la croissance démographique et le développement en Afrique au sud du Sahara.

    VI- Interactions entre la croissance démographique et le développement : les résultats empiriques

    Compte tenu des critères de choix énoncés plus haut (préambule de la partie B- du chapitre II), les modules que nous utiliserons pour nos analyses sont les suivants :« fécondité vs niveau de vie », « croissance démographiquevséducation »,« croissance démographique vs santé ».

    II.1- Module «  fécondité vs niveau de vie économique » et perspectives pour l'atteinte de l'OMD 1

    Le module « fécondité vs niveau de vie économique », a mis en évidence les interactions entre la croissance démographique et le développement.

    II.1.1- Incidence de la fécondité sur le niveau de vie des ménages

    Les effets de la fécondité élevée en Afrique subsaharienne peuvent être traités suivant deux aspects qui sont in fine interdépendant : un aspect macroéconomique et un aspect microéconomique.

    II.1.1.1- Conséquences macroéconomiques de la fécondité en Afrique subsaharienne et sur l'OMD 1

    a) Analyse des données empiriques

    Les effets d'une fécondité qui demeure élevée en Afrique au sud du Sahara se font ressentir sur le niveau de revenu qui est déjà faible.

    En effet, après l'Asie du Sud (6,1%) et le moyen Orient (4,4%), l'Afrique subsaharienne est la région du monde qui a enregistré le taux de croissance économique le plus élevé en moyenne annuelle au cours des deux dernières décennies. Cette croissance est d'un peu plus de 3,5%. Cependant, ce résultat est à relativiser si on le compare au taux moyen annuel de croissance de la population au cours de la même période. Celui-ci est de 2,6%, soit le plus élevé au monde. La conséquence est que la croissance démographique actuelle est l'un des principaux facteurs qui plombent la croissance du revenu par habitant. Ce dernier (1265$ en 2011) demeure éloigné du seuil au-delà duquel la région aura un niveau de revenu moyen supérieur (RNB=3876), capable de donner aux différents gouvernements plus de marges pour lutter contre la pauvreté. Ainsi cette forte croissance démographique est en partie responsable du fait que les dividendes tirés de la croissance économique, ne permettent de réduire le nombre de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté qu'à un rythme relativement lent.

    Graphique 15 :

    b) Les perspectives pour l'atteinte de l'OMD 1

    Ce rythme de la réduction de la pauvreté, bien qu'encourageant, est un handicap pour l'atteinte du premier Objectif du Millénaire pour le Développement (OMD1) qui est de réduire de moitié l'extrême pauvreté et la faim entre 1990 et 2015. Sachant qu'en 1990, 58% de personnes étaient extrêmement pauvres en Afrique subsaharienne, cet objectif envisage donc de porter ce pourcentage à environ 30% au maximum, soit une baisse attendue de quelques 28 points. Un premier bilan d'étape fait constater que le taux de pauvreté (1,25$/jour) est passé de 58 à 51% dans le sous-continent entre 1990 et 200530(*), soit 7 points de moins sur le premier tiers du temps total d'observation. Ce bilan laisse donc planer des doutes quant à l'atteinte de l'OMD 1 d'autant plus que des estimations de taux de croissance économique nécessaire à l'atteinte du résultat escompté ont été faites. En tenant compte, entre autres choses, de la poussée démographique que connait le sous-continent, les organismes de développement avaient fixé à environ 7% la croissance économique annuelle qu'il fallait en Afrique subsaharienne entre 2000 et 2015 pour l'OMD 1. Cette croissance a été de moins de 5% en moyenne entre 2000 et 2011.

    II.1.1.2- Incidence microéconomique : effets de la fécondité sur le niveau de vie des ménages

    En Afrique subsaharienne, la taille du ménage est avec le sexe du chef de famille et son niveau d'éducation, l'un des déterminants du niveau de vie des ménages. Plusieurs études découlant d'enquêtes auprès des ménages pour l'évaluation de la pauvreté, ont mis en évidence la corrélation négative entre le nombre de personnes constituant un ménage et le niveau de revenu principalement en zone urbaine. Les familles ayant plus de personnes ont tendance à avoir un niveau de vie inférieur à celles qui en ont moins. Cela est dû pour une part, à un niveau élevé des charges familiales alors que le revenu de financement stagne ou n'est pas assez élevé. Ce phénomène a notamment été observé en Afrique de l'ouest et centrale où les résultats montrent dans le cas de la République Démocratique du Congo, que le taux de pauvreté est d'environ 44% pour les ménages ayant 3 membres et de près de 80% pour ceux qui sont constitués de plus de cinq personnes31(*).

    Graphique 16 :Niveau de pauvreté en fonction de la taille des ménages en Afrique de l'Ouest (Nigéria, Guinée, Niger)

    Source : « Profil de pauvreté dans les pays de la CEDEAO, CEDEAO,2008 »

    La taille de ménage peut donc être un facteur aggravant de pauvreté. En effet, une fécondité élevée au-delà d'un certain seuil, est susceptible de baisser le niveau de vie pour les ménages à revenus modestes, car elle peut aboutir à certaines privations dues à l'augmentation de besoins fondamentaux. Pour des ménages pauvres, une famille qui s'agrandit peut être la source d'un état d'appauvrissement plus prononcé.

    Cependant, ce rôle que jouerait la fécondité dans les ménages n'est pas mécanique. D'autres études sont arrivées à la conclusion d'une neutralité de la taille du ménage. Pour ces dernières, c'est plutôt le nombre d'enfants en bas âges qui est l'un des facteurs explicatifs du niveau de vie des ménages. Le cas du Burkina Faso est l'un des exemples mis en exergue par une étude sur ce sujet à Ouagadougou.

    Graphique 17Effets du nombre d'enfants en bas âge sur le niveau de vie des ménages

    Source : « Pauvreté, structures familiales au Burkina », INS, page 162

    II.1.2- L'impact du niveau de vie économique sur la fécondité

    Sur la base des résultats des Enquêtes de Démographie et de santé (EDS) effectuées dans au moins vingt-cinq (25) pays subsahariens, un constat s'impose empiriquement : le nombre d'enfants par femme varie sensiblement en fonction du niveau de vie des ménages. Dans ces enquêtes, les ménages sont classés selon des quintiles représentant les niveaux de revenus. Il en ressort qu'au fur et à mesure que l'on passe des quintiles représentant les plus démunis à ceux représentant les plus aisés, la fécondité décroit. Cependant, si tous les pays subsahariens effectuent ce mouvement d'ensemble, l'amplitude n'est pas la même partout. Des disparités existent, l'indice de fécondité n'étant pas le même entre ménages d'un même quintile mais de pays différents.

    Graphique 18 : variations de l'ISF en fonction du niveau de vie économique dans les pays subsahariens

    Source : « Pauvreté et fécondité en Afrique sub-saharienne : une analyse comparative des EDS », page 25

    Ce phénomène s'explique par des déterminants tels que le rôle des enfants comme facteurs potentiels de sécurité financière, matériel ou affective chez les plus démunis [cf. CHAP II, A-, I.2.1.1, c)].

    En outre, la pauvreté monétaire chez les plus défavorisés s'accompagne généralement de la pauvreté culturelle. En Afrique subsaharienne, ces deux facteurs conjugués influencent négativement la prévalence contraceptive (et resp. l'âge de mariage) qui est moins élevée (et resp. plus précoce) chez les plus démunis, ce qui contribue à maintenir la fécondité à un niveau élevé.

    Graphique 19 : incidence du niveau de vie sur la prévalence contraceptive et l'âge nuptial

    Source : « Pauvreté et fécondité en Afrique sub-saharienne : une analyse comparative des EDS », pp. 26, 27

    II.2-Module «  Croissance démographique vs éducation » et perspectives pour l'atteinte de l'OMD2

    L'un des défis de l'Afrique subsaharienne est d'assurer l'éducation pour tous d'ici 2015 c'est-à-dire promouvoir la généralisation de l'instruction. A cet effet, un ensemble de mesures sont prises par les différents gouvernements en ce qui concerne le financement du dispositif éducatif : investissement dans les infrastructures, dépenses de fonctionnement, rémunération des enseignants, etc.

    L'analyse de l'évolution de la part des dépenses publiques allouées au financement du système éducatif en Afrique subsaharienne traduit une volonté des parties concernées à promouvoir le capital humain. L'on est ainsi passé de 3,5% du PIB en 1999 à 5% en 200832(*). Cela classe l'Afrique subsaharienne parmi les trois premières régions du monde où le budget de l'éducation par rapport au PIB est élevé après les pays de l'Amérique du Nord et ceux de l'Amérique Occidentale.

    Graphique 20 : classement de l'Afrique subsaharienne par rapport aux dépenses pour l'éducation

    Source:UNESCO

    Ces efforts pour l'accès à l'éducation ont abouti à des résultats substantiels : de 1999 à 2008, 46 millions d'enfants supplémentaires ont été scolarisés dans le sous-continent.

    II.2.1- Effets de la pression démographique sur l'éducation

    Cependant, la forte poussée démographique de l'Afrique subsaharienne n'est pas sans conséquence dans l'atteinte de l'objectif de la généralisation de l'enseignement primaire, de la qualité des cours dispensés et sur le taux de survie jusqu'en dernière année du primaire.

    II.2.1.1- Conséquence dans l'objectif « Ecole Primaire pour tous »

    a) Analyse des données empiriques

    La pyramide des âges de l'Afrique subsaharienne (cf. graphique 8) est encore à base large, traduisant une structure par âge de la population marquée par un fort pourcentage de personnes en âge d'être scolarisées. C'est la conséquence du taux de natalité qui demeure élevé. Compte tenu de l'insuffisance des moyens financiers (cf. II.2.2 du titre A- du présent chapitre), les Etats n'arrivent pas à satisfaire les besoins sociaux des populations dont la croissance numérique globale est encore soutenue.

    Dans un tel contexte de rareté des ressources financières, le secteur de la scolarisation n'échappe pas aux conséquences des contraintes budgétaires des Etats. En effet, par rapport à la santé où la demande des soins est faite par les malades, le secteur de l'éducation connait une sollicitation non discontinue. Au demeurant, la demande des services de l'éducation primaire est faite pourune population(6-12 ans) dont le taux de croissance est supérieur à celuide la population globale.

    Pour maintenir un taux brut de scolarisation constant, il faut prévoir la construction et l'extension des infrastructures afin d'accueillir des effectifs qui croissent au rythme de 3% environ chaque année33(*). Les moyens limités des Etats ne permettent pas toujours un accroissement de l'offre pour la hisser au niveau de la demande.

    Ce manque de structures est l'un des facteurs qui font qu'en Afrique subsaharienne, 31 millions d'enfants en âge d'aller à l'école primaire n'étaient inscrits dans aucune école en 2010, soit 23% d'entre eux.34(*)

    b) Les perspectives pour l'atteinte de l'OMD2

    Afin deréaliser le deuxième des Objectifs de Développement du Millénaire « Ecole Primaire pour Tous », le sous-continent doit avoir les moyens descolariser un supplément de plus de 100 millions d'enfants d'ici 2015 (voir calcul en annexe 2), pour simultanément combler ce gap de 31 millions d'enfants non scolarisés et faire face à la croissance rapide de la tranche de la population concernée (6-12 ans). Cet objectif est difficile à atteindre pour les pays subsahariens en 5 ans (2011-2015), étant entendu que le nombre d'enfants n'ayant pas eu accès à l'école primaire a plutôt augmenté en Afrique subsaharienne entre 2008 (29 millions) et 2010 (31 millions)35(*).

    L'effet ainsi créé par la croissance rapide de la population en âge d'être scolarisée en Afrique subsaharienne fait apparaitre l'objectif d'Education Primaire pour Tous comme « un mirage qui se déplace au fur et à mesure que l'on croit s'en approcher »36(*).

    II.2.1.2- Effets de la croissance démographique sur la qualité des enseignements

    Ces effets sont relatifs au respect des normes de l'Unesco relativement au nombre d'élèves maximum par enseignantet à la qualification des enseignants.

    S'agissant du nombre d'élèves par enseignant celui-ci s'élevait à 44 pour toute l'Afrique subsaharienne prise globalement. La norme Unesco prévoit un maximum de 15 à 20 élèves par classe. Le différentiel entre cette norme et le ratio effectif (24 élèves) est assez élevé et en s'y référant, l'on peut conclure que beaucoup d'efforts restent à fournir pour assurer une école de qualité optimale. L'objectif est de favoriser la transmission des connaissances dans des conditions propices à la concentration et à l'assimilation des enseignements reçus.Les efforts à fournir concernent la quasi-totalité des pays, le seul pays respectant cette norme étant les Seychelles qui comptaient 14 élèves pour 1 enseignant en 2009, tandis que le pays le plus en marge est la République Centrafricaine avec 1 enseignant pour 95 élèves !

    Graphique 21 : nombre d'élève par enseignant dans le primaire dans les pays subsahariens

    Source : généré avec les données de la Banque mondiale

    Il faut ajouter à ces effectifs pléthoriques la qualification des enseignants. Le nombre sans cesse croissant des enfants à l'école provoque dans certains pays une pénurie d'enseignants formés dans des institutions agréées à cet effet. Afin de prendre des mesures conservatoires, les enseignants non formés sont souvent recrutés. Ce phénomène a prisune telle ampleur que dans certains pays comme le Cameroun, le Mali, le Togo, le Tchad ou le Sénégal, l'on dénombre généralement plus d'enseignants non formés que d'enseignants formés.

    Tableau 7 : Nombre élevé d'enseignants non formés dans les pays francophones subsahariens

    Source : Rapport suivi modial de l'EPT 2007, Unesco, 2007

    II.3.1.3- Effet de la croissance démographique sur le taux de survie jusqu'à la dernière année du primaire

    D'après les statistiques de l'Unesco, 10 millions d'enfants en moyenne abandonnent l'école primaire chaque année en Afrique subsaharienne. Le rôle joué par la poussée démographique sur ce phénomène est indirect. Il s'opère à travers les effets conjugués de la faiblesse des revenus et du découragement né des mauvais résultats scolaires37(*). Ces résultats sont influencés en grande partie par la qualité des enseignements abordée au titre b) précédent, et l'insuffisance des infrastructuresscolaires.

    II.3.2- Incidences de l'éducation sur la démographie

    Inversement, l'éducation peut avoir des effets sur les variables démographiques tels que présenté théoriquement selon l'approche des systèmes au précédent chapitre. Dans le cas de l'Afrique subsaharienne, nous examinerons les effets de l'éducation sur la fécondité et la mortalité infantile et maternelle.

    II.3.2.1- Effets de l'éducation sur la fécondité

    En plus de transmettre des connaissances, l'école change les comportements et les croyances au fil du temps.A travers les valeurs qu'elle inculque et qui proviennent plus ou moins de sources similaires, l'école contribue à une certaine modernisation socio culturelle. Cela devient palpable au fur et à mesure que l'on avance tout au long du cycle scolaire.

    C'est ainsi qu'en Afrique subsaharienne, les études réalisées dans bon nombre de pays, notamment à travers les enquêtes de démographie et de santé (EDS), font état de ce que les nombres d'enfants désiré et effectif sont moins élevés chez les couples scolarisés que chez les couples non scolarisés. C'est un phénomène général dans la quasi-totalité des pays subsahariens. Les pays où la fécondité par femme est plus basse sont en général ceux où le taux d'alphabétisation des femmes est plus élevé, à l'exception notable des pays comme la Guinée Equatoriale ou encore le Kenya.

    Graphique 22 : effet de l'alphabétisation des femmes sur la fécondité en Afrique subsaharienne (2009)

    (ISF en ordonné et Taux d'alphabétisation en abscisse)

    Source : Nos calculs à partir des données de la Banque mondiale

    Cette différence entre les personnes scolarisées et celles qui ne le sont pas est plus prononcée lorsque les femmes ont atteint le niveau d'études secondaires.

    Graphique 23 : effet du niveau d'étude des femmes sur la fécondité

    Source : Défis du développement en Afrique subsaharienne. L'éducation en jeu, page 28.

    Le rôle joué par l'éducation sur la fécondité a fait l'objet de beaucoup d'analyses de la part de spécialistes. Il en ressort que plusieurs explications concourent à cet état de choses.

    - Premièrement, avec le caractère universalisant de l'école, les personnes scolarisées entrent indirectement en contact avec d'autres modèles sociaux du monde. Certains modèles sont issus de régions ayant achevé leurs transitions démographiques et où il est souvent prôné une rationalité économique et non sociale (poids des traditions) par rapport au nombre d'enfants à avoir.

    - Ensuite, l'école repousse l'âge nuptial chez les femmes, ce qui diminue considérablement le nombre de grossesses précoces. Cela s'est observé dans les pays de l'Afrique subsaharienne tout comme dans ceux d'autres régions du monde.

    - Graphique 24 : Age médian au premier mariage des femmes en fonction du niveau d'étude

    Source : Défis du développement en Afrique subsaharienne. L'éducation en jeu, page 30.

    - Au demeurant, l'école développe des aptitudes qui permettent aux femmes subsahariennes scolarisées de mieux connaitre leur physiologie, et de mieux maîtriser les bien-fondés de la santé reproductive en espaçant les naissances et en utilisant les moyens de contraception.

    Graphique 25: Evolution du pourcentage de personnes vivant en ville

    Un autre aspect du développement qui conditionne la fécondité en Afrique subsaharienne est les conséquences de la forte mobilité géographique qu'il provoque. En effet, les villes étant généralement mieux loties en infrastructure et étant plus capables d'offrir des opportunités d'emploi, un fort exode rural a longtemps caractérisé les pays subsahariens dont plusieurs ont vu le pourcentage de personnes vivant en ville augmenter de manière considérable.

    Le fait que les populations vivant en ville soient confrontées à la montée des individualismes et à des charges incompressibles (paiement loyers, transport intra-urbain, ration alimentaire, loisirs des enfants, etc.) inconnues des villageois, pourrait avoir eu des répercussions sur le nombre d'enfants désirés. Les contraintes budgétaires et le fait que la ville est par excellence le lieu le plus propice à la modernisation socio culturelle, justifieraient que le nombre moyen d'enfants par femme soit moins élevés pour celles qui vivent en ville par rapport à celles qui résident dans les zones rurales.

    Tableau 8 : Indice synthétique de fécondité en fonction du lieu de résidence

    Pays et années EDS

    ISF urbain

    ISF rural

    Différentiel (ISF rural -ISF urbain)

    Burkina (2003)

    3,8

    6,9

    3,1

    Cameroun (2004)

    4

    6,1

    2,1

    Ghana (2003)

    3,1

    5,6

    2,5

    Kenya (2003)

    3,3

    5,4

    2,1

    Madagascar (2004)

    3,7

    5,7

    2

    Malawi (2004)

    4,2

    6,4

    2,2

    Nigéria (2003)

    4,9

    6,1

    1,2

    Sénégal (2005)

    4,1

    6,4

    2,3

    Tchad (2004)

    5,7

    6,5

    0,8

    Guinée (2005)

    4,4

    6,3

    1,9

    Mozambique (2003)

    4,1

    6,1

    2

    Source : généré à partir des données collectées dans « l'Afrique face à ses défis démographiques »

    II.3- Module « croissance démographique vs santé » et perspectives pour l'atteinte des OMD 4 et 5

    Pour ce module, il sera mis en évidence l'incidence de l'état de santé des populations subsahariennes sur la croissance démographique d'une part, et les effets de l'expansion démographique du sous-continent sur les institutions sanitaires.

    II.3.1- Impacts du profil de santé de l'Afrique subsaharienne sur sa croissance démographique

    Les multiples problèmes de santé que connait l'Afrique subsaharienne (cf. A- II.2.2 du présent chapitre) ont des répercussions sur la croissance démographique. En effet, la santé de la population conditionne inéluctablement le taux de mortalité et l'espérance de vie à la naissance.

    A titre d'exemple, le paludisme et le VIH/Sida ont été responsables de plus de 2 200 000 décès dans le sous-continent en 2010, soit plus de 20% des causes de mortalitéenregistrées au cours de cette année. Il est évident que cette mortalité contribue à ralentir la croissance démographique.

    L'impact de la santé de la population est aussi perceptible sur l'allongement de la vie humaine. L'on peut par exemple présager de cette corrélation en observant la chute de l'espérance de vie à la naissance dans les pays d'Afrique australe et de l'est,au fur et à mesure que la prévalence du VIH/SIDA augmentait au cours des années 90 (début 90 pour la Zambie et le Swaziland, milieu 90 pour le Kenya, fin des années 90 pour le Botswana)38(*).Des études plus approfondies effectuées sur le sujet ont conclu que l'espérance de vie en Afrique subsaharienne en 2010 (54 ans),aurait pu atteindre 60 ans si le problème de la pandémie du VIH/SIDA ne se posait pas avec une telle acuité (Sources : « Variables démographiques, éducation et santé en Afrique ou le mirage des OMD », Philippe Hugon).

    II.3.2- Impact de la croissance démographique sur la santé

    Dans cette partie, c'est la santé vue à travers les institutions en charge de la garantir qui sera analysée face à la croissance démographique de la région concernée.

    a) Analyse de la situation par les données empiriques

    En effet, comme dans le domaine de l'éducation, il se pose en Afrique subsaharienne le problème de la performance des systèmes de santé des pays (cf. A- II.2.2 du présent chapitre), compte tenu des ratios d'efficacité définis par les organismes spécialisés. Le respect des normes édictées en la matière vise à promouvoir des services et prestations sanitaires de qualité, dans ce domaine si délicat touchant à la pérennité des vies humaines.

    Malheureusement la plupart des pays subsahariens sont à la traine vis-à-vis de ces normes. L'une des plus importantes est la densité médicale qui laisse augurer de la prise en charge des malades par les personnels adéquats. La croissance rapide de la population fait qu'il est difficile pour ces pays de suivre cette norme, à cause de moyens limités qui ne leur permettent pas de répondre aux besoins d'une population qui s'accroit plus vite que le capital potentiellement disponible (personnel en service et en formation). Une autre cause de cette pénurie du personnel de santé est la fuite des cerveaux vers les pays développés des médecins formés en Afrique subsaharienne à cause des conditions de travail précaires, un niveau peu élevé des revenus et l'absence du matériel et des ressources pour la recherche. Entre 1990 et 2010, on estimait à20 000 le nombre de médecins subsahariens qui se sont expatriés dans d'autres continents soit environ 1 compétence sur 339(*). Les pays où cette situation est la plus préoccupante sont l'Angola, la Guinée Bissau et la Guinée Equatoriale avec des taux d'expatriation de plus de 60% en 2007. Ils sont suivi d'un deuxième groupe de huit (8) pays (Congo Brazzaville, Gambie, Malawi, Zambie, Tanzanie, Sénégal, Kenya et le Kenya) où ce taux d'expatriation était de plus de 50% entre 2007 et 200940(*)

    Tableau 9 : Nombres de médecins subsahariens dans les autres régions du monde

    Source : La santé en Afrique subsaharienne : Panorama, Problématiques, Enjeux et Perspectives, page 3, 2010.

    Tous ces facteurs conjugués contribuent à la baisse de la densité médicale qui est très faible en Afrique subsaharienne. En 2009, elle étaitde 2 médecins pour 10 000 habitants41(*). Cela est un taux d'encadrement très en dessous de celui des autres régions du monde telles que l'Europe qui comptent 32 médecins pour 10 000 habitants. Comme pour toutes les variables déjà analysées, il faut cependant noter les disparités qui existent entre les pays. Mais, cela n'enlève pas le fait que cette situation de faiblesse du taux d'encadrement est quasi générale : seuls deux pays(Afrique du Sud, Madagascar) ont un taux d'encadrement supérieur à 5 pour 10 000.

    A l'intérieur des pays également, des problèmesd'inégalité de répartition géographique du personnel existent.Au Sénégal par exemple, la capitale Dakar comptait à elle 1100 médecins sur les 1543 que comptait le pays tout entier, soit plus de 70% de l'effectif global en 200842(*).

    S'agissant de la représentativité sur une large part de leurs territoires respectifs, la plupart les Etats subsahariens ont fait l'effort d'avoir un système de santé pyramidal organisé de manière à couvrir chaque niveau de circonscription administrative. Mais les infrastructures n'ont pas souvent des plateaux techniques efficaces.

    b) Les perspectives pour l'atteinte des OMD 4 et 5

    La pénurie des personnels de santé et des infrastructures, ainsi que les problèmes d'inégalité de répartition des personnels de santé à l'intérieur des pays font entretenir le doute sur l'atteinte des objectifs du Millénaire pour le développementnuméros 4 et 5 relatifs à la santé, notamment la réduction de la mortalité infantile de deux tiers (OMD 4) et de la mortalité maternelle de trois quarts (OMD 5) entre 1990 et 2015.

    La mortalité infantile était de 89 pour 1000 en 1990 et l'objectif fixé devrait donc la ramener à au plus 30 pour 1000 d'ici 2015. Un bilan d'étape de l'ONU indique qu'entre 1990 et 2009 elle est passée à 60 pour 1000, soit une diminution de 30 points sur les deux tiers du temps d'observation (2000 à 2015). Quoique ce résultat soit encourageant, il parait difficile de diminuer ce taux de 30 autres points en 6 ans compte tenu du handicap que représente le manque de personnels et d'infrastructures, tel que souligné par l'ONU. Des ratios relatifs à l'assistance pendant l'accouchement par des professionnels sanitaires restent insatisfaisants, ainsi que le suivi néonatal des mères et des enfants. En 2011, l'on estimait à 35% les soins de santé obstétrique non dispensés par un personnel qualifié en Afrique subsaharienne43(*).

    Quant à la mortalité maternelle, l'atteinte de l'OMD y relatif souffre également de cette situation de pénurie. En 1990,le taux de mortalité maternelle était de 440 pour 100 00044(*). L'objectif était donc de le ramener à 110 pour 100 000 soit une diminution attendue de 330 points en 15 ans. Selon l'ONU, ce taux est passé à 290 pour 100 000 en 2008, ce qui correspond à une diminution de 150 points à mi-parcours qui bien qu'encourageante ne rassure pas quant à l'atteint du but visé à horizon 2015.

    III- Nécessité d'une analyse ciblée de quelques pays

    Tout au long des analyses précédentes, un constat peut être fait : l'Afrique subsaharienne n'est pas homogène que ce soit en ce qui concerne les avancées et niveau de développement des différents pays de cette aire géographique, que de leur croissance démographique ou encore des interactions entre les deux sous systèmes d'études. Les analyses précédentes ont mis en évidence une diversité des situations presque aussi importante que le nombre de pays constitutif de cette aire géographique. Il importe donc, pour avoir une idée moins globalisante des relations entre la croissance démographique et le développement en Afrique subsaharienne, de procéder à une études des cas spécifiques relatifs à certains pays. C'est l'objet du chapitre suivant.

    CHAPITRE III- CAS PRATIQUE DE DEUX PAYS :

    LE KENYA ET LE CAMEROUN

    Dans cette partie, les pays qui feront l'objet de notre analyse sont le Kenya pays de l'Afrique orientale et le Cameroun à mi-chemin entre l'Afrique centrale et l'Afrique de l'Ouest. Ces pays ont été choisis pour des raisons historiques et surtout de disponibilité des données d'analyse.

    A cet effet et pour chacun des pays, il sera successivement fait un état des lieux des deux concepts d'étude, une analyse des interactions entre eux et enfin, un point sur les perspectives relatives à l'atteinte des objectifs de développement du millénaire pour ce qui est de l'éducation et de la santé.

    A-LE CAS DU KENYA

    Le Kenya est un pays de l'Afrique de l'Est qui en termes de démographie présente deux particularités, l'une à l'antipode de l'autre. Il s'agit d'une part de la croissance démographique qui s'est située à 2,7%45(*) en 2011, et qui demeure assez élevée bien qu'éloigné du record africain de 4,2% enregistré dans le cas la Zambie au cours de la même année.D'autre part, le Kenya est le premier pays en Afrique subsaharienne à mettre sur pied une politique de population dès 196746(*).

    VII- Etat des lieux de la démographie et du Développement

    Il s'agit de faire une présentation transversale et longitudinale de la démographie et du niveau de développement au Kenya.

    I.1- La démographie

    Avec une population estimée à 41 609 728 d'habitants en 2011, le pays est l'un des plus populeux d'Afrique.

    Graphique26: place du Kenya en fonction du nombre d'habitants en Afrique subsaharienne (données en millier d'habitants)

    Afin de mieux cerner le niveau actuel de la population, nous allons passer en revue les principaux éléments ayant eu une influence sur la fécondité et la mortalité de ce pays. Enfin, il sera fait une brève analyse de l'état d'avancement de sa transition démographique.

    I.1.1- La fécondité

    Le niveau de la population au Kenya est la résultante d'une croissance démographique qui a une tendance baissière depuis plus de trente ans, mais qui demeure forte et soutenue puisqu'elle n'est jamais passée sous le seuil des 2%. Ladite croissance est à son tour sous-tendue par une fécondité qui reste élevée (4,7 enfants par femme en 2010) malgré la tendance baissière encouragée depuis la fin des années 60 par la politique de régulation démographique initiée par l'Etat. Cette régulation visait à freiner l'expansion démographique qui était alors la plus élevée en Afrique subsaharienne (34 à 36% de taux quinquennal)47(*), afin de promouvoir une éducation et une santé de qualité, et favoriser une insertion plus facile des populations dans le marché de l'emploi48(*).La durabilité de cette politique qui a certes connue un relâchement déploré par les acteurs commel'Agence Nationale de Coordination pour la Population et le Développement49(*),a certainement contribué à faire progressivement passer la fécondité à un niveau inférieur à celui de l'Afrique subsaharienne prise dans sa globalité.

    Graphique27: Evolution comparative de l'accroissement de la population du Kenya (C.P en %), de l'indice de fécondité du Kenya(ISF Kenya), et de l'indice de fécondité de l'Afrique subsaharienne (ISF ASA)

    Source : généré avec les données de la Banque mondiale

    La fécondité élevée s'explique par certaines raisons déjà évoquées dans le cas de toute la région de l'Afrique subsaharienne. Il s'agit notamment de 50(*):

    Ø La précocité du mariage qui concerne encore un nombre élevé de femmes : en effet, la moitié des femmes au

    Kenya se marie au plus tard à l'âge de 20 ans dont près de 40% au plus tard à 18 ans. Pour les hommes, l'âge médian se situe autour de 25 ans.

    Ø La polygamie : un pourcentage de 13% des femmes mariées vivent dans des foyers polygamiques tenus par une population de 7% d'hommes.

    Ø L'utilisation des moyens de contraception pour la maitrise du nombre d'enfants et l'espacement des grossesses : le planning familial est freiné par des raisons religieuses ou culturelles (13% des personnes sexuellement actives) et de moins en moins pour des raisons de sensibilisation (2% des personnes environ). Si on inclut les femmes qui ne peuvent pas utilisées un quelconque moyen contraceptif pour des raisons de santé, de stérilité naturelle ou de perturbation reproductive, il ressort que moins de 50%des femmesmariées utilisent des contraceptifs. Ce chiffre qui est encore insuffisant, connait toutefois une progression soutenue car il a été multiplié par près de 7 en 35 ans.

    Ø Graphique 28: Evolution de l'utilisation de la contraceptionchez les femmes mariéesau Kenya

    Source : Enquête de Démographie et de santé, Kenya , 2008 -2009

    Cette utilisation limitée des moyens contraceptifs influe certainement sur l'espacement des naissances qui est encore inférieur dans plus de 22% des cas, au minimum de 24 mois généralement recommandé pour une bonne santé de la reproduction. La contraception est également déterminante pour l'équilibre entre l'offre et la demande d'enfants s'agissant des couples qui veulent limiter numériquement leur progéniture. Ladite demande varie en fonction de l'âge et du sexe. Ainsi, les femmes désirent avoir moins d'enfants que les Hommes dont le nombre d'enfants désirés est plus proche de la fécondité effectivement enregistrée au cours des dernières années.

    Tableau10 : Demande d'enfants au Kenya par âge et par sexe

    Tranches d'âge

    15-19

    20-24

    25-29

    30-34

    35-39

    40-44

    45-49

    Ensemble

    Demande d'enfants pour les femmes

    3,5

    3,4

    3,6

    3,7

    4,1

    4,3

    4,8

    3,8

    Demande d'enfants pour les hommes

    3,7

    3,4

    3,4

    4,3

    4,8

    4,9

    7

    4,2

    Source : Enquête de Démographie et de santé, Kenya , 2008 -2009

    I.1.2- La mortalité

    Le taux de mortalité du Kenya se situe autour de 12 pour 1000 depuis cinq, en dessous de celui de l'Afrique subsaharienne dans son ensemble (13 pour 1000 environ), même si progressivement l'écart se resserre entre les deux depuis le milieu des années des 90.

    Graphique29: Evolution comparée de la mortalité (en pour 1000) du Kenya et de l'Afrique subsaharienne.

    Source : généré avec les données de la Banque mondiale

    Au Kenya, la mortalité est principalement due à la morbidité du paludisme, du Sida et la pneumonie chez les moins de 5ans.

    Le paludisme constitue la première cause de décès (19% des décès en 2007) et de morbidité (30%)51(*). Les dépenses y relatives représentaient 1,4% du PIB national en 2009. Selon un classement du programme Roll Back Malaria de l'OMS, le Kenya fait partie des cinq premiers pays en Afrique subsaharienne où la prévalence est la plus élevée. Elle était de plus de quatre millions (11 342 000) de cas en 201152(*). Son incidence reste tout aussi forte (30 307 sur 100 000 personnes en 2008)53(*), malgré une baisse progressive due à la mise sur pied d'un plan de lutte comprenant la facilitation de l'utilisation des insecticides, la distribution des moustiquaires imprégnées, les campagnes de sensibilisation, etc.54(*)Les couches les plus vulnérables sont les femmes enceintes et les enfants de moins de cinq ans.

    Le SIDA est aussi l'une des premières causes de mortalité avec 80 000 décès en 200955(*), soit environ 18% de tous les cas de mortalité. Le taux de prévalence qui est de 6,3% en 2010 demeure plus élevé que celui de l'Afrique subsaharienne prise dans son ensemble (4,7%). Toutefois, il faut noter qu'à la faveur de la lutte contre cette maladie à travers la sensibilisation, la subvention des soins de traitement, l'accès facile aux moyens de protection, la maladie a reculé d'une manière notable passant d'une prévalence de 14% au milieu des années 90 à 6,3% en 2010.

    La pneumonie est la première cause de mortalité chez les moins de 5 ans où elle représentait 17% des causes de mortalité en 2010. Le gouvernement s'est également lancé dans la lutte contre cette maladie, avec le lancement d'une campagne de vaccination gratuite des enfants de moins d'un an depuis 2011.

    Graphique30: Distribution des causes de mortalité chez les enfants de moins de 5ans en 2010 (en %)

    Source : OMS

    I.1.3- Evolution comparée de la natalité et de la mortalité : niveau de la transition démographique

    Graphique 31: Niveau de la transition démographique au Kenya

    Source : Tableau généré sur l'interface du site de la Banque mondiale,

    La natalité et la mortalité du Kenya ont simultanément une tendance baissière depuis au moins 50 ans. L'on note cependant un redressement de la mortalité du début des années 90 jusqu'au début des années 2000. Sur la base du graphique ci-contre, l'on peut conclure que le Kenya a amorcé sa transition démographique qui ressemble plus à celle du modèle classique (lente). La phase décrite par le schéma ressemble plus à la deuxième phase au cours de laquelle la natalité connait aussi une tendance baissière notable.

    I.2.- Le développement

    Il s'agit d'indiquer les niveaux d'éducation, de santé et de niveau de vie. Mais avant, une analyse descriptive de l'évolution de l'indice de développement humain sera effectuée.

    I.2.1- L'indice de développement humain (IDH)

    Graphique 32: Evolution comparée IDH Kenya

    Source : généré avec les données de la Banque mondiale

    Depuis au moins l'année 2000, le Kenya est classé dans la catégorie des pays en développement, son IDH ayant toujours été supérieur au seuil en dessous duquel un pays fait partie de ceux les moins avancés (cf. graphique ci-dessous). Les différentes mesures prises pour améliorer le bien-être des populations semblent avoir des résultats positifs, l'IDH étant en progression régulière et notable. Il est ainsi passé de 0,420 en 2000 à 0,502 en 2011 et a toujours été au-dessus l'IDH de la région Afrique subsaharienne prise dans son ensemble.

    Pour une meilleure description de l'évolution du développement, l'analyse détaillée des variables de calcul de l'IDH est faite ci-dessous.

    I.2.2- L'index de santé

    Il s'agit de l'espérance de vie à la naissance. Celle-ci a connu un recul de deux ans en 30 ans. En effet après les indépendances, l'espérance vie a cru d'une manière régulière jusqu'au début des années 90. C'est en 1980 qu'elle a été la plus élevée à 60 ans. Mais avec l'épidémie du SIDA qui a connu sa prévalence la plus élevée au milieu des années 90, l'espérance de vie a commencé à décroitre pour atteindre 52 ans en 2004. Depuis 2005, elle a repris la tendance haussière et était de 56 en 2010 contre 58 ans en 1980. Elle reste supérieure à celle de l'Afrique subsaharienne considérée globalement mais largement inférieure à celle des pays les plus développées (79 ans en 2010).

    Graphique 33: Evolution comparée des niveaux de l'espérance de vie Kenya, AFS, OCDE

    Source : généré avec les données de la Banque mondiale

    I.2.3- L'index d'éducation

    Le taux d'alphabétisme est une composante essentielle.Au Kenya, il était de 87% en 2010 contre 63% pour l'Afrique subsaharienne et presque 98% pour les pays de l'OCDE. Il s'est apprécié de plus de 5% entre les années 2000 et 2010. Ces résultats proviennent d'un train de mesures prises par l'Etat et qui visent à éradiquer l'analphabétisme. Il s'agit de la construction de nouvelles écoles, du recrutement de nouveaux enseignants et de la gratuité de l'école primaire mise en application depuis 2003. Ladite gratuité a permis à environ 1,3 million d'enfants pauvres dont des enfants de la rue, de bénéficier de l'enseignement primaire pour la première fois (Note de l'Unesco sur la politique de la petite enfance, l'impact de l'enseignement primaire gratuit sur le développement de la petite enfance au Kenya, Janvier-Février 2006).

    I.2.4- Le bien-être économique

    Avec un RNB par habitant qui reste très en dessous des 975$ reconnu comme le seuil à franchir pour être qualifié de pays à revenu moyen (Cf. définition des groupes de revenu de la Banque mondiale http://donnees.banquemondiale.org/a-propos/classification-pays http://donnees.banquemondiale.org/a-propos/classification-pays), le Kenya reste un pays à faible revenu (RNB de 590$ en 2011). Cet indicateur laisse présager des difficultés de l'Etat à fournir aux populations des moyens leur permettant d'avoir des conditions de vie garantissant leur bien-être. Dans un tel contexte, la pauvreté reste élevée avec 46% des Kenyans vivant en dessous du seuil de pauvreté56(*), et les inégalités de revenu restent prononcées (Indice de Gini de 48% en 2005)57(*). La croissance économique qui se situe à un peu plus de 4% en moyenne au cours de dix dernières années, reste insuffisante pour faire évoluer le revenu de manière notable d'autant plus l'économie ne repose que sur trois principaux piliers : une agriculture peu diversifiée (27% du PIB) dont les rendements sont régulièrement impactés par une baisse des précipitations depuis 2004 environ, les industries manufacturières (15% du PIB environ), commerce et tourisme (12%).

    Graphique 34: Evolution RNB par habitant Kenya ($)

    III- Interaction entre croissance démographique et développement

    Ces interactions seront analysées à travers des modules. Parmi ceux-ci, on aura notamment les sous-systèmes : fécondité vs éducation, santé et niveau de vie ; croissance démographique vs urbanisation ; pression démographique vs environnement.

    II.1- Module« Fécondité vs éducation, santé et niveau de vie »

    Des études sur les interactions entre la fécondité et le niveau de scolarisation ont montré une influence du niveau de scolarisation sur le nombre d'enfants. Plus précisément, cette incidence s'accentue avec la scolarisation des femmes notamment quand elles atteignent le niveau du secondaire. L'influence de la scolarisation s'effectue à travers l'espacement des naissances, la baisse de la mortalité infantile, l'utilisation de la contraception, le recul de l'âge du mariage et l'association des femmes aux décisions du foyer : des critères qui dépendent tous du niveau d'étude.

    Le niveau de vie quant à lui a la même relation inverse avec la fécondité. Cela pourrait s'expliquer par le fait que les personnes aisées sont le plus en contact avec les pratiques et les moeurs modernes (concept de la famille moderne avec un nombre d'enfants réduits), et ont les moyens pour faire plus attention à leur santé dont celle reproductive.

    Tableau 11: Action de l'éducation et du niveau de vie sur la fécondité au Kenya

    Source : Enquête de Démographie et de Santé au Kenya, 2008-2009

    Inversement, il est évident que la fécondité a un impact sur le niveau de vie. Micro économiquement, dans un contexte où plus de 45% de la population est pauvre, les ménages de cette catégorie par ailleurs les plus féconds, ont des revenus par tête faibles.

    Sur l'éducation et la santé, la fécondité relativement forte a de mauvais impacts sur la qualité des services de santé et d'éducation et donc sur le capital humain. En effet, les ratios d'efficacité (nombre de personnels rapporté à la population cible) sont inférieurs aux normes internationales.

    Pour l'éducation primaire, ce ratio tourne autour de 47 élèves pour 1 enseignant alors que la norme UNICEF pour un enseignement de qualité est de 15 à 20 élèves par enseignant. Au-delà de la quantité des enseignants, se pose également le problème de la qualité. En effet, la croissance démographiquerapide que continue de connaitre le Kenya fait que la structure par âge de la population soit marquée par un grand nombre de personnes en âge d'être scolarisées. Afin de répondre au déficit de personnels de l'éducation causé par ce contexte, il est arrivé que l'Etat recrute des enseignants non formés.A une certaine époque, ces derniers étaient plus nombreux que les enseignants formés dans certaines régions du pays (Cf. tableau ci-dessous). Cela ne garantit pas une certaine optimalité dans la qualité de l'instruction reçue et donc du capital humain formé.

    Tableau 12: Nombre d'école, d'élèves et d'enseignants formés et non formés

    Au Kenya 1999-2003

    Source : Rapport initial a l'union africaine sur la mise en oeuvre de la charte africaine sur les droits

    et le bien-être de l'enfant - 2003 a 2007

    Le secteur de la santé est aussi confronté au problème de la faiblesse du taux d'encadrement par un personnel qualifié qui était de un (1) médecin pour 10 000 habitants en 200758(*).

    II.2- Module « croissance démographique vs urbanisation »

    Les effets conjugués de la poussée démographique et de la polarisation des activités économiques et/ou administratives dans certaines localités ont fait du Kenya l'un des pays les plus urbanisés en Afrique. Son taux d'urbanisation est ainsi passé de 7% en 1960 à environ45 % en 2010. C'est aussi un pays où le taux d'urbanisation est supérieur au taux de croissance démographique.

    Tableau 13: évolution des indicateurs urbains du Kenya

    Source : e-Geopolis 2010

    Cette forte urbanisation a entrainé un certain nombre de problèmes sociaux qui freinent l'évolution du bien-être. Il s'agit notamment du taux de chômage élevé (40% en 2008), de l'exercice d'emplois précaires et de l'accès limité à des installations assainies (32% seulement des personnes y avaient accès en 2010)59(*).

    Inversement, les villes ont un impact sur la fécondité. Des études ont démontré qu'au Kenya, les femmes vivant en milieu urbain ont un taux de fécondité moins élevé que celles qui vivent en milieu rural. Cela est une conséquence de la demande d'enfants moins élevée dans les ménages de la ville que ceux du monde rural, et l'accès plus facile des citadins aux programmes de contraception.

    Tableau : nombre d'enfants désirés par les ménages au Kenya en fonction du lieu de résidence

    Source : Enquête de Démographie et de Santé au Kenya, 2008-2009

    II.3- Module «Pression démographique vs environnement »

    Avec la croissance démographique soutenue qu'il a connu, la densité de population du Kenya a plus que doublé en trente ans, passant de 28 à 73 habitants/km2 de 1980 à 201160(*). Cette densité qui est basse par rapport à celle de nombreux pays (en 2005, le Kenya était classé 113e pays sur 192 relativement à la densité de population)61(*), est cependant inégalement répartie. En effet, la densité d'un lieu est fonction des conditions vitales qu'il offre. Celles-ci concernent entre autre le niveau de fertilité du sol pour l'agriculture, première source de devises du pays. Les nécessités d'accroissement des ressources face à la poussée démographique ont causé une déforestation de masse, causée simultanément pour les besoins des sociétés de l'industrie agricole et ceux de subsistance des ménages. A ce jour, le Kenya aurait perdu plus de 90% de sa couverture forestière originelle62(*).Cette déforestation est avec le réchauffement climatique, l'une des causes de la vague de sécheresse qui sévit au dans le pays depuis 2004. Les réserves forestières interdites d'exploitation sont elle-même menacées par l'action des communautés riveraines qui y amènent les animaux pour paître ou y étendent leurs activités agricoles. Ainsi, 100 000 hectares de végétation auraient progressivement été défrichés de manière illégale dans la forêt Mau qui est l'une des plus importantes forêts vierges d'Afrique orientale. A cela s'ajoute la baisse des niveaux de certains cours d'eau du fait de l'élévation des températures.

    B- LE CAS DU CAMEROUN

    Le Cameroun est un pays situé en Afrique centrale avec une superficie de 475 442 km2. Il est caractérisé par sa diversité sur le plan géographique, climatique, humain et culturel.

    J- Etat des lieux de la démographie et du Développement

    Dans cette partie il est question de faire un état des lieux de la démographie et du niveau de développement du Cameroun

    I.1- La démographie

    L'un des principaux objectifs stratégiques de la politique gouvernementale de développement est la maîtrise de la croissance démographique du pays afin qu'elle soit en harmonie avec ses possibilités économiques. Le Bureau Central des Etudes de la Population (BUCREP) estime à 20 millions d'habitants la population du Cameroun (position du Cameroun par rapport en Afrique). Le niveau d'urbanisation du pays est globalement élevé, quoique présentant d'importantes inégalités régionales. Le taux d'urbanisation se situe actuellement à 43 %. La densité globale de la population est d'environ 33 habitants au Km², avec cependant des disparités importantes entre les provinces et à l'intérieur de celles-ci. Concernant sa structure par âge, la population est majoritairement jeune, avec 45% des individus âgés de moins de 15 ans et 64% âgés de moins de 25 ans. L'âge moyen de la population se situe autour de 22 ans. L'espérance de vie à la naissance est à 56,5 ans en 2003 (soit 54,5 pour les hommes et 59 ans pour les femmes). Le rapport de masculinité révèle un léger déficit en hommes, soit 97 hommes pour 100 femmes.

    I.1.1- La fécondité

    Selon les chiffres de la Banque mondiale, la fécondité est en régression au Cameroun du fait du planning familial. On est passé de 6,5 enfants en 1980 à 4,5 en 2010. Ceci a été possible par l'intensification du programme de contrôle des naissances vers les années 1988, les campagnes de sensibilisation et la réduction de la mortalité infantile.

    Selon l'Enquête démographique et santé (EDS MICS), l'Indice Synthétique de Fécondité (ISF) est beaucoup plus élevé en milieu rural (en moyenne, 6,4 enfants par femme) qu'en milieu urbain (4,0 enfants, en moyenne).

    Graphique 36: Evolution comparative de l'indice de fécondité du Cameroun, et de l'indice de fécondité de l'Afrique subsaharienne

    Source : Banque Mondiale

    Le taux moyen de natalité au niveau national connaît une baisse progressive liée à l'accentuation des programmes de réduction des naissances par la pratique du planning familial. Les campagnes de sensibilisation y relatives ont fait que le taux de natalité de ce pays passe de 41,7 %o (entre 1987 et 1992) à 39,7 %o (entre 1993 et 1997) pour se fixer à 38,2 (entre 1998 et 2002).

    En ce qui concerne la transition démographique, la chute progressive et substantielle de l'ISF du pays qui est par ailleurs inférieur à l'ISF de l'Afrique subsaharienne prise dans sa globalité, est une confirmation du fait que le Cameroun est à une phase relativement avancée de ce processus.ne D'après les projections des Nations-Unies, fondées sur l'analyse des différentes enquêtes de ménages disponibles, le Cameroun serait entré dans la phase de transition démographique : le taux annuel de croissance de la population totale qui était de 2,8 % à la fin des années 90 serait actuellement de 2,3 % et atteindra sans doute moins de 2 % en 2010.

    I.1.2- La mortalité

    Le taux de mortalité est encore globalement élevé : 49 % de nos jours, notamment avec l'effet du VIH/SIDA. Quant à la mortalité infanto-juvénile (enfants de 0-4 ans), elle est passée de 126 à 151 pour 1000. Par ailleurs la mortalité maternelle demeure élevée, environ 430 décès pour 100 000 naissances.

    Graphique37: Evolution comparée de la mortalité (en pour 1000) du Cameroun et de l'Afrique subsaharienne.

    Source : Banque Mondiale

    Pour la période 2006-2011, selon l'EDS MICS le risque de mortalité infantile est évalué à 62 décès pour 1 000 naissances vivantes; le risque de mortalité juvénile s'établit, quant à lui, à 63%. Quant aux composantes de la mortalité infantile, elles se situent à 31 % pour la mortalité néonatale et à 31 % pour la mortalité post-néonatale. Globalement, le risque de mortalité infanto-juvénile, c'est-à-dire le risque de décès avant l'âge de cinq ans, est de 122 %. La principale cause de mortalité infantile reste l'absence des soins (paludisme, diarrhées, pneumonie...) dans les zones rurales dépourvues de centre de santé.

    I.2.- Le développement 

    Le niveau de développement est évalué par les niveaux d'éducation, de santé et de niveau de vie. L'analyse de l'indice de développement humain permettra de se faire une idée approximative du développement.

    I.2.1- L'indice de développement humain (IDH)

    Le Cameroun est classé comme pays en voie de développement depuis au moins l'année 2000. Les efforts déployés dans les secteurs de l'éducation et de la santé au cours de la dernière décennie ont contribué à améliorer le niveau de vie des populations camerounaises. Il en est de même de l'accroissement du revenu national dû au redécollage progressif de l'économie après la forte crise le pays a connu dans les années 80 et 90.

    Ainsi, l'IDH est en progression régulière depuis le début des années 80 malgré un fléchissement notable en 1990. Cet indice est ainsi passé de 0,390 en 1980 à 0,501 en 2011 et est au dessus l'IDH du sous-continent pris dans son ensemble.

    Graphique 38: Evolution comparée IDH Cameroun, Afrique Subsaharienne

    Source : Banque mondiale

    Selon le Programme des Nations Unies pour le Développement, la pauvreté est beaucoup plus présente dans les campagnes (70 %), tandis que la pauvreté urbaine touche près de 2 millions de personnes, essentiellement dans les deux plus grandes villes du pays (Yaoundé et Douala).

    I.2.2- La santé

    Le Cameroun a dû faire face ces dernières décennies à deux graves crises en matière de santé, qui perdurent encore : il s'agit du paludisme et du sida.

    - Le paludisme pose un problème de santé publique majeur pour les populations vulnérables et pauvres. Il fait partie des cinq maladies les plus importantes et les plus meurtrières au Cameroun. Il représente environ 45 % des consultations médicales, 23 % des hospitalisations, 26 % des arrêts maladie, 40 % des décès chez les enfants de moins de 5 ans, 35 % de la mortalité en hôpital et 40 % du budget annuel des ménages. 300 000 moustiquaires imprégnées ont été distribuées en 2005 pour les femmes enceintes et les jeunes enfants.

    - Le VIH/SIDA : le taux de prévalence de cette maladie a atteint 5,5 % chez les 15-49 ans en fin 2010. Sur les 500 000 personnes contaminées, 49 000 sont décédées en 2003. Plus de 70 % des malades ont entre 15 et 45 ans, au moins 25 % des cas vivent en zone rurale, 49 % sont des célibataires et 51 % sont mariés. La transmission du VIH se fait dans 90 % des cas par rapports sexuels non protégés, hétérosexuels surtout. La transmission sanguine et celle de la mère à l'enfant représentent environ 10 % des cas. Les populations les plus vulnérables sont les femmes (6,8 % de prévalence contre 4,1 % chez les hommes), et les jeunes de 15-24 ans. Le gouvernement subventionne les antirétroviraux et distribue des préservatifs aux populations, en partenariat avec des ONG (37 millions de préservatifs distribués en 2005). Des centres de prévention et de dépistage volontaire anonyme ont été créés dans chaque district, dans le cadre de la décentralisation de la lutte contre le fléau.

    II- Interaction entre croissance démographique et développement

    II.1- Module« Fécondité vs éducation, santé et niveau de vie »

    Au Cameroun, le modèle social fait qu'à un niveau élevé d'instruction, les femmes ont davantage de chances d'occuper un emploi dans le secteur moderne de l'économie, d'occuper un emploi en milieu urbain dans les bureaux, les ateliers etc. A terme, ces dernières se retrouvent peuvent se retrouver avec des ambitions de carrières qui s'opposent à une maternité nombreuse.

    De plus le niveau d'instruction accroit les chances de ne pas être pauvre. L'enquête EDS de 2004 a démontré qu'à tous les âges, la fécondité est négativement corrélée au niveau de vie des populations. En effet, les taux de fécondité sont plus élevés dans les ménages pauvres.

    Le niveau d'instruction des femmes constitue un autre facteur différentiel important en matière de contraception. La prévalence contraceptive est très fortement associée au niveau d'instruction : chez les femmes ayant un niveau d'instruction supérieur, 34 % utilisent actuellement une méthode moderne, contre 24 % chez les femmes de niveau secondaire, 13 % chez celles ayant un niveau primaire et 3 % chez celles n'ayant aucun niveau d'instruction.

    Par ailleurs, on relève que la prévalence de la contraception moderne varie selon le groupe d'âges de la femme. La plus forte proportion d'utilisatrices (taux variant entre 14 % à 16 %) se situe à 20-39 ans, âges correspondant à la période de fécondité maximum. Chez les femmes de moins de 20 ans et celles de 45 ans ou plus, les taux sont relativement plus faibles : 12 % dans le groupe 15-19 ans, et 9 % à 45-49 ans. On peut aussi souligner qu'au Cameroun, le niveau d'utilisation de la contraception moderne varie en fonction du nombre d'enfants vivant de la femme. L'EDS 2004 a mis en évidence le fait que les femmes sans enfant sont celles qui utilisent le plus la contraception moderne (17 %), essentiellement le préservatif (16 %).

    Cependant, comme dans le cas de la plupart des pays africains, les normes d'encadrement souffre de la poussée démographique vis-à-vis d'une offre de prestation dont la croissance relative est faible. A cet effet, le Cameroun fait partie des pays qui accordent moins de 5% de leurs dépenses budgétaires au secteur de la santé. La densité médicale se situe à 2 médecins pour 10 000 habitants, ce qui reste faible comparativement à celle des pays où elle est jugée satisfaisante (OCDE dont elle est de plus de 30 pour 10 000 dans certains pays).

    Le même problème se pose dans le domaine de l'éducation où le nombre d'élève par enseignant était de 57,5 élèves pour un enseignant en 2003.

    II.2- Module «  croissance démographique vs urbanisation »

    Au Cameroun, il apparait comme dans le cas de l'Afrique subsaharienne prise dans son ensemble, que l'urbanisation est un catalyseur de la révolution socio culturelle soit par effet de mimétisme face au comportement de civilisations précurseur de la modernité, soit alors à cause des contraintes économiques. Ainsi, l'Enquête de démographie et de Santé de 2011 fait observer qu'à tous les groupes d'âges, les taux de fécondité sont plus élevés en milieu rural qu'urbain.

    Source : EDS MICS Cameroun 2011

    Pour le groupe d'âge des 25-29 ans où les maxima de fécondité sont atteints, le taux de natalité est de 302 % en milieu rural contre 206 % en milieu urbain, soit près de 100 points d'écarts. Les données révèlent également une précocité des grossesses en milieu rural qu'urbain du fait de l'incidence de la culture encore importante surtout dans la partie septentrionale du pays. Ainsi, si dans l'ensemble, les adolescentes de 15-19 ans contribuent pour 12 % dans la fécondité totale, les pourcentages correspondant sont de 14 % en milieu rural et de 11 % en milieu urbain. En plus, la même enquête révèle qu'en 2011, c'est en milieu urbain que l'utilisation de la contraception est la plus fréquente: 21 % des femmes en union utilisent actuellement une méthode moderne.

    La structure de population qui est caractérisée par une forte présence de personnes en âge de fréquenter (notamment ceux qui font des études dans des écoles du niveau supérieure localisées dans un nombre limité de villes environ 6 au total) ou de travailler, fait qu'il y a un afflux massif de cette frange de population dans les villes. Il s'en suit des problèmes d'encadrement dus à l'inadaptation et à l'insuffisance des structures d'accueil. Ainsi, le problème du sous-emploi se pose avec acuité dans les grandes villes où son taux est souvent supérieur à 35%. Cela pousse plusieurs personnes à exercer dans le secteur informel qui est un véritable recours pour les chômeurs en milieu urbain. Ce contexte de précarité sociale est aussi l'une des causes de l'insécurité engendrée par les désoeuvrés et du développement du travail des enfants de la rue.

    La poussée démographique est également l'une des causes de l'insuffisance de l'offre d'infrastructures adéquates. Par exemple, en 2010 la moitié des ménages n'était pas raccordée au réseau électrique et le tiers n'avait pas accès à l'eau potable. Ce manque d'eau potable, combiné à d'autres problèmes d'assainissement, se traduit par des problèmes de santé publique tels que le paludisme, les maladies intestinales ou encore le choléra.

    CONCLUSION GENERALE

    Au terme de notre travail, les analyses empiriques et les études statistiques de corrélationentre la croissance démographique et le développement en Afrique subsaharienne, convergent toutes vers l'existence de relations entre les déterminants et indicateurs de chacun des deux concepts. Cette conclusion est surtout une confirmation, l'existence de relations entre les sous-systèmes démographie et développement étant reconnue par la quasi-totalité des praticiens et théoriciens des questions démoéconomiques.

    Par contre, les analyses relatives aux domaines controversés du sens de causalité et des effets induits, ont permis d'aboutir à des conclusions dont la prise en compte pourrait êtreplus bénéfique. L'intérêt à y accorder peut être sous-tendu par la présentation faite surl'état des lieux des questions de développement et de démographie (transition démographique notamment) dans le cas de la région d'étude. En effet, ces états des lieux ont parfois montré qu'il existait des urgences, étant entendu quepar rapport aux autres régions, le sous-continent continue d'accuser un retard généralisé et parfois abyssal dans divers domaines relatifs au bien-être des populations. En substance, le processus de transition démographique, quoique résolument enclenché est l'un des plusattardéscorrélativement à une fécondité qui demeure la plus élevée au monde. La situation dans les domaines sociaux est loin d'être reluisante. Beaucoup reste à faire : qu'il s'agisse de l'éducation et de la santé pour lesquelles l'encadrement efficient des populations demeure un objectif lointain, ou encore du niveau de vie économique qui réduit les marges de manoeuvre des gouvernements condamnant ainsi plus de deux cents millions de personnes à vivre dans l'extrême pauvreté.

    En ce qui concerne le sens de causalité, les principaux modules du système « croissance démographique et développement » qui ont été analysés amènent à conclure à une relation cause à effet réciproque dans tous les cas de figure en Afrique subsaharienne. L'étude des corrélations via des séries chronologiques a servi à pressentir parfois de manière univoque, des dépendances dont les caractères plurivoques ont ensuite été confirmés de manière empirique à travers les effets de chacun des systèmes sur les déterminants de l'autre. Ces déterminants ont été préalablement identifiés lors d'une étude approfondie sur les facteurs explicatifs directs et intermédiaires de chacun de nos deux concepts. Ainsi, les cas d'influence réciproques ont été identifiés pour les modules suivants : «fécondité& niveau de vie », « fécondité & éducation », « fécondité&santé », « pression démographique & environnement » et « pression démographique & urbanisation ».

    S'agissant des effets induits, il est globalement ressorti que jusqu'ici, la croissance démographique de l'Afrique subsaharienne a été loin de permettre au sous-continent de bénéficier pleinement des dividendes de sa croissance économique. La population croit encore à un rythme auquel les gouvernements des différents pays peinent visiblement à y ajuster l'offre des services sociaux, de travail et des niveaux de revenu adéquats. Dans la majorité des pays, les systèmes éducatifs et de santé semblent encore débordés par l'afflux des demandes de prestation, tandis que les structures économiques ne produisent pas assez pour une redistribution par tête garantissant un niveau de revenu élevé. Au cours des années passées, cela a sans aucun doute contribué à freiner les efforts de développement dans leurs volets quantitatif (niveau de revenu, taux d'alphabétisation, prévalence et incidence) et qualitatif (norme de qualité concernant notamment les densités médicale et d'enseignement). Le domaine environnemental n'est pas épargné, le cas du Kenya ayant démontré que l'augmentation des besoins nutritionnels et d'habitation dans le sous-continent, entraine une surexploitation des ressources. Celle-ci menace les réserves sécuritaires constituées et l'équilibrede l'écosystème, cela constitue une source de perte de devises (activités touristiques) et est micro économiquement un facteur aggravant de pauvreté (activités agricoles, élevage, intempéries).

    Cependant, au fil de nos analyses, une constance s'est incontestablement dégagée : le rôle vertueux du développement pour sa propre promotion. En effet, il ressort de notre étude que l'Afrique subsaharienne ne constitue pas une dérogation à cette règle. L'éducation, la santé et le niveau de revenu sont apparus comme des catalyseurs de la transition démographique. Par ricochet, ils constituent un moyen direct ou indirect d'ajustement progressif de la croissance démographique aux disponibilités existantes et potentielles à court et moyen termes. L'accent devrait donc être mis sur l'éducation des femmes qui est apparue comme déterminante au déclenchement du cercle vertueux ci-dessous :

    La promotion du développement social et économique pour un meilleur capital humain apparait donc comme un levier des plus surs pour accélérer l'infléchissement de la croissance démographique du sous-continent. Cela permettrait à la région de faire face ne serait qu'à court ou moyen termes, aux goulots d'étranglement qui ne permettent toujours pas à ses services sociaux de promouvoir le bien-être des populations. Le ralentissement de la poussée démographique ainsi accéléré donnera plus de marge aux pays sub sahariens pour que ceux-ci puissent dans un premier temps combler leur retard et ensuite assurer durablement le bien-être des générations naissantes.

    Cependant, deux visages moins élogieux du développement ont fait surface au cours de notre étude. L'un d'entre eux concerne l'attrait que le développement exerce sur certaines franges de la population. Ce sont principalement les jeunes en quête de modernité et la population active. Les méfaits de cet attrait ont été identifiés dans les pays étudiés spécifiquement à savoir le Cameroun et le Kenya. En effet, les personnes concernées vont chercher les bienfaits du développement là où il est plus susceptible de les trouver à savoir les villes. Compte tenu du fait que la pyramide des âges a montré que les concernés constituent d'une manière écrasante la frange de la population la plus nombreuse, les deux pays étudiés à l'instar de la région prise dans son ensemble, ont connu une augmentation rapide du taux d'urbanisation. Les structures économiques et sociales n'ont pas pu s'ajuster à cet afflux massif et accéléré des populations dans les cités. Il s'en est suivi à travers toute la région des taux de chômage et de sous-emploi urbains très élevés, la monté de l'insécurité dans les villes et la précarité des conditions de logement. L'autre aspect est l'ambivalence du développement avec les notions de développement vues en coupe transversale, qui privilégie le bien-être des populations existantes et le développement durable qui va au-delà en prenant en compte les conditions de vie des générations futures. Les problèmes auxquels sont confrontés les gouvernements subsahariens les amènent souvent, sous l'effet de la pression démographique et de la recherche des retombées politiques à court terme, à entreprendre des actions qui produisent des ressources pour résoudre des problèmes ponctuels en mettent à mal le développement durable. La déforestation qui a lieu dans bon nombre de pays du sous-continent en est une illustration. L'exemple du Kenya sur lequel ce travail a planché donne un aperçu de conséquences néfastes sur le bien-être des populations.

    Pour ce qui est des perspectives du sous-continent, la conclusion à laquelle nous pouvons aboutir sur la base des données des plus actualisées, est que les conditions démographiques dans lesquelles se trouve l'Afrique subsaharienne ont jusqu'ici été un obstacle pour l'atteinte des Objectifs du Millénaire pour le Développement. Il s'agit des volets santé, éducation et lutte contre la pauvreté pour lesquelles il est presque utopique que la région atteigne les buts fixés à l'horizon 2015, compte tenu des bilans d'étape effectués dans ce travail et de l'estimation des chemins qui restent à parcourir.

    Mais, l'espoir est bel et bien fondé. En effet, les bilans d'étape ci-dessous évoqués dans le cadre des OMD, ont permis de montrer que le sous-continent avait fait des efforts considérables au cours de la dernière décennie. L'IDH est sans cesse à la hausse tiré en cela par de l'augmentation des taux de scolarisation et les baisses notables des taux de mortalité infantile et maternelle. Quant à la pauvreté, elle a reculé quoique de manière plus timide.

    Ces résultats positifs enregistrés en matière de développement devraient aller crescendo. Pour cause, les Etats subsahariens qu'accompagnent les organismes de développement, ont de toute évidence intégré dans leurs politiques socio-économiques le rôle majeur que jouent potentiellement la santé et l'éducation dans le processus de développement. Ils disposent donc là d'un vent favorable dont il faut exploiter les directions. Cependant, sur la base de notre travail, nous pouvons émettre l'avis selon lequel un opportunisme face à ce vent voudrait qu'afin de permettre à ce dernier de jouer plus efficacement son rôle, il conviendrait de poursuivre les campagnes de sensibilisation de la limitation des naissances via les outils tels que le planning familial ou autres encouragements à la baisse de la fécondité. Il est évident que cela permettrait de dégager des ressources supplémentaires pour permettre à des centaines de millions de subsahariens de se libérer avec célérité, des carcans de la pauvreté à laquelle ils font face avec impuissance et résignation.

    ANNEXES

    ANNEXE 1 : Différences entre ISF et ISF désiré en Afrique subsaharienne

    ANNEXE II : Calcul de la Population totale supplémentaire à scolariser de 2011 à 2015

    Population totale supplémentaire à scolariser de 2011 à 2015 :

    = 156 249984 + 31 000 000 = 187249984187249984

    Années

    2010

    2011

    2012

    2013

    2014

    2015

    TOTAL de l'accroissement de la population âgée de 6-12 ans 2010-2015

    Accroissement annuel de la population 6-12 au taux 3% (?n=3%Pn-1)

    4043478

    4164783

    4289726

    4418418

    4550970

    156249984

    Population totale des 6-12 ans (Pn=Pn-1+ ?n)

    134782609

    138826087

    142990870

    147280596

    151699014

    156249984

     

    TABLEAUX, GRAPHIQUERS ET CARTES

    TABLEAUX

    INTITULE

    PAGE

    Tableau 1: mise en évidence de l'effet du développement sur la démographie

    15

    Tableau 2: Classement des régions par niveau de développemnt : place de l'Afrique subsaharienne

    22

    Tableau 3 : évolution du solde migratoire de l'Afrique subsaharienne de 1960 à 2010 (en millier)

    25

    Tableau 4 : évolution de la prévalence contraceptive au Sénégal et au Kenya (1978 -2005

    30

    Tableau 6 : Statistiques du SIDA en Afrique subsaharienne (2010-2011)

    33

    Tableau 7 : Nombre élevé d'enseignants non formés dans les pays francophones subsahariens

    49

    Tableau 8 : Indice synthétique de fécondité en fonction du lieu de résidence

    52

    Tableau 9 : Nombres de médecins subsahariens dans les autres régions du monde

    53

    Tableau 10: Demande d'enfants au Kenya par âge et par sexe

    59

    Tableau 11: Action de l'éducation et du niveau de vie sur la fécondité au Kenya

    64

    Tableau 12 : évolution des indicateurs urbains du Kenya (1960 - 2010)

    64

    Tableau13 : nombre d'enfants désirés par les ménages au Kenya en

    fonction du lieu de résidence

    65

    Tableau14 : ISF et Taux brut de natalité par âge et par milieu de

    résidence au Cameroun (2011)

    71

    GRAPHIQUES

    INTITULE

    PAGE

    Graphique 1  schéma général de la transition démographique

    10

    Graphique 2 :controverse sur l'universalité du processus de

    transition: cas de la France

    12

    Graphique 3 : différences de rythmes de transitions démographiques

    entre pays en développement

    13

    Graphique 4 :Evolution du taux de croissance démographique de

    l'Afrique subsaharienne (1960-2010)

    24

    Graphique 5 : Taux de croissance démographique par sous-région

    en Afrique subsaharienne

    25

    Graphique 6 : Evolution comparative des taux de fécondité de

    l'Afrique subsaharienne et des autres régions du monde

    26

    Graphique 7 : Graphique7 : nombre d'enfants désiré en Afrique au sud du

    Sahara (en millier)

    27

    Graphique 8 : Structures par âge de l'Afrique subsaharienne

    et de l'Europe

    29

    Graphique 9 : Evolution du taux brut de mortalité de l'Afrique

    subsaharienne (1960-2010)

    31

    Graphique 10 : Transition démographique de l'Afrique subsaharienne

    par rapport à celle des autres régions du monde (2009)

    34

    Graphique 11 : évolution comparée IDH

    35

    Graphique 12 : Disparité entre les IDH des pays subsahariens (année 2011)

    36

    Graphique 13 : Espérance de vie à la naissance des principales

    régions du monde  (2005-2010)

    37

    Graphique 14 : évolution du taux de scolarisation global et du

    genre en Afrique subsaharienne (1999-2010)

    38

    Graphique 15: Croissance économique en moyenne annuelle sur 20 ans (1990-2011)

    43

    Graphique 16 Niveau de pauvreté en fonction de la taille des ménages en Afrique de l'Ouest (Nigéria, Guinée et Niger)

    44

    Graphique 17 Effets du nombre d'enfants en bas âge sur le niveau de vie des ménages

    45

    Graphique 18 : variations de l'ISF en fonction du niveau de vie économique dans les pays subsahariens

    45

    Graphique 19 : incidence du niveau de vie sur la prévalence contraceptive et l'âge nuptial

    46

    Graphique 20 : classement de l'Afrique subsaharienne par rapport

    aux dépenses pour l'éducation

    46

    Graphique 21: nombre d'élève par enseignant dans le primaire

    48

    Graphique 22 : effet de l'alphabétisation des femmes sur la fécondité en Afrique subsaharienne (2009)

    50

    Graphique 23:effet du niveau d'étude des femmes sur la fécondité

    50

    Graphique 24 : Age médian au premier mariage des femmes en fonction du niveau d'étude

    pour les pays subsahariens

    51

    Graphique 25: Evolution du pourcentage de personnes vivant en ville

    57

    Graphique 26 : place du Kenya en fonction du nombre d'habitants en Afrique subsaharienne

    57

    Graphique 27 : Evolution comparative de l'accroissement de la population du Kenya (C.P en %), de l'indice de fécondité du Kenya (ISF Kenya), et de l'indice de fécondité de l'Afrique subsaharienne (ISF ASA

    57

    Graphique28: Evolution de l'utilisation de la contraception chez les femmes mariées au Kenya

    58

    Graphique 29 : Evolution comparée de la mortalité (en pour 1000) du Kenya et de l'Afrique subsaharienne.

    59

    Graphique 30 : Distribution des causes de mortalité chez les enfants de moins de 5ans en 2010

    60

    Graphique31 : Niveau de la transition démographique au Kenya

    60

    Graphique 32: Evolution comparée des IDH du Kenya, de l'OCDE et de l'Afrique subsaharienne.

    61

    Graphique33: Evolution comparée des espérances de vie du Kenya, de l'OCDE et de l'Afrique subsaharienne.

    62

    Graphique34: Evolution RNB par habitant Kenya ($)

    63

    Graphique35: Densité de population au Km2 au Kenya

    67

    Graphique36 : Evolution comparative de l'indice de fécondité du Cameroun

    et de l'indice de fécondité de l'Afrique subsaharienne

    68

    Graphique 37 : Evolution comparée de la mortalité (en pour 1000) du Cameroun

    et de l'Afrique subsaharienne.

    68

    Graphique 38 : Evolution comparée IDH Cameroun, Afrique Subsaharienne

    69

    CARTES

    INTITULE

    PAGE

    Cartes 1 : Carte N°1 : L'Afrique subsaharienne et ses pays

    24

    Carte N°2 : L'indice synthétique de fécondité dans le monde

    26

    Carte N°3 : Transition démographique de l'Afrique subsaharienne

    par rapport à celle des autres régions du monde (2009)

    34

    Carte N°4 : pourcentage de lapopulation vivant en dessous

    du seuil de pauvreté dans les pays de l'Afrique subsaharienne

    37

    Carte N°5 : Nombre de médecin pour 1000 habitants

    54

    BIBLIOGRAPHIE ET WEBOGRAPHIE

    BIBLIOGRAPHIE

    « Défis du développement en Afrique subsaharienne. L'éducation en jeu », Marc PILON, CEPED, Paris, 2006.

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    « Disponibilité des ressources financières pour la santé dans les pays d'Afrique subsaharienne », Jacky Mathonat, AFD, 2010.

    « L'Afrique face à ses défis démographiques, un avenir incertain », sous la direction de Benoit Ferry, éd. AFD, CEPED, Karthala, 2007.

    « Le financement de l'éducation en Afrique subsaharienne: Relever les défis de l'expansion, de l'équité et de la qualité », PNUD, 2011.

     « Pauvreté, structures familiales au Burkina Faso et starégie éducative à Ouagadougou », Jean François Kobiane, Institut National de la Statistique et de la Démographie, Ouagadougou.

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    «Rapport mondial d e s u i v i s u r l' é d u c at i o n p o u r t o u s,  A p e r ç u r é g i o n a l, A f r i q u e s u b s a h a r i e n n e», UNESCO, 2 0 1 1.

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    « Value and Capital »,John Hicks, Clorendon Press, 1939, Oxford.

    « Enquête de démographie et de Santé Afrique du Sud », 2009

    « Enquête de démographie et de Santé Cameroun », 2009

    « Enquête de démographie et de Santé du Kenya », 2009

    « Kenya national health accounts 2009/10 », Ministère de la santé du Kenya, 2010

    « Rapport initial a l'union africaine sur la mise en oeuvre de la charte africaine sur les droit et le bien-être de l'enfant au Kenya de 2003 à 2007 », 2008.

    Dossiers et Articles

    « Pauvreté et fécondité en Afrique sub-saharienne : une analyse comparative des enquêtes démographiques et de santé », Bruno Schoumaker, Institut de Démographie,

    « Afrique subsaharienne : territoires et conflits », L'État-nation en Afrique subsaharienne, un modèle? Eric Bordessoule, http://geoconfluences.ens-lyon.fr

    « Après des années de progrès, le nombre d'enfants non scolarisés augmente, notamment en Afrique », UNESCO, www.unesco.org.

    « La Santé en Afrique subsaharienne : Panorama, Problématiques, Enjeuxet Perspectives, PMC, 2010

    « Analyse de la fécondité en RDC », Banque Africaine de Développement, 2010

    « Les modèles de développement à l'épreuve de la sécheresse et du climat. L'exemple du Kenya », Janvier 2009, PETITJEAN Olivier http://www.partagedeseaux.info/article57.html

    « La transition démographique », Matthieu Mucherie, dans Melchior site des sciences économiques et sociales, http://www.melchior.fr/La-transition-demographique.3913.0.html, 2012.

    « Câblage en Aluminium », Nick Gromicko, Rob London et Kenton Shepard, article sur www.nachi.org/aluminium-wiring-french.htm

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    « Crise Pétrolière. Même pas mal ! », Georges KAPLAN, article paru dans le site d'Atanlatico, Mars 2011. http://www.atlantico.fr/decryptage/crise-petroliere-meme-pas-mal-51318.html

    « Population : vers un monde à 9 milliards », Céline Deluzarche, dossier paru sur le site http://www.linternaute.com/science/science-et-nous/dossiers/06/demographie/11.shtml

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    « Les traites négrières, Essai d'histoire globale », Olivier Pétré-Grenouilleau, 2004.

    WEBOGRAPHIE

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    http://fr.wikipedia.orgwww.populationdata.net

    http://perspective.usherbrooke.ca http://rbm.who.int

    http://www.statistiques-mondiales.com/afrique_guerres.htm http://www.insee.fr

    http://www.planbleu.org http://www.blogg.org

    http://www.rbm.who.intwww.un.org

    * 1 (source : Fonds Monétaire International)

    * 2  Goran OHLIN (1926-1996), « Régulation démographique et développement économique », page 57, Centre de Développement de l'Organisation de Coopération et de Développement Economique, Paris, 1967.

    * 3 « Population et développement de Jacques Véron », page 14, édition Presse Universitaire de France, 1994

    * 4 (Matthieu Mucherie, « La transition démographique », dans Melchior site des sciences économiques et sociales, http://www.melchior.fr/La-transition-demographique.3913.0.html, 2012.),

    * 5 (Malthus cité dans le livre Population et développement de Jacques Véron, page 14, édition Presse Universitaire de France, 1994)

    * 6 (Rapport Meadows cité dans le livre Population et développement de Jacques Véron, page 15, édition Presse Universitaire de France, 1994)

    * 7 (Goran OHLIN, « Régulation démographique et développement économique », Paris 1967, page 58).

    * 8 (Esther Boserup dans son livre  Évolution agraire et pression créatrice, 1965)

    * 9 (Population et développement, Jacques Veron, édition P.U.F,1991, Paris).

    * 10 (Population et développement, Jacques Veron, édition P.U.F,1991, Paris)

    * 11 (« Câblage en Aluminium », Nick Gromicko, Rob London et KentonShepard, article sur www.nachi.org/aluminium-wiring-french.htm

    * 12 Georges KAPLAN, « Crise Pétrolière. Même pas mal ! », article paru dans le site d'Atanlatico, Mars 2011. http://www.atlantico.fr/decryptage/crise-petroliere-meme-pas-mal-51318.html

    * 13 (Population et développement, Jacques Veron, édition P.U.F,1991, page 16, Paris)

    * 14 (Population : vers un monde à 9 milliards, Céline Deluzarche, dossier paru sur le site http://www.linternaute.com/science/science-et-nous/dossiers/06/demographie/11.shtml)

    * 15 (Paul Ehrlich cité dans le livre Population et développement, Jacques Véron, Presse Universitaire de France, Paris, 1994).

    * 16 (Population et développement, Jacques Veron, édition P.U.F, 1991, page 21, Paris)

    * 17 (Définition tirée de Wikipédia, http://fr.wikipedia.org/wiki/Syst%C3%A8me)

    * 18  Goran OHLIN (1926-1996), « Régulation démographique et développement économique », page 58, Centre de Développement de l'Organisation de Coopération et de Développement Economique, Paris, 1967.

    * 19 Démographie et population, Indice synthétique de fécondité, http://www.planbleu.org/methodologie/idd002.pdf

    * 20 (Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques de France, http://www.insee.fr/fr/methodes/default.asp?page=definitions/taux-mortalite.htm).

    * 21 (Patrice Vimard et RaimiFassassi, L'Afrique face à ses défis démographique, page 197, coédition AFD, CEPED, KARTHALA, 2007)

    * 22 (Patrice Vimard et RaimiFassassi, L'Afrique face à ses défis démographiques, page 200, coédition AFD, CEPED, KARTHALA, 2007).

    * 23 (John Hicks, Value and Capital, page 302, Clorendon Press, 1939, Oxford)

    * 24 (Du fait de la pression démographique qui a entrainé une surexploitation des ressources de ce lac, sa superficie est passée de 25 000 km2 à 2000km2 en 40 ans. Cela accentue l'appauvrissement des populations de cette aride qui y tiraient une grande partie des ressources)

    * 25 (Module : association deux à deux des éléments dont chacun est un facteur explicatif ou un indicateur de l'un de nos deux concepts d'étude)

    * 26 (Les traites négrières, Essai d'histoire globale, 2004)

    * 27 (J.Coale cité dans le livre L'Afrique face à ses défis démographiques, page 198)

    * 28 (Source : L'accès aux traitements dans les pays du sud, Dossier de synthèse documentaire et bibliographique, octobre 2005, http://crips.centredoc.fr/docs/PDF_GED/S52195.).

    * 29 (Jacky Mathonat, Disponibilité des ressources financières pour la santé dans les pays d'Afrique subsaharienne, AFD, 2010)

    * 30 (Source ONU, http://www.un.org/fr/millenniumgoals/pdf/report2011_goal1.pdf)

    * 31 (Source : « Analyse de la fécondité en RDC », Banque Africaine de Développement, page 15, 2010)

    * 32 (source« Le financement de l'éducation en Afrique subsaharienne: Relever les défis de l'expansion, de l'équité et de la qualité », PNUD, page 30, 2011)

    * 33 (L'Afrique face à ses défis démographiques, page 161)

    * 34 (Source:Unesco http://www.unesco.org).

    * 35(Source : « Après des années de progrès, le nombre d'enfants non scolarisés augmente, notamment en Afrique », Unesco, ww.unesco.org)

    * 36(Philippe Hugon, «  L'Afrique face à ses défis démographiques », page 160)

    * 37 (Rapport mondial de suivi sur l'éducation pour tous, Aperçu régional, Afrique subsaharienne », UNESCO, page 4, 2001)

    * 38 (source : nos comparaisons effectuées avec les données de la banque mondiale entre l'évolution de la prévalence du VIH SIDA et l'évolution de l'espérance de vie de ces différents pays)

    * 39 (Source : La Santé en Afrique subsaharienne : Panorama, Problématiques, Enjeux et Perspectives, page 3)

    * 40 (Source : statistiques du monde http://www.statistiques-mondiales.com/medecins_afrique.htm)

    * 41 (Source : Statistiques sanitaires mondiales 2009, Tableau 6, OMS)

    * 42 (Source : Ministère de la santé du Sénégal via le rapport « La Fidélisationdes personnels de santé dans les zones difficiles du Sénégal, Octobre 2008).

    * 43 (Source : ONU, http://www.un.org/fr/millenniumgoals/childhealth.shtml).

    * 44 (Source : ONU, http://www.un.org/fr/millenniumgoals/maternal.shtml)

    * 45 (Données tirées du site de la Banque mondiale http://donnees.banquemondiale.org)

    * 46 (Population et société en Afrique au sud du Sahara, Dominique Tabutin et EliwoAkoto, page 178, éd. L'Harmatan, 1988).

    * 47 (Source : D'après nos comparaisons des données issues de United Nations, Department of Economy and Social Affairs, Population Division, http://esa.un.org/unpd/wpp/Excel-Data/fertility.htm)

    * 48 (Population et société en Afrique au sud du Sahara, Dominique Tabutin et EliwoAkoto, page 178, éd. L'Harmatan, 1988).

    * 49 (Source : Développement-Kenya, article « Une croissance démographique rapide menace le développement », 2010, http://ipsinternational.org/fr/_note.asp?idnews=5754)

    * 50 (N.B : les informations ci-dessous ont pour source : Enquête de démographie et de Santé du Kenya, 2009, http://www.measuredhs.com/pubs/pdf/fr229/fr229.pdf)

    * 51 (Source : KENYA NATIONAL HEALTH ACCOUNTS 2009/10, Ministère de la santé du Kenya, 2010)

    * 52 (Source : site du programme Roll Back Malaria ( http://www.rbm.who.int/fr/keyfacts.php)

    * 53 ( http://donnees.banquemondiale.org, cas déclarés de paludisme sur 100 000 personnes)

    * 54 (Enquête de démographie et de Santé du Kenya, 2009, http://www.measuredhs.com/pubs/pdf/fr229/fr229.pdf).

    * 55 (Source : site de l'Organisation Mondiale de la Santé, http://apps.who.int/ghodata/?vid=10012)

    * 56 (Europeaid, Développement et Coopération, http://ec.europa.eu)

    * 57 (Source : wikipedia, list of countries by income equality, http://en.wikipedia.org/wiki/List_of_countries_by_income_equality)

    * 58 ( http://www.statistiques-mondiales.com)

    * 59 (Source : données de la banque mondiale)

    * 60(source : Perspective monde, Université Sherbrooke, http://perspective.usherbrooke.ca)

    * 61(source : Wikipédia, classement des pays par densité)

    * 62(Source ainsi que source de toutes les informations qui suivent dans ce paragraphe: PETITJEAN Olivier, « Les modèles de développement à l'épreuve de la sécheresse et du climat. L'exemple du Kenya », Janvier 2009, http://www.partagedeseaux.info/article57.html)






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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon